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15/07/2024 | FRANCE | N°21/02448

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre civile, 15 juillet 2024, 21/02448


COUR D'APPEL D'ORLÉANS



C H A M B R E C I V I L E



GROSSES + EXPÉDITIONS : le 15/07 /2024

la SCP REFERENS

la SCP THAUMAS AVOCATS ASSOCIES

la SCP LEMAIGNEN - WLODYKA - DE GAULLIER

la SELARL CONVERGENS

Me Valerie DESPLANQUES



ARRÊT du : 15 JUILLET 2024



N° : - 24



N° RG 21/02448 - N° Portalis DBVN-V-B7F-GN5H





DÉCISION ENTREPRISE : Jugement TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOURS en date du 13 Juillet 2021



PARTIES EN CAUSE



AP

PELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265267242463660



S.C.S. YMOTOUR société en commandite simple, immatriculée au RCS de Lyon sous le n° B 820 213 314, agissant poursuites et d...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 15/07 /2024

la SCP REFERENS

la SCP THAUMAS AVOCATS ASSOCIES

la SCP LEMAIGNEN - WLODYKA - DE GAULLIER

la SELARL CONVERGENS

Me Valerie DESPLANQUES

ARRÊT du : 15 JUILLET 2024

N° : - 24

N° RG 21/02448 - N° Portalis DBVN-V-B7F-GN5H

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOURS en date du 13 Juillet 2021

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265267242463660

S.C.S. YMOTOUR société en commandite simple, immatriculée au RCS de Lyon sous le n° B 820 213 314, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

ayant pour avocat postulant Me Laurent LALOUM de la SCP REFERENS, avocat au barreau de BLOIS,

ayant pour avocat plaidant Me Josselin CHAPUIS de la SELARL AVOCATS CHAPUIS ASSOCIES (ACA), avocat au barreau de VIENNE

D'UNE PART

INTIMÉS :

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265265503592966

S.A.R.L. GOODWILLTRADER, société à responsabilité limitée, au capital social de 200 000,00 €, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le numéro 478 721 160 représentée par son gérant

[Adresse 1]

[Localité 9]

ayant pour avocat postulant Me Benoit de GAULLIER des BORDES de la SCP LEMAIGNEN - WLODYKA - DE GAULLIER, avocat au barreau d'ORLEANS,

ayant pour avocat plaidant Me Emmanuelle MENARD de la SELARL RACINE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265266959545506

S.A. CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE LOIRE CENTRE

société anonyme à directoire au capital de 374 033 440 euros identifiée au SIREN sous le numéro 383952470 et immatriculée au RCS d'ORLEANS,

représentée par son dirigeant en exercice,

[Adresse 7]

[Localité 4]

ayant pour avocat postulant Me Marie HUYGENS de la SELARL CONVERGENS, avocat au barreau de TOURS,

ayant pour avocat plaidant Me Christophe VERSCHAEVE de la SELEURL ILEX, avocat au barreau de PARIS

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265274538590648

Société Mutuelle d'Assurance du Bâtiment et des Travaux Publics (SMABTP), Société Mutuelle d'Assurances à cotisation variable, Entreprise régie par le Code des Assurances, inscrite au RCS de PARIS sous le n° 775 684 764, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 10]

[Localité 8]

ayant pour avocat postulant Me Valerie DESPLANQUES de la SCP VALERIE DESPLANQUES, avocat au barreau d'ORLEANS

ayant pour avocat plaidant Me Vincent DAVID de la SARL ARCOLE, avocat au barreau de TOURS,

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265268728296662

Maître [D] [J]

Notaire

[Adresse 5]

[Localité 11]

représenté par Me Sofia VIGNEUX de la SCP THAUMAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TOURS

SELARL ALTANOT NOTAIRES CONSEILS, Société d'exercice libéral à responsabilité limitée immatriculée au RCS de Tours sous le numéro D 331 786 194, prise en la personne de ses représentants légaux

Notaires Associés - [Adresse 5]

[Localité 11]

représentée par Me Sofia VIGNEUX de la SCP THAUMAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de TOURS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du :16 Septembre 2021

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 8 avril 2024

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, du délibéré :

Mme Anne-Lise COLLOMP, Présidente de chambre, en charge du rapport,

Monsieur Laurent SOUSA, conseiller,

Mme Laure-Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.

