| France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 octobre 1960, JURITEXT000006953672

SUR LE PREMIER MOYEN : VU L'ARTICLE 19 DE LA LOI DU 1ER SEPTEMBRE 1948 ;

ATTENDU QU'AUX TERMES DE CE TEXTE, UN PROPRIETAIRE QUI A ACQUIS A TITRE ONEREUX UN IMMEUBLE DEPUIS QUATRE ANS PEUT ETRE AUTORISE PAR JUSTICE A EXERCER SON DROIT DE REPRISE SUR CELUI-CI, S'IL ETABLIT QUE SON ACQUISITION N'A ETE FAITE QUE POUR SE LOGER OU POUR SATISFAIRE UN INTERET FAMILIAL LEGITIME A L'EXCLUSION DE TOUTE IDEE DE SPECULATION, ET ATTENDU QU'AU SENS DUDIT ARTICLE 19, LA SPECULATION DOIT S'ENTENDRE D'UN BENEFICE ANORMALEMENT IMPORTANT ET RAPIDE ET NON D'UNE OPERATION EVENTUELLEMENT AVANTAGEUSE COMME POURRAIT L'ETRE L'ACQUISITION D'UN IMMEUBLE A CHARGE D'UNE RENTE VIAGERE ;

ATTENDU QUE LE 30 MARS 1953, LES CONSORTS X... SE RENDIRENT ACQUEREURS MOYENNANT LE PAYEMENT D'UNE RENTE VIAGERE D'UN IMMEUBLE A BORDEAUX DANS LEQUEL LA DAME FOURNIER ETAIT LOCATAIRE D'UN APPARTEMENT ;

ATTENDU QUE, LE 14 OCTOBRE 1957, ILS DONNERENT CONGE A CETTE PERSONNE, SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 19 PRECITE, EN RAISON DU MARIAGE DE LEUR FILLE, LAQUELLE CONTINUAIT A VIVRE AVEC EUX DANS UN LOGEMENT NE CORRESPONDANT PAS, EN RAISON DE SON EXIGUITE, AUX BESOINS NORMAUX AINSI QU'AU GOUT D'INDEPENDANCE ET D'AUTONOMIE D'UN JEUNE MENAGE ;

OR ATTENDU QUE PAR JUGEMENT CONFIRMATIF DU 26 JANVIER 1959, LE TRIBUNAL CIVIL DE BORDEAUX REFUSA D'AUTORISER CETTE REPRISE AU MOTIF QUE L'ACQUISITION DE L'IMMEUBLE AVAIT ETE FAITE CONTRE PAYEMENT D'UNE RENTE VIAGERE ET QU'UNE TELLE ACQUISITION, DEPENDANT D'UN EVENEMENT INCERTAIN, COMPORTAIT NECESSAIREMENT UN CARACTERE SPECULATIF NE PERMETTANT PAS D'AUTORISER CETTE REPRISE AVANT DIX ANS REVOLUS ;

ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI, LA DECISION ATTAQUEE A VIOLE PAR FAUSSE APPLICATION L'ARTICLE 19 PRECITE ;

PAR CES MOTIFS, ET SANS QU'IL Y AIT LIEU DE STATUER SUR LE SECOND MOYEN : CASSE ET ANNULE LE JUGEMENT RENDU ENTRE LES PARTIES PAR LE TRIBUNAL CIVIL DE BORDEAUX LE 26 JANVIER 1959 ;

REMET EN CONSEQUENCE LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT JUGEMENT ET, POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LIBOURNE ;

N° 59-20 173 CONSORTS X... C/VEUVE FOURNIER PRESIDENT : M VERDIER - RAPPORTEUR : M DUPIN - AVOCAT GENERAL : M CHERPITEL ;