CASSATION PARTIELLE SUR LE POURVOI DE LA SOCIETE VINICOLE MERIDIONALE " COVIMER ", PARTIE CIVILE, CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE (5EME CHAMBRE CORRECTIONNELLE) EN DATE DU 3 DECEMBRE 1973, QUI L'A DEBOUTEE DE SON ACTION EN DOMMAGES-INTERETS DIRIGEE CONTRE X... (FELIX) ET Y... (PIERRE), RESPECTIVEMENT CONDAMNES POUR BANQUEROUTE FRAUDULEUSE ET INFRACTION A L'ARTICLE 614-19-1° (ANCIEN) DU CODE DE COMMERCE. LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
SUR LES DEUX MOYENS DE CASSATION REUNIS ET PRIS : LE PREMIER MOYEN, DE LA VIOLATION ET FAUSSE APPLICATION DES ARTICLES 1382 DU CODE CIVIL, 2, 3 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, 593 DU MEME CODE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810 POUR DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, " EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A REFUSE DE FAIRE DROIT A LA DEMANDE DE DOMMAGES-INTERETS DE LA DEMANDERESSE EN REPARATION DU PREJUDICE CAUSE PAR LES INFRACTIONS ;
" AU MOTIF QUE L'EXISTENCE DE LA FAILLITE DE X... INTERDISAIT DE PRONONCER UNE CONDAMNATION QUI ROMPRAIT L'EGALITE ENTRE LES CREANCIERS ;
" ALORS QUE Y... QUI EST IN BONIS S'EST CONSTITUE LE COMPLICE DE X... A L'OCCASION DES DETOURNEMENTS D'ACTIF INCRIMINES ET QUE PAR CONSEQUENT IL DOIT REPONDRE SUR TOUS SES BIENS DES CONSEQUENCES CIVILES DE L'INFRACTION QU'IL A AIDE A COMMETTRE;
D'OU IL SUIT QUE LE JUGE DU FOND AVAIT L'OBLIGATION DE STATUER SUR L'ACTION CIVILE A L'EGARD DE X..., D'EVALUER LE DOMMAGE CAUSE PAR L'INFRACTION ET DE LE CONDAMNER A LA REPARATION QUI S'IMPOSAIT " ;
LE SECOND MOYEN, DE LA VIOLATION ET FAUSSE APPLICATION DES ARTICLES 1382 DU CODE CIVIL, 80 ET SUIVANTS, 90, 91 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810 POUR DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, " EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DEBOUTE LA DEMANDERESSE DE SON ACTION CIVILE EN DOMMAGES-INTERETS ;
" AU MOTIF QU'ELLE AURAIT ETE REMPLIE DE SES DROITS PAR SON ADMISSION AU PASSIF DE LA FAILLITE X... ET QUE LA REGLE DE L'EGALITE DES CREANCIERS DANS LA MASSE INTERDIRAIT DE PRONONCER A SON PROFIT UNE CONDAMNATION CIVILE ;
" ALORS EN PREMIER LIEU QUE LA PRODUCTION D'UNE CREANCE A LA FAILLITE N'A PAS LE CARACTERE D'UNE ACTION EN JUSTICE ET NE PERMET PAS D'OPPOSER AU CREANCIER LA REGLE ELECTA UNA VIA ;
" ALORS QUE LE JUGE DU FOND NE S'EXPLIQUE PAS SUR L'ETAT DES OPERATIONS DE FAILLITE ET SUR LE POINT DE SAVOIR SI L'UNION DES CREANCIERS AYANT CESSE, LA DEMANDERESSE N'A PAS RECOUVRE SON DROIT DE POURSUITE INDIVIDUELLE ;
" ALORS QUE SI L'EXISTENCE DE L'ETAT DE FAILLITE INTERDIT AU JUGE DE PRONONCER UNE CONDAMNATION QUI ROMPRAIT L'EGALITE DES CREANCIERS DANS LA MASSE, LE JUGE SAISI DE L'ACTION CIVILE A TOUJOURS L'OBLIGATION DE STATUER SUR CETTE ACTION, C'EST-A-DIRE DE CONSTATER ET D'EVALUER LE DOMMAGE CAUSE PAR L'INFRACTION ET DE FIXER AINSI, AU JOUR OU IL STATUE, LE MONTANT DE LA CREANCE INDEMNITAIRE DE LA PARTIE CIVILE QU'IL NE PEUT, IL EST VRAI, SANCTIONNER PAR UNE CONDAMNATION ;
