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15/07/2024 | FRANCE | N°21/02563

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre civile, 15 juillet 2024, 21/02563


COUR D'APPEL D'ORLÉANS



C H A M B R E C I V I L E



GROSSES + EXPÉDITIONS : le 15/07/2024

Me Audrey GUERIN

la SELARL BRETLIM

la SCP HERVOUET/CHEVALLIER/GODEAU

la SCP ROBILIARD





ARRÊT du : 15 JUILLET 2024



N° : - 24



N° RG 21/02563 - N° Portalis DBVN-V-B7F-GOFT





DÉCISION ENTREPRISE : Jugement Tribunal de Grande Instance de BLOIS en date du 24 Septembre 2020



PARTIES EN CAUSE



APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: Exonérati

on



Madame [I] [E] épouse [F]

née le 14 Novembre 1967 à MAROC

[Adresse 4]

[Localité 8]



représentée par Me Audrey GUERIN, avocat au barreau d'ORLEANS



(bénéficie d'une aide juridicti...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 15/07/2024

Me Audrey GUERIN

la SELARL BRETLIM

la SCP HERVOUET/CHEVALLIER/GODEAU

la SCP ROBILIARD

ARRÊT du : 15 JUILLET 2024

N° : - 24

N° RG 21/02563 - N° Portalis DBVN-V-B7F-GOFT

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement Tribunal de Grande Instance de BLOIS en date du 24 Septembre 2020

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: Exonération

Madame [I] [E] épouse [F]

née le 14 Novembre 1967 à MAROC

[Adresse 4]

[Localité 8]

représentée par Me Audrey GUERIN, avocat au barreau d'ORLEANS

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/004340 du 20/08/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ORLEANS)

D'UNE PART

INTIMÉS :

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265276210798189

Monsieur [M] [X]

né le 10 Octobre 1946 à [Localité 13]

[Adresse 5]

[Localité 7]

représenté par Me Valérie HARLICOT GUELE de la SELARL BRETLIM, avocat au barreau de BLOIS

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265274384387517

Compagnie d'assurance MMA

[Adresse 3]

[Localité 9]

représentée par Me Denys ROBILIARD de la SCP ROBILIARD, avocat au barreau de BLOIS

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265277573890592

SMABTP agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 11]

[Localité 10]

ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat au barreau d'ORLEANS

ayant pour avocat plaidant Me Frédéric CHEVALLIER de la SCP HERVOUET/CHEVALLIER/GODEAU, avocat au barreau de BLOIS,

Maître [P] [Y] es qualité de mandataire judiciaire de la société SAS MAISONS TRADIBUDGET selon jugement de liquidation judiciaire en date du 20 février 2015

[Adresse 2]

[Localité 6]

Non représenté, n'ayant pas constitué avocat

SARL TRADIBUDGET (anciennement EGCR)

[Localité 1]

[Localité 7]

Non représenté, n'ayant pas constitué avocat

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 05 Octobre 2021.

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 17 avril 2024

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du 3 juin 2024 à 14h00, l'affaire a été plaidée devant Madame Anne-Lise COLLOMP, présidente de chambre, en charge du rapport, et Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, en l'absence d'opposition des parties ou de leurs représentants.

Lors du délibéré, au cours duquel Madame Anne-Lise COLLOMP, présidente de chambre et Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, ont rendu compte des débats à la collégialité, la Cour était composée de:

Madame Anne-Lise COLLOMP, Présidente de chambre,

Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, Conseiller,

Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

GREFFIER :

Mme Fanny ANDREJEWSKI-PICARD, Greffier lors des débats

Mme Karine DUPONT, Greffier lors du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé publiquement le 15 juillet 2024 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

***

FAITS ET PROCEDURE :

Mme [E] a signé le 29 décembre 2005 un contrat de construction de maison individuelle (CCMI) avec fourniture de plan avec la société Maisons Tradibudget pour la construction d'une maison située à [Adresse 12] moyennant le prix forfaitaire de 74.015 euros.

Après réalisation de l'ensemble des conditions suspensives (notamment obtention du permis de construire et achat du terrain par Mme [E]) les travaux ont commencé le 28 mars 2007.

Les travaux ont été réceptionnés le 12 avril 2008 avec réserves.

Par acte d'huissier en date du 29 août 2008, Mme [E] a solliciété une expertise devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Blois.

Par ordonnance de référé en date du 28 octobre 2008, une mesure d'expertise judiciaire a été ordonée et Mme [J] désignée pour y procéder.

L'expert judiciaire a déposé son rapport en mai 2009.

Par actes d'huissier en date des 11 et 12 octobre 2010, Mme [E] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Blois la société Atradius credit Insurance, assureur 'garantie livraison', la Smabtp, assureur dommages ouvrage, la société Maisons Tradibudget en réparation des préjudices subis résultant des désordres.

Par jugement en date du 14 mars 2013, le tribunal de grande instance de Blois a notamment avant dire droit sur les désordres, ordonné une expertise judiciaire et commis pour y procéder M. [N].

Par actes d'huissier en date des 29 et 30 janvier 2014, la Smabtp a fait assigner M. [X], dont l'entreprise LME est intervenue comme sous-traitant de la société Maisons Tradibudget sur le lot chauffage, la MMA ès qualité d'assureur responsabilité décennale de M. [X], afin notamment que les opérations d'expertise leur soient déclaarées communes et opposables.

Les deux instances ont été jointes.

Par jugement en date du 20 février 2015, le tribunal de commerce de Blois a placé la société Maisons Tradibudget en liquidation judiciaire et désigné Me [Y] en qualité de mandataire liquidateur.

Par acte d'huissier en date du 28 août 2015, Mme [E] a fait assigner Me [Y] en intervention forcée.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 27 décembre 2017.

