CASSATION PARTIELLE SUR LES POURVOIS FORMES PAR : 1° X... (MARIE-LOUISE), VEUVE DE LA Y..., AGISSANT TANT EN SON NOM PERSONNEL QU'AU NOM DE SES NEUF ENFANTS ALORS MINEURS ;
2° DE LA Y... (MARIE-FRANCE) ;
3° DE LA Y... (BEATRICE), CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL D'ANGERS (2E CHAMBRE), DU 13 JUIN 1974, QUI A STATUE SUR LES DEMANDES DE REPARATIONS CIVILES FORMEES PAR LESDITES DEMANDERESSES CONTRE Z... (JEAN) ET A... (ANDRE), PRECEDEMMENT DECLARES COUPABLES D'HOMICIDE INVOLONTAIRE. LA COUR, JOIGNANT LES POURVOIS EN RAISON DE LA CONNEXITE ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS TANT EN DEMANDE QU'EN DEFENSE ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, COMMUN A TOUS LES DEMANDEURS ET PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 319 DU CODE PENAL ET 1382 DU CODE CIVIL, DES ARTICLES 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 102 DU DECRET DU 20 JUILLET 1972 ;
DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A PRETENDU FIXER LES CONSEQUENCES PATRIMONIALES DU DECES ACCIDENTEL DE DE LA Y... COMPTE TENU DE L'AGE DE LA VICTIME A LA SOMME GLOBALE DE 400000 FRANCS A REPARTIR PAR MOITIE ENTRE DAME DE LA Y... ET SES ENFANTS ;
"AUX MOTIFS QU'AU COURS DE L'ANNEE AYANT PRECEDE L'ACCIDENT MORTEL DU 12 FEVRIER 1971, LE SALAIRE DE DE LA Y... S'ETAIT ELEVE A LA SOMME DE 28000 FRANCS ET QUE LE SEUL PREJUDICE PATRIMONIAL SUBI PAR LA VEUVE ET SES ENFANTS RESSORTAIT DU SALAIRE PERCU AU JOUR DU DECES SUR LEQUEL LA VICTIME PRELEVAIT POUR SES BESOINS ET SON ENTRETIEN PERSONNEL UNE SOMME QUE L'ON POUVAIT EVALUER A 20 % DE SES GAINS ;
"ALORS D'UNE PART, QUE C'EST PAR UNE ERREUR DE DROIT MANIFESTE ET UNE TOTALE MECONNAISSANCE DES PRINCIPES APPLICABLES A LA CAUSE QUE LA COUR S'EST PLACEE AU JOUR DU DECES POUR EVALUER LES CONSEQUENCES DE LA DISPARITION PREMATUREE DE DE LA Y... ET REFUSER D'INCLURE DANS LES ELEMENTS CONCOURANTS A LA DETERMINATION DU DOMMAGE LES PERSPECTIVES D'UNE EVOLUTION CERTAINE DANS LA CARRIERE PROFESSIONNELLE DE LA VICTIME, OUVERTES PAR UN PLAN DE CARRIERE DEJA CONSTITUE LORS DE SON DECES, QU'IL EST EN EFFET DE PRINCIPE CONSTANT QUE C'EST AU JOUR OU LE JUGE STATUE QU'IL CONVIENT DE SE PLACER POUR APPRECIER LE DOMMAGE ET EN FIXER LA REPARATION, ET QUE LA PERTE D'UNE CHANCE PROFESSIONNELLE AUSSI MINIME SOIT-ELLE CONSTITUE UN CHEF DE PREJUDICE INDEMNISABLE ;
"ALORS D'AUTRE PART, QUE L'EVALUATION "GLOBALE" DU PREJUDICE PATRIMONIAL DE LA FAMILLE DE LA Y... REPOSE SUR UNE CONFUSION ARBITRAIRE DU PREJUDICE PERSONNEL DE DAME DE LA Y... AVEC CELUI DE SES ONZE ENFANTS ;
QUE DES L'INSTANT OU LES CONSORTS DE LA Y... AVAIENT CONCLU A LA NECESSITE DE DISTINGUER DEUX PREJUDICES DISTINCTS, A SAVOIR LE PREJUDICE PERSONNEL DE DAME DE LA Y..., D'UNE PART, ET CELUI DE SES ONZE ENFANTS, D'AUTRE PART, LA COUR NE POUVAIT FIXER UNE EVALUATION GLOBALE DU PREJUDICE PATRIMONIAL DE LA FAMILLE DE LA Y... SANS REPONDRE AUX MOYENS PARTICULIERS DES DEMANDEURS ;
