SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SES DIVERSES BRANCHES : ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE (PARIS, 27 JUIN 1960) QUE LA COMPAGNIE DES MESSAGERIES MARITIMES (C M M), CONSTITUEE EN 1948 PAR LES APPORTS DE L'ETAT ET DE L'ANCIENNE COMPAGNIE DES MESSAGERIES MARITIMES, DEVENUE DEPUIS LORS LA COMPAGNIE DES TRANSPORTS OCEANIQUES (C T O), EST PROTEGEE CONTRE LA CONCURRENCE DE SA DEVANCIERE PAR L'ARTICLE 15, PARAGRAPHE C, DE LA LOI DU 28 FEVRIER 1948 QUI DISPOSE QUE "L'ANCIENNE COMPAGNIE DES MESSAGERIES MARITIMES, SUBSISTANT SOUS LA DENOMINATION QU'ELLE PRENDRA, NE POURRA, PENDANT UNE PERIODE DE CINQUANTE ANNEES ENTIERES, A COMPTER DE LA PROMULGATION DE LA PRESENTE LOI, CREER OU ENTRETENIR, SOIT DIRECTEMENT, OU INDIRECTEMENT, DES LIGNES REGULIERES SUR LES TRAFICS REGULIERS DE LA SOCIETE CREEE PAR LE PRESENT ARTICLE, SAUF AUTORISATION DU MINISTRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES TRANSPORTS" ;
QU'EN JUIN 1958, LA C M M, QUI ASSURE UN TRAFIC REGULIER DE TRANPORT DE MARCHANDISES ENTRE SINGAPOUR ET LES PORTS DE L'EUROPE DU NORD, A ASSIGNE LA C T O EN PAYEMENT DE DOMMAGES-INTERETS POUR CONCURRENCE ILLEGALE ET ILLICITE ET DEMANDE QUE SOIT INTERDIT SOUS ASTREINTE A LA C T O TOUT TRAFIC SUR LA LIGNE DESSERVANT SINGAPOUR, LES PORTS MALAIS, LES PORTS DE LA MER ROUGE ET CEUX DE L'EUROPE DU NORD ;
QUE LA C T O A REPLIQUE QUE SES ACTIVITES DANS CETTE REGION DU MONDE CONSISTENT UNIQUEMENT DANS UN TRAFIC INDONESIE-EUROPE DU NORD ET QUE SEULS LES DANGERS RENCONTRES PAR LA NAVIGATION EN 1958 DANS LES EAUX INDONESIENNES L'ONT CONTRAINTE A FAIRE ALORS RECRUTER LE FRET EN INDONESIE PAR LA GREAT EASTERN TRADING COMPANY (G E T C) ET A LE TRANSBORDER A SINGAPOUR ;
QU'EN CONSEQUENCE, LA C T O A FORME UNE DEMANDE RECONVENTIONNELLE EN REPARATION DU PREJUDICE SUBI PAR ELLE DU FAIT DES AGISSEMENTS DE LA C M M ;
QUE, PAR JUGEMENT DU 9 MARS 1959, LE TRIBUNAL DE COMMERCE DE LA SEINE A DECLARE LES PARTIES MAL FONDEES EN LEURS DEMANDES TANT PRINCIPALE QUE RECONVENTIONNELLE ;
ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR CONFIRME LE REJET DES DEMANDES DE LA C M M, AU MOTIF, D'UNE PART, QUE LA C M M N'A PAS RAPPORTE LA PREUVE QU'EN FAIT, LA C T O AIT JAMAIS CHARGE A SINGAPOUR A DESTINATION DE L'EUROPE DU NORD DES MARCHANDISES AUTRES QUE CELLES SPECIALEMENT RECRUTEES POUR ELLE EN INDONESIE PAR LA G E T C, ET AU MOTIF, D'AUTRE PART, QU'UN TRAFIC REGULIER INDONESIE -EUROPE DU NORD, MEME S'IL