CASSATION PARTIELLE SUR LE POURVOI DE X... (RAYMOND), CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE ROUEN EN DATE DU 5 OCTOBRE 1964, QUI, DU CHEF D'HOMICIDE ET DE BLESSURES INVOLONTAIRES, L'A CONDAMNE A 500 FRANCS D'AMENDE ET A DES DOMMAGES - INTERETS ENVERS LES PARTIES CIVILES ET L'A DEBOUTE DE SON ACTION CIVILE DIRIGEE CONTRE Y... ;
LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
VU LES MEMOIRES EN DEFENSE ;
SUR LES DEUX MOYENS DE CASSATION REUNIS PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES R 26 ET R 27, R 5 DU CODE DE LA ROUTE, VIOLATION DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIF ET CONTRADICTION, MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE, D'UNE PART, L'ARRET ATTAQUE A CONFIRME LE JUGEMENT ENTREPRIS EN TANT QU'IL AVAIT RELAXE Y... ET RETENU LE DEMANDEUR SEUL DANS LES LIENS DE LA PREVENTION, LE CONDAMNANT A 500 FRANCS D'AMENDE AINSI QU'A LA REPARATION DE TOUT PREJUDICE ENVERS LES PARTIES CIVILES, AU MOTIF QU'IL SERAIT DIFFICILE DE DIRE QUE Y... A COMMIS UNE FAUTE QUELCONQUE ;
QU'IL NE S'EST ENGAGE SUR LA ROUTE NATIONALE QU'APRES S'ETRE ASSURE QU'IL POUVAIT LE FAIRE SANS DANGER AUCUN VEHICULE NE VENANT SUR SA DROITE ET SUR SA GAUCHE ;
ALORS QUE LE DEMANDEUR EMPRUNTANT UNE ROUTE A GRANDE CIRCULATION, SANS LIMITATION DE VITESSE, BENEFICIAIT DE LA PRIORITE ABSOLUE ;
QUE SI LES CONDITIONS DE VISIBILITE ETAIENT CONSIDEREES COMME INSUFFISANTES A L'EGARD DU PRIORITAIRE PAR L'ARRET ATTAQUE EN RAISON DU DOS D'ANE, ELLES DEVAIENT L'ETRE AUSSI POUR LE CONVOI AGRICOLE LOURD, LONG ET LENT, QUI ETAIT DANS L'IMPOSSIBILITE D'ENTREPRENDRE SA MANOEUVRE APRES S'ETRE ASSURE QU'IL POUVAIT LE FAIRE SANS DANGER, DES LORS QU'IL DEVAIT S'ATTENDRE, A TOUT INSTANT, A VOIR SURGIR AU SOMMET DU DOS D'ANE UN VEHICULE RAPIDE ;
QUE L'ARRET EST ENTACHE DE CONTRADICTION DE MOTIFS, SUR CE POINT, ET D'UNE ERREUR DE QUALIFICATION DES FAITS ;
QUE LA COUR DEVAIT RECONNAITRE A LA CHARGE DU VEHICULE LENT POUR NE PAS AVOIR PRIS LA PRECAUTION DE REVELER SA MANOEUVRE PERTURBATRICE AUX VEHICULES CIRCULANT SUR LA ROUTE A GRANDE CIRCULATION QUI POURRAIENT LUI ETRE MASQUES PAR LE DOS D'ANE, UNE FAUTE, DE NATURE A ENTRAINER, AU MOINS UN PARTAGE DE RESPONSABILITE ;
EN CE QUE, D'AUTRE PART, L'ARRET A RELAXE Y... AU MOTIF QU'IL N'AVAIT COMMIS AUCUNE FAUTE ET QUE ON NE SAURAIT TENIR COMME FAUTE LE FAIT PAR Y... D'AVOIR, EN TOURNANT SUR SA GAUCHE, EMPIETE SUR LA LIGNE GAUCHE CONTINUE ;