"QU'IL EN EST D'AUTANT PLUS AINSI QUE LA COUR N'A PU SANS SE CONTREDIRE PROCEDER A UNE PRETENDUE EVALUATION DU "PREJUDICE GLOBAL" ET PREVOIR PAR AILLEURS DES INDEMNITES COMPLEMENTAIRES DEPASSANT LE SEUIL DU PREJUDICE AINSI FIXE CARACTERISANT AINSI L'INSUFFISANCE DE LADITE EVALUATION" ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ENSEMBLE LES ARTICLES 2, 3, 459, 512 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
ATTENDU QUE SI LES JUGES APPRECIENT SOUVERAINEMENT LE PREJUDICE QUE PORTE L'INFRACTION A CELUI QUI S'EN PRETEND VICTIME, IL EN EST DIFFEREMMENT LORSQUE CETTE APPRECIATION EST DEDUITE DE MOTIFS INSUFFISANTS, CONTRADICTOIRES OU ERRONES ;
QUE, D'AUTRE PART, LES JUGES SONT TENUS DE REPONDRE AUX CHEFS PEREMPTOIRES DES CONCLUSIONS DONT ILS SONT REGULIEREMENT SAISIS ;
ATTENDU QU'AYANT A STATUER SUR L'ACTION EN REPARATION EXERCEE CONTRE Z... ET A..., PRECEDEMMENT DECLARES COUPABLES D'UN HOMICIDE INVOLONTAIRE, PAR LES AYANTS DROIT DE DE LA Y..., VICTIME DU MEME DELIT, LA COUR D'APPEL ETAIT REGULIEREMENT SAISIE PAR LESDITS AYANTS DROIT CONSTITUES PARTIES CIVILES DE CONCLUSIONS SOUTENANT QUE DE LA Y... AURAIT ETE APPELE, S'IL N'ETAIT PAS MORT, A BENEFICIER A BREF DELAI AU SEIN DE L'ENTREPRISE QUI L'EMPLOYAIT D'UNE PROMOTION QUI AURAIT ENTRAINE UNE MAJORATION SENSIBLE DE SON SALAIRE, ET QUE, DE TOUTE FACON, COMPTE TENU DES CIRCONSTANCES ECONOMIQUES ET DES AUGMENTATIONS DE SALAIRE INTERVENUES ENTRE-TEMPS, SES EMOLUMENTS EUSSENT ETE AU JOUR DE L'ARRET, MEME EN L'ABSENCE DE TOUTE PROMOTION, BIEN SUPERIEURS A CEUX PERCUS A LA DATE DU DECES ;
QUE POUR FONDER EN CET ETAT SON EVALUATION, L'ARRET ADMET QUE DE LA Y... "POUVAIT ESPERER" UNE PROMOTION ET UNE MAJORATION CONSECUTIVE DE SON SALAIRE, MAIS ENONCE CEPENDANT QU'IL N'EST JUSTIFIE A CET EGARD D'AUCUNE CERTITUDE ET QUE DES LORS LE "SEUL" PREJUDICE PATRIMONIAL SUBI PAR LA VEUVE ET LES ENFANTS DE LA VICTIME "RESSORT DU SALAIRE PERCU AU MOMENT DE SON DECES" ;
MAIS ATTENDU D'UNE PART, QU'EN NE S'EXPLIQUANT PAS SUR L'AGGRAVATION DU PREJUDICE AYANT PU RESULTER DE L'EVOLUTION DES SALAIRES ET DU COUT DE LA VIE ENTRE LE JOUR DU DELIT ET CELUI OU ILS STATUAIENT, LES JUGES D'APPEL ONT LAISSE SANS REPONSE UN CHEF PEREMPTOIRE DES CONCLUSIONS PRECITEES DES PARTIES DEMANDERESSES ;
ATTENDU D'AUTRE PART QU'EN SE BORNANT A ENONCER QU'IL N'ETAIT PAS CERTAIN QUE LA VICTIME EUT OBTENU LA PROMOTION QU'ELLE POUVAIT ESPERER, L'ARRET N'A PAS JUSTIFIE LE REJET DE LA PRETENTION DES PARTIES CIVILES QUI INVOQUAIENT LA PERTE D'UNE CHANCE ;
QU'EN EFFET, L'ELEMENT DE PREJUDICE CONSTITUE PAR LA PERTE D'UNE CHANCE PEUT PRESENTER EN LUI-MEME UN CARACTERE DIRECT ET CERTAIN CHAQUE FOIS QU'EST CONSTATEE LA DISPARITION, PAR L'EFFET DU DELIT, DE LA PROBABILITE D'UN EVENEMENT FAVORABLE, ENCORE QUE, PAR DEFINITION, LA REALISATION D'UNE CHANCE NE SOIT JAMAIS CERTAINE ;
QU'IL SUIT DE LA QUE LA DECISION MANQUE DE BASE LEGALE ET QUE LA CASSATION EST ENCOURUE ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL D'ANGERS, DU 13 JUIN 1974, DANS SES DISPOSITIONS CONCERNANT L'ACTION CIVILE DES CONSORTS X... ET DE LA Y... ;
ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI, DANS LES LIMITES DE LA CASSATION INTERVENUE : RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE RENNES