Greffier :

Mme Fanny ANDREJEWSKI-PICARD, Greffier lors des débats

Mme Karine DUPONT, Greffier lors du prononcé.

DÉBATS :

A l'audience publique du 3 juin 2024, ont été entendus Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de Chambre, en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries.

ARRÊT :

Prononcé le 15 juillet 2024 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

***

FAITS ET PROCEDURE :

Suivant acte sous seing privé en date du 3 février 2015, la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre (ci-après la société Caisse d'Epargne) a donné mandat non exclusif de vente d'un immeuble à usage de bureaux lui appartenant, sis [Adresse 2] à [Localité 11] (37), à la société Goodwill trader qui exerce une activité d'agent immobilier sous l'enseigne Cabinet d'affaires [Z]-Ameteau.

M. [V] [W] a fait une offre d'achat pour un montant de 724 000 euros. La société Goodwill Trader a transmis cette offre d'achat à son mandant qui l'a acceptée.

Un compromis de vente a été signé le 3 mai 2016.

Afin d'acquérir et d'exploiter l'immeuble dans lequel il projetait de créer onze logements meublés, M. [W] a constitué la société Ymotour sous la forme d'une commandite simple. La société Ymotour s'est substituée à M. [W] par acte sous seing privé le 3 juin 2016.

Le 1er juin 2016, la société Ymotour a signé un contrat de maîtrise d'oeuvre avec la société Minka.

Par acte authentique reçu le 17 juin 2016, par Me [J], notaire, avec la participation de Me [H], notaire, la vente de l'immeuble a été régularisée pour un prix de 724 000 euros, outre la commission de l'agent immobilier fixée à 31 200 euros.

M. [W] a déposé une déclaration préalable de travaux le 15 juillet 2016, à laquelle la mairie a fait opposition le 1er septembre 2016 en raison de l'existence d'un PPRI interdisant la création de logements au rez-de-chaussée.

Le 11 octobre 2016, la société Ymotour a déposé une demande de permis de construire, portant sur le réaménagement de l'immeuble, avec bureaux au rez-de-chaussée et création de 6 logements dans les étages, qui lui a été accordé le 14 décembre 2016 sous réserve du respect d'un certain nombre de prescriptions architecturales, tenant notamment à la réfection des menuiseries en bois selon les dispositions d'origine.

Par courrier du 12 janvier 2017, la société Ymotour a mis fin au contrat de maîtrise d'oeuvre signé avec la société Minka le 1er juin 2016.

Par actes d'huissier en date des 26 avril et 3 mai 2017, la société Ymotour a fait assigner la société Caisse d'Epargne et de prévoyance Loire Centre (ci-après Caisse d'Epargne), la société Goodwill Trader et la société OMS (venant aux droits de la société Minka) et son assureur la SMABTP devant le tribunal de grande instance de Tours en indemnisation de ses préjudices.

Par jugement en date du 11 septembre 2018, le tribunal de commerce de Tours a placé la société OMS en liquidation judiciaire simplifiée et désigné la société Villa en qualité de liquidateur. Elle a été appelée en la cause par acte d'huissier en date du 24 octobre 2018.

Par acte d'huissier en date du 6 février 2019, la société Goodwill Trader a appelé en garantie le notaire rédacteur, Me [J] et la société Altanot notaires conseil.

Par jugement en date du 13 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Tours a :

- débouté la société Ymotour de ses demandes formées contre la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre, la société Goodwilltrader, la société Villa ès qualités de liquidateur de la société Oms (anciennement Minka) et la Smabtp ;

- dit sans objet l'appel en garantie formé par la société Goodwilltrader et la Smabtp contre la société Altano notaires conseil et Me [J] ;

- débouté la société Ymotour, la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre, la société Goodwilltrader, la Smabtp, la société Altano notaires conseil et Me [D] [J] de leurs demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir matière à exécution provisoire ;

- condamné la société Ymotour aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- rejeté toute demande plus ample ou contraire à la motivation.

Par déclaration en date du 16 septembre 2021, la société Ymotour a relevé appel de l'intégralité des chefs de ce jugement sauf en ce qu'il a dit sans objet l'appel en garantie formé par la société Goodwilltrader et la Smabtp contre la société Altano notaires conseil et Me [J].

