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06/06/1921 | FRANCE | N°JURITEXT000006953019

France | France, Cour de cassation, Chambre civile, 06 juin 1921, JURITEXT000006953019


CASSATION, sur le pourvoi du sieur X..., d'un arrêt rendu, le 8 juillet 1920, par la Cour d'appel de Toulouse, au profit du sieur Y....

ARRET.

Du 6 Juin 1921.

LA COUR,

Ouï, aux audiences publiques des 31 mai et 1er juin 1921, M. le conseiller Ambroise Colin, en son rapport ; Maîtres de Lavergne et Bressolles, avocats des parties, en leurs observations respectives, ainsi que M. Blondel, avocat général, en ses conclusions ;

Et après en avoir délibéré en la chambre du conseil ;

Sur le moyen unique :

Vu les articles 1134 et 1826 du Code

civil ;

Attendu que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont f...

CASSATION, sur le pourvoi du sieur X..., d'un arrêt rendu, le 8 juillet 1920, par la Cour d'appel de Toulouse, au profit du sieur Y....

ARRET.

Du 6 Juin 1921.

LA COUR,

Ouï, aux audiences publiques des 31 mai et 1er juin 1921, M. le conseiller Ambroise Colin, en son rapport ; Maîtres de Lavergne et Bressolles, avocats des parties, en leurs observations respectives, ainsi que M. Blondel, avocat général, en ses conclusions ;

Et après en avoir délibéré en la chambre du conseil ;

Sur le moyen unique :

Vu les articles 1134 et 1826 du Code civil ;

Attendu que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et qu'aucune considération d'équité n'autorise le juge, lorsque ces conventions sont claires et précises, à modifier, sous prétexte de les interpréter, les stipulations qu'elles renferment ;

Attendu qu'à la date du 4 décembre 1910 Y..., propriétaire, a conclu avec X... un contrat de louage à cheptel de fer contenant la clause suivante : "Le pied du capital qui a été pris en charge par le fermier s'élève à la somme de 3000 francs pour le bétail et de 2245 francs pour le troupeau, et c'est de cette valeur, en espèces ou en nature, au choix du propriétaire, qu'il rendra compte à sa sortie" ;

Que cette clause, claire et précise, dérogeait aux clauses du Code civil relatives aux baux à cheptel de fer, contenant un état estimatif des animaux, uniquement en ce qu'elle attribuait au bailleur le droit d'opter, lors de la fin du bail, entre un règlement en espèces ou la restitution en nature, mais que, pour le surplus, elle laissait les parties sous l'empire du droit commun ;

Que, dès lors, le compte de cheptel devait être régi par l'article 1826 du Code civil ;

Attendu qu'aux termes de cette disposition le fermier, à la fin du bail, est tenu de laisser un cheptel "de valeur pareille à celui qu'il a reçu" ; que, s'il y a du déficit, il doit le payer, mais que l'excédent lui appartient ; que, d'une part, aucune distinction n'est faite entre la plus-value apportée au cheptel par les soins ou les améliorations du fermier et celle qui provient de circonstances accidentelles ; que, du rapprochement de l'article 1826 avec l'article 1821, définissant le cheptel de fer celui par lequel le fermier "laissera des bestiaux d'une valeur égale au prix de l'estimation de ceux qu'il aura reçus", il résulte, d'autre part, que la loi a envisagé la valeur vénale du cheptel et non sa puissance comme instrument d'exploitation ;

Que c'est donc à tort que l'arrêt attaqué, au lieu d'attribuer à X... la totalité de la plus-value acquise par le bétail et par le troupeau, a décidé qu'il devrait la partager avec le propriétaire ;

Attendu que la cour d'appel allègue vainement que les parties, en contractant, n'avaient pu prévoir l'augmentation extraordinaire du prix des bestiaux résultant de la guerre de 1914, mais seulement une hausse normale "dont le maximum correspondait évidemment au prix le plus fort du bétail pendant la période des dernières années antérieures à la conclusion du contrat" ;

Attendu, en effet, qu'en s'astreignant à supporter le risque d'une élévation future du cours des bestiaux et du troupeau, contre-partie des risqques pouvant résulter, soit de l'abaissement des mêmes cours, soit de la perte fortuite des animaux et mis à la charge du fermier, Y... s'était fait à lui-même une loi dont il ne pouvait s'affranchir, en alléguant que ses prévisions avaient été trompées ; qu'il lui aurait appartenu de restreindre son engagement à un taux déterminé, mais qu'en induisant cette restriction de circonstances sur lesquelles le bail ne s'était pas expliqué,

l'arrêt attaqué n'a fait que substituer une convention supposée

à la convention exprimée par les contractants ;

En quoi il a violé les textes de loi susvisés ;

Par ces motifs, CASSE,


Synthèse
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006953019
Date de la décision : 06/06/1921
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

BAIL A CHEPTEL - Cheptel de fer - Expiration du bail - Plus-value du cheptel - Attribution - Fermier

Les articles 1821 et 1826 du Code civil, qui imposent au fermier l'obligation de laisser, à l'expiration du bail à cheptel de fer, des bestiaux d'une valeur égale à l'estimation de ceux qu'il a reçus, visent la valeur vénale du cheptel et non sa puissance comme instrument d'exploitation. L'article 1826 du Code civil, d'après lequel l'excédent appartient au fermier, ne fait aucune distinction entre la plus-value apportée au cheptel par les soins ou améliorations du fermier et celle qui provient de circonstances accidentelles. Par suite, lorsqu'il est spécifié au contrat que "le pied de capital qui a été pris en charge par le fermier s'élève à la somme de 3000 francs pour le bétail, et de 2425 francs pour le troupeau, et que c'est de cette valeur en espèces ou en nature, au choix du propriétaire, qu'il rendra compte à sa sortie", cette clause, claire et précise, a pour effet d'attribuer au fermier la totalité de la plus-value acquise par le cheptel. Doit donc être cassé l'arrêt qui décide qu'il devra la partager avec le propriétaire.


Références :

Code civil 1821, 1826

Décision attaquée : Cour d'appel Toulouse, 08 juillet 1920


Publications
Proposition de citation : Cass. Chambre civile, 06 jui. 1921, pourvoi n°JURITEXT000006953019, Bull. civ. N. 95 p. 173
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles N. 95 p. 173

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1921:JURITEXT000006953019
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