Sur le premier moyen :
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué qu'en juin 1956, lors de la date anniversaire de naissance de son épouse née Herta X..., le mari, Y..., a acheté une voiture automobile de marque "Mercédès" ; qu'il fit rédiger toutes pièces administratives et la police d'assurance au nom de sa femme ; que lors de l'introduction de la voiture en France, il la fit immatriculer au même nom ; qu'à la suite de la mésentente entre les époux, qui se traduisit par une instance en divorce, le mari reprit la voiture dont il fut ultérieurement constitué séquestre en attendant qu'il soit statué sur la propriété ; que, sur l'action en revendication de la dame X..., la Cour a considéré qu'il s'agissait, en l'espèce, d'un présent d'usage, fait par un mari disposant d'importants revenus, et que dès lors la donation ainsi faite était irrévocable ;
Attendu que le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir omis de répondre à la fin de non-recevoir tirée de l'article 242 du Code civil, qui rendait irrecevable la demande en revendication de propriété de la dame X... pendant l'instance en divorce ; Mais attendu que la Cour, en indiquant que les époux étaient mariés sous le régime de séparation de biens, donc restés propriétaires de leurs biens, a répondu implicitement au moyen en écartant la fin de non-recevoir invoquée ; que le moyen ne saurait être accueilli ; Sur le second moyen pris en ses deux branches :
Attendu que le pourvoi reproche aux juges du fond d'avoir méconnu l'autorité de la chose jugée qui s'attachait à l'arrêt du 9 juillet 1958 nommant le mari séquestre de la voiture litigieuse pendant l'instance en divorce et jusqu'à la liquidation des biens des époux ; Mais attendu que c'est à tort que le pourvoi prétend faire reconnaître l'autorité de la chose jugée, à un arrêt statuant au provisoire, sur appel d'une ordonnance de référé désignant séquestre, et renvoyant les parties à se pourvoir au principal sur la revendication de propriété et en déduire qu'il interdisait toute action pendant l'instance en divorce ; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le troisième moyen pris en ses quatre branches :
Attendu que, d'après le pourvoi, c'est à tort que les juges du second degré ont reconnu à une prétendue donation manuelle le caractère d'un présent d'usage ; qu'ils auraient interverti la charge de la preuve qui incombait à la dame X... et qu'enfin, ils auraient inexactement déclaré que le mari ne contestait pas que l'épouse ait eu la possession paisible et publique de l'automobile ; Mais attendu que les juges du fond, ayant constaté que la dame X... se prévalait d'un don manuel, ont examiné les titres et circonstances de fait dont elle entendait déduire la preuve de la donation, à défaut de la possession de la voiture dont son mari l'avait privée à la suite de leur mésentente ; que c'est au vu de la preuve ainsi rapportée par elle, et alors qu'ils constataient que le mari ne rapportait pas la preuve contraire notamment du défaut d'intention libérale et par une appréciation souveraine qu'ils en ont déduit qu'il y avait eu, au profit de l'épouse, un don manuel présentant les caractères d'un présent d'usage ; qu'il était dès lors sans intérêt de faire appel à la possession comme élément de preuve du don ; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le quatrième moyen, pris en ses trois branches :
Attendu, enfin, qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir écarté les conclusions invoquant le caractère révocable de la libéralité et déclaré que le mari n'avait jamais tenté de la révoquer, alors qu'il n'était pas constaté, en ce qui concerne le présent d'usage, que le prix d'achat était en rapport avec ses revenus ; qu'en outre, ce serait en violation de l'article 1095 du Code civil que la Cour se serait refusée à prononcer la révocation alors que le mari avait manifesté sa volonté de révoquer en reprenant la voiture ; Mais attendu que la Cour, en constatant expressément que Y... jouissait de revenus très importants, qu'il possédait déjà deux automobiles, et qu'il résultait des circonstances de la cause que c'était à l'occasion d'un anniversaire de naissance que la voiture avait été donnée, a légalement caractérisé le présent d'usage ; d'où il s'ensuit que le don ainsi fait était irrévocable comme elle l'a déclaré ; que c'est dès lors, pour répondre aux conclusions de Labbé-Laurant, que l'arrêt a indiqué que celui-ci n'avait jamais tenté de révoquer la libéralité ; qu'ainsi, le moyen ne saurait être accueilli ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 18 février 1959 par la Cour d'appel de Toulouse. N° 59-11.950 Y... c/ dame Y.... Premier président : M. Bornet - Rapporteur : M. Lapeire - Avocat général : M. Lebègue - Avocats : MM. Compain et Roques. A RAPPROCHER :
Sur le n° 1 :
3 mai 1960, Bull. 1960, I, n° 231, p. 190. Sur le n° 3 :
20 juin 1961, Bull. 1961, I, n° 326 (I), p. 259. Sur le n° 4 :
30 décembre 1952, Bull. 1952, I, n° 344, p. 283.