Par ordonnance en date du 5 avril 2016, le juge de la mise en état a donné acte à Mme [E] de son désistement d'instance à l'égard de la société Atradius credit Insurance, l'a déclaré parfait et dit qu'il entraîne extinction de l'instance.

Par jugement en date du 24 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Blois a :

- rejeté la fin de non-recevoir soulevée par M. [X] ;

- constaté que la société Maisons Tradibudget a engagé sa responsabilité à l'égard de Mme [E], sur le fondement de la responsabilité décennale et sur le fondement de la responsabilité contractuelle ;

- fixé en conséquence les créances suivantes au passif de la liquidation judiciaire de la société Maisons Tradibudget :

- 11 625 euros en réparation du préjudice de jouissance causé par les désordres de nature décennale,

- 6 075 euros en réparation du préjudice de jouissance causé par les désordres de nature contractuelle,

- 2 600 euros au titre de la surfacturation initiale,

- 4 099,43 euros au titre de l'actualisation à tort du marché,

- 3 830,75 euros en remboursement du chèque encaissé à tort,

- 1 000 euros pour le préjudice matériel et moral consécutif à l'encaissement injustifié du chèque,

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- dit que le jugement sera commun et opposable à Me [Y], ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société Maisons Tradibudget ;

- rejeté le surplus des demandes formées par Mme [E] au titre de son préjudice de jouissance ;

- rejeté les demandes formées par Mme [E] au titre de la sous-évaluation des travaux supplémentaires et de la non-remise de documents contractuels ;

- rejeté les demandes de condamnation à exécuter ou faire exécuter des travaux formées par Mme [E] ;

- condamné la Smabtp à verser à Mme [E] la somme de 11 625 euros correspondant au préjudice de jouissance causé pour le désordre de nature décennale ;

- rejeté le surplus des demandes formées par Mme [E] à l'encontre de la Smabtp ;

- rejeté l'ensemble des demandes formées par Mme [E] à l'encontre de M. [X] et de son assureur de la société Mma ;

- rejeté l'ensemble des demandes formées par la Smabtp à l'encontre de M. [X] et de son assureur la société Mma ;

- rejeté toute autre demande ;

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;

- condamné la Smabtp à payer à Me Rapin, avocat de Mme [E], la somme de 3 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rappelé que lorsque l'avocat recouvre intégralement l'indémnité fixée en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat ;

- condamné la Smabtp aux dépens, qui comprendront les frais de l'expertise judiciaire ordonnée dans le cadre de la présente instance et réalisée par M. [N] ;

- autorisé les avocats de la cause à recouvrer directement ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.

Par déclaration en date du 5 octobre 2021, Mme [E] a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a fixé en conséquence les créances suivantes au passif de la liquidation judiciaire de la société Maisons Tradibudget : 11 625 euros en réparation du préjudice de jouissance causé par les désordres de nature décennale, 6 075 euros en réparation du préjudice de jouissance causé par les désordres de nature contractuelle, 2 600 euros au titre de la surfacturation initiale, 4 099,43 euros au titre de l'actualisation à tort du marché, 3 830,75 euros en remboursement du chèque encaissé à tort, 1 000 euros pour le préjudice matériel et moral consécutif à l'encaissement injustifié du chèque, 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ; rejeté le surplus des demandes formées par Mme [E] au titre de son préjudice de jouissance ; rejeté les demandes formées par Mme [E] au titre de la sous-évaluation des travaux supplémentaires et de la non-remise de documents contractuels ; rejeté les demandes de condamnation à exécuter ou faire exécuter des travaux formées par Mme [E] ; condamné la Smabtp à verser à Mme [E] la somme de 11 625 euros correspondant au préjudice de jouissance causé pour le désordre de nature décennale ; rejeté le surplus des demandes formées par Mme [E] à l'encontre de la Smabtp ; rejeté l'ensemble des demandes formées par Mme [E] à l'encontre de M. [X] et de son assureur de la société Mma.

Me [Y], ès qualité de mandataire liquidateur de la société Maisons Tradibudget, n'a pas constitué avocat.

La déclaration d'appel a été signifiée par remise à domicile à Me [Y], ès qualité de mandataire liquidateur de la société Maisons Tradibudget, par acte d'huissier en date du 7 décembre 2021.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 8 avril 2024, Mme [E] demande à la cour de :

- infirmer le jugement dont appel.

Statuant à nouveau,

- fixer la créance de Mme [E] au passif de la liquidation judiciaire de

Tradibudget-Egcr à la somme de :

- 208 320 euros au titre de son préjudice de jouissance consécutif aux désordres subis pour la période de mai 2008 à juin 2024

- 504 euros/mois de décembre 2013 jusqu'à la reprise effective des désordres

- 2600 euros au titre de la surfacturation initiale

- 4099,43 euros au titre de l'actualisation à tort du marché

- 15 000 euros au titre de la sous-évaluation des travaux supplémentaires

- 7 400 euros au titre de la non remise des documents contractuels

- 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- déclarer le jugement à intervenir commun et opposable à Me [Y] es qualité de mandataire liquidateur.

- condamner in solidum, la Smabtp, M. [M] [X], et Mma :

1. à payer à Mme [E] au titre de son préjudice de jouissance consécutif aux désordres subis pour la période de mai 2008 à juin 2024 à la somme de 208 320 euros ;

2. à réaliser ou à faire réaliser les travaux restant à effectuer (y compris d'embellissement) restant à effectuer suivant le chiffrage estimé par l'expert et ce dans un délai de 1 mois et demi maximum à compter de la décision à intervenir, et ce sous astreinte de 100 euros par jours de retard.

