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18/07/2024 | FRANCE | N°22/01251

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre sociale, 18 juillet 2024, 22/01251


C O U R D ' A P P E L D ' O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE - A -

Section 2

PRUD'HOMMES

Exp + GROSSES le 18 juillet 2024 à

la SELAS BARTHELEMY AVOCATS

la SCP PETIT



LD



ARRÊT du : 18 JUILLET 2024



N° : - 24



N° RG 22/01251 - N° Portalis DBVN-V-B7G-GSTD



DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ORLEANS en date du 25 Avril 2022 - Section : COMMERCE



ENTRE



APPELANTES :



S.A.S. MURLAUR (INTERMARCHE)r>
[Adresse 6]

[Localité 2]



représentée par Me Valérie GUICHARD de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de PARIS



S.A.S. ITM ALIMENTAIRE REGION PARISIENNE

[Adresse 1]

[Loca...

C O U R D ' A P P E L D ' O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE - A -

Section 2

PRUD'HOMMES

Exp + GROSSES le 18 juillet 2024 à

la SELAS BARTHELEMY AVOCATS

la SCP PETIT

LD

ARRÊT du : 18 JUILLET 2024

N° : - 24

N° RG 22/01251 - N° Portalis DBVN-V-B7G-GSTD

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ORLEANS en date du 25 Avril 2022 - Section : COMMERCE

ENTRE

APPELANTES :

S.A.S. MURLAUR (INTERMARCHE)

[Adresse 6]

[Localité 2]

représentée par Me Valérie GUICHARD de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

S.A.S. ITM ALIMENTAIRE REGION PARISIENNE

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Valérie GUICHARD de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

ET

INTIMÉE :

Madame [D] [N] NÉE [T] épouse [N]

née le 23 Décembre 1986 à [Localité 4]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Bernard PETIT de la SCP PETIT, avocat au barreau de METZ

Ordonnance de clôture : le 19 janvier 2024

A l'audience publique du 15 Février 2024

LA COUR COMPOSÉE DE :

Madame Laurence DUVALLET, présidente de chambre, présidente de la collégialité,

Monsieur Xavier AUGIRON, conseiller,

Madame Anabelle BRASSAT-LAPEYRIERE, conseiller,

Assistés lors des débats de Monsieur Jean-Christophe ESTIOT, Greffier.

Puis ces mêmes magistrats ont délibéré dans la même formation et le 18 juillet 2024, Mme Laurence DUVALLET, présidente de chambre, présidente de la collégialité, assistée de Monsieur Jean-Christophe ESTIOT, Greffier, a rendu l'arrêt par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [D] [T] épouse [N] a été engagée à compter du 21 juillet 1986 par la S.A.S. Murlaur dans le cadre d'un contrat de professionnalisation . Elle occupait en dernier lieu les fonctions de manager des rayons charcuterie.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001.

Mme [N] était titulaire d'un mandat de déléguée du personnel.

La SAS Murlaur employait 20 salariés.

Société gérée par un chef d'entreprise indépendant, M. [F], la SAS Murlaur est adhérente du groupement des Mousquetaires dans le cadre d'un contrat commercial.

M. [F] ayant souhaité cesser cette activité et en l'absence de repreneur immédiat, la SAS Murlaur a été rachetée le 2 juillet 2012 par la SAS ITM alimentaire région parisiennne. La SAS ITM alimentaire région parisienne est devenue l'actionnaire unique de la SAS Murlaur, devenue sa filiale à 100 %, dans l'attente d'un nouveau repreneur indépendant.

Elle a ainsi fait l'objet, à partir de juillet 2012, d'une opération de portage de la part de la SAS ITM alimentaire région parisienne, entité appartenant au groupe ITM Entreprises les Mousquetaires.

La holding ITM entreprises fixe les objectifs opérationnels, délègue les moyens, coordonne et veille à l'application des politiques par les filiales. Ces dernières sont des sociétés, gestionnaires des fonctions support transversales. Les filiales comptent aussi quatre ITM métiers qui veillent au développement des enseignes Mousquetaires, parmi lesquels ITM automobile, ITM restauration, ITM équipement de la maison et enfin ITM alimentaire (Intermarché, Netto).

