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20/04/1928 | FRANCE | N°JURITEXT000006953023

France | France, Cour de cassation, Chambre civile, 20 avril 1928, JURITEXT000006953023


CASSATION, sur le pourvoi des époux X..., d'un arrêt rendu, le 9 janvier 1924, par la cour d'appel de Paris, au profit du sieur Y....

ARRET.

Du 20 Avril 1928.

LA COUR,

Ouï, en l'audience publique de ce jour, M. le conseiller Lepelletier, en son rapport ; Maîtres Auger et Mihura, avocats des parties, en leurs observations respectives, ainsi que M. Péan, avocat général, en ses conclusions ;

Et après en avoir immédiatement délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Vincent, fermier de divers fonds ruraux,

est décédé le 28 novembre 1905, laissant à sa survivance son fils mineur et sa femme commune en biens ...

CASSATION, sur le pourvoi des époux X..., d'un arrêt rendu, le 9 janvier 1924, par la cour d'appel de Paris, au profit du sieur Y....

ARRET.

Du 20 Avril 1928.

LA COUR,

Ouï, en l'audience publique de ce jour, M. le conseiller Lepelletier, en son rapport ; Maîtres Auger et Mihura, avocats des parties, en leurs observations respectives, ainsi que M. Péan, avocat général, en ses conclusions ;

Et après en avoir immédiatement délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen :

Attendu que Vincent, fermier de divers fonds ruraux, est décédé le 28 novembre 1905, laissant à sa survivance son fils mineur et sa femme commune en biens ; que celle-ci s'est remariée en 1907 ; qu'elle a poursuivi l'exploitation des biens affermés, exploitation qui était encore en cours lors de l'introduction de l'instance ; Attendu que c'est seulement en 1920 que la susnommée a demandé la liquidation et le partage de la communauté ayant existé entre elle et son premier mari, et de la succession de celui-ci ; que l'arrêt attaqué a ordonné que cette liquidation comprendrait, pour sa valeur actuelle, le train de culture, meubles ou objets mobiliers se trouvant sur les propriétés affermées ;

Attendu qu'en statuant ainsi l'arrêt attaqué a fait une exacte application des règles du partage ; qu'à bon droit il a écarté les dispositions de l'article 453 du Code civil, qui régit le cas où le père ou la mère ayant la jouissance légale des biens du mineur, préfère garder les meubles pour les remettre en nature, et qui limite l'obligation pesant sur lui en cas de non-représentation à la valeur estimative au moment de la prise de possession ;

Attendu en effet qu'il résulte, de l'arrêt attaqué que les meubles litigieux consistaient en bétail, instruments aratoires et autres objets servant à l'exploitation du fonds rural dont l'épouse du de cujus a continué d'exécuter le bail à ferme, bail qui était un bien de la communauté restée dans l'indivision ; qu'en cet état des faits, la masse à partager pouvait comprendre les animaux et ustensiles tels qu'ils existaient au moment du partage ; qu'en effet ces animaux et ustensiles forment un ensemble qui a toujours été attaché au service de l'exploitation, qu'il n'y a pas en l'espèce de distinction entre les éléments qui la composent suivant qu'ils existaient déjà en nature lors de l'inventaire, ou qu'ils ont été acquis au fur et à mesure des besoins en remplacement de ceux qui venaient a être vendus ou à disparaître ; d'où il suit que le moyen doit être rejeté.

Sur le deuxième moyen :

Attendu que Vincent a demandé pour la première fois devant la cour, par conclusions d'appel incident, à faire comprendre dans le train de culture, tous les éléments qui, par les règles de l'accession, s'y étaient incorporés ; qu'à tort, d'après le pourvoi, l'arrêt attaqué a fait droit à ces conclusions, lesquelles constituaient une demande nouvelle irrecevable aux termes de l'article 464 ;

Mais attendu qu'en matière de liquidation et de partage, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l'établissement de l'actif et du passif et à la fixation de leurs droits, les demandes formées pour la première fois en appel qui se rattachent aux bases mêmes de la liquidation ont le caractère d'une défense, et dès lors, ne sont pas interdites par l'article 464 ; d'où il suit que le deuxième moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs ;

Rejette les premier et deuxième moyens.

