La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/08/2024 | FRANCE | N°24/02065

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre des rétentions, 16 août 2024, 24/02065


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Étrangers



ORDONNANCE du 16 AOÛT 2024

Minute N°

N° RG 24/02065 - N° Portalis DBVN-V-B7I-HBMB

(1 pages)







Décision déférée : Juge des libertés et de la détention d'Orléans en date du 14 août 2024 à 15h09





Nous, Nathalie Lauer, président de chambre à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée

de Hermine Bildstein, greffier, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,





APPELANT :

M. [L] [X]

né le 28 février 1996 à [Localité 2], de nationalité tunisienne,
...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Étrangers

ORDONNANCE du 16 AOÛT 2024

Minute N°

N° RG 24/02065 - N° Portalis DBVN-V-B7I-HBMB

(1 pages)

Décision déférée : Juge des libertés et de la détention d'Orléans en date du 14 août 2024 à 15h09

Nous, Nathalie Lauer, président de chambre à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Hermine Bildstein, greffier, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,

APPELANT :

M. [L] [X]

né le 28 février 1996 à [Localité 2], de nationalité tunisienne,

actuellement en rétention administrative au centre de rétention administrative d'[Localité 4] dans des locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire,

comparant par visioconférence, assisté de Me Karima Hajji, avocat au barreau d'Orléans,

en présence de M. [G] [H], interprète en langue arabe, expert près la cour d'appel d'Orléans, qui a prêté son concours lors de l'audience et du prononcé ;

INTIMÉ :

LA PRÉFECTURE DE L'ORNE

non comparante, non représentée ;

MINISTÈRE PUBLIC : avisé de la date et de l'heure de l'audience ;

À notre audience publique tenue en visioconférence au Palais de Justice d'Orléans, conformément à l'article L. 743-8 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), le 16 août 2024 à 14 heures ;

Statuant en application des articles L. 743-21 à L. 743-23 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), et des articles R. 743-10 à R. 743-20 du même code ;

Vu l'ordonnance rendue le 14 août 2024 à 15h09 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Orléans ordonnant la jonction des procédures de demande de prolongation par la préfecture et de recours contre l'arrêté de placement en rétention administrative par le retenu, rejetant les exceptions de nullité soulevées, rejetant le recours formé contre l'arrêté de placement en rétention administrative, rejetant la demande de placement sous assignation à résidence, et ordonnant la prolongation du maintien de M. [L] [X] dans les locaux non pénitentiaires pour une durée de vingt six jours à compter du 14 août 2024 ;

Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 15 août 2024 à 12h48 par M. [L] [X] ;

Vu les observations et pièces de la préfecture de l'Orne reçues au greffe le 15 août 2024 à 19h06 ;

Après avoir entendu :

- Me Karima Hajji, en sa plaidoirie,

- M. [L] [X], en ses observations, ayant eu la parole en dernier ;

AVONS RENDU ce jour, publiquement et contradictoirement, l'ordonnance suivante :

Il résulte de l'article 66 de la Constitution et de l'article L. 743-9 du CESEDA que le juge des libertés doit s'assurer que l'étranger est pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir lorsqu'il se trouve placé en rétention administrative.

Aux termes de l'article L. 743-12 du CESEDA, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la main levée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.

Selon l'article L. 741-3 du CESEDA , « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps nécessaire à son départ, l'administration étant tenue d'exercer toutes diligences à cet effet, dès le placement en rétention ».