Les magasins exploités sous enseigne 'Mousquetaires' n'appartiennent pas à ce groupe, sauf en période de transition dans l'attente de reprise par un adhérent indépendant, le point de vente étant alors détenu par une société chargée de portage et membre du groupe, en l'espèce, la SAS ITM alimentaire région parisienne.

Invoquant des difficultés économiques récurrentes et l'absence de repreneur indépendant, la cessation d'activité de la SAS Murlaur a été décidée et la procédure de licenciement économique collectif de l'ensemble du personnel engagée le 8 février 2018 par la convocation des représentants du personnel.

La SAS Murlaur a convoqué Mme [N] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 7 mars 2018. Le 23 mars suivant, l'employeur a sollicité l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique.

Le 17 mai 2018, l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement au motif que la société ne justifiait pas de la réalité des difficultés économiques au niveau du secteur d'activité du groupe ITM entreprises les Mousquetaires.

Le 18 mars 2019, le Ministre du travail a annulé la décision de refus de licenciement de l'inspection du travail estimant que la cessation d'activité de l'entreprise et la suppression du poste de la salariée était établie mais a maintenu le refus en raison d'un manquement dans la recherche de reclassement en l'absence de précision de l'identité des salariés concernés, leurs compétences ou capacités et l'absence d'examen particulier de la situation professionnelle de la salariée.

Par jugement du 2 juillet 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté le recours de l'employeur contre cette décision, retenant des manquements dans la recherche de reclassement.

Par arrêt du 13 juillet 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté le recours de la SAS Murlaur contre ce jugement et la décision administrative, retenant que la ministre du travail n'avait pas commis d'erreur d'appréciation dans le respect de l' obligation de reclassement.

La protection légale de Mme [N] au titre de son mandat de déléguée du personnel a cessé le 1er septembre 2020.

Le 21 septembre 2020, la SAS Murlaur a informé Mme [N] de l'impossibilité de procéder à un reclassement.

Le 30 septembre 2020, la SAS Murlaur l'a convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement qui a été fixé au 12 mars 2020.

Le 22 octobre 2020, la SAS Murlaur a notifié à Mme [N] son licenciement pour motif économique.

Mme [N] a fait l'objet d'un congé de reclassement durant huit mois.

Par requête du 10 mars 2021, Mme [N] a saisi le conseil de prud'hommes d'Orléans aux fins de voir reconnaître l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement et d'obtenir le paiement de diverses sommes en conséquence.

Le 13 juillet 2021 la cour administrative d'appel a confirmé la décision de refus de licenciement.

Par jugement du 25 avril 2022, auquel il est renvoyé pour un plus ample exposé du litige, le conseil de prud'hommes d'Orléans a :

Dit que la SA Murlaur et la SAS ITM Alimentation Région Parisienne ont satisfait à l'obligation de reclassement de Mme [V] [E] (lire en réalité Mme [N] [D],

Dit que la SA Murlaur et la SAS ITM Alimentation Région Parisienne auraient dû faire une nouvelle demande d'autorisation de licenciement auprès de l'inspecteur du travail,

Dit que faute de PSE le licenciement pour motif économique de Mme [N] [D] est nul,

Requalifié le licenciement économique de Mme [N] [D] en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamné la SA Murlaur et la SAS ITM Alimentation Région Parisienne à verser à Mme [N] [D] les sommes de

34.485,69 euros (trente quatre mille quatre cent quatre vingt cinq euros soixante neuf centimes) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

1.000,00 euros (mille euros) sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Ordonné àla SA Murlaur et la SAS ITM Alimentation Région Parisienne de rembourser à l'organisme Pôle Emploi 1 mois d'indemnités de chômage versées à Mme [N] [D],

Débouté la SA Murlaur et la SAS ITM Alimentation Région Parisienne de leur demande sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Ordonné I'exécution provisoire du présent jugement,

Condamné la SA Murlaur et la SAS ITM Alimentation Région Parisienne aux dépens.