Et,

b) la condamnation in solidum, la Smabtp, M. [M] [X], et Mma à Mme [E]

1. Au titre de la surfacturation initiale : 2600 euros

2. Au titre de l'actualisation à tort du prix du marché : 4 099,43 euros

3. Au titre de la sous-évaluation des travaux supplémentaires : 15 000 euros

4. Au titre de la non remise des documents contractuels : 7 400 euros

5. Au titre du chèque bancaire encaissé : 20 000 euros

c) la condamnation in solidum M. [M] [X], Mma et la Smabtp à payer à Mme [E] au titre de la résistance abusive la somme de 80 000 euros ;

d) condamner in solidum M. [M] [X], Mma et la Smabtp à payer Maître [L] [O] la somme de 4500euros au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, par application des dispositions de l'articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle.

e) condamner in solidum M. [M] [X], Mma et la Smabtp aux dépens, comprenant les frais d'expertise.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 16 avril 2024, les sociétés Mma demandent à la cour de :

A titre principal,

- déclarer irrecevable les conclusions de l'appelante, Mme [E] notifiées le 8 avril 2024 ;

- déclarer prescrite l'action de la Smabtp ;

- confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Blois le 24 septembre 2020 ;

- débouter Mme [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions présentées en cause d'appel ;

A titre subsidiaire,

- débouter Mme [E] de la demande de garantie dirigée à l'encontre des Mma pour la période de 2008 à 2013 ;

- débouter Mme [E] de la demande de garantie dirigée à l'encontre des Mma pour la période postérieure à 2013 ;

En tout état de cause,

- condamner Mme [E] à verser aux Mma la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [E] aux entiers dépens.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 15 avril 2024, la Smabtp demande à la cour de :

- déclarer mal fondé l'appel principal interjeté par Mme [I] [E] dans toutes ses dispositions, et en conséquence, l'en débouter purement.

- dire et juger mal fondées les Mma dans leurs demandes et les en débouter purement et simplement.

En conséquence,

- déclarer recevable et bien fondé l'appel incident interjeté par la Smabtp en ce que le tribunal a rejeté l'ensemble des demandes formées par la Smabtp à l'encontre de Mr [M] [X] et de son assureur la société Mma.

- condamner in solidum Mr [M] [X] et les Mma à relever la Smabtp en principal, intérêts, frais et accessoires, article 700 compris de toute condamnation susceptible d'être prononcée à leur encontre.

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la Smabtp était bien fondée à opposer au maître d'ouvrage les limites du plafond de garanties dommages immatériels soit 15.251,86euros en dommages ouvrage.

- condamner in solidum Mme [E] et Mr [M] [X] et sa compagnie d'assurance les Mma au paiement d'une somme de 3.000euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamner les mêmes sous la même solidarité aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Devauchelle conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 11 avril 2024, M. [X] demande à la cour de :

- infirmer le jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Blois le 24 septembre 2020 (RG n°10/02751) en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par M. [M] [X] ;

Et statuant à nouveau ;

- déclarer Mme [I] [E] irrecevable en ses demandes à l'encontre de M. [M] [X], celui-ci étant dépourvu du droit d'agir.

- confirmer les chefs du jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Blois le 24 septembre 2020 (RG n°10/02751) en ce qu'il a fixé en conséquence les créances suivantes au passif de la liquidation judiciaire de la société Maisons Tradibudget :11 625 euros en réparation du préjudice de jouissance causé par les désordres de nature décennale, 6 075 euros en réparation du préjudice de jouissance causé par les désordres de nature contractuelle,

2 600 euros au titre de la surfacturation initiale, 4 099,43 euros au titre de l'actualisation à tort du marché, 3830,75 euros en remboursement du chèque encaissé à tort, 1 000 euros pour le préjudice matériel et moral consécutif à l'encaissement injustifié du chèque, 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ; dit que le jugement sera commun et opposable à Maître [Y], ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société Maisons Tradibudget ; rejeté le surplus des demandes formées par Mme [I] [E] au titre de son préjudice de jouissance ; rejeté les demandes formées par Mme [I] [E] au titre de la sous-évaluation des travaux

supplémentaires et de la non-remise des documents contractuels ; rejeté les demandes de condamnation à exécuter ou à faire exécuter des travaux formées par Mme [I] [E] ; condamné la Smabtp à verser la somme de 11 625 euros correspondant au préjudice de jouissance causé pour le désordre de nature décennale ; rejeté le surplus des demandes formées par Mme [I] [E] à l'encontre de la Smabtp ; rejeté l'ensemble des demandes formées par Mme [I] [E] à l'encontre de M. [M] [X] et de son assureur la société Mma ; rejeté l'ensemble des demandes formées par la Smabtp à l'encontre de M. [M] [X] et de son assureur la société Mma ; rejeté toute autre demande ; ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

- rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires ;

- déclarer Mme [I] [E] irrecevable et mal fondée en toutes ses demandes, et l'en débouter ;

- déclarer la Smabtp irrecevable et mal fondée en toutes ses demandes, et l'en débouter ;

- condamner Mme [I] [E] à verser à M. [M] [X] la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner Mme [I] [E] aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 avril 2024.

MOTIFS

Sur la recevabilité des conclusions de Mme [E] signifiées le 8 avril 2024

La société MMA demande à la cour de rejeter les demandes formées par Mme [E] dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 8 avril 2024 comme étant tardives, pour irrespect du contradictoire.

Toutefois, force est de constater que l'ordonnance de clôture, initialement prévu le 8 avril 2024, a été retardé au 17 avril 2024, que les conclusions signifiées le 8 avril 2024 sont donc recevables et ne violent pas le principe du contradictoire, d'autant que la société MMA y a répliqué par des conclusions signifiées le 16 avril 2024.

