| France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 juillet 1964, JURITEXT000006966898

ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR DEBOUTE LEFEVRE DE LA DEMANDE QU'IL A FORMEE CONTRE LA SOCIETE LUTERMA, DONT IL AVAIT ETE L'INGENIEUR EN CHEF CHARGE DES SERVICES TECHNIQUES, EN PAYEMENT DE 130 000 FRANCS A TITRE DE DOMMAGES-INTERETS POUR RUPTURE ABUSIVE DE SON CONTRAT DE TRAVAIL, AU MOTIF QU'IL NE RAPPORTAIT PAS LA PREUVE DE L'INEXACTITUDE DE LA REORGANISATION DE L'ENTREPRISE INVOQUEE PAR LA SOCIETE A L'APPUI DE SA DECISION DE LE LICENCIER, ALORS QU'EN DONNANT DE CETTE REORGANISATION UNE ANALYSE EXTREMEMENT SUCCINCTE QUI N'AVAIT ETE PROPOSEE NI PAR L'UNE NI PAR L'AUTRE DES PARTIES EN CAUSE, L'ARRET ATTAQUE, QUI EST INSUFFISAMMENT MOTIVE, N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION;

MAIS ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE CONSTATE D'UNE PART QUE, PAR UNE LETTRE DU 23 DECEMBRE 1960, LA SOCIETE LUTERMA A LICENCIE LEFEVRE QUI DIRIGEAIT SES SERVICES TECHNIQUES DEPUIS LE 1ER JUILLET 1952 AU MOTIF QU'ELLE REORGANISAIT SON SERVICE "ENTRETIEN ET EQUIPEMENT GENERAL", D'AUTRE PART QUE CETTE REORGANISATION ETAIT REELLE ET QUE LEFEVRE N'APPORTAIT AUCUNE JUSTIFICATION DE L'INEXACTITUDE PRETENDUE DE CE MOTIF DU LICENCIEMENT;

QU'EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS, LES JUGES DU FOND ONT PU ESTIMER QUE LA SOCIETE LUTERMA N'AVAIT FAIT QU'USER DU DROIT QU'A TOUT EMPLOYEUR DE REORGANISER SON ENTREPRISE DANS L'INTERET DE LA BONNE MARCHE DE CELLE-CI ET DE PRENDRE LES MESURES QU'IL JUGE UTILES A CET EFFET;

QU'ILS ONT AINSI DONNE UNE BASE LEGALE A LEUR DECISION;

SUR LE SECOND MOYEN, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 23 DU LIVRE 1ER DU CODE DU TRAVAIL, 1134 ET 1382 DU CODE CIVIL, 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS, DENATURATION DES CONVENTIONS, MANQUE DE BASE LEGALE;

ATTENDU QU'IL EST ENCORE FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR REFUSE DE CONSIDERER QUE LE LICENCIEMENT DE LEFEVRE AVAIT ETE ENTACHE DE LEGERETE BLAMABLE BIEN QU'IL SOIT INTERVENU AVANT LE TERME DU REMBOURSEMENT D'UN PRET A LUI CONSENTI PAR LA SOCIETE LUTERMA POUR SON RELOGEMENT, AU MOTIF QU'AUCUN ENGAGEMENT N'AVAIT ETE PRIS PAR CETTE SOCIETE DE "GARANTIR SON EMPLOI AUDIT LEFEVRE PENDANT LA DUREE DU REMBOURSEMENT DU PRET", ALORS QUE CE PRET CONSTITUAIT UNE VERITABLE GARANTIE DE L'EMPLOI ET QUE C'EST PAR UNE DENATURATION DES CONVENTIONS DES PARTIES QUE L'ARRET ENTREPRIS EN A DECIDE AUTREMENT;

MAIS ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE CONSTATE QUE, D'UNE PART, LE PRET SANS INTERET DE 5 MILLIONS DE FRANCS CONSENTI A LEFEVRE LE 5 MARS 1957 PAR LA SOCIETE LUTERMA POUR L'ACHAT D'UN APPARTEMENT ETAIT REMBOURSABLE AUX ECHEANCES DU PREMIER AVRIL 1958, 1959, 1960, 1961 ET 1962 AVEC CETTE STIPULATION QU'AU CAS DE RUPTURE DU CONTRAT LES SOMMES RESTANT DUES PRODUIRAIENT UN INTERET DE 5%, D'AUTRE PART QUE, SI CETTE ACQUISITION D'APPARTEMENT PAR LEFEVRE S'EST ACCOMPAGNEE DE LA REMISE A LA DISPOSITION DE LA SOCIETE DU LOGEMENT DE FONCTION, QUI ETAIT ACCESSOIRE DE SON CONTRAT DE TRAVAIL, CELLE-CI N'A PRIS AUCUN ENGAGEMENT QUANT A LA GARANTIE DE L'EMPLOI DE SON SALARIE;

QU'EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS, LES JUGES DU FOND ONT PU, SANS DENATURER LES CONVENTIONS INTERVENUES, DECIDER QUE CELLES-CI N'AVAIENT APPORTE AUCUNE RESTRICTION AU DROIT DE LA SOCIETE LUTERMA DE METTRE FIN AU CONTRAT DE TRAVAIL A DUREE INDETERMINEE DE LEFEVRE ET QUE LA CIRCONSTANCE QUE SON LICENCIEMENT SOIT INTERVENU AVANT LE TOTAL REMBOURSEMENT DU PRET QU'ELLE LUI AVAIT CONSENTI N'APPORTAIT PAS LA PREUVE D'UNE LEGERETE BLAMABLE DANS L'EXERCICE DE CE DROIT :

QUE LE MOYEN N'EST DONC PAS FONDE;

SUR LE TROISIEME MOYEN, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 9 ET 48 DE LA CONVENTION COLLECTIVE DU TRAVAIL DU BOIS ET DE SCIERIE, DES ARTICLES 1134 DU CODE CIVIL , 23 DU LIVRE 1ER DU CODE DU TRAVAIL, 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS MANQUE DE BASE LEGALE;

ATTENDU QUE LE POURVOI FAIT EN OUTRE GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR OMIS DE S'ASSURER DE LA REGULARITE FORMELLE DU LICENCIEMENT DE LEFEVRE, ET NOTAMMENT DU POINT DE SAVOIR SI LES FORMALITES PRESCRITES PAR LA CONVENTION COLLECTIVE APPLICABLE AVAIENT BIEN ETE RESPECTEES, ALORS QUE CETTE CONVENTION A PREVU DES GARANTIES AU PROFIT DES SALARIES MENACES D'UN LICENCIEMENT ET QUE DE LEUR OBSERVATION OU INOBSERVATION DEPEND LA REGULARITE DE LA DECISION DE L'EMPLOYEUR;

MAIS ATTENDU QUE CE MOYEN MELANGE DE FAIT ET DE DROIT N'A PAS ETE PRESENTE DEVANT LES JUGES D'APPEL ET NE SAURAIT DES LORS ETRE UTILEMENT OPPOSE POUR LA PREMIERE FOIS DEVANT LA COUR DE CASSATION;

'OU IL SUIT QU'IL N'EST PAS RECEVABLE;

PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 19 MARS 1962 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.