Le 24 mai 2022, la S.A.S. Murlaur et la SAS ITM Alimentation Région Parisienne ont relevé appel de cette décision.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions remises au greffe le 8 août 2022 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du Code de procédure civile et aux termes desquelles la S.A.S. Murlaur et la SAS ITM Alimentation Région Parisienne demandent à la cour de :

A titre principal :

Infirmer la décision du 25 avril 2022 rendue par le Conseil de prud'hommes d'Orléans, notamment en ce qu'il a :

Considéré que le licenciement de Mme [N] était nul et sans cause réelle et sérieuse.

Condamné la SAS Murlaur et la SAS ITM Alimentaire Région Parisienne a payer solidairement à Mme [N] la somme de 34.485,69 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Condamné solidairement la SAS Murlaur et la SAS ITM Alimentaire Région Parisienne a payer à Mme [N] la somme de 1.000 euros d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Juger que la SAS Murlaur était autorisée à licencier pour motif économique Mme [N] à l'expiration de sa période de protection légale liée au mandat de déléguée du personnel et ce, sans avoir besoin de recourir une nouvelle fois à l'inspection du travail pour obtenir l'autorisation de licenciement.

Juger bien-fondé le licenciement pour motif économique de Mme [N].

Juger respectée la procédure de licenciement pour motif économique de Mme [N].

En conséquence :

Débouter Mme [N] de l'intégralité de ses demandes,

Condamner Mme [N] au paiement de la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamner Mme [N] aux entiers dépens des instances.

A titre subsidiaire :

Si, par extraordinaire, la Cour jugeait le licenciement de Mme [N] sans cause réelle et sérieuse, il lui serait alors demandé de :

Fixer à une plus juste valeur la demande d'indemnité pour nullité du licenciement ou licenciement sans cause réelle et sérieuse de Mme [N], en tout état de cause dans la fourchette suivante : entre 6.162 euros bruts et 40.500 euros bruts.

Débouter Mme [N] au paiement de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Débouter Mme [N] de sa demande de remboursement des allocations chômage ou, à tout le moins, limiter cette condamnation à hauteur d'un mois d'allocations chômage.

Condamner Mme [N] aux entiers dépens des instances

***

Vu les dernières conclusions remises au greffe le 8 novembre 2022 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du Code de procédure civile et aux termes desquelles Mme [D] [N] demande à la cour de :

Dire et juger l'appel des sociétés mal fondé.

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris.

Condamner les sociétés Murlaur et ITM à payer à Mme [N] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les condamner également aux entiers frais et dépens éventuels.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 19 janvier 2024.

MOTIFS

Le jugement attaqué a retenu que le licenciement de Mme [N] était nul et dépourvu de cause réelle et sérieuse aux motifs que la SAS Murlaur aurait du solliciter à nouveau de l'inspection du travail l'autorisation de licencier la salariée et qu'un plan de sauvegarde de l'emploi auraît être établi. Il a en revanche estimé que les SAS Murlaur et SAS ITM Alimentation Région Parisienne avaient respecté leur obligation de reclassement.

Aux termes de l'article 954, alinéa 6, du même code, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs. (Soc., 18 janvier 2023, pourvoi n° 21-23.796)

Dans ses conclusions, Mme [N] demande la confirmation du jugement et développe un moyen sur l'absence de nouvelle autorisation administrative de licenciement en présence d'un motif de licenciement identique qui s'est produit au cours de la période de protection. Sur le «fond», Mme [N] mentionne qu'elle «réitère» les explications qui avaient été données par les salariées non protégées, celles-ci ayant saisi le conseil de prud'hommes d'Orléans qui, par plusieurs décisions, avaient déclaré les licenciements sans cause réelle et sérieuse.

- Sur l'absence d'autorisation de licenciement de l'inspection du travail

Il n'est pas contesté qu'au moment de l'engagement de la seconde procédure de licenciement de Mme [N] , objet du présent litige, celle-ci ne bénéficiait plus de la protection attachée au statut de salarié titulaire de mandat de représentant du personnel.

Dans une telle hypothèse, l'employeur n'est pas tenu de solliciter à nouveau une autorisation de licencier un salarié protégé.