Les conclusions de Mme [E] notifiées le 8 avril 2024 seront donc déclarées recevables.

I - Sur la fixation de la créance de Mme [E] au passif de la liquidation judiciaire de la société Tradibudget-EGCR

Mme [E] sollicite que sa créance soit fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société Tradibudget-EGCR comme suit :

- 208 320 euros au titre de son préjudice de jouissance consécutif aux désordres subis pour la période de mai 2008 à juin 2024

- 504 euros/mois de décembre 2013 jusqu'à la reprise effective des désordres

- 2600 euros au titre de la surfacturation initiale

- 4099,43 euros au titre de l'actualisation à tort du marché

- 15 000 euros au titre de la sous-évaluation des travaux supplémentaires

- 7 400 euros au titre de la non remise des documents contractuels ;

Il convient d'examiner successivement ces différentes demandes.

1 - Sur le préjudice de jouissance

Moyens des parties

Mme [E] fait valoir qu'elle a subi un préjudice de jouissance pour la période de mai 2008 à juin 2024, qu'elle évalue à la somme de 208 320 euros, correspondant à 80% de la valeur locative de son habitation, valeur locative estimée à 840 euros par mois. Elle explique que le chauffage n'a pas fonctionné jusqu'à novembre 2013, date de réalisation des travaux réparatoires, qu'il en est en outre résulté des désordres sur les sols et les cloisons (humidité, prolifération de moisissures), ce qui a eu des conséquences sur sa santé et celle de ses enfants.

Elle ajoute que par ailleurs l'expert n'a pas retenu de chiffrage pour le préjudice de jouissance pour la période postérieure à novembre 2013, et qu'il convient de lui allouer à ce titre une somme de 504 euros par mois, correspondant à 40% de la valeur locative, pour la période de décembre 2013 jusqu'à la réalisation effective des travaux.

La SMABTP soutient que Mme [E] a contribué par son manque d'empressement à l'aggravation de son préjudice.

Elle soutient encore qu'en tout état de cause, elle ne doit sa garantie que dans la limite du plafond de garantie contractuellement convenu, à savoir 15.251,86 euros concernant les dommages immatériels.

Réponse de la cour

Il résulte du rapport d'expertise que la maison de Mme [E] était affectée de plusieurs désordres, affectant notamment le système de chauffage. Il en est résulté, en considération des pièces produites :

- une absence de chauffage et d'eau chaude, de la réception le 12 avril 2008 jusquà ce que les travaux réparatoires soient réalisés le 15 novembre 2013,

- le développement de moisissures et tâches d'humidité en partie inférieure des cloisons,

- des problèmes de santé de type respiratoire pour Mme [E] et son fils, que les médecins, au regard des certificats médicaux produits, imputent à l'état du logement à la présence de moisissures.

Les dysfonctionnements affectant le système de chauffage et de production d'eau chaude ont causé un trouble de jouissance important, en raison non seulement de l'absence de chauffage durant cinq périodes hivernales (hivers 2008-2009, 2009-2010, 2010-2011, 2011-2012, 2012- 2013), affectant directement l'habitabilité du logement, mais également d'eau chaude à longueur d'année. Mme [E] produit des attestations de membres de sa famille chez lesquels ils se rendaient pour aller prendre une

douche. Par ailleurs, était également permanente la présence de moisissures des cloisons, ayant non seulement un impact esthétique mais également sanitaire.

A défaut de chauffage et d'eau chaude, les conditions d'habitabilité étaient fortement dégradées durant la période hivernale, soit durant 6 mois par an, et altérées durant le reste de l'année, de sorte que son préjudice peut être évalué, en considération d'une valeur locative de 775 euros à cette époque au regard du rapport d'expertise, comme suit :

- 80% de la valeur locative de la maison durant la moitié de l'année durant 5 hivers : 0,8 X 775 euros X 6mois X 5 hivers = 18 600 euros

- 20% de la valeur locative durant le reste du temps : 0,2 X 775 X 6 mois X 6 périodes estivales (2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013) = 5 580 euros,

soit un total de 18 600 + 5 580 = 24 180 euros.

S'agissant des désordres de nature contractuelle, tenant notamment à l'absence d'étanchéité des portes fenêtres du rez-de-chaussée séjour et salon, aux finitions de carrelage et faïence dans la salle de bain, à la mauvaise étanchéité de la porte du garage, à l'erreur d'altimétrie, ceux-ci ont occasionné, jusqu'en juin 2024, un trouble de jouissance qui sera justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 8 000 euros.

Il convient de fixer à ces sommes la créance de Mme [E] au passif de la liquidation judiciaire de la société Tradibudget, et de rejeter le surplus de ses demandes à ce titre, en ce compris pour la période postérieure, à défaut de tout élément permettant d'avaluer, pour l'avenir, la réalité et l'étendue du préjudice de Mme [E].

2 - Sur la demande au titre de la surfacturation initiale

Mme [E] sollicite le paiement d'une somme de 2600 euros au titre de la surfacturation initiale.

Le prix forfaitaire convenu dans les conditions générales du marché conclu entre Mme [E] et la société Tradibudget était de 74 015 euros, cette somme étant mentionnée en chiffres et en lettres dans le document signé par Mme [E].

L'accord des parties portait donc sur cette somme, et non sur la somme de 76 615 euros mentionnée dans la notice descriptive, qui ne saurait prévaloir sur les conditions générales du contat.

Mme [E] a donc trop versé une somme de 2600 euros, dont elle est fondée à obtenir restitution.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a fixé la créance à ce titre au passif de la liquidation judiciaire de la société Tradibudget à la somme de 2600 euros.