COMPORTE UN TRANSBORDEMENT A SINGAPOUR, N'EST PAS UN TRAFIC SINGAPOUR-EUROPE DU NORD ET N'EQUIVAUT PAS A LA CREATION INDIRECTE D'UNE LIGNE REGULIERE SINGAPOUR-EUROPE DU NORD, ALORS, D'UNE PART, QUE LE FAIT DE FAIRE CIRCULER DES NAVIRES ENTRE DEUX LIEUX DONNES, EN CHARGEANT DES MARCHANDISES AU DEPART, POUR LES DECHARGER A L'ARRIVEE, CONSTITUERAIT PAR DEFINITION L'ENTRETIEN D'UNE LIGNE REGULIERE, EN SORTE QU'IL SERAIT CONTRADICTOIRE D'ADMETTRE QUE LA C T O CHARGE REGULIEREMENT DES MARCHANDISES SUR SES NAVIRES A SINGAPOUR POUR LES DECHARGER EN EUROPE DU NORD, ET DE PRETENDRE EN MEME TEMPS QU'ELLE N'ENTRETIENT ENTRE CES DEUX LIEUX GEOGRAPHIQUES AUCUNE LIGNE REGULIERE, ALORS, D'AUTRE PART, QUE L'EXISTENCE D'UN TRAFIC INDONESIE-EUROPE DU NORD, A LA SUPPOSER ADMISE, N'EXCLURAIT AUCUNEMENT QUE CE TRAFIC UTILISAT, APRES TRANSBORDEMENT, UNE LIGNE DE NAVIGATION SINGAPOUR-EUROPE DU NORD, CIRCONSTANCE QUI SERAIT LA SEULE A CONSIDERER ETANT DONNE LES TERMES PRECIS ET FORMELS DE LA LOI, ALORS, EN EFFET, QUE LA SOLUTION RETENUE PAR L'ARRET SUPPOSERAIT QUE LE LEGISLATEUR AIT UTILISE COMME SYNONYMES LES MOTS LIGNE ET TRAFIC, DONT LE SENS SERAIT POURTANT DIFFERENT, SUPPOSITION QUI NE POURRAIT ETRE RETENUE DES LORS QUE LE TEXTE DE LA LOI S'ECLAIRERAIT EN DONNANT A CES VOCABLES LEUR SENS PRECIS, TANDIS QUE LE LEGISLATEUR AURAIT VISIBLEMENT EU EGARD A L'IMPOSSIBILITE DE METTRE A LA CHARGE DE LA C M M LA PREUVE DE TRAFICS COMMERCIAUX COMPLEXES VIS-A-VIS DESQUELS ELLE SERAIT UN TIERS, ET AURAIT DONC RECOURU AU CRITERE INDISCUTABLE QUE CONSTITUERAIT L'ENTRETIEN D'UNE LIGNE DE NAVIGATION REGULIERE SUR UN ITINERAIRE DONNE ;
ALORS, AU SURPLUS, QUE L'ESPRIT EVIDENT DU TEXTE LEGAL SERAIT D'EMPECHER LA C T O DE CONCURRENCER EN AUCUNE MANIERE LA C M M, A LA CREATION DE LAQUELLE ELLE A CONCOURU ET QU'IL SERAIT CLAIR QUE SI LES CIRCONSTANCES DE FAIT IMPOSAIENT DE CHARGER A SINGAPOUR LES MARCHANDISES PROVENANT D'INDONESIE, AINSI QUE LE SOULIGNE L'ARRET ATTAQUE, CETTE CIRCONSTANCE AURAIT BENEFICIE NORMALEMENT A LA C M M SI LA C T O N'AVAIT PAS CREE DE LIGNE DESSERVANT SINGAPOUR, D'OU IL SUIVRAIT QUE L'EXPLOITATION D'UNE TELLE LIGNE CONSTITUERAIT NECESSAIREMENT LA CONCURRENCE QUE LE LEGISLATEUR AURAIT ENTENDU RENDRE IMPOSSIBLE ;
MAIS ATTENDU QUE L'INTERDICTION LEGALE DE NON-CONCURRENCE APPLICABLE EN L'ESPECE VISE L'EXPLOITATION DE LIGNES REGULIERES SUR LES TRAFICS REGULIERS DE LA C M M ;