Les parties ont constitué avocat et ont conclu.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 27 avril 2022, la société Ymotour demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu sous le RG N° 17/01620 en date du 13/07/2021 par le tribunal judiciaire de Tours en ce qu'il a débouté la société Ymotour de ses demandes formées contre la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre, la société Goodwilltrader, la société Villa ès qualités de liquidateur de la société Oms (anciennement Minka) et la Smabtp; débouté la société Ymotour, la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre, la société Goodwilltrader, la Smabtp, la société Altano notaires conseil et Me [D] [J] de leurs demandes respectives fodnées sur l'article 700 du code de procédure civile ; condamné la société Ymotour aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

- débouter la Société Caisse d'Epargne, la Smabtp, ès-qualité d'assureur de la société Minka devenue OSM, la société Altanot Notaires Conseils et la société Goodwill Trader de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions.

- dire recevable et bien fondée l'action de la société Ymotour à l'encontre de la Société Caisse d'Epargne, la Smabtp, ès-qualité d'assureur de la société Minka devenue O.S.M, et la société Goodwill Trader.

- constater l'existence d'un vice caché par la Société Caisse d'Epargne quant à la non-conformité des fenêtres et menuiseries de l'immeuble aux règles d'urbanismes notamment au regard du secteur sauvegardé.

- constater que le consentement de la société Ymotour a été vicié par le dol de la Société Caisse d'Epargne.

- constater que la Société Caisse d'Epargne a manqué à son obligation de garantie d'éviction.

- constater le défaut de conseil de la société Minka devenue O.S.M, assurée auprès de la Smabtp, et de la société Goodwill Trader à l'égard de la société Ymotour.

En conséquence,

A titre principal,

- condamner solidairement la Société Caisse d'Epargne, la Smabtp, et la société Goodwill Trader à payer à la société Ymotour la somme de, sous réserves de réévaluation :

- 86 500,00 euros au titre du retard de livraison et donc du manque à gagner locatif.

- 12 220,00 euros au titre intérêts financiers intercalaires

A titre subisdiaire,

- condamner solidairement la Smabtp et la société Goodwill à payer la somme de :

- 20 000 euros au titre de la perte de chance de réaliser des habitations au rez-de chaussée,

- 66 500 euros au titre du retard pris sur le chantier,

- 12 200 euros au titre des intérêts financiers intercalaires

En tout état de cause,

- condamner solidairement la Société Caisse d'Epargne, la Smabtp, et la société Goodwill Trader à payer à la société Ymotour la somme de, sous réserves de réévaluation :

- 49 945,90 euros TTC en remplacement des fenêtres non conformes. Devis société Pasquet menuiseries.

- 71 618,49 euros TTC. au titre du ravalement de façade.

- condamner solidairement la Société Caisse d'Epargne, la Smabtp, et la société Goodwill Trader à payer à la société Ymotour la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamner solidairement la Société Caisse d'Epargne, la Smabtp, et la société Goodwill Trader à payer à la société Ymotour aux entiers dépens de l'instance distraction faite au profit de Maître Laurent Laloum, avocat au barreau de Tours.

Très subsidiairement,

- condamner la société Goodwill Trader sur le fondement de sa responsabilité délictuelle, au paiement des sommes ci-dessus au profit de la société Ymotour.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 22 août 2023, la société Goodwill Trader demande à la cour de :

- déclarer et juger la société Ymotour mal-fondée en son appel ;

- déclarer plus précisément la société Ymotour mal-fondée à agir à l'encontre de la société Goodwill Trader, à défaut de rapporter la preuve cumulative d'un manquement contractuel et d'une faute en résultant ;

- déclarer et juger la société Ymotour infondée à se prévaloir d'un manquement de la société Goodwill Trader à son obligation d'information et de conseil,

- déclarer et débouter la société Ymotour, mais également la Smabtp et toute autre partie, de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions en ce qu'elle sont dirigées à l'encontre de la société Goodwill Trader ;

Et, par voie de conséquence :