Il convient de considérer que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents qu'il y a lieu d'adopter que le premier juge a statué sur l'ensemble des moyens de fond soulevés devant lui et repris devant la cour, étant observé, au vu des termes de la déclaration d'appel du retenu du 14 août 2024 et des moyens repris lors des débats de ce jour :

1. À titre liminaire sur l'insuffisance de motivation par le premier juge

Sur la motivation de la décision du premier juge, ce moyen est insusceptible de prospérer. A supposer que le premier juge n'ait pas examiné tous les moyens soulevés par le retenu et son conseil au cours de l'audience du 14 août 2024, cette circonstance ne saurait entraîner la main levée de la mesure de rétention puisque, compte tenu de l'effet dévolutif de l'appel en application des articles 561 et 562 du code de procédure civile, il appartient au premier président de la cour d'appel ou au magistrat délégué par lui de statuer sur la requête préfectorale sollicitant la prolongation de la rétention et, le cas échéant, sur la requête en contestation de l'arrêté de placement. Le moyen est rejeté.

Par ailleurs, dans la mesure ou M. [L] [X] entend reprendre les moyens de nullité soulevés en première instance, il convient de réexaminer, en cause d'appel, les moyens tenant à la contestation de l'arrêté de placement, à l'irrecevabilité de la requête en prolongation, à la consultation des fichiers, aux diligences de la préfecture, et à la demande d'assignation à résidence judiciaire.

2. Sur la régularité de la procédure précédant le placement en rétention

Sur l'habilitation des agents ayant consulté les fichiers FAED et VISABIO, ce moyen est parfaitement inopérant puisqu'il ne ressort d'aucun élément de la procédure que ces fichiers aient été consultés. Le moyen est rejeté.

3. Sur la contestation de l'arrêté de placement en rétention

Sur l'incompétence du signataire de l'arrêté de placement en rétention, la Cour fait sienne l'analyse et la motivation du premier juge qui a relevé que le signataire de la décision litigieuse, en l'espèce Mme [B] [E] [F], avait compétence pour ce faire en vertu de la délégation de signature du 5 décembre 2023.

Par ailleurs, il n'y a pas lieu d'exiger la preuve de l'indisponibilité du préfet, et la signataire est présumée avoir été de permanence le 10 août 2024 (en ce sens, 1ère Civ., 13 février 2019, pourvoi n° 18-11.654) et aucune preuve contraire n'est rapportée. Le moyen est donc rejeté.

Sur l'insuffisance de motivation, la Cour rappelle au préalable que le préfet n'est pas tenu, dans sa décision, de faire état de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé dès lors que les motifs positifs qu'il retient suffisent à justifier le placement en rétention, qui est la date à laquelle le juge doit se placer pour apprécier la légalité de la décision de placement.

En l'espèce, le préfet de l'Orne a notamment justifié sa décision de placement en rétention du 10 août 2024 par le défaut de document de voyage en cours de validité détenu par l'intéressé, par la non-justification d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale puisque ce dernier évoque un hébergement chez son cousin au [Adresse 1] à [Localité 3] sans en apporter la preuve, et par la menace que son comportement représente pour l'ordre public au regard de sa condamnation à une peine de huit ans d'emprisonnement et d'interdiction définitive du territoire pour des faits de viol, par arrêt du 19 mai 2021 rendu par la Cour d'assises de la Loire-Atlantique.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, vérifiés grâce aux pièces transmises par la préfecture, le seul fait pour M. [L] [X] d'évoquer un hébergement par son cousin, sans produire de justificatif, est insuffisant pour retenir l'existence de garanties de représentations effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la décision d'éloignement dont il fait l'objet.

Par conséquent, et sans qu'il y ait besoin, à ce stade de la procédure administrative de rétention, de se prononcer sur la menace à l'ordre public, le préfet de l'Orne a motivé sa décision et n'a commis aucune erreur d'appréciation, le risque de fuite devant la mise à exécution de l'interdiction définitive du territoire français en date du 19 mai 2021 étant établi, de sorte que l'assignation à résidence est une mesure insuffisante dans ce cas d'espèce. Le moyen est rejeté.

Sur la demande d'assignation à résidence judiciaire, l'article L. 743-13 du CESEDA prévoit que « Le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution ».

Aux termes des dispositions précitées, l'assignation à résidence judiciaire est un choix discrétionnaire opéré par le juge, si ce dernier estime que l'étranger dispose de garanties de représentation effectives, et après remise préalable de l'original de son passeport et de tout document justificatif de son identité.