QUE, DES LORS, L'ARRET, APRES AVOIR CONSTATE QUE LA C M M N'A JAMAIS ASSURE DE LIGNE NI DE TRAFIC REGULIER D'INDONESIE EN EUROPE DU NORD OU VICE VERSA, EN A DEDUIT A BON DROIT QUE LA C T O NE VIOLAIT PAS SON OBLIGATION LEGALE DE NON-CONCURRENCE PAR SON TRAFIC REGULIER INDONESIE-EUROPE DU NORD ;
QUE, SI L'ARRET CONSTATE QUE LE POINT DE DEPART DES NAVIRES DE LA C T O POUR CE TRAFIC A ETE EN FAIT EN 1958 SINGAPOUR ET NON L'INDONESIE, IL RELEVE QUE, C'EST "EN RAISON DES DIFFICULTES PARTICULIERES A LA NAVIGATION DANS LES EAUX INDONESIENNES" ET "QU'EN FAIT, LE TRAFIC (EST) ASSURE DE BOUT EN BOUT D'INDONESIE JUSQU'AUX PORTS DE L'EUROPE DU NORD PAR LA C T O" ;
QUE L'ARRET FAIT RESSORTIR QUE LE TRANSBORDEMENT DES MARCHANDISES A SINGAPOUR N'A PAS EU POUR EFFET LE DECHARGEMENT DANS CE PORT SUR LES NAVIRES DE LA C T O DE MARCHANDISES "EN QUETE DE TRANSPORT" POUR L'EUROPE DU NORD ET "AUTRES QUE CELLES SPECIALEMENT RECRUTEES POUR LA C T O EN INDONESIE PAR LA G E T C", ET QU'IL CONSTATE QUE LES ACCORDS DE FRET DES CONFERENCES DES GRANDES COMPAGNIES DE NAVIGATION ASSIMILENT, DE LEUR COTE, LE TRAFIC DIRECT BANGKOK-ETATS-UNIS AU TRAFIC BANGKOK-ETATS-UNIS AVEC TRANSBORDEMENT A SINGAPOUR ;
QUE DE CES CONSTATATIONS, LA COUR D'APPEL A DEDUIT, PAR UNE APPRECIATION SOUVERAINE DES ELEMENTS DE PREUVE QUI LUI ETAIENT SOUMIS, QUE LE TRANSBORDEMENT A SINGAPOUR N'ENTRAINAIT PAS LA CREATION, MEME INDIRECTE, D'UNE LIGNE REGULIERE AU DEPART DE SINGAPOUR ET N'A NULLEMENT MECONNU NI LE SENS DES TERMES DE L'ARTICLE 15, PARAGRAPHE C, SUS-ENONCE, NI LES REGLES RELATIVES A LA CHARGE DE LA PREUVE ;
QUE LE MOYEN N'EST DONC PAS FONDE ;
MAIS SUR LE SECOND MOYEN : VU L'ARTICLE 1382 DU CODE CIVIL ;
ATTENDU QUE POUR CONDAMNER LA C M M A PAYER A LA C T O UN FRANC DE DOMMAGES-INTERETS, L'ARRET SE BORNE A DECLARER QUE L'ACTION EN CONCURRENCE ILLICITE A ETE ENGAGEE PAR LA C M M "SUR DES BASES INSUFFISANTES" ;
ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI, SANS RELEVER A L'ENCONTRE DE LA C M M LES ELEMENTS CONSTITUTIFS D'UNE FAUTE EXCEDANT L'EXERCICE LEGITIME DE SON DROIT, LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A CE CHEF DE SA DECISION ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, MAIS SEULEMENT DANS LES LIMITES DU SECOND MOYEN, L'ARRET RENDU LE 27 JUIN 1960 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS ;
REMET, EN CONSEQUENCE, QUANT A CE, LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT ARRET, ET POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LA COUR D'APPEL DE RENNES.