3 - Sur la demande au titre de l'actualisation à tort du marché

Par de justes motifs que la cour adopte, le premier juge a considé que la d'un montant de 4099,43 euros réclamée par la société Tradibudget à Mme [E] au titre de l'actualisation du marché n'était pas due.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé la créance de Mme [E] au passif de la iquidation judiciaire de la société Tradibudget à cette somme.

4 - Sur la demande au titre de la sous-évaluation des travaux supplémentaires

Mme [E] sollicite une somme de 15 000 euros au titre de la sous-évaluation des travaux supplémentaires. Elle fait valoir en effet que la société Tradibudget a chiffré les travaux supplémentaires non compris dans le prix initial à la somme de 4000 euros., tandis que cette somme ne couvre même pas une partie de l'aménagement des combles.

Elle estime que la société Tradibudget a, à tout le moins, manqué à son devoir de conseil.

En application de l'article L. 231-2 du code de la construction et de l'habitation, le contrat de construction de maison individuelle doit comporter le coût des travaux dont le maître de l'ouvrage se réserve l'exécution.

Mme [E] soutient que la somme de 4000 euros était très largement inférieure au montant nécessaire pour faire aménager les combles.

Toutefois, ainsi que l'a relevé le premier juge, Mme [E] a choisi l'option 'combles aménageables', et non 'combles aménagés', ce dont il résulte que l'aménagement des combles n'était pas contractuellement prévu.

Si Mme [E] était libre de faire procéder ultérieurement à l'aménagement de ces combles, il n'est nullement établi qu'elle envisageait cet aménagement ab initio, et que les travaux restant à sa charge, évalués à 4000 euros, portaient sur l'aménagement des combles, qui n'avait pas été contractuellement prévu.

Au contraire, il résulte de l'attestation de la SMABTP 'assurance dommages ouvrages', que produit Mme [E] en pièce n°5, que les travaux restant à la charge de Mme [E], évalués à 4000 euros, portaient sur le raccordement aux différents réseaux entre la maison et le réseau public.

Elle prétend donc vainement que les travaux supplémentaires de 4000 euros prévus correspondaient à l'aménagement des combles.

Il n'est dès lors pas non plus démontré que la société Tradibudget a manqué à son devoir de conseil, puisque les travaux restant à la charge de Mme [E] ne portaient pas sur l'aménagement des combles, et qu'il n'est pas établi que Mme [E] l'avait informé de son intention de faire procéder ab initio à l'aménagement des combles et que ces travaux supplémentaires auraient dû être chiffrés.

La demande de Mme [E] a ce titre sera en conséquence rejetée, et le jugement confirmé de ce chef.

5 - Sur la demande au titre de la non-remise des documents contractuels

Mme [E] fait valoir que dès le début de la procédure, elle a indiqué que la société Tradibudget ne lui avait pas remis de double de son contrat de construction. Elle n'a donc pas été en mesure de vérifier l'ensemble des clauses de ce contrat et par suite, d'exercer le cas échéant son droit de rétractation. Elle s'estime fondée à solliciter 10% du prix à titre de dommages et intérêts soit 7400 euros.

Par de justes motifs que la cour adopte, cette demande a été rejetée par le premier juge. Le jugement sera confirmé de ce chef.

II - Sur les demandes de Mme [E] dirigées contre la SMABTP

Mme [E] sollicite la condamnation de la société SMABTP à :

- lui payer une somme de 208 320 euros au titre de son préjudice de jouissance pour la période mai 2008 à juin 2024 ;

- réaliser ou faire réaliser les travaux restant à effectuer suivant le chiffrage estimé par l'expert, dans un délai d'un mois et demi maximum à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

- lui payer les sommes de :

- 2600 euros au titre de la surfacturation initiale

- 4099,43 euros au titre de l'actualisation à tort du prix du marché

- 15 000 euros au titre de la sous-évaluation des travaux supplémentaires ;

- 7400 euros au titre de la non-remise des documents contractuels ;

- 20 000 euros au titre du chèque bancaire encaissé.

- lui payer une somme de 80 000 euros au titre de la résistance abusive.

1 - Sur la demande au titre du préjudice de jouissance

La société SMABTP produit les conditions particulières du contrat d'assurance souscrit par la société Tradibudget.

S'agissant de la garantie dommage-ouvrage, elle garantit :

- les dommages matériels ;

- les dommages immatériels.

Ces deux garanties sont plafonnées.

La société SMABTP souligne que le plafond de garantie applicable aux dommages immatériels s'élève à 15 251,86 euros.

Le contrat mentionne en effet un plafond de 100 000 francs.

Elle sera donc condamnée à garantir la somme allouée à Mme [E] au titre de son préjudice de jouissance en conséquence des désordres de nature décennale, qui ont pris fin en novembre 2013, soit 24 180 euros, dans la limite du plafond invoqué par la société SMABTP, soit 15 251,86 euros.

La société SMABTP sera en conséquence condamnée à verser à Mme [E] une somme de 15 521,86 euros à ce titre.

2 - Sur la demande de réalisation des travaux

L'assureur, qui n'est pas un constructeur, ne peut pas être tenu de réaliser les travaux réparatoires. Aucune demande en paiement n'est formée par Mme [E] à ce titre.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de Mme [E] tendant à la condamnation de l'assureur à réaliser les travaux de reprise.

3 - Sur les demandes relatives à la surfacturation, à l'actualisation à tort du prix du marché, à la sous-évaluation des travaux supplémentaires, à la non-remise des documents contractuels et au chèque encaissé

Les sommes allouées à Mme [E] en raison du non respect par la société Tradibudget de ses engagements contractuels (surfacturation et actualisation à tort du prix du marché) n'entrent pas dans le cadre de la garantie de la société SMABTP.

