SUR LE PREMIER MOYEN : ATTENDU QUE, SELON LES QUALITES ET LES MOTIFS DE L'ARRET ATTAQUE (COUR D'APPEL DE PARIS, 12 MAI 1958) , LA SOCIETE FRANCAISE INDUSTRIELLE ET COMMERCIALE DES PETROLES (S.F.I.C.P.) S'EST, EN 1938, ASSURE LE CONTROLE DE LA SOCIETE ROUMANO-BELGE DES PETROLES, EN ACQUERANT NOTAMMENT 19.000 ACTIONS DE CETTE SOCIETE ;
QUE, PAR UN CONTRAT CONCLU EN 1942 EN TERRITOIRE OCCUPE, LA S.F.I.C.P. A CEDE CES TITRES A LA SOCIETE ALLEMANDE KONTINENTAL OEL, QUI AVAIT ABSORBE LA SOCIETE ROUMANO-BELGE DES PETROLES, ET QU'ELLE A RECU EN PAYEMENT 4.430 ACTIONS DE LA COMPAAGNIE FRANCAISE DES PETROLES DECOMPTEES AU COURS DE 1.800 FRANCS L'UNITE, AINSI QUE LA SOMME DE 4.376.000 FRANCS ;
QU'EN 1950, LA S.F.I.C.F., A ASSIGNE, LA SOCIETE KONTINENTAL OEL ET L'ADMINISTRATION DES DOMAINES, SEQUESTRE DES BIENS DE CETTE SOCIETE, A L'EFFET DE VOIR DECLARER L'INEXISTENCE OU LA NULLITE DE LADITE CESSION ;
QUE LA S.F.I.C.P. N'AYANT PAS SUIVI SUR CETTE INSTANCE ET AYANT RENONCE A SES PRETENTIONS INITIALES, LE DIRECTEUR DES DOMAINES A DE SON COTE POURSUIVI LA RESOLUTION OU L'ANNULATION DE LA CESSION DE 1942 ;
QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A REJETE CETTE DEMANDE ET RECONNU LA VALIDITE DE CE CONTRAT ;
ATTENDU QUE LE POURVOI REPROCHE A LA DECISION ENTREPRISE D'AVOIR ADMIS LA VALIDITE D'UNE VENTE DE VALEURS PETROLIERES, CONCLUE EN 1942EN FRANCE OCCUPEE, ENTRE UNE SOCIETE FRANCAISE ET UNE SOCIETE ALLEMANDE, ALORS QUE LE DECRET DU 1ER SEPTEMBRE 1939 PORTE D'ABORD INTERDICTION GENERALE DE TOUS RAPPORTS AVEC L'ENNEMI, "NONOBSTANT LE LIEU DU CONTRAT ET LES FAITS EVENTUELS, D'OCCUPATION DU TERRITOIRE, SAUF LES EXCEPTIONS LIMITATIVEMENT ENUMEREES" ;
QUE SI CE TEXTE ETEND EN OUTRE L'INTERDICTION AUX RAPPORTS AVEC LES PERSONNES SE TROUVANT SUR LE TERRITOIRE OCCUPE PAR L'ENNEMI, ET CE POUR SUPPRIMER LE COMMERCE DE LA FRANCE NON OCCUPEE AVEC LES ZONES OCCUPEES, CETTE INTERDICTION SPECIALE NE CONTREDIT NI NE SUPPRIME L'INTERDICTION GENERALE, QUE CELLE-CI S'IMPOSAIT DONC AUX FRANCAIS DES ZONES OCCUPEES, DANS LEURS RAPPORTS AVEC L'ENNEMI, ET QUE PAR VOIE DE CONSEQUENCE, LES CONTRATS PASSES AVEC L'ENNEMI EN VIOLATION DE L'INTERDICTION GENERALE DOIVENT ETRE DECLARES NULS ;
ATTENDU QU'APRES AVOIR DISPOSE, DANS SON ARTICLE PREMIER : "TOUT RAPPORT, DIRECT OU PAR PERSONNE INTERPOSEE, SE TROUVE ETT DEMEURE INTERDIT ENTRE FRANCAIS ET ENNEMIS , SOUS RESERVE DES DEROGATIONS PREVUES AUX ARTICLES 15 ET 16", LE DECRET DU 1ER SEPTEMBRE 1939 PRECISE EN SON ARTICLE 2 : "POUR L'APPLICATION DU PRESENT DECRET, SONT REPUTES FRANCAIS ET TRAITES COMME TELS : A. TOUS RESSORTISSANTS FRANCAIS, EN QUELQUE LIEU QU'ILS SE TROUVENT A L'EXCEPTION DE CEUX QUI SE TROUVENT SUR LE TERRITOIRE METROPOLITAIN OU COLONIAL DE L'ENNEMI" ;