ALORS QUE LES DISPOSITIONS DU CODE DE LA ROUTE SONT IMPERATIVES ET QUE LE DEMANDEUR, PRIORITAIRE SUR UNE VOIE A GRANDE CIRCULATION SANS LIMITATION DE VITESSE, ETAIT EN DROIT DE PENSER QUE LE PASSAGE LUI SERAIT LAISSE LIBRE DANS LE COULOIR DELIMITE PAR CETTE LIGNE JAUNE CONTINUE ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QU'IL RESULTE TANT DU JUGEMENT QUE DE L'ARRET ATTAQUE QUI LE CONFIRME, QU'UNE COLLISION S'EST PRODUITE SUR LA ROUTE A GRANDE CIRCULATION PARIS-ROUEN, ENTRE LA VOITURE AUTOMOBILE CONDUITE PAR X... ET L'ENSEMBLE TRACTEUR-REMORQUE AGRICOLE CONDUIT PAR Y... QUI, DEBOUCHANT D'UN CHEMIN VICINAL SITUE SUR LA DROITE DE LA DIRECTION SUIVIE PAR L'AUTOMOBILISTE SUR LA ROUTE NATIONALE, S'APPRETAIT A TOURNER SUR SA GAUCHE SUR CETTE MEME ROUTE ;
QU'AU COURS DE L'ACCIDENT DEUX DES PASSAGERS DE LA VOITURE AUTOMOBILE FURENT, L'UN MORTELLEMENT ET L'AUTRE GRAVEMENT, BLESSES ;
QU'IL EST CONSTATE PAR LES JUGES DU FOND QUE LES LIEUX DE L'ACCIDENT SONT PRECEDES, SUR LA ROUTE NATIONALE, PAR UN DOS D'ANE, A 100 METRES ENVIRON, SANS QU'AUCUN PANNEAU DE SIGNALISATION IMPOSE UNE LIMITATION DE VITESSE, QU'AU DEBOUCHE DU CHEMIN VICINAL LA VOIE A GRANDE CIRCULATION COMPORTE UNE LIGNE JAUNE CONTINUE QUE Y... A FRANCHIE POUR EFFECTUER SA MANOEUVRE ;
ATTENDU QUE POUR IMPUTER A X... L'ENTIERE RESPONSABILITE DE L'ACCIDENT LA COUR D'APPEL ENONCE QU'IL N'A PAS ETE MAITRE DE SA VITESSE ALORS QUE LES CONDITIONS DE VISIBILITE ETAIENT INSUFFISANTES EN CET ENDROIT QU'IL CONNAISSAIT BIEN ;
QUE PAR SUITE D'UN MANQUE DE REFLEXE IL N'A FREINE QU'APRES AVOIR PARCOURU 40 METRES ;
QU'EN REVANCHE Y... N'A COMMIS AUCUNE FAUTE ;
QU'IL A MARQUE UN TEMPS D'ARRET AU SIGNAL STOP ET NE S'EST ENGAGE SUR LA ROUTE NATIONALE QU'APRES S'ETRE ASSURE QU'IL POUVAIT LE FAIRE SANS DANGER ;
MAIS ATTENDU QUE SI EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS LA COUR D'APPEL, QUI A CARACTERISE LA FAUTE DE X... ET SON LIEN DE CAUSALITE AVEC L'ACCIDENT, ETAIT FONDEE A RETENIR SA RESPONSABILITE, ELLE N'A PU, SANS MECONNAITRE LES PRESCRIPTIONS DU CODE DE LA ROUTE, DECIDER QU'AUCUNE FAUTE NE SAURAIT ETRE RETENUE A LA CHARGE DE Y... ;
QU'EN EFFET, AUX TERMES DE L'ARTICLE R 5 DUDIT CODE, LORSQUE LA CHAUSSEE COMPORTE DES VOIES DELIMITEES PAR DES LIGNES CONTINUES, LE CONDUCTEUR SUIVANT UNE TELLE VOIE NE PEUT FRANCHIR NI CHEVAUCHER CES LIGNES, QUE CETTE DISPOSITION IMPERATIVE ET ABSOLUE S'IMPOSE A TOUT USAGER QUELLE QUE SOIT LA MANOEUVRE QU'IL ENTREPRENNE SUR LADITE CHAUSSEE ;
QU'AINSI LA COUR D'APPEL, PAR SA DECISION, A, AU REGARD DE Y..., MECONNU ET PAR LA MEME VIOLE LES TEXTES VISES AU MOYEN ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE ROUEN DU 5 OCTOBRE 1964 EN CE QU'IL A DECLARE X... ENTIEREMENT RESPONSABLE DE L'ACCIDENT ET L'A DEBOUTE DE SON ACTION CIVILE, LES AUTRES DISPOSITIONS DUDIT ARRET ETANT EXPRESSEMENT MAINTENUES, ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI, DANS LA MESURE DE LA CASSATION PRONONCEE, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES EN L'ETAT DEVANT LA COUR D'APPEL DE CAEN. PRESIDENT : M ZAMBEAUX - RAPPORTEUR : M POMPEI - AVOCAT GENERAL : M RELIQUET - AVOCATS : MM MARTIN-MARTINIERE, BROUCHOT, ROUSSEAU ET DESACHE.