S'agissant de la somme de 20 000 euros réclamée par Mme [E] au titre d'un chèque de 3 830,75 euros encaissé à tort, il convient de relever, de première part, que Mme [E], qui sollicite l'infirmation du jugement, ne sollicite pas dans le dispositif de ses conclusions la fixation de cette créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Tradibudget, de sorte que la cour n'en est pas saisie, et qu'en tout état de cause, la restitution à Mme [E] de la somme de 3 830,75 euros indument perçue par la société Tradibudget qui a à tort encaissé le chèque qui lui avait remis pour lever des réserves qui n'ont jamais été levées, n'est pas garantie par le contrat d'assurance SMABTP, pas plus que les conséquences de cet encaissement fautif.

Les demandes de Mme [E] à ce titre, en ce qu'elles sont digirées contre la SMABTP, ne peuvent qu'être rejetées.

4 - Sur la demande au titre de la résistance abusive

Moyens des parties

Mme [E] fait valoir que la société Tradibudget a été défaillante, n'a pas respecté ses engagements, qu'elle a été contrainte de multiplier les diligences procédurales, que les travaux les plus urgents n'ont été réalisés qu'au bout de 5 années, grâce à l'intervention de l'expert judiciaire, qu'aucune des parties n'a proposé la moindre solution pour remédier aux désordres.

Réponse de la cour

Il convient en premier lieu de relever que Mme [E], qui sollicite dans le dispositif de ses conclusions l'infirmation du jugement, ne sollicite pas dans le dispositif de ses conclusions la fixation d'une créance à ce titre au passif de la liquidation de la société Tradibudget, de sorte que la cour n'est pas saisie de cette demande à l'égard de la société Tradibudget.

Il résulte du rapport d'expertise que la société Tradibudget a été défaillante dans le respect de ses engagements contractuels, que la maison était affectée de désordres graves affectant notamment le système de chauffage, auxquels elle n'a pas remédié. Mme [E] s'est vue contrainte de diligenter des procédures judiciaires pour faire valoir ses droits, en ce compris deux mesures d'expertise, subissant ainsi les tracas afférents à des procédures judiciaires. L'instance est toujours en cours 16 ans après la réception de la maison en avril 2008.

Mais il ne résulte pas des conditions particulières du contrat d'assurance versé aux débats que la responsabilité le cas échéant encourue à ce titre par le constructeur à l'égard du maître de l'ouvrage est garantie par la société SMABTP, étant enfin ajouté que s'agissant de la réparation d'un préjudice immatériel, il excéderait en tout état de cause le plafond de garantie de 15 251,86 euros contractuellement prévu.

La demande de Mme [E] à ce titre ne peut dès lors qu'être rejetée.

III - Sur les demandes de Mme [E] dirigées contre M. [M] [X] et la société MMA Assurance Iard

Moyens des parties

Mme [E] sollicite la condamnation de M. [M] [X], et de son assureur la société MMA, en indemnisation de son préjudice, en réalisation des travaux réparatoires prévus par l'expert en paiement de sommes correspondant à la surfacturation initiale, l'actualisation à tort du prix du marche, la sous-évaluation des travaux supplémentaires, la non-remise des documents contractuels et le chèque bancaire encaissé.

M. [X] fait valoir que :

- la demande de Mme [E] est irrecevable en ce qu'il est intervenu sur le chantier de Mme [E] en qualité d'entrepreneur individuel, sous le nom LME [M] [X], qu'il a apporté le fonds de commerce de cette entreprise à la société EGCR dont il était cogérant associé, que cette entreprise a cessé son activité le 31 décembre 2009, a été radiée le 11 février 2010, et que la société EGCR a ensuite été cédée le 14 décembre 2011 à la société Maisons d'aujourd'hui, devenue Tradibudget. Il en déduit que M. [X], personne phyisque dont l'entreprise individuelle LME est radiée depuis 2010, ne peut être mise en cause.

- sur le fond, il n'était que sous-traitant et ne peut donc pas engager sa responsabilité à l'égard de Mme [E] sur le fondement de la garantie décennale ou sur le fondement de la garantie contractuelle. Or Mme [E] ne démontre pas avoir subi des préjudices de nature délictuelle dont l'origine aurait pu lui être imputable.

Réponse de la cour

* sur la recevabilité des demandes dirigées contre M. [X]

M. [M] [X] explique que c'est l'entreprise LME, qu'il exploitait à titre personnel, qui a effectué des travaux de sous-traitance dans le cadre de la construction de la maison de Mme [E], pour le compte de la société Tradibudget.

La radiation de cette entreprise le 11 février 2010 est intervenue postérieurement à la réalisation des travaux en cause puisque la réception est intervenue en avril 2008.

Il produit à hauteur d'appel les mêmes pièces qu'en première instance, pièces insuffisantes à démontrer, ainsi que l'a jugé le tribunal, que M. [X] n'aurait pas effectué les travaux sur le chantier par l'intermédiaire de son entreprise LME.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a jugé recevables les demandes formées contre lui par Mme [E].

* sur leur bien-fondé

Le sous-traitant est contractuellement lié à l'entrepreneur principal qui lui a confié la réalisation d'un certain nombre de travaux.

Il n'est en revanche pas contractuellement lié au maître de l'ouvrage, avec lequel il n'a conclu aucun contrat. Il n'est donc tenu à son égard ni sur le fondement de la garantie décennale, ni sur le fondement de la garantie contractuelle, de sorte que seules les règles de la responsabilité délictuelle sont applicables. Il appartient en conséquence au maître de l'ouvrage de prouver que le sous-traitant a commis à son égard une faute de nature délictuelle.

