SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SA PREMIERE BRANCHE, DE LA VIOLATION DES ARTICLES 23 DU LIVRE 1ER DU CODE DU TRAVAIL, 1382 ET SUIVANTS DU CODE CIVIL, 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DENATURATION DES CONCLUSIONS DES PARTIES, DEFAUT, INSUFFISANCE ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
ATTENDU QUE CHAMBRIER, ENTREPRENEUR DE BATIMENTS, PRETENDANT AVOIR CONSTATE L'INCAPACITE DE SON EMPLOYE CAILLOT PENDANT UN CONGE DE MALADIE PRIS PAR CELUI-CI, LUI A REFUSE L'ACCES DE SON BUREAU A SON RETOUR DE CONGE, ET LUI A OFFERT DE LE RECLASSER DANS UN AUTRE POSTE, DANS DES CONDITIONS A DEBATTRE ;
QU'IL FAIT GRIEF AU JUGEMENT ATTAQUE D'AVOIR DECIDE QU'IL AVAIT AINSI UNILATERALEMENT ROMPU LE CONTRAT DE TRAVAIL LITIGIEUX, ET DE L'AVOIR, EN CONSEQUENCE, CONDAMNE A PAYER A CAILLOT TROIS MOIS DE SALAIRES A TITRE D'INDEMNITE DE PREAVIS, ALORS QU'IL N'ETAIT PAS ETABLI QUE LA MODIFICATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL AIT ETE PREJUDICIABLE A CAILLOT, NI QUE LE DELAI CONGE D'USAGE FUT DE TROIS MOIS ;
MAIS ATTENDU QU'IL RESULTE TANT DE LA DECISION ATTAQUEE QUE DE LA SENTENCE PRUD'HOMALE DONT ELLE A CONFIRME LES MOTIFS NON CONTRAIRES, QUE CHAMBRIER AVAIT ESSAYE D'IMPOSER A CAILLOT, QU'IL EMPLOYAIT DEPUIS 1930, ET SPECIALEMENT DEPUIS DIX ANS DANS FONCTIONS DE FONDE DE POUVOIRS, SON RECLASSEMENT DANS UN EMPLOI DE MAGASINIER NE PRESENTANT PAS LES MEMES AVANTAGES ;
QUE LES JUGES DU FOND ONT EXACTEMENT RELEVE QUE L'OFFRE D'UN EMPLOI INFERIEUR EQUIVALAIT A UN CONGEDIEMENT, DU FAIT DE L'EMPLOYEUR LORSQU'ELLE N'ETAIT PAS ACCEPTEE PAR LE SALARIE, ET QUE CELUI-CI, EN RAISON DE LA BRUSQUE RUPTURE DES RELATIONS DE TRAVAIL, AVAIT DROIT A L'INDEMNITE DE DELAI-CONGE ;
ET ATTENDU QU'EN RECONNAISSANT PAR AILLEURS A CAILLOT LA QUALITE DE CADRE, ILS ONT JUSTIFIE LEUR DECISION DE FIXER A TROIS MOIS DE SALAIRES LE MONTANT DE CETTE INDEMNITE ;
QU'AINSI, LE PREMIER MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI EN SA PREMIERE BRANCHE ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 4 ET 4 BIS DE LA CONVENTION COLLECTIVE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE DES CADRES DU 14 MARS 1947, DE L'ARTICLE 1134 DU CODE CIVIL ET DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT ET INSUFFISANCE DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF AU JUGEMENT D'AVOIR DECIDE QUE CAILLOT AVAIT LA QUALITE DE CADRE ET D'AVOIR CONDAMNE CHAMBRIER A LUI REMETTRE UN CERTIFICAT CONFORME ET A JUSTIFIER DU PAYEMENT DES COTISATIONS PREVUES PAR LA CONVENTION COLLECTIVE DES CADRES, MOTIFS PRIS, D'UNE PART, DE CE QU'IL RESULTERAIT D'UNE PROCURATION REMISE A CAILLOT QUE CELUI-CI AURAIT