| France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 décembre 1965, 64-92584

REJET DU POURVOI DE X... (EDOUARD), CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE TOULOUSE EN DATE DU 9 JUILLET 1964 QUI L'A CONDAMNE A DEUX MOIS DE PRISON AVEC SURSIS POUR ESCROQUERIES ET FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE. LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;

SUR LE

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE X... A DEUX MOIS DE PRISON AVEC SURSIS POUR ESCROQUERIE AU MOTIF QUE SOUS PRETEXTE DE FAIRE SIGNER LE RECU GRATUIT D'UNE PAIRE DE DRAPS, X... AURAIT FAIT SIGNER UN BON DE COMMANDE DE DEUX AUTRES PAIRES DE DRAPS ET AURAIT AINSI ESCROQUE PARTIE DE LA FORTUNE DES DAMES Y... ET Z... ;

ALORS QUE L'ARRET NE CONTESTE PAS QUE LA SIGNATURE DE CHAQUE COMMANDE AIT ETE ACCOMPAGNEE, OUTRE LA REMISE GRATUITE D'UNE PAIRE DE DRAPS, DU VERSEMENT DE DEUX ACOMPTES DE 7000 FRANCS AVEC REMISE CORRELATIVE DE DEUX NOUVELLES PAIRES DE DRAPS COMMANDEES ET RECUES SANS CRITIQUE QUANT A LA VALEUR, EN SORTE QUE L'OPERATION, DEPOURVUE DE TOUT CARACTERE CHIMERIQUE, NE POUVAIT CONSTITUER UNE ESCROQUERIE ;

ATTENDU QU'IL RESULTE DES CONSTATATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE VERS LE DEBUT DE JUIN 1962 LA DAME Y... DEMEURANT A LAVAUR, A RECU UN IMPRIME DIT BON DE SELECTION QUI LUI ANNONCAIT QU'ELLE AVAIT ETE CHOISIE PARMI LES HABITANTS DE SA COMMUNE POUR RECEVOIR UN CADEAU OFFERT A TITRE PUBLICITAIRE PAR LES ETABLISSEMENTS DYFRANCE, DE SAINT-ETIENNE ;

QUE, QUELQUES JOURS PLUS TARD, X..., REPRESENTANT DE LA MAISON DYFRANCE, A RENDU VISITE A LA DAME Y... ET LUI A REMIS, A TITRE GRACIEUX, UNE PAIRE DE DRAPS ;

QU'IL A DEMANDE A LA DAME Y... DE LUI SIGNER UN RECU DE CE DON, ET LUI A PRESENTE, A CETTE FIN, UN IMPRIME NON REMPLI DONT IL DISSIMULA L'EN-TETE AVEC SA SERVIETTE ;

QUE LA DAME Y... SIGNA SANS MEFIANCE ;

QUE X... REMPLIT ENSUITE CET IMPRIME ET REVELA SEULEMENT ALORS A LA DAME Y... QU'ELLE VENAIT DE SIGNER NON POINT LE RECU DU DON D'UNE PAIRE DE DRAPS MAIS UN BON DE COMMANDE DE TROIS PAIRES DE DRAPS ;

QUE LA DAME Y... PROTESTA QU'ELLE N'AVAIT RIEN COMMANDE, QU'ELLE PREFERAIT RESTITUER UN PRESENT QUI, EN FAIT, N'EN ETAIT PAS UN, ET ANNULER UN ACHAT QUI LUI ETAIT ARTIFICIEUSEMENT IMPOSE ;

QUE, CEPENDANT DEVANT LES MENACES DE POURSUITES JUDICIAIRES PROFEREES PAR X..., ELLE SE LAISSA INTIMIDER ET PAYA A CELUI-CI UN ACOMPTE DE 7000 FRANCS, QU'ELLE A, PAR LA SUITE, REFUSE DE REGLER UNE TRAITE REVETUE PAR X... D'UNE FAUSSE MENTION D'ACCEPTATION ET QUI REPRESENTAIT LE SOLDE DU PRIX ;

ATTENDU QUE L'ARRET ENONCE, EN OUTRE, QUE X... A EU RECOURS A LA MEME MACHINATION POUR DUPER UNE DAME Z... ;

ATTENDU QU'EN CET ETAT DES FAITS SOUVERAINEMENT CONSTATES PAR ELLE C'EST A BON DROIT QUE LA COUR D'APPEL A CONSIDERE QUE LA PROMESSE FAITE AUX DAMES Y... ET Z... D'UNE LIBERALITE SANS CHARGE, CONSTITUAIT L'ESPERANCE D'UN EVENEMENT CHIMERIQUE, ET QUE X... AYANT EU RECOURS NON SEULEMENT A DES ALLEGATIONS MENSONGERES MAIS ENCORE A DES ACTES EXTERIEURS POUR SURPRENDRE LE CONSENTEMENT DE CES PERSONNES, LE DELIT DE L'ARTICLE 405 SE TROUVAIT CONSTITUE ;

QUE D'AUTRE PART L'ESCROQUERIE EST SUFFISAMMENT CARACTERISEE, EN DEHORS DE TOUT PREJUDICE NOTABLE LORSQU'IL EST ETABLI, COMME EN L'ESPECE, QUE LES REMISES DE FONDS ONT ETE LE RESULTAT DES MOYENS FRAUDULEUX EMPLOYES PAR LE PREVENU ET QU'ELLES N'ONT PAS ETE LIBREMENT CONSENTIES PAR CEUX QU'IL A TROMPES ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;

SUR LE

SECOND MOYEN DE CASSATION :

EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE X... A DEUX MOIS DE PRISON AVEC SURSIS POUR FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE ;

ALORS QUE LA MATERIALITE DU FAUX NE RESULTE QUE DE MOTIFS HYPOTHETIQUES INSUFFISANTS POUR JUSTIFIER, EN MATIERE PENALE, UNE CONDAMNATION PUISQUE LE DOUTE PROFITE A L'ACCUSE ;

ATTENDU QUE LE TRIBUNAL AVAIT DECLARE X... COUPABLE DE FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE POUR AVOIR IMITE L'ECRITURE ET LA SIGNATURE DE LA DAME Y... DANS UNE FORMULE D'ACCEPTATION DE TRAITE, AUX MOTIFS QUE LES CONSTATATIONS DES EXPERTS EN ECRITURES CORROBORAIENT LE TEMOIGNAGE ACCUSATEUR DE LA DAME Y... ET QU'IL ETAIT CERTAIN QUE X... AVAIT INTERET A FORMALISER LA VENTE QU'IL VENAIT DE FAIRE IRREGULIEREMENT ;

QUE LES JUGES D'APPEL ONT CONFIRME LA DECISION DES PREMIERS JUGES ADOPTE LEURS MOTIFS ET AJOUTE QUE LE FAUX EN ECRITURES COMMIS PAR X... NE SAURAIT ETRE SERIEUSEMENT CONTESTE ;

QUE PAR DE TELS MOTIFS QUI NE SONT NULLEMENT HYPOTHETIQUES, LES JUGES DU FOND QUI AVAIENT, SUR CETTE QUESTION DE FAIT, UN POUVOIR SOUVERAIN D'APPRECIATION, ONT MARQUE LEUR CONVICTION DE LA CULPABILITE DE X... ;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;

ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;

REJETTE LE POURVOI. PRESIDENT : M ZAMBEAUX - RAPPORTEUR : M GAGNE - AVOCAT GENERAL : M BOUCHERON - AVOCAT : M ROUVIERE.