CASSATION, sur le pourvoi des consorts X..., d'un arrêt rendu le 30 octobre 1933, par la cour d'appel de Paris, au profit du sieur Y....
ARRET
du 8 février 1938.
La Cour,
Ouï, en l'audience publique de ce jour,
M. le conseiller Mazeaud, en son rapport, Maîtres Labbé et Célice, en leurs observations respectives, ainsi que M. Bloch-Laroque, avocat général, en ses conclusions ;
Et après en avoir délibéré en la Chambre du Conseil ;
Sur le moyen unique pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1384, paragraphe 1er du Code civil ;
Attendu que la présomption de responsabilité établie par l'article 1384, paragraphe 1er du Code civil, à l'encontre de celui qui a sous sa garde la chose inanimée qui a causé un dommage à autrui, ne peut être détruite que par la preuve d'un cas fortuit ou de force majeure, ou d'une cause étrangère qui ne lui soit pas imputable ;
Attendu que X... a été renversé et mortellement blessé dans la journée du 25 décembre 1930, boulevard Haussmann, en dehors d'un passage clouté, par l'automobile conduite par Y..., dont ce dernier avait la garde ;
Attendu que, pour rejeter la demande de dommages-intérêts formée par la dame veuve X... et par son fils, l'arrêt attaqué a posé en principe que le fait, par un piéton, de traverser la chaussée sans emprunter les passages aménagés à cet effet, exonère complètement le gardien de l'automobile qui lui a causé un dommage, de la présomption de responsabilité mise à sa charge par l'article 1384, paragraphe 1er du Code civil, motif pris de ce que cette présomption est indivisible et n'admet pas de partage de responsabilité ;
Mais attendu que les dispositions de l'article 1384, paragraphe 1er du Code civil ne font pas obstacle à ce que la responsabilité d'un dommage puisse être partagée entre la victime dont la faute a concouru à l'occasionner et le gardien de la chose qui en demeure présumé responsable pour partie ;
Attendu qu'en décidant le contraire et en déclarant qu'en contrevenant aux dispositions réglementaires destinées à assurer la protection des piétons, X... a commis une imprudence cause exclusive du dommage, qui a exonéré complètement le gardien, l'arrêt attaqué n'a pas justifié sa décision ;
Par ces motifs ;
Et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen,
Casse.