ETE FONDE DE POUVOIRS, ET, D'AUTRE PART, DE CE QUE CET EMPLOYE AURAIT PERCU UN SALAIRE PLUS ELEVE QUE CELUI CORRESPONDANT A LA COTE 300 DES ARRETES PARODI, ALORS QUE CHAMBRIER AVAIT FAIT VALOIR DANS DES CONCLUSIONS LAISSEES SANS REPONSE, QUE LES PROCURATIONS DONNEES A CAILLOT AVAIENT ETE REVOQUEES AVANT D'ETRE UTILISEES ET NE POUVAIENT ETRE RETENUES POUR DETERMINER QUELLES AVAIENT ETE SES ATTRIBUTIONS, ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE LES APPOINTEMENTS DE CAILLOT, AU RESTE MODEREMENT ELEVES, POUVAIENT D'AUTANT MOINS ETRE REVELATEURS DE LA NATURE ET DE L'IMPORTANCE DE SES FONCTIONS QU'ILS AVAIENT ETE FIXES, SELON LES CONSTATATIONS MEMES DU JUGEMENT ATTAQUE COMPTE TENU DE L'ANCIENNETE DE CET EMPLOYE ;
MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QUE CONTRAIREMENT AUX ALLEGATIONS DU MOYEN, CHAMBRIER N'A PAS SOUTENU QUE LA PROCURATION GENERALE NOTARIEE X... EN 1946 A CAILLOT AVAIT ETE REVOQUEE, MAIS SEULEMENT QU'IL N'EN AVAIT PAS ETE FAIT USAGE ;
QU'EN REPONSE A SES CONCLUSIONS, LES PREMIERS JUGES, PAR DES MOTIFS ADOPTES PAR LA DECISION ENTREPRISE, ONT ENONCE QU'IL RESULTAIT DES EXPLICATIONS DES PARTIES ET DES PIECES PRODUITES QUE CAILLOT AVAIT AU MOINS DEPUIS 1946 EXERCE LES FONCTIONS DE FONDE DE POUVOIRS PREVUES PAR CETTE PROCURATION ;
QU'AINSI, LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI EN SA PREMIERE BRANCHE ;
ET ATTENDU, SUR LA SECONDE BRANCHE, QU'EN RETENANT EGALEMENT POUR RECONNAITRE A CAILLOT LA QUALITE DE CADRE, LE FAIT QUE SON SALAIRE ETAIT PLUS ELEVE QUE CELUI CORRESPONDANT A LA COTE 300 DES ARRETES "PARODI", LES JUGES D'APPEL ONT FAIT UNE EXACTE APPLICATION DE L'ARTICLE 4 BIS DE LA CONVENTION COLLECTIVE DU 14 MARS 1947 QUI NE FAIT PAS DE DISTINCTION SUIVANT QUE LES SALARIES ONT BENEFICIE DE CE COEFFICIENT DES LE DEBUT DE LEURS FONCTIONS OU SEULEMENT APRES UN CERTAIN NOMBRE D'ANNEES DE SERVICE ;
QU'AINSI LE MOYEN N'EST FONDE EN AUCUNE DE SES DEUX BRANCHES ;
SUR LE TROISIEME MOYEN, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 1142 ET SUIVANTS ET 1149 DU CODE CIVIL, 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, VIOLATION DE LA LOI, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
ATTENDU QUE, VAINEMENT ENCORE, CHAMBRIER REPROCHE AU JUGEMENT ATTAQUE DE L'AVOIR CONDAMNE A REMETTRE A CAILLOT UN CERTIFICAT DE TRAVAIL ET LA JUSTIFICATION DU PAYEMENT DES COTISATIONS A LA CAISSE NATIONALE DE PREVOYANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (CADRES) SOUS UNE ASTREINTE NON COMMINATOIRE DE 2.000 FRANCS PAR JOUR DE RETARD, SANS JUSTIFIER QUE LA SOMME AINSI FIXEE REPRESENTE LE MONTANT DU PREJUDICE EVENTUELLEMENT CAUSE AU CREANCIER PAR LE RETARD DU DEBITEUR ;
