2RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL D'ORLÉANS
Rétention Administrative
des Ressortissants Étrangers
ORDONNANCE du 25 AOUT 2024
Minute N°
N° RG 24/02156 - N° Portalis DBVN-V-B7I-HBQZ
(1 pages)
Décision déférée : Juge des libertés et de la détention d'ORLÉANS en date du 22 août 2024 à 12h55
Nous, Alexandre David, président de chambre à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assisté de Fatima Hajbi, greffier, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,
APPELANT :
M. [O] [F] [J]
né le 23 Avril 1989 à [Localité 2] (TUNISIE), de nationalité tunisienne,
actuellement en rétention administrative au centre de rétention administrative d'[Localité 1] dans des locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire,
comparant par visioconférence, assisté par Me Karima HAJJI, avocat au barreau d'ORLEANS
en présence de Monsieur [N] [L], interprète en langue arabe, expert près la cour d'appel d'Orléans, qui a prêté son concours lors de l'audience et du prononcé ;
INTIMÉ :
LA PRÉFECTURE DU LOIRET
non comparante,
représentée par Me Joyce JACQUARD de la SELARL ACTIS AVOCATS, avocats au barreau de VAL-DE-MARNE ;
MINISTÈRE PUBLIC : avisé de la date et de l'heure de l'audience ;
À notre audience publique tenue en visioconférence au Palais de Justice d'Orléans, conformément à l'article L. 743-8 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), le 25 août 2024 à 10 H 20 heures
Statuant en application des articles L. 743-21 à L. 743-23 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), et des articles R. 743-10 à R. 743-20 du même code ;
Vu l'ordonnance rendue le 22 août 2024 à 12h55 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Orléans ordonnant la prolongation du maintien de M. [O] [F] [J] dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de trente jours à compter du ;
Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 22 août 2024 à 17h08 par M. [O] [F] [J] ;
Après avoir entendu :
- Me Karima HAJJI en sa plaidoirie,
- Me Joyce JACQUARD en sa plaidoirie,
- M. [O] [F] [J], en ses observations, ayant eu la parole en dernier ;
AVONS RENDU ce jour, publiquement et contradictoirement, l'ordonnance suivante :
Aux termes de l'article L. 742-4 du Code de l'entrée du séjour et du droit d'asile (CESEDA), « Le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu'à l'article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public ;
2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement
b) de l'absence de moyens de transport.
L'étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l'article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours ».
Selon l'article L. 741-3 du CESEDA : « Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet ».
Il convient de considérer que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qu'il y a lieu d'adopter que le premier juge a statué sur l'ensemble des moyens de fond soulevés devant lui et repris devant la cour, étant observé, au vu des termes de la déclaration d'appel du retenu du 22 août 2024 et des moyens repris lors des débats de ce jour :
Sur le défaut d'accès aux soins
L'incompatibilité médicalement établie de l'état de santé avec la rétention est une circonstance qui autorise le juge judiciaire à mettre fin à la rétention, dans le cadre de son contrôle (2e Civ., 8 avril 2004, pourvoi n°03-50.014).
M. [O] [F] [J] fait valoir que depuis le 23 juillet il demande à voir un médecin, qu'il a mal au ventre et qu'il vomit du sang depuis trois semaines.
Cependant, « l'attestation » qu'il produit aux débats n'est de nature à établir ni que son état de santé serait incompatible avec la rétention ni qu'il ait sollicité un examen médical durant la rétention. En effet, cette attestation est un écrit établi par M. [O] [F] [J] et qui ne suffit pas à démontrer les faits allégués. Il ressort au contraire du registre du CRA que celui-ci a été examiné par un médecin le 23 juillet et le 1er août 2018.
Il en est de même du document qu'il présente à l'audience comme émanant de l'association France Terre d'asile et du courrier de plainte au procureur de la République, ces écrits ne reposant que sur ses propres déclarations.
Il n'est donc pas établi que la prise en charge médicale et matérielle de M. [O] [F] [J] n'ait pas été assurée au sein du centre de rétention.
Il ne résulte pas davantage des éléments du dossier l'existence d'une insécurité de M. [O] [F] [J] au sein du centre de rétention.
Sur le non-respect du droit à une vie privée et familiale, garanti par l'article 8 de la CEDH
Le moyen est inopérant en ce qu'il tend à critiquer l'arrêté de placement en rétention ou la décision d'éloignement.