A l'issue de la période de protection, l'employeur retrouve la liberté de licencier selon les règles de droit commun, sous certaines conditions. Le licenciement prononcé à l'expiration de la période légale de protection ne peut être motivé par des faits invoqués devant l'autorité administrative et qui ont donné lieu à une décision de refus d'autorisation du licenciement, cette solution étant applicable en matière de licenciement économique (Soc., 15 janvier 2013, pourvoi n° 11-18.800).

Il résulte de la lettre de licenciement du 22 octobre 2020 adressée à la salariée que la SAS Murlaur se prévaut du même motif économique de licenciement, en l'espèce, la cessation définitive et totale de son activité intervenue le 3 mars 2018. Il est cependant incontestable que ce motif, dont la cour rappelle que c'est un motif autonome de licenciement économique, s'est poursuivi au delà de la période de protection et était caractérisé au moment du licenciement du 22 octobre 2020. Aucune évolution, notamment favorable, n'est possible entre la période de la première procédure de licenciement et la seconde engagée deux ans et demi plus tard. Dès lors, il ne peut être dénié le droit pour l'employeur, qui a définitivement cessé toute activité et supprimé tous les emplois qui s'y rattachaient, de se prévaloir de ce motif au soutien du licenciement d'un salarié dont la protection est achevée.

Il ressort en outre de cette lettre de licenciement qu'elle vise de nouvelles recherches de reclassement actualisées en septembre 2020, dont il est justifié en procédure, en sorte que la SAS Murlaur se prévalait sur ce point d'une situation différente de celle de l'année 2018 pour laquelle elle avait, conformément à ses obligations, sollicité l'autorisation de licencier la salariée.

Il résulte de ces éléments que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a retenu que le licenciement de Mme [N] était sans cause réelle et sérieuse pour ce motif.

- Sur la nullité du licenciement

Mme [N] ne reprend pas ce moyen dans ses écritures devant la cour d'appel.

Cependant, aux termes de l'article 954, alinéa 6, du même code, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs. (Soc., 18 janvier 2023, pourvoi n° 21-23.796).

Au cas particulier, Mme [N] demande la confirmation du jugement qui retient la nullité du licenciement, estimant que la SAS Murlaur a été rachetée par la SAS ITM alimentaire région parisiennne qui compte plus de 1000 salariés et qu'un plan de sauvegarde de l'emploi auraît dû être établi.

Selon l'article L.1233-61 du code du travail dans sa version applicable au litige, dans les entreprises comprenant au moins 50 salariés, lorsque le projet de licenciement économique concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre.

Selon la Cour de cassation, en l'absence de plan de sauvegarde de l'emploi, la procédure de licenciement est nulle ainsi que tous les actes subséquents dont les licenciements ( Soc., 13 février 1997, pourvoi n° 96-41.874, 96-41.875, Bulletin 1997, V, n° 64). En application de l'article L.1235-11 du code du travail, le salarié peut prétendre, en cas de non réintégration, à une indemnité au moins égale aux salaires des six derniers mois.

Les conditions d'effectif s'apprécient au moment où la procédure de licenciement est engagée et au niveau de l'entreprise ou de l'établissement concerné par les licenciements. Il en va de même si l'entreprise appartient à un groupe, l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi pesant sur l'employeur (Soc., 28 janvier 2009, pourvoi n° 07-45.481, Bull. 2009, V, n° 26)

Il est constant que l'effectif de la SAS Murlaur, au moment de l'engagement de la procédure de licenciement, et jusqu'à son terme, comportait moins de cinquante salariés, en l'espèce vingt salariés. En l'absence de situation de coemploi qui n'est pas débattue ni invoquée, il n'y a pas lieu d'intégrer les effectifs de la SAS ITM alimentaire région parisiennne pour déterminer si un plan de sauvegarde de l'emploi devait être adopté.

Le jugement, qui a fait droit à la demande en nullité du licenciement à ce titre, sera infirmé et la demande de Mme [N] rejetée.

- Sur les autres moyens afférents au licenciement

Le conseil de prud'hommes a retenu que les sociétés SAS Murlaur et SAS ITM alimentaire région parisiennne avaient respecté leur obligation de reclassement et écarté le moyen selon lequel il n'avait pas été procédé à de sérieuses recherches.