QU'EN EFFET, CHAMBRIER N'AYANT PAS CRITIQUE DEVANT LES JUGES D'APPEL L'IMPORTANCE NI LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DU PREJUDICE SUBI PAR CAILLOT DE CE CHEF, TEL QU'IL AVAIT ETE APPRECIE PAR LES PREMIERS JUGES DONT LA DECISION A ETE CONFIRMEE PUREMENT ET SIMPLEMENT SUR CE POINT PAR LE JUGEMENT ATTAQUE, N'EST PLUS RECEVABLE A DISCUTER CETTE EVALUATION DEVANT LA COUR DE CASSATION ;
QU'AINSI LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;
MAIS SUR LA SECONDE BRANCHE DU PREMIER MOYEN : VU LES ARTICLES 23 DU LIVRE 1ER DU CODE DU TRAVAIL ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810 ;
ATTENDU QUE, POUR CONDAMNER CHAMBRIER A PAYER A CAILLOT UN MILLION DE FRANCS DE DOMMAGES-INTERETS POUR CONGEDIEMENT ABUSIF, LA DECISION ATTAQUEE S'EST BORNEE A ENONCER QU'IL ETAIT DIFFICILE D'ADMETTRE QUE CHAMBRIER AYANT DEPUIS VINGT-SIX ANS CAILLOT A SON SERVICE, AIT ATTENDU LA MALADIE DE SON COLLABORATEUR POUR SE RENDRE COMPTE DES INSUFFISANCES GRAVES PAR LUI INVOQUEES POUR JUSTIFIER SA RETROGRADATION, ET QUE, DES LORS QU'IL N'AVAIT PAS ETABLI LE BIEN FONDE DE SES GRIEFS, CETTE RETROGRADATION, NE CORRESPONDANT PAS A L'INTERET DE L'ENTREPRISE ET AYANT ENTRAINE LA RUPTURE DU CONTRAT, EQUIVALAIT A UNE RUPTURE ABUSIVE DU CONTRAT DE TRAVAIL ;
QU'EN STATUANT AINSI, EN ECARTANT LES CONCLUSIONS DE CHAMBRIER QUI OFFRAIT DE PROUVER PAR VOIE D'EXPERTISE DES FAITS PRECIS DE NATURE A ETABLIR LES FAUTES COMMISES PAR CAILLOT, ET ALORS, AU SURPLUS QU'IL APPARTENAIT AU SALARIE CONGEDIE DE PROUVER QUE LA MESURE PRISE A SON ENCONTRE AVAIT ETE INSPIREE PAR UNE INTENTION MALVEILLANTE OU EMPREINTE D'UNE LEGERETE BLAMABLE, LES JUGES D'APPEL ONT VIOLE LES TEXTES SUSVISES ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, MAIS SEULEMENT EN CE QUI CONCERNE LES DOMMAGES-INTERETS POUR CONGEDIEMENT ABUSIF, LE JUGEMENT RENDU LE 5 NOVEMBRE 1957, PAR LE TRIBUNAL CIVIL DE PONT-L'EVEQUE ;
REMET, EN CONSEQUENCE, QUANT A CE, LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT JUGEMENT, ET, POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LISIEUX. NO 58-40.152. CHAMBRIER C/ CAILLOT. PRESIDENT : M. VERDIER. - RAPPORTEUR : M. GRANIE. - AVOCAT GENERAL : M. FENIE. - AVOCATS : MM. COPPER-ROYER ET ROUVIERE. DANS LE MEME SENS : SUR LE NO 2 : 11 JUIN 1959, BULL. 1959, IV, NO 715 (3EME), P. 574. SUR LE NO 3 : 23 MAI 1957, BULL. 1957, IV, NO 575 (2EME), P. 410. A RAPPROCHER : SUR LE NO 1 : 22 AVRIL 1960, BULL. 1960, IV, NO 373 (1ER), P. 289. SUR LE NO 4 : 6 JUIN 1955, BULL. 1955, I, NO 229, P. 197. 9 MAI 1957, BULL. 1957, IV, NO 513, P. 363. 13 JUIN 1958, BULL. 1958, IV, NO 724, P. 539. 8 MARS 1961, BULL. 1961, I, NO 149, P. 119.