Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 320 du Code pénal, R. 27 du Code de la route, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé X... des fins de la poursuite et débouté les époux Y... des fins de leurs demandes ;
aux motifs qu'il résulte de l'attestation du chauffeur de car Z... qu'il s'est arrêté pour laisser le passage éventuel aux usagers voulant franchir la rue de Laon qu'il suivait, que la 403 de X... s'est arrêtée au stop puis a redémarré pour s'immobiliser ensuite une deuxième fois juste devant le car sans dépasser l'axe de la chaussée, pour laisser passer la 404 de Y... qui arrivait à vive allure de Soissons, que l'on ne saurait faire grief à X... de s'être avancé dans le carrefour alors que sa visibilité était masquée sur sa gauche par le car immobilisé et qu'un doute existe quant au point de savoir s'il a ou non dépassé l'axe médian de l'avenue de Laon, ceci d'autant que cet axe n'est pas matérialisé sur la chaussée et que, sur sa droite, le prévenu avait sa visibilité gênée par la file de voitures ;
alors que l'article R. 27 du Code de la route fait une obligation impérative et absolue au conducteur arrivant par une voie marquée par un stop non seulement de marquer un temps d'arrêt à la limite de la chaussée abordée mais encore de céder le passage au véhicule prioritaire dès lors qu'il n'a pas le temps de dégager le carrefour avant le passage de ce dernier ;
alors que, dès lors qu'il a été constaté que la visibilité de X... était gênée vers la droite par une file de voitures, il avait l'obligation de ne pas s'avancer sur la chaussée avant d'avoir la certitude de ne pas gêner la progression d'un véhicule prioritaire, qu'il n'a donc pas satisfait à toutes les obligations qui lui incombaient en avançant sur la chaussée, fût-ce sans en dépasser l'axe médian ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'aux termes de l'article R. 27 du Code de la route, tout conducteur doit, à certaines intersections indiquées par une signalisation spéciale, marquer un temps d'arrêt à la limite de la chaussée abordée ; qu'il doit ensuite céder le passage aux véhicules circulant sur l'autre route et ne s'y engager qu'après s'être assuré qu'il peut le faire sans danger ; que cette obligation est impérative et absolue ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que X..., le 24 février 1978, conduisant une voiture automobile, est arrivé à une intersection signalée par un panneau " stop " ; qu'il a marqué un temps d'arrêt à la limite de la chaussée abordée ; que sa visibilité étant réduite, par la présence de véhicules en stationnement sur les côtés, il s'est avancé dans le carrefour et s'est à nouveau arrêté ; que Y..., conduisant également une voiture automobile est arrivé sur sa droite et, perdant le contrôle de son véhicule, est allé heurter une autre voiture en stationnement sur le bord opposé de la chaussée ; que les époux Y... ont été blessés ;
Attendu que, pour relaxer X... des chefs de blessures involontaires et de contravention à l'article R. 27 du Code de la route, et débouter les parties civiles de leur action, l'arrêt énonce que l'on ne saurait faire grief au prévenu de s'être avancé dans le carrefour alors que sa visibilité était masquée sur sa droite et sur sa gauche par d'autres véhicules et qu'il existe un doute quant au point de savoir s'il a ou non dépassé l'axe médian de la voie transversale ; Mais attendu qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte et du principe ci-dessus rappelés ;
Que la cassation est encourue de ce chef ;
PAR CES MOTIFS ; CASSE ET ANNULE l'arrêt de la Cour d'appel d'Amiens du 7 mai 1979 mais, faute d'un pourvoi du Ministère public, en ses seules dispositions civiles, toutes autres dispositions dudit arrêt étant expressément maintenues et pour être statué à nouveau conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel de Reims à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.