| France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 juin 1966, 65-93681

REJET DU POURVOI DE X... (PIERRE) CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE CAEN DU 5 NOVEMBRE 1965 QUI, POUR EMISSION DE CHEQUE SANS PROVISION, L'A CONDAMNE A 100 FRANCS D'AMENDE AVEC SURSIS. LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;

SUR LE

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

ATTENDU QUE LA PRETENDUE NULLITE DE L'ACTE D'APPEL, QUI N'A PAS ETE OPPOSEE DEVANT LA COUR D'APPEL, NE SAURAIT, AUX TERMES DE L'ARTICLE 599 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, ETRE PRESENTEE

COMME MOYEN DE CASSATION :

DECLARE LE MOYEN IRRECEVABLE ;

SUR LES DEUXIEME ET TROISIEME MOYENS DE CASSATION REUNIS PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 171 ET 172 DU CODE DES POSTES ET COMMUNICATIONS, 19 DU DECRET DU 17 NOVEMBRE 1941, MODIFIE PAR LE DECRET DU 12 NOVEMBRE 1956, 66 DU DECRET DU 30 OCTOBRE 1935, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE, D'UNE PART, L'ARRET ATTAQUE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE D'EMISSION DE CHEQUE SANS PROVISION ;

AU MOTIF QU'IL A EMIS, AU PROFIT DE LA SOCIETE ESSO-STANDARD UN CHEQUE POSTAL DE VIREMENT, AVEC UNE PROVISION DISPONIBLE INSUFFISANTE ;

ALORS QUE LE CHEQUE SUPPOSE L'INTERVENTION DE TROIS PERSONNES : LE TIREUR, LE TIRE ET LE BENEFICIAIRE, QU'AU CAS, PREVU A L'ARTICLE 171 DU CODE DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS, OU LE CHEQUE DE VIREMENT EST ENVOYE AU CENTRE DE CHEQUES POSTAUX ET NON REMIS AU BENEFICIAIRE, IL DOIT, PAR APPLICATION DE L'ARTICLE 19 DU DECRET DU 17 NOVEMBRE 1941 MODIFIE PAR LE DECRET DU 12 NOVEMBRE 1956, ETRE RENVOYE AU TIREUR, QUE LE BENEFICIAIRE RESTE DANS CE CAS HORS DE CIRCUIT, DE SORTE QUE LE DELIT D'EMISSION DE CHEQUE SANS PROVISION N'EST PAS LEGALEMENT POSSIBLE ;

ET ALORS QUE, L'ARRET ATTAQUE, CONSTATANT QU'IL Y AVAIT EU EN L'ESPECE CHEQUE DE VIREMENT, IL AURAIT DU PRECISER SI CELUI-CI AVAIT ETE REMIS AU BENEFICIAIRE ET QUE, FAUTE DE L'AVOIR FAIT, IL N'A PAS CARACTERISE LE DELIT ;

ET EN CE QUE, D'AUTRE PART, L'ARRET ATTAQUE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE D'EMISSION DE CHEQUE SANS PROVISION ;

AUX MOTIFS QU'IL A EMIS UN CHEQUE POSTAL DONT LA PROVISION ETAIT INSUFFISANTE, QU'IL DEVAIT VERIFIER LA SITUATION DE SON COMPTE ET QUE LA CONSULTATION DES RELEVES EST INSUFFISANTE CAR ILS NE PEUVENT TENIR COMPTE DES CHEQUES EMIS ET NON ENCORE PRESENTES ;

ALORS QUE LA MAUVAISE FOI, ELEMENT ESSENTIEL DU DELIT D'EMISSION DE CHEQUE SANS PROVISION RESIDE DANS LA CONNAISSANCE QU'AVAIT LE PREVENU DU DEFAUT OU DE L'INSUFFISANCE DE LA PROVISION, QUE SI UN DEFAUT DE VERIFICATION DU COMPTE PEUT CONSTITUER LE PREVENU DE MAUVAISE FOI, CE N'EST QUE DANS LA MESURE OU LES CIRCONSTANCES DE LA CAUSE INDIQUENT QU'IL AVAIT TOUTES RAISONS DE PENSER QUE SON COMPTE N'ETAIT PAS PROVISIONNE ET DEVAIT SE MONTRER PARTICULIEREMENT VIGILANT ;

ALORS QU'EN L'ESPECE, AUCUNE CIRCONSTANCE DE CE GENRE N'A ETE RELEVEE, QU'AU CONTRAIRE IL RESSORT DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE LE PREVENU A PU ETRE INDUIT EN ERREUR PAR UN RELEVE POSTAL ET N'A COMMIS QU'UNE SIMPLE FAUTE D'INATTENTION, INSUFFISANTE POUR CARACTERISER L'INTENTION DELICTUEUSE ;

ATTENDU QUE POUR DECLARER X... COUPABLE D'AVOIR EMIS DE MAUVAISE FOI UN CHEQUE SANS PROVISION, L'ARRET ATTAQUE CONSTATE QUE LE 21 SEPTEMBRE 1964, LE PREVENU A EMIS AU PROFIT DE LA SOCIETE ESSO-STANDARD UN CHEQUE POSTAL DE VIREMENT D'UN MONTANT DE 5109,60 FRANCS QU'A CETTE DATE LA PROVISION DISPONIBLE DU TIREUR N'ETAIT QUE DE 2538,96 FRANCS, QU'AU JOUR DE LA PRESENTATION DU CHEQUE, LE 25 SEPTEMBRE 1964, LE COMPTE DE X..., BIEN QU'APPROVISIONNE ENTRE LE JOUR DE L'EMISSION ET LE JOUR DE LA PRESENTATION, S'EST REVELE INSUFFISANT POUR ASSURER LE PAYEMENT DE LA SOMME DE 5109,60 FRANCS ;

ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS ET DE CES ENONCIATIONS, LA COUR D'APPEL A JUSTIFIE SA DECISION ;

QU'EN EFFET, AUX TERMES DE L'ARTICLE 172-5 DU DECRET DU 8 OCTOBRE 1952, MODIFIE PAR LE DECRET DU 5 OCTOBRE 1957 LES DISPOSITIONS PENALES QUI REPRIMENT LES DELITS EN MATIERE DE CHEQUES BANCAIRES SONT DE PLEIN DROIT APPLICABLES AU CHEQUE POSTAL ;

QU'IL EN RESULTE QUE LE DELIT D'EMISSION DE CHEQUE POSTAL SANS PROVISION EST CONSTITUE LORSQU'IL N'Y A PAS, COMME EN L'ESPECE, PROVISION PREALABLE ET DISPONIBLE LORS DE L'EMISSION DU CHEQUE ;

D'OU IL SUIT QUE LES MOYENS DOIVENT ETRE ECARTES ;

ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;

REJETTE LE POURVOI ;

ET ATTENDU QUE PAR L'EFFET DU REJET DU PRESENT POURVOI LA CONDAMNATION PRONONCEE EST DEVENUE DEFINITIVE ;

VU L'ARTICLE 9, PARAGRAPHE C DE LA LOI DU 18 JUIN 1966 ;

DECLARE L'ACTION PUBLIQUE ETEINTE. PRESIDENT : M COMTE, CONSEILLER DOYEN, FAISANT FONCTIONS - RAPPORTEUR : M POMPEI - AVOCAT GENERAL :

M RELIQUET - AVOCAT : M HUBERT-HENRY.