REJET DU POURVOI DE X... (JEAN), PARTIE CIVILE, CONTRE UN ARRET DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, EN DATE DU 1ER FEVRIER 1966 QUI A CONFIRME L'ORDONNANCE DE NON-LIEU DU JUGE D'INSTRUCTION DE LA SEINE DANS UNE INFORMATION SUIVIE CONTRE X - DU CHEF D'ESCROQUERIE ;
LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION ET FAUSSE APPLICATION DES ARTICLES PREMIER ET SUIVANTS DE LA LOI DU 7 MARS 1925, 1166, 1382 DU CODE CIVIL, 2 ET SUIVANTS, 8 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, POUR DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DIT N'Y AVOIR LIEU A SUIVRE SUR LA PLAINTE PORTEE PAR LE DEMANDEUR EN SUITE D'INFRACTIONS A LA LOI SUR LES SOCIETES A RESPONSABILITE LIMITEE COMMISES PAR LES PREVENUS, D'UNE PART EN 1953 PAR DETOURNEMENT DES BIENS SOCIAUX ET TRANSFERTS DE FONDS SOCIAUX NON UTILISES POUR LE SERVICE DE LA SOCIETE, D'AUTRE PART EN SUITE DE LA VENTE CLANDESTINE DU BATEAU LE RETIAIRE QUI CONSTITUAIT TOUT L'ACTIF SOCIAL ET DU DETOURNEMENT DES FONDS SOCIAUX PROVENANT DE CETTE VENTE COMMIS PAR LES GERANTS AU MOTIF QUE LES PREMIERS FAITS SERAIENT COUVERTS PAR LA PRESCRIPTION TRIENNALE ET QU'EN CE QUI CONCERNE LES SECONDS, LE DEMANDEUR, QUI AVAIT VENDU SES PARTS SOCIALES LORSQU'ILS FURENT COMMIS, NE POUVAIT SE FAIRE GRIEF D'ACTES DE GESTION INTERNE D'UNE SOCIETE DONT IL NE FAISAIT PLUS PARTIE ;
ALORS SUR LE PREMIER POINT QU'IL EST CONSTATE QUE LES FAITS AVAIENT ETE DEFERES AU JUGE D'INSTRUCTION DE SAIGON AU COURS D'UNE INFORMATION OUVERTE EN 1954 ET ONT PAR CONSEQUENT FAIT L'OBJET D'ACTE D'INFORMATION OU DE POURSUITE INTERRUPTIFS DE LA PRESCRIPTION A L'EGARD DE TOUTES LES INFRACTIONS QUELCONQUES QUI AVAIENT PU ETRE COMMISES DANS LA GESTION DE LA SOCIETE ET QUE LE JUGE DU FOND AVAIT DES LORS L'OBLIGATION DE METTRE LA COUR DE CASSATION EN MESURE D'EXERCER SON CONTROLE SUR LE POINT DE SAVOIR COMMENT S'ETAIT TERMINEE CETTE INFORMATION OUVERTE A SAIGON ET A QUELLE DATE ;
ALORS SUR LE SECOND POINT QU'IL RESULTE DES FAITS ENONCES QUE LES DETOURNEMENTS DE FONDS SOCIAUX, SONT CONSTANTS ET DEVAIENT PAR CONSEQUENT ETRE POURSUIVIS, ET QUE LE DEMANDEUR CREANCIER DE LA SOCIETE, QUI, DE PLUS, AVAIT CONSTITUE UN DEPOT DE GARANTIE DE 2000000 DE FRANCS EN OR POUR CAUTIONNER UNE DETTE SOCIALE ETAIT RECEVABLE - QUOIQUE N'ETANT PLUS ASSOCIE - A INTERVENIR EN RAISON DES DETOURNEMENTS DE FONDS SOCIAUX, COMMIS AU PREJUDICE DE LA SOCIETE DEBITRICE, PAR SES GERANTS OU LIQUIDATEURS ;
ATTENDU QU'IL APPERT DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE LA SOCIETE FRANCAISE DE NAVIGATION DU PACIFIQUE, SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE, CONSTITUEE EN 1953, AU CAPITAL DE 2000000 DE FRANCS, ENTRE Y..., Z..., A... ET X..., AVAIT POUR OBJET L'ACQUISITION, EN VUE DE SON EXPLOITATION POUR LE CABOTAGE EN EXTREME-ORIENT, D'UN NAVIRE LE RETIAIRE, MIS EN VENTE PAR L'ADMINISTRATION DES DOMAINES ;