Il est constant que la possibilité pour un tiers au contrat de se prévaloir, sur le fondement délictuel, d'un manquement contractuel qui lui a causé un préjudice ne peut pas résulter du seul manquement à une obligation contractuelle de résultat de livrer un ouvrage conforme et exempt de vice (3e Civ., 18 mai 2017, pourvoi n° 16-11.203, Bull. 2017, III, n° 64).

Or en l'espèce, Mme [E] se prévaut d'un manquement contractuel de M. [X], mais ne justifie d'aucune faute délictuelle de nature à engager sa responsabiltié à son égard.

L'ensemble des demandes qu'elle forme à l'égard de M. [X] et de la société MMA sera donc rejeté, étant surabondamment ajouté que les demandes en paiement de sommes fondées sur le non-respect par la société Tradibudget de ses engagements contractuels ne peut en aucun cas être imputé à M. [X], étranger aux relations contractuelles entre Mme [E] et la société Tradibudget.

IV - Sur la demande en garantie formée par la SMABTP contre M. [X] et la société MMA

1 - Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action

Moyens des parties

La société MMA fait valoir que l'action récursoire de la SMABTP est prescrite, dans la mesure où :

- Mme [E] a assigné la société Tradibudget et la SMABTP dès le mois d'août 2008 ;

- la SMABTP devait donc engager son action récursoire dans les 5 ans à compter d'août 2008, donc avant le mois d'août 2013,

- elle n'a assigné M. [X] et les MMA qu'en novembre 2013, de sorte que son action est prescrite.

La société SMABTP fait valoir que son action n'est pas prescrite car :

- les 29 et 30 janvier 2014, elle a sollicité la juridiction du 1er degré de déclarer communes et opposables les dispositions du jugement du 14 mars 2013 à M. [X] et aux MMA ;

- le délai de prescription est interrompu par une demande en justice, même en référé,

- il est constant qu'une partie assignée en justice est en droit d'en appeler une autre en garantie, la recevabilité de l'action en garantie étant subordonnée à la délivrance d'une citation en justice avant l'expiration du délai décennal ;

- une assignation en référé qui tend à rendre commune une expertise ordonnée par une précédente décision constitue une citation en justice interrompant la prescription au profit de celui qui l'a diligentée.

Réponse de la cour

Il est exact que la société SMABTP a été assignée, de même que la société Tradibudget, par Mme [E] le 2 septembre 2008 en référé-expertise.

Néanmoins, il ne peut être considéré que la société SMABTP a connu à cette date les faits lui permettant d'exercer une action en garantie contre M. [X] et son assureur alors qu'elle n'avait pas, à cette date, été assignée par Mme [E] en en indemnisation de son préjudice, de sorte qu'elle ignorait que sa garantie serait engagée, fait justifiant l'appel en garantie dirigé contre M. [X] et les MMA.

Il est constant en effet que le constructeur ne pouvant agir en garantie avant d'être lui-même assigné aux fins de paiement ou d'exécution de l'obligation en nature, il ne peut être considéré comme inactif, pour l'application de la prescription extinctive, avant l'introduction des demandes principales (3e Civ., 14 décembre 2022, pourvoi n° 21-21.305, publié). Il en est de même de l'assureur du constructeur.

En l'espèce, la société SMABTP a été assignée en paiement par Mme [E] par acte d'huissier des 11 et 12 octobre 2010.

La société SMABTP a assigné M. [X] et les MMA par actes des 29 et 30 janvier 2014, dans le délai de prescription quinquennal applicable à son action en garantie contre un sous-traitant.

La fin de non-recevoir tirée de la prescription de son action sera donc écartée.

2 - Sur le fond

Moyens des parties

La société SMABTP estime que M. [X] ayant reconnu être intervenu en qualité de sous-traitant en charge du lot chauffage, sa responsabilité est engagée.

M. [X] sollicite la confirmation du jugement.

La société MMA indique qu'à défaut de production d'un contrat de sous-traintance, elle ne peut être condamnée à garantir des obligations contractuelles dont le périmètre est inconnu.

Réponse de la cour

* sur la responsabilité de M. [X]

M. [X] indique qu'il a été chargé par la société Tradibudget, dans le cadre d'un contrat de sous-traitance, du lot 'chauffage' de la maison de Mme [E].

Il résulte du rapport d'expertise que 3 dommages sont liés à l'équipement de chauffage :

- le dysfonctionnement de la chaudière,

- le dysfonctionement du thermostat d'ambiance situé dans le dégagement,

- les fuites sur réseau de chauffage depuis nourrice chaudière et en sol.

L'expert explique que l'équipement est globalement défectueux, étant le résultat d'une installation mal réalisée, sans aucun contrôle final, que le pressotat différentiel hydraulique est défectueux, le thermostat d'ambiance non raccordé, les fils d'alimentation non protégés, les pôles inversés sur PC d'alimentation, les nourrices de distribution rez-de-chaussé avec 4 retours et 3 départs pour 6 radiateurs, et des attentes PE non raccordées.

Il résulte de ces éléments que l'installation du système de chauffage s'est révélée défectueuse. M. [X] admet que son entreprise était en charge du lot chauffage. Il résulte au demeurant du contrat d'assurance souscrit par la société Tradibudget auprès de la SMABTP que la société Tradibudget a déclaré exercer l'activité de 'constructeur de maisons individuelles donnant en sous-traitance tous les travaux et assumant la maîtrise d'oeuvre totale'. La société Tradibudget n'a donc elle-même réalisé aucun travaux.

Il est ainsi suffisamment établi, nonobstant l'absence de production du contrat de sous-traitance, que l'entreprise LME, exploitée par M. [X], a effectué les travaux d'installation du système de chauffage en cause.

