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19/04/1977 | FRANCE | N°76-10412

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 19 avril 1977, 76-10412


Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le Crédit suisse a vendu le 15 décembre 1966 à la Compagnie générale immobilière d'investissements (CGII), les parts de la société de construction Neuilly-Ancelle qu'il possédait ; que la CGII a financé la construction par cette société d'un immeuble qui a été donné en location à partir de son achèvement en juin 1970 ; que la cession de parts a été annulée par un arrêt du 22 novembre 1972 qui désigna un sequestre chargé de percevoir les loyers en attendant que les restitutions que les parties devaient se faire mutuellement

soient opérées ; que, la cassation partielle de l'arrêt du 22 novembre 19...

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le Crédit suisse a vendu le 15 décembre 1966 à la Compagnie générale immobilière d'investissements (CGII), les parts de la société de construction Neuilly-Ancelle qu'il possédait ; que la CGII a financé la construction par cette société d'un immeuble qui a été donné en location à partir de son achèvement en juin 1970 ; que la cession de parts a été annulée par un arrêt du 22 novembre 1972 qui désigna un sequestre chargé de percevoir les loyers en attendant que les restitutions que les parties devaient se faire mutuellement soient opérées ; que, la cassation partielle de l'arrêt du 22 novembre 1972, prononcée le 13 novembre 1974, ayant eu pour effet de mettre fin à la mission de ce sequestre, un arrêt du 18 février 1975, statuant en matière de référés, décida que le Crédit suisse percevrait désormais le prix des loyers correspondant aux parts dont il avait recouvré la propriété et que le sequestre lui remettrait les loyers qu'il avait perçus depuis l'arrêt du 22 novembre 1972 ; que le Crédit suisse ayant saisi à nouveau le juge des référés, en invoquant l'alinéa 3 de l'article 73 du décret du 9 septembre 1971 alors applicable, pour que lui soient remis les loyers perçus et l'indemnité d'occupation due par la CGII avant l'arrêt du 22 novembre 1972, la Cour d'appel a refusé de faire droit à cette demande ;

Attendu que le Crédit suisse fait grief à la Cour d'appel d'avoir ainsi statué, alors que les décisions de référé, si elles n'ont pas l'autorité de chose jugée quant au principal, n'en auraient pas moins une autorité de chose jugée provisoire interdisant notamment au juge des référés de rapporter ou modifier ses décisions, sauf en cas de survenance d'un fait nouveau ; qu'en l'espèce, l'arrêt du 18 février 1975, qui, tirant les conséquences de la décision du juge du principal ayant annulé la cession des parts, avait déclaré que le cédant recouvrait définitivement la propriété de celles-ci et était censé ne l'avoir jamais perdue, aurait imposé à la juridiction des référés d'ordonner le versement entre ses mains d'une provision sur les loyers, leurs accessoires et les intérêts des dépôts de garantie ainsi que sur l'indemnité due pour l'occupation de l'immeuble ; qu'il est également soutenu que, comme le constatait l'arrêt attaqué, les sommes réclamées constituaient une simple provision à valoir sur les créances du propriétaire des parts et donc de l'immeuble, que la juridiction des référés n'aurait donc pu se déclarer incompétente en raison de l'existence d'une contestation sérieuse, mais conformément à l'article 71, alinéa 3, du décret du 9 septembre 1971 modifié par le décret du 17 décembre 1973, aurait dû rechercher si ladite créance n'était pas sérieusement contestable et que, tel étant le cas en l'espèce, elle aurait dû admettre sa compétence ; qu'en outre, il est prétendu, qu'en tout état de cause l'intégralité des fruits et revenus des choses frugifères appartenant au propriétaire, la contestation soulevée était dépourvue de tout caractère sérieux ;

que le pourvoi fait valoir au surplus que le Crédit suisse avait fait état de ce que plusieurs tentatives pour exécuter les décisions rendues à son profit étaient demeurées vaines et de ce que plusieurs procès-verbaux de carence avaient été dressés, et que les juges d'appel, qui auraient laissé sans réponse ces conclusions de nature à démontrer que le recouvrement de ses créances était en péril, n'auraient pas légalement justifié leur décision ; qu'il est enfin soutenu que la Cour d'appel, ayant plénitude de juridiction, était investie de la connaissance du litige par l'effet dévolutif de l'appel et avait donc compétence pour statuer, que le juge des référés ait été ou non compétemment saisi ;