QUE, CEPENDANT, MALGRE UNE AUGMENTATION DE CAPITAL ET DES APPORTS DE FONDS DES ASSOCIES, LA MISE EN ETAT DE MARCHE DU NAVIRE N'AVAIT PAS ETE ASSUREE ET QU'IL N'AVAIT JAMAIS PRIS LA MER ;
QU'ENFIN, A LA SUITE DE DISSENTIMENTS QUI S'ETAIENT ELEVES ENTRE LES ASSOCIES, EN 1955, A L'OCCASION D'IMPORTANTS TRANSFERTS DE CAPITAUX D'INDOCHINE EN FRANCE, X... AVAIT, EN AVRIL 1956, CEDE A B... LES PARTS SOCIALES QU'IL POSSEDAIT AINSI QUE LA CREANCE QU'IL AVAIT SUR LA SOCIETE ;
ATTENDU QUE X... A DEPOSE PLAINTE ET S'EST CONSTITUE PARTIE CIVILE, LE 23 FEVRIER 1961, CONTRE SES ANCIENS ASSOCIES AUXQUELS IL REPROCHAIT DE S'ETRE LIVRES, AVEC LA COMPLICITE DE B..., A DES ACTES CONTRAIRES AUX INTERETS DE LA SOCIETE ET QUI LUI AVAIENT PORTE PREJUDICE ;
ATTENDU QUE L'INFORMATION OUVERTE SUR CETTE PLAINTE, DU CHEF D'ESCROQUERIE CONTRE X - A ETE CLOSE LE 12 AVRIL 1965 PAR UNE ORDONNANCE DE NON-LIEU, ET QUE, SAISIE DE L'APPEL DE CETTE DECISION, LA CHAMBRE D'ACCUSATION L'A CONFIRMEE PAR L'ARRET ATTAQUE, AUX MOTIFS QUE CERTAINS DES FAITS DENONCES ETAIENT COUVERTS PAR LA PRESCRIPTION TRIENNALE ET QUE D'AUTRES N'ETAIENT PAS SUSCEPTIBLES DE COMPORTER UNE QUALIFICATION PENALE ;
SUR LA PREMIERE BRANCHE DU MOYEN : SUR LA RECEVABILITE : ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE A CONFIRME L'ORDONNANCE DU JUGE D'INSTRUCTION EN CE QU'ELLE A DECLARE L'ACTION PUBLIQUE ETEINTE PAR L'EFFET DE LA PRESCRIPTION A L'EGARD DE CERTAINS FAITS ;
ATTENDU QU'AUX TERMES DE L'ARTICLE 575, ALINEA 3 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, LA PARTIE CIVILE PEUT SE POURVOIR EN CASSATION CONTRE LES ARRETS DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION, MEME EN L'ABSENCE DE POURVOI DU MINISTERE PUBLIC, LORSQUE L'ARRET A ADMIS UNE EXCEPTION METTANT FIN A L'ACTION PUBLIQUE ;
QU'AINSI LE POURVOI DE X... EST RECEVABLE EN CE QUI CONCERNE LES FAITS DECLARES PRESCRITS ET QU'IL Y A LIEU DE STATUER SUR LA PREMIERE BRANCHE DU MOYEN ;
SUR LE FOND : ATTENDU QU'APRES AVOIR EXPOSE LES CIRCONSTANCES DANS LESQUELLES LA PARTIE CIVILE AVAIT, LE 23 FEVRIER 1961, PORTE PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE, POUR ESCROQUERIE ET EXAMINE LES FAITS PAR ELLE DENONCES COMME CONSTITUTIFS D'INFRACTION, L'ARRET ATTAQUE CONSTATE : 1° EN CE QUI CONCERNE L'AFFECTATION DU NAVIRE, QUI DEVAIT DEVENIR LA PROPRIETE DE LA SOCIETE A LA GARANTIE D'UN PRET PERSONNEL A Y... ET Z... - QUE CET ABUS DES BIENS ET DU CREDIT DE LA SOCIETE, A LE SUPPOSER ETABLI, AURAIT ETE COMMIS EN 1953 ET QUE, DES 1956, LA PARTIE CIVILE EN AVAIT EU CONNAISSANCE ;
2° EN CE QUI CONCERNE LES VIREMENTS D'INDOCHINE EN FRANCE, D'IMPORTANTS CAPITAUX SOCIAUX QUI, SELON LA PARTIE CIVILE, N'AURAIENT PAS ETE UTILISES A DES FINS SOCIALES ;