" ET ALORS QU'EN L'ESPECE, OU IL EST CONSTATE QUE LA CREANCE DE LA DEMANDERESSE N'A PLUS D'AUTRE GAGE QU'UN ACTIF " IRREALISABLE OU DISPARU ", L'EXISTENCE D'UN PREJUDICE NE DIRECTEMENT DU DELIT DE DETOURNEMENT D'ACTIF RESULTE DES FAITS ENONCES ET NE POUVAIT EN CONSEQUENCE SANS QUE L'ARRET ATTAQUE APPARAISSE ENTACHE DE CONTRADICTION ETRE DENIEE PAR LE JUGE DU FOND QUI S'EXPLIQUE AVEC PRECISION SUR LES DETOURNEMENTS ET LEURS CONSEQUENCES " ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU, D'UNE PART, QUE SI LA REGLE DE L'EGALITE DES CREANCIERS EN MATIERE DE FAILLITE (AU SENS DONNE A CE TERME ANTERIEUREMENT A L'ENTREE EN VIGUEUR DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967) DE REGLEMENT JUDICIAIRE OU DE LIQUIDATION DE BIENS S'OPPOSE A CE QU'IL SOIT CONFERE, PAR L'ALLOCATION DE DOMMAGES-INTERETS, AUX CREANCIERS INTERVENANT A TITRE INDIVIDUEL DEVANT LA JURIDICTION REPRESSIVE, DES DROITS PLUS FORTS QUE CEUX DES AUTRES CREANCIERS REUNIS DANS LA MASSE, CETTE REGLE EST ETRANGERE A L'ACTION CIVILE EXERCEE CONTRE UN PREVENU QUI N'EST PAS LE DEBITEUR DECLARE EN FAILLITE, EN REGLEMENT JUDICIAIRE OU EN LIQUIDATION DE BIENS MAIS QUI A ETE RECONNU COUPABLE DE RECEL DES BIENS DETOURNES PAR CE DEBITEUR, DELIT PREVU ET REPRIME PAR L'ARTICLE 614-19 ANCIEN DU CODE DE COMMERCE DONT LES DISPOSITIONS ONT ETE REPRISES PAR L'ARTICLE 143-1 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967 ;
ATTENDU, D'AUTRE PART, QU'IL N'Y A PAS LIEU D'OPPOSER A L'ACTION D'UNE PARTIE CIVILE LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 5 DU CODE DE PROCEDURE PENALE LORSQUE CETTE PARTIE CIVILE A PRODUIT A LA FAILLITE, AU REGLEMENT JUDICIAIRE OU A LA LIQUIDATION DES BIENS DU DEBITEUR, CETTE PRODUCTION N'AYANT PAS LE CARACTERE D'UNE ACTION EN JUSTICE ;
ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE X... ET Y... COUPABLES, LE PREMIER, EN TANT QUE COMMERCANT FAILLI, DE LA SOUSTRACTION FRAUDULEUSE DE SA COMPTABILITE ET DU DETOURNEMENT FRAUDULEUX D'UNE PARTIE DE SON ACTIF, LE SECOND DU RECEL DE TOUT OU PARTIE DE L'ACTIF AINSI DETOURNE ;
QUE, STATUANT SUR L'ACTION CIVILE DE LA SOCIETE VINICOLE MERIDIONALE " COVIMER " DIRIGEE CONTRE LES DEUX PREVENUS, LA COUR D'APPEL A DECLARE CETTE ACTION RECEVABLE MAIS A REFUSE D'Y FAIRE DROIT AUX MOTIFS, D'UNE PART, QUE L'ALLOCATION DE DOMMAGES-INTERETS AU PROFIT DE CETTE PARTIE CIVILE PORTERAIT ATTEINTE AU PRINCIPE DE L'EGALITE DES CREANCIERS COMPOSANT LA MASSE ET, D'AUTRE PART, QUE LA SOCIETE " COVIMER ", AYANT PRODUIT A LA FAILLITE DE X... ET Y AYANT ETE ADMISE POUR LE MONTANT DE SA CREANCE, NE JUSTIFIE PAS D'UN PREJUDICE DISTINCT DE CELUI QUI EST REPARE PAR SON ADMISSION AU PASSIF DE LADITE FAILLITE ;
ATTENDU QUE SI CETTE DECISION EST JUSTIFIEE, AU MOINS EN VERTU DU PREMIER DE CES DEUX MOTIFS, EN TANT QUE L'ACTION DE LA SOCIETE " COVIMER " ETAIT DIRIGEE CONTRE X... DONT LE PATRIMOINE EST LE GAGE DE LA MASSE DE SES CREANCIERS, IL N'EN EST PAS DE MEME A L'EGARD DE Y... QUI DOIT REPONDRE SUR SON PATRIMOINE PERSONNEL DES CONSEQUENCES DOMMAGEABLES CAUSEES DIRECTEMENT A LA PARTIE CIVILE PAR LE DELIT DE RECEL DONT IL A ETE RECONNU COUPABLE ;
QUE, DES LORS, EN REFUSANT DE FAIRE DROIT AUX DEMANDES DE LA PARTIE CIVILE DIRIGEES CONTRE Y... AUQUEL LA REGLE DE L'EGALITE DES CREANCIERS EST ETRANGERE, LA COUR D'APPEL, EN L'ETAT DES DEUX ORDRES D'ENONCIATIONS SUR LESQUELLES ELLE S'EST FONDEE, A MECONNU LES PRINCIPES CI-DESSUS RAPPELES ;
QUE LA CASSATION EST ENCOURUE DE CES CHEFS ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE L'ARRET PRECITE DE LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE EN DATE DU 3 DECEMBRE 1973 EN CELLES DES DISPOSITIONS DUDIT ARRET QUI ONT REFUSE DE FAIRE DROIT A L'ACTION DE LA PARTIE CIVILE DIRIGEE CONTRE Y..., TOUTES AUTRES DISPOSITIONS DUDIT ARRET ETANT EXPRESSEMENT MAINTENUES, ET, POUR ETRE STATUE A NOUVEAU, CONFORMEMENT A LA LOI, DANS LES LIMITES DE LA CASSATION AINSI PRONONCEE : RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE NIMES