Mais sur le troisième moyen :

Vu les articles 565, 566, 573 du Code civil ;

Attendu que le droit d'accession en matière mobilière ne peut s'exercer que lorsque deux choses appartenant à différents maîtres ont été adjointes ou mélangées de manière à former un tout ;

Attendu que si, aux termes du jugement frappé d'appel, le train de culture à partager devait être composé des objets et animaux achetés au cours de l'indivision pour remplacer ceux qui figuraient à l'inventaire dressé au décès de Vincent père, l'arrêt attaqué a ordonné qu'il comprendrait en outre tous les éléments qui s'y seraient incorporés "d'après les règles de l'accession" ;

Mais attendu qu'un train de culture, bien que formant pratiquement un ensemble destiné à un usage déterminé, ne constitue pas une "chose", au sens des articles susvisés ; que si, parmi les objets qui le composent, il en est qui appartiennent à des tiers, ces éléments, facilement reconnaissables, ne peuvent être considérés comme faisant l'objet d'une adjonction ou d'un mélange ;

D'où il suit que les règles de l'accession ne sont pas applicables à la cause et qu'en statuant comme il l'a fait, l'arrêt attaqué a violé les textes ci-dessus visés ;

Par ces motifs ;

Et sans qu'il soit besoin de statuer sur le quatrième moyen qui tend à la cassation du même chef du dispositif ;

CASSE et ANNULE, mais seulement du chef du dispositif qui a fait droit à l'appel incident de Vincent fils.


Synthèse
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006953023
Date de la décision : 20/04/1928
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

1) PARTAGE DE COMMUNAUTE ET SUCCESSION - Mineurs - Jouissance légale de la mère survivante - Bail à ferme - Exploitation rurale - Train de culture - Non-applicabilité de l'article 453 du Code civil aux éléments acquis - pendant l'indivision - en remplacement de ceux venant à disparaître.

L'article 453 du Code civil n'est pas applicable aux éléments d'un train de culture servant à l'exploitation d'un fonds rural, lorsqu'après la mort du fermier sa veuve a continué, pendant la minorité de l'enfant commun, d'exécuter le bail à ferme qui était un bien de communauté en s'abstenant de provoquer le partage de la succession de son mari et de la communauté. En ce cas, la masse à partager peut comprendre les animaux et ustensiles tels qu'ils existent au moment du partage, sans distinction à faire entre les éléments qui la composent, suivant qu'ils existaient déjà en nature lors de l'inventaire ou qu'ils ont été acquis au fur et à mesure des besoins en remplacement de ceux qui venaient à disparaître.

2) DEMANDE NOUVELLE - Partage - compte - liquidation - Défense - Appel - base de liquidation.

En matière de compte, liquidation et partage, les parties étant respectivement considérées comme demanderesses et défenderesses quant à l'établissement de l'actif et du passif, peuvent former pour la première fois en appel toutes réclamations relatives au compte litigieux et qui sont de nature à en modifier les résultats.

3) ACCESSION EN MATIERE MOBILIERE - Train de culture - Eléments appartenant à des tiers - Non-applicabilité des articles 565 - 566 - 573 du Code civil.

En matière mobilière, le droit d'accession ne peut s'exercer que lorsque deux choses appartenant à différents maîtres ont été adjointes ou mélangées de manière à former un tout ; un train de culture ne constitue pas une "chose" au sens des articles 565, 566 et 573 du Code civil. En conséquence, les règles de l'accession ne sont pas applicables si, parmi les objets qui composent ce train de culture, il en est qui appartiennent à des tiers, ces éléments parfaitement reconnaissables ne pouvant être considérés comme faisant l'objet d'une adjonction ou d'un mélange.


Références :

Code civil 453
Code civil 565, 566, 573

Décision attaquée : Cour d'appel Paris, 09 janvier 1924


Publications
Proposition de citation : Cass. Chambre civile, 20 avr. 1928, pourvoi n°JURITEXT000006953023, Bull. civ. N. 62 p. 128
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles N. 62 p. 128

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1928:JURITEXT000006953023
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