En l'espèce, M. [L] [X] est dépourvu de passeport. De plus, comme cela a déjà été évoqué ci-dessus, il ne dispose pas de garanties de représentation effectives. Par conséquent, sa demande ne peut qu'être rejetée.

4. Sur la requête en prolongation

Sur la recevabilité de la requête en prolongation, le défaut d'actualisation du registre de rétention, pièce justificative utile expressément visée par les dispositions de l'article R. 743-2 du CESEDA, a été soulevé devant le premier juge. Selon les arguments du conseil de M. [L] [X], il ne ressort pas de ce document que le vol prévu en août dernier était inscrit.

La Cour observe que ce moyen est insusceptible de prospérer puisque l'annulation du vol prévu initialement le 10 août 2024 est datée du 8 août 2024. Il s'agit d'un acte antérieur au placement en rétention administrative de l'intéressé de M. [X] [L], débuté le 10 août 2024 à 9h39.

Le registre de rétention mentionne, conformément à l'article L. 744-2 du CESEDA, l'état civil des personnes retenues et les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. Il n'y a donc pas lieu d'exiger la retranscription sur ce document d'un routing annulé deux jours avant le placement en rétention administrative de l'intéressé. Le moyen est rejeté.

Sur les diligences de l'administration, M. [X] [L] estime ces dernières insuffisantes en l'espèce, et reproche à l'administration de n'avoir réalisé aucune démarche consulaire durant le temps de sa détention.

La Cour rappelle au préalable qu'il n'y a pas lieu d'imposer à l'administration de réaliser des démarches consulaires durant la période d'incarcération ayant précédé le placement en rétention (1ère Civ. 17 octobre 2019, pourvoi n° 19-50.002).

Ainsi, l'autorité administrative, qui a saisi les autorités consulaires tunisiennes d'une demande de laissez-passer dès le 26 juillet 2024 avant de leur transmettre la fiche de situation administrative de l'intéressé le 6 août 2024, a effectué des diligences nécessaires et suffisantes à ce stade de la procédure administrative de rétention, s'agissant d'une première demande de prolongation. Il est également rappelé qu'elle ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires, de sorte qu'il ne peut lui être reproché le défaut de réponse du consulat. Le moyen est rejeté.

En l'absence de toute illégalité susceptible d'affecter les conditions, découlant du droit de l'Union, de la légalité de la rétention et à défaut d'autres moyens présentés en appel, il y a lieu de confirmer l'ordonnance attaquée.

PAR CES MOTIFS,

DÉCLARONS recevable l'appel de M. [L] [X] ;

CONFIRMONS l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 14 août 2024 ayant ordonné la prolongation de la rétention administrative pour une durée de vingt six jours ;

LAISSONS les dépens à la charge du Trésor ;

ORDONNONS la remise immédiate d'une expédition de la présente ordonnance à la préfecture de l'Orne, à M. [L] [X] et son conseil, et au procureur général près la cour d'appel d'Orléans ;

Et la présente ordonnance a été signée par Nathalie Lauer, président de chambre, et Hermine Bildstein, greffier présent lors du prononcé.

Fait à Orléans le SEIZE AOÛT DEUX MILLE VINGT QUATRE, à heures

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Hermine BILDSTEIN Nathalie LAUER

Pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien la rétention et au ministère public. Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification. Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

NOTIFICATIONS, le 16 août 2024 :

La préfecture de l'Orne, par courriel

Monsieur le procureur général près la cour d'appel d'Orléans, par courriel

M. [L] [X] , copie remise par transmission au greffe du CRA

Me Karima Hajji, avocat au barreau d'Orléans, copie remise en main propre contre récépissé

L'interprète L'avocat de l'intéressé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre des rétentions
Numéro d'arrêt : 24/02065
Date de la décision : 16/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-16;24.02065 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award