QU'ENFIN L'ARTICLE 4 EDICTE : "LES TERRITOIRES OCCUPES PAR L'ENNEMI SERONT, POUR L'APPLICATION DU DECRET-LOI DU 1ER SEPTEMBRE 1939, CONSIDERES COMME FAISANT PARTIE DU TERRITOIRE METROPOLITAIN OU COLONIAL DE L'ENNEMI" ;
ATTENDU QUE CES TEXTES LAISSENT EN DEHORS DE LEURS PREVISIONS LES RAPPORTS INTERVENUS ENTRE DES FRANCAIS ET DES ENNEMIS SE TROUVANT LES UNS ET LES AUTRES SUR LES TERRITOIRES OCCUPES PAR L'ENNEMI ;
ATTENDU DES LORS QUE C'EST A BON DROIT QU'APRES AVOIR RELEVE QUE LE CONTRAT INCRIMINE AVAIT ETE CONCLU, EN TERRITOIRE OCCUPE, PAR UNE SOCIETE FRANCAISE QUI Y AVAIT SON SIEGE, ET UNE SOCIETE ALLEMANDE, LA COUR D'APPEL A DECLARE QUE CET ACTE N'ETAIT PAS FRAPPE DE LA NULLITE EDICTEE PAR L'ARTICLE 5 DU DECRET SUS-DATE ;
QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;
MAIS SUR LE SECOND MOYEN : ET D'ABORD, SUR LA FIN DE NON-RECEVOIR OPPOSEE AUDIT MOYEN ET TIREE DE LA NOUVEAUTE DE CE GRIEF ;
ATTENDU QUE CE MOYEN FAIT ETAT DE LA VIOLATION D'UNE REGLE DE DROIT ET QUE L'EXAMEN DE SON BIEN-FONDE NE NECESSITE L'APPRECIATION D'AUCUN FAIT QUI N'AIT ETE SOUMIS AUX JUGES DU FOND ;
REJETTE LA FIN DE NON-RECEVOIR ;
ET VU L'ARTICLE 6 DU CODE CIVIL ;
ATTENDU QUE, DANS SES CONCLUSIONS D'APPEL, LE DIRECTEUR DES DOMAINES SOUTENAIT QUE "S'AGISSANT D'UN CONTRAT NUL DE PLEIN DROIT TANT PAR APPLICATION DE L'ARTICLE 6 DU CODE CIVIL QUE DE L'ARTICLE 5 DU DECRET SIMPLE DU 1ER SEPTEMBRE 1939, LA NULLITE DOIT PRODUIRE SES EFFETS ET FAIRE DISPARAITRE TOUTE TRACE DU CONTRAT CONCLU" ;
QUE L'ARRET DENONCE S'EST BORNE A DECLARER : "QUE LES RAPPORTS COMMERCIAUX AYANT EXISTE AU COURS DE LA DERNIERE GUERRE ENTRE FRANCAIS ETALLEMANDS EN TERRITOIRE OCCUPE, S'ILS SONT DE NATURE A ETRE SANCTIONNES PAR LA LOI PENALE LORSQUE CERTAINES CONDITIONS SONT REMPLIES, ECHAPPENT AUX DISPOSITIONS DES TEXTES DU 1ER SEPTEMBRE 1939" ET : "QUE LES CONVENTIONS N'AYANT PAS REVETU UN CARACTERE ILLICITE AU MOMENT OU ELLES SONT INTERVENUES, IL NE SAURAIT ETRE FAIT APPLICATION DE L'ARTICLE 6 DU CODE CIVIL" ;
ATTENDU QU'EN NE S'EXPLIQUANT PAS SUR LE POINT DE SAVOIR SI LES DISPOSITIONS DES TEXTES D'ORDRE PUBLIC RELATIFS A LA REPRESSION DU COMMERCE AVEC L'ENNEMI DANS LES TERRITOIRES OCCUPES ETAIENT APPLICABLES EN LA CAUSE, LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE L'ARRET RENDU ENTRE LES PARTIES PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS, LE 12 MAI 1958 ;
REMET DN CONSEQUENCE LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT ARRET ET POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DECANT LA COUR D'APPEL D'AMIENS. NO 58-12.156. CHEF DU SERVICE DES DOMAINES C/ SOCIETE INDUSTRIELLE ET COMMERCIALE DES PETROLES. PRESIDENT : M. LESCOT. - RAPPORTEUR : M. BETOLAUD. - AVOCAT GENERAL : M. GEGOUT. - AVOCATS : MM. GOUTET ET CHEVRIER.