Or le sous-traitant est tenu d'une obligation de résultats à l'égard de l'entrepreneur principal, qui l'oblige à réaliser des travaux exempts de vices et à répondre des désordres affectant les travaux qu'il a réalisés.

Il résulte du rapport d'expertise que les travaux étaient affectés d'importants désordres, de sorte qu'il a manqué à l'obligation de résultats à laquelle il était tenu, de sorte que sa responsabilité est engagée à l'égard de la société Tradibudget.

M. [X] sera donc condamné à garantir la société SMABTP des condamnations prononcées à son encontre relatives aux conséquences des désordres affectant la chaudière et le système de chauffage.

Il sera condamné en conséquence à payer à la société SMABTP une somme de 15 251,86 euros, correspondant à la condamnation prononcée à l'encontre de la société SMABTP au titre du préjudice de jouissance consécutif à ces désordres.

* sur la garantie de la société MMA

Les MMA font valoir que leur garantie jouait du 26 mars 1992 au 1er octobre 2010. Elles estiment qu'il appartient à M. [X] de justifier de son assureur après 2010 et de produire sa police afin d'examiner l'asureur qui devrait le garantir.

Toutefois, il résulte du contrat d'assurance versé aux débats que M. [X] a été assuré par la société MMA à compter du 17 septembre 2004, notamment pour les désordres relevant de la garantie décennale.

Il ne résulte pas des pièces produites que ce contrat aurait été résilité au 1er octobre 2010, la pièce n°2 des MMA étant un courrier des MMA adressé à M. [X], daté du 29 novembre 2013, qui ne démontre nullement que le contrat aurait pris fin le 1er octobre 2010.

En conséquence, il convient de condamner in solidum M. [X] et la société MMA à garantir la SMABTP des condamnations prononcées à son encontre concernant le désordre du système de chauffage, et donc à la garantir de la condamnation en paiement d'une somme de 15 251,86 euros à Mme [E].

Sur les demandes accessoires

Le jugement sera confirmé en ses mesures relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

M. [X] et les MMA ont été condamnés à garantir la SMABTP des condamnations prononcées à son encontre relatives aux conséquences des désordres affectant le système de chauffage. Toutefois, le rapport d'expertise et la présente instance concernait également d'autres désordres, non imputables à M. [X].

En conséquence, M. [X] et les MMA seront condamnés à garantir la SMABTP à hauteur de 50% des condamnations prononcées par le jugement de première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

S'agissant de la procédure d'appel, la société SMABTP sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel, et à verser une somme de 2500 euros à Maître Audrey GUERIN, avocat de Mme [E], en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article 700 du code de procédure civile. Il n'y a pas lieu de fixer une créance à ce titre au passif de la liqduiation judiciaire de la société Tradibudget.

M. [X] et la société MMA seront condamnés à la garantir à hauteur de 50% des condamnations prononcées à ce titre en appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant par mise à disposition au greffe, publiquement, par défaut et en dernier ressort,

CONFIRME en ses dispositions critiquées le jugement entrepris SAUF en ce qu'il :

- fixe la créance de Mme [E] au passif de la liquidation judiciaire de la société Maisons Tradibudget à :

- 11 625 euros en réparation du préjudice de jouissance causé par les désordres de nature décenale,

- 6075 euros en réparation du préjudice de jouissance causé par les désordres de nature contractuelle,

- 3 830,75 euros en remboursement du chèque encaissé à tort,

- 1000 euros pour le préjudice matériel et moral consécutif à l'encaissement injustifié du chèque,

- 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

- rejette le surplus des demandes formées par Mme [E] au titre de son préjudice de jouissance,

- condamne la SMABTP à verser à Mme [E] une somme de 11 625 euros correspondant au préjudice de jouissance causé pour le désordre de nature décennale,

- rejette l'ensemble des demandes formées par la SMABTP à l'encontre de M. [X] et de son assureur la société MMA ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

DECLARE recevables les conclusions de Mme [E] signifiées par voie électronique le 8 avril 2024 ;

FIXE au passif de la liqudiation judiciaire de la société TRADIBUDGET les créances suivantes au profit de Mme [E] :

- 24 180 euros en réparation du préjudice de jouissance subi par Mme [E] en raison des désordres de nature décennale affectant le système de chauffage;

- 8000 euros en réparation du préjudice de jouissance subi par Mme [E] jusqu'en juin 2024 en raison des désordres de nature contractuelle affectant sa maison ;

CONDAMNE la société SMABTP à verser à Mme [E] une somme de

15 251,86 euros au titre du préjudice de jouissance consécutif aux désordres affectant le système de chauffage ;

REJETTE le surplus des demandes de Mme [E] ;

DECLARE recevable les demandes en garantie formées par la société SMABTP contre la société MMA Assurance Iard et M. [X] ;

CONDAMNE in solidum M. [X] et la société MMA Assurance Iard à garantir la société SMABTP de la condamnation en paiement d'une somme de

15 251,86 euros ;

CONDAMNE la société SMABTP à verser une somme de 2500 euros à Maître Audrey GUERIN, avocat de Mme [E], en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article 700 du code de procédure civile et rejette les autres demandes à ce titre ;

RAPPELLE que lorsque l'avocat recouvre intégralement l'indemnité fixée en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat ;

CONDAMNE la société SMABTP aux dépens de la procédure d'appel ;

CONDAMNE in solidum M. [X] et la société MMA Iard à garantir la société SMABTP à hauteur de 50% des condamnations prononcées à son encontre, par le jugement de première instance et en appel, au titre des dépens et des frais irrépétibles.

Arrêt signé par Mme Anne-Lise COLLOMP, Présidente de Chambre et Mme Karine DUPONT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/02563
Date de la décision : 15/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-15;21.02563 ?
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