QUE CES FAITS DATENT D'AVRIL ET NOVEMBRE 1953 ET DE MAI 1954, ET QUE LA PARTIE CIVILE AVAIT ELLE-MEME RECONNU QU'ELLE AVAIT ETE AU COURANT DE CES VIREMENTS A L'EPOQUE OU ILS AVAIENT ETE REALISES ;
ATTENDU QUE DU RAPPROCHEMENT DE CES DIFFERENTES DATES, L'ARRET A DEDUIT QUE LES FAITS INCRIMINES REMONTAIENT A UNE PERIODE DE PLUS DE TROIS ANS ANTERIEURE AU DEPOT DE LA PLAINTE (23 FEVRIER 1961), ET QU'ILS SE TROUVAIENT, DES LORS, COUVERTS PAR LA PRESCRIPTION ;
ATTENDU, ENFIN, QUE, REPONDANT AUX CONCLUSIONS DU DEMANDEUR SELON LESQUELLES LA PRESCRIPTION AURAIT ETE INTERROMPUE PAR UNE INFORMATION OUVERTE A SAIGON, LE 17 AOUT 1954, L'ARRET PRECISE QUE CETTE PROCEDURE, DANS LAQUELLE X... FUT DU RESTE LUI-MEME INCULPE, CONCERNAIT DES FAITS D'ESCROQUERIE COMMIS PAR DIVERSES PERSONNES SOUS LE COUVERT DE LA SOCIETE FRANCAISE DE NAVIGATION DU PACIFIQUE AU PREJUDICE DE RESSORTISSANTS VIETNAMIENS, FAITS NETTEMENT DIFFERENTS DES AGISSEMENTS DENONCES PAR X... DANS SA PLAINTE DU 23 FEVRIER 1961 ;
ET QU'ELLE N'AVAIT PU, EN CONSEQUENCE, CONSTITUER UNE CAUSE D'INTERRUPTION DE LA PRESCRIPTION ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES MOTIFS, L'ARRET ATTAQUE A LEGALEMENT JUSTIFIE LA DECISION ;
QU'IL APPARTENAIT A LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE RECHERCHER A QUELLE EPOQUE AVAIENT ETE COMMIS OU AVAIENT PU ETRE CONSTATES LES FAITS DENONCES COMME CONSTITUANT DES ESCROQUERIES, DE FIXER AINSI LE POINT DE DEPART DE LA PRESCRIPTION ET DE DIRE SI CELLE-CI AVAIT, OU NON, ETE INTERROMPUE ;
QUE SON APPRECIATION A CET EGARD EST SOUVERAINE DES LORS QUE LES MOTIFS QUI LA JUSTIFIENT NE CONTIENNENT NI ILLEGALITE NI CONTRADICTION ;
D'OU IL SUIT QUE, DANS SA PREMIERE BRANCHE, LE MOYEN DOIT ETRE REJETE ;
SUR LA SECONDE BRANCHE DU MOYEN ;
ATTENDU QU'EXAMINANT LES CONDITIONS DANS LESQUELLES LE NAVIRE LE RETIAIRE AURAIT ETE VENDU ET L'UTILISATION DES FONDS PROVENANT DE CETTE VENTE - OPERATIONS QUE LA PARTIE CIVILE DENONCE COMME FRAUDULEUSES ET CONSIDERE COMME CONSTITUTIVES D'INFRACTIONS - LA CHAMBRE D'ACCUSATION, APRES AVOIR EXPOSE LES MOTIFS QUI LUI PARAISSAIENT PROPRES A JUSTIFIER SA DECISION, CONSTATE QUE LES FAITS DENONCES NE SONT PAS SUSCEPTIBLES DE RECEVOIR UNE QUALIFICATION PENALE ET DECLARE, EN REPONSE AUX CONCLUSIONS PRISES PAR LE DEMANDEUR, QUE LE COMPLEMENT D'INFORMATION SOLLICITE SERAIT SANS INTERET POUR LA MANIFESTATION DE LA VERITE ;
QU'AINSI L'ARRET S'EST EXPLIQUE SUR LES CHEFS DE POURSUITE VISES ET QU'IL LES A ECARTES PAR DES MOTIFS DONT LE DEMANDEUR N'EST PAS RECEVABLE A DISCUTER LA VALEUR A L'APPUI DE SON SEUL POURVOI, SELON LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 575 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
QUE, DES LORS, LE MOYEN DANS SA SECONDE BRANCHE N'A PAS A ETRE EXAMINE ;
REJETTE LE POURVOI. PRESIDENT : M ZAMBEAUX - RAPPORTEUR : M CENAC - AVOCAT GENERAL : M BOUCHERON - AVOCAT : M DE SEGOGNE.