S'agissant du moyen en ce qu'il vise le maintien en rétention, contrairement à ce qu'il soutient, M. [O] [F] [J] ne justifie pas être convoqué à une audience qui se tiendra le 17 octobre 2024 et qui concerne la garde de son enfant. En effet, l'avis qui lui a été adressé par le cabinet du juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Bourges l'informe que la demande qu'il a formée ne pourra être examinée que s'il fait citer à cette audience son adversaire. Il ne résulte d'aucune pièce du dossier que la rétention de M. [O] [F] [J] l'empêcherait de faire valoir ses droits en justice. Le moyen est écarté.
Sur les diligences de l'administration, M. [O] [F] [J], se prévalant des dispositions de l'article L. 742-4 du CESEDA, estime ces dernières insuffisantes, affirmant que l'administration n'a pas effectué les diligences nécessaires à l'obtention d'un laissez-passer et d'un vol.
La cour rappelle au préalable qu'il n'y a pas lieu d'imposer à l'administration d'effectuer des actes sans réelle effectivité, tels que des relances auprès des consulats, dès lors que celle-ci ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires (1ère Civ. 9 juin 2010, pourvoi n° 09-12.165). En revanche, le juge est tenu de vérifier que les autorités étrangères ont été requises de manière effective.
En l'espèce, il apparaît que le 2 août 2024 M. [O] [F] [J] a refusé d'être extrait du centre de rétention pour se rendre à l'audition consulaire organisée pour lui. L'intéressé avait été examiné la veille par un médecin. Il ne résulte d'aucun élément que son état de santé l'empêchait d'honorer ce rendez-vous ni même qu'il ait invoqué cette circonstance pour expliquer son refus. Il y a donc lieu de retenir qu'il a fait volontairement obstacle à son éloignement.
Il ressort d'un courriel du 9 août 2024 des autorités consulaires tunisiennes, en réponse à un courriel du 24 juillet 2024 de l'autorité administrative, que M. [O] [F] [J] est en cours d'identification auprès des services compétents en Tunisie. L'autorité administrative a relancé les autorités consulaires le 20 août 2024.
Ainsi, l'autorité administrative justifie avoir effectué des diligences nécessaires et suffisantes, dans le respect de l'obligation de moyen qui s'impose à elle en application de l'article L. 741-3 du CESEDA et de l'article 15 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008. Il est également rappelé qu'elle ne détient aucun pouvoir de contrainte ou d'instruction sur les autorités consulaires, de sorte qu'il ne peut lui être reproché le défaut de réponse du consulat. Le moyen est rejeté.
Par conséquent, dans la mesure où la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et en l'absence de carence dans les diligences de l'administration, il y a lieu de confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a fait droit à la deuxième demande de prolongation de la rétention administrative de M. [O] [F] [J].
PAR CES MOTIFS,
DÉCLARONS recevable l'appel de M. [O] [F] [J] ;
CONFIRMONS l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 22 août 2024 ayant ordonné la prolongation de la rétention administrative pour une durée de 30 jours.
LAISSONS les dépens à la charge du Trésor ;
ORDONNONS la remise immédiate d'une expédition de la présente ordonnance à la PRÉFECTURE DU LOIRET et son conseil, à M. [O] [F] [J] et son conseil, et au procureur général près la cour d'appel d'Orléans ;
Et la présente ordonnance a été signée par Alexandre David, président de chambre, et Fatima Hajbi, greffier présent lors du prononcé.
Fait à Orléans le VINGT CINQ AOUT DEUX MILLE VINGT QUATRE, à 10h 50 heures
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Fatima HAJBI Alexandre DAVID
Pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien la rétention et au ministère public. Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification. Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
NOTIFICATIONS, le 25 août 2024 :
LA PRÉFECTURE DU LOIRET, par courriel
Monsieur le procureur général près la cour d'appel d'Orléans, par courriel
M. [O] [F] [J] , copie remise par transmission au greffe du CRA
Me Karima HAJJI, avocat au barreau d'ORLEANS, remise en main propre
la SELARL ACTIS AVOCATS, avocats au barreau de VAL-DE-MARNE, copie par PLEX
L'avocat de la préfecture L'interprète L'avocat de l'intéressé