Les sociétés appelantes demandent la confirmation du jugement sur ce point. Mme [N] , dans ses conclusions, indique qu'elle «réitère les explications qui avaient été données par les salariées non protégées. Ces dernières avaient saisi le conseil de prud'hommes d'Orléans, qui par plusieurs décisions, avait effectivement déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse».

Toutefois, Mme [N] ne peut être suivie dans cette demande inopérante dès lors que les autres salariées non protégées visées dans ses écritures et dont la rupture du contrat de travail a fait l'objet de litiges distincts, ne sont pas parties au présent litige, la cour relevant au demeurant que la société employeur n'était pas la SAS Murlaur et que les jugements auxquels se réfère l'intéressée ont été infirmés en cause d'appel (production employeur).

La salariée ne développe en cause d'appel aucun moyen sur un manquement à l'obligation de reclassement en sorte que la cour n'est pas tenue de statuer sur ce point.

La cour relève toutefois que les SAS Murlaur et SAS ITM alimentaire région parisiennne démontrent, par la production de pièces, qu'il a été procédé, à une période contemporaine de la seconde procédure de licenciement, à de nombreuses recherches de reclassement opérées au sein des diverses entités du groupe et auprès de structures extérieures et que ces demandes de recherches de postes disponibles précisent non seulement l'intitulé et la classification des postes supprimés des deux

salariées concernées, en sorte qu'elles sont conformes à la la jurisprudence de la Cour de cassation qui énoncent qu'elles n'ont pas à être assorties du profil personnalisé des salariés concernés par le reclassement ( Soc., 17 mars 2021, pourvoi n° 19-11.114) mais aussi leurs attributions, temps de travail, rémunération et ancienneté. Les salariées ont également été réinterrogées sur leur mobilité géographique éventuelle en 2020. Aucun manquement ne pourrait être retenu.

Enfin, s'agissant du motif économique du licenciement, aucun moyen autre que celui relatif à l'absence d'autorisation de licenciement n'est développé en cause d'appel au soutien d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, pas plus que devant les premiers juges. Au surplus, selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation, sauf lorsqu'elle procède d'une faute ou d'une légèreté blâmable, circonstance non alléguée au cas particulier, la cessation totale et définitive de l'activité de l'employeur constitue une cause économique de licenciement et il s'agit d'un motif autonome de licenciement économique ( Soc., 16 janvier 2001, pourvoi n° 98-44.647, Bull 2001, V, n° 10 et Soc. 5 janvier 2022 pourvoi n°20-15.494 et s.) . Il en est de même lorsque la société employeur qui cesse ses activités fait partie d'un groupe (Soc., 8 juillet 2009, pourvoi n° 08-41.644, 08-41.645). La réalité de la cessation définitive et complète de la SAS Murlaur, employeur, est avérée.

Il résulte de l'ensemble de ces développements, que, par voie d'infirmation du jugement, le licenciement économique de Mme [N] apparaît fondé sur une cause réelle et sérieuse et que ses demandes au titre d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse doivent être rejetées.

Il convient par ailleurs d'infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné à la SAS ITM alimentaire région parisiennne de rembourser des allocations chômage versées à Mme [N].

- Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SAS Murlaur et la SAS ITM alimentaire région parisiennne à payer à la salariée la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel. Les demandes des parties seront rejetées.

Mme [N], qui succombe en ses prétentions, doit supporter les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement rendu entre les parties, le 25 avril 2022, par le conseil de prud'hommes d'Orléans en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et ajoutant,

Dit que le licenciement économique de Mme [D] [N] est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Rejette les demandes de Mme [D] [N] au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou licenciement nul ;

Rejette les demandes présentées par Mme [D] [N] et les SAS Murlaur et la SAS ITM alimentaire région parisiennne sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dit que Mme [D] [N] supporte la charge des dépens de première instance et d'appel.

Et le présent arrêt a été signé par le président de chambre, président de la collégialité, et par le greffier

Jean-Christophe ESTIOT Laurence DUVALLET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/01251
Date de la décision : 18/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-18;22.01251 ?
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