Mais attendu d'abord, que l'arrêt attaqué n'a pas rapporté ou modifié les décisions prises par l'arrêt du 18 février 1975 ; que ce dernier arrêt, ayant statué sur les demandes concernant des loyers versés après l'annulation de la cession des parts de la société de construction, alors que la Cour d'appel était saisie de demandes portant sur des loyers perçus avant cette annulation, dans des circonstances différentes, et sur une indemnité d'occupation, n'avait pas autorité de chose jugée s'imposant à la Cour ;

Attendu, en second lieu, que la plénitude de juridiction ne permet pas à la Cour d'appel, devant laquelle est critiquée la décision du juge des référés, de statuer elle-même si ce juge n'avait pas compétence pour le faire ; que, d'ailleurs, la Cour d'appel ne s'est pas déclarée incompétente pour connaître des demandes du Crédit suisse, mais a statué sur leur bien fondé ; qu'ayant relevé que, si le Crédit suisse invoquait les droits que la propriété des parts lui donnait sur les revenus de l'immeuble en vertu de l'article 546 du Code civil, la CGII s'opposait à cette demande en faisant valoir que les parts n'étaient pas frugifères au moment où elles les avait acquises, la Cour d'appel a pu en déduire que les créances du Crédit suisse étaient sérieusement contestables et que ses demandes devaient être rejetées ;

Attendu, enfin, que les tentatives de recouvrement des créances et l'existence de procès-verbaux de carence n'ont été invoquées par le Crédit suisse que comme des arguments à l'appui de son raisonnement tendant à établir le caractère urgent de ses demandes ; que la Cour d'appel, qui a écarté l'urgence en faisant valoir qu'elle ne découlait pas de la nature des demandes ni de la mauvaise volonté mise par le débiteur à exécuter ses obligations, n'était pas tenue de répondre par un motif spécial à un simple argument ; qu'ainsi le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 3 novembre 1975 par la Cour d'appel de Paris.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 76-10412
Date de la décision : 19/04/1977
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1) CHOSE JUGEE - Identité d'objet - Société - Société de construction - Annulation d'une cession de parts - Loyers - Attributions - Période antérieure et période postérieure à l'annulation (non).

Lorsqu'à la suite de l'annulation d'une cession de parts d'une société de construction, prononcée au principal, une cour d'appel a statué en référé sur l'attribution des loyers de l'immeuble, il ne saurait lui être fait grief d'avoir, par un arrêt postérieur également rendu en référé, violé l'autorité de la chose jugée, dès lors qu'elle n'a pas rapporté ou modifié les décisions prises par son précédent arrêt et n'a statué que sur l'attribution des loyers perçus avant l'annulation de la cession dans des circonstances différentes, et sur une indemnité d'occupation.

2) COMPETENCE - Compétence matérielle - Cour d'appel - Plénitude de juridiction - Litige porté à tort devant le juge des référés.

REFERES - Ordonnance - Voies de recours - Appel - Plénitude de juridiction - Litige porté à tort devant le juge des référés.

La plénitude de juridiction ne permet pas à la cour d'appel, devant laquelle est critiquée la décision du juge des référés, de statuer elle-même si ce juge n'avait pas compétence pour le faire.

3) CASSATION - Moyen - Défaut de réponse à conclusions - Conclusions ne nécessitant pas une réponse - Conclusions ne constituant pas un véritable moyen - Simple argument.

Une cour d'appel qui, statuant en référé, écarte l'urgence au motif qu'elle ne découle pas de la nature des demandes ni de la mauvaise volonté mise par le débiteur à exécuter ses obligations, n'est pas tenue de répondre par un motif spécial au simple argument tiré par le créancier de tentatives de recouvrement des créances et de l'existence de procès-verbaux de carence.


Références :

Code civil 1350
Code civil 1351

Décision attaquée : Cour d'appel Paris (Chambre 3 ), 03 novembre 1975

CF. Cour de Cassation (Chambre sociale ) 1974-07-02 Bulletin 1974 V N. 402 p.376 (REJET). (2).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 19 avr. 1977, pourvoi n°76-10412, Bull. civ. des arrêts Cour de Cassation Civ. 1re N. 168 P. 131
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles des arrêts Cour de Cassation Civ. 1re N. 168 P. 131

Composition du Tribunal
Président : PDT M. Bellet
Avocat général : AV.GEN. M. Boucly
Rapporteur ?: RPR M. Jégu
Avocat(s) : Demandeur AV. MM. Lemanissier, Choucroy

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1977:76.10412
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