- confirmer le jugement rendu le 13 juillet 2021 par le tribunal judiciaire de Tours en ce qu'il a débouté la société Ymotour de ses demandes formées contre la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire Centre, la société Goodwilltrader, la société Villa ès qualités de liquidateur de la société Oms (anciennement Minka) et la Smabtp ; débouté la société Ymotour de ses demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ; condamné la société Ymotour aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile

- infirmer néanmoins le jugement rendu le 13 juillet 2021 par le tribunal judiciaire de Tours en ce qu'il a débouté la société Goodwill Trader de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Et, statuant à nouveau sur ce point :

- condamner la société Ymotour à payer à la société Goodwill Trader une indemnité de 3.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance, au visa de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour réformait le jugement queréllé et retenait un manquement fautif imputable à la société Goodwill Trader

- déclarer et juger qu'il n'existe aucun lien de causalité entre l'intervention de la société Goodwill Trader et les prétendus préjudices invoqués par la société Ymotour;

- déclarer et juger par ailleurs que la société Ymotour est mal-fondée à se prévaloir de l'existence d'un préjudice financier résultant des travaux prescrits par les Architectes des Bâtiments de France ;

- débouter par conséquent la société Ymotour de sa demande indemnitaire à hauteur de 121.564,39 euros au titre des travaux de remplacement des fenêtres et de ravalement des façades ;

- déclarer et juger mal fondée la société Ymotour à prétendre à l'existence d'une perte de chance de tirer des revenus locatifs ;

- débouter par conséquent la société Ymotour de sa demande (principale et subsidiaire) tendant au paiement d'une somme de 20.000 euros de ce chef ;

- déclarer et juger la société Ymotour mal-fondée à prétendre à un retard de chantier;

- débouter par conséquent la société Ymotour de sa demande (principale et subsidiaire) tendant au paiement d'une somme de 66.500 euros de ce chef ;

- déclarer et juger mal fodnée la société Ymotour en son prétendu préjudice financier

résultant du cours des intérêts intercalaires ;

- débouter par conséquent la société Ymotour de ses demandes principale et subsidiaire tendant au paiement d'une somme de 12.200 euros de ce chef ;

- déclarer et juger plus généralement que la société Ymotour n'établit pas l'existence de préjudices indemnisables, justifiés dans leur principe ;

- débouter par conséquent la société Ymotour de ses entières demandes, fins et conclusions.

A titre très subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour déclarait les demandes fondées dans leur principe et en lien de causalité avec l'intervention de la société Goodwill Trader,

- déclarer et juger mal fondée la société Ymotour à prétendre à l'existence d'une solidarité entre les parties intimées et la débouter de toute demande de condamnation solidaire ;

- ramener les prétentions de la société Ymotour à de plus justes proportions ;

- fixer la part de responsabilité de la société Ymotour dans la réalisation de son propre dommage à hauteur de 30 % ;

- fixer le préjudice allégué par la société Ymotour résultant d'une perte de chance de

percevoir des revenus locatifs à la somme maximale de 2.142 euros TTC ;

- déclarer et juger qu'en au regard des règles fiscales applicables, l'indemnisation qui serait allouée à la Société Ymotour ne pourrait se faire qu'hors taxe (HT) ;

- débouter en toute hypothèse la société Ymotour de sa demande en paiement des intérêts intercalaires ;

- condamner in solidum la Smabtp, la société Altanot et Maître [D] [J] à garantir et relever la société Goodwill Trader indemne de toute éventuelle condamnation prononcée à son encontre, en ce inclus les frais irrépétibles et dépens,

Y ajoutant,

- rejeter toute demande, fins et conclusions plus amples ou contraires, lesquelles seront déclarées irrecevables ou à tout le moins mal fondées,

- condamner la société Ymotour, et à défaut toute partie succombante, à payer à la société Goodwill Trader la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Ymotour, et à défaut toute partie succombante, à supporter les entiers dépens d'appel, dont distraction au profit de la société Lemaignen de Gaullier agissant par Maître Benoit de Gaullier, avocat postulant, et ce conformément aux dispositions prévues aux articles 696 et 699 du code de procédure civile.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 13 juin 2022, la SMABTP demande à la cour de :

A titre principal,

- dire et juger sinon recevable, à défaut mal fondé l'appel interjeté par la société Ymotour.

En conséquence de quoi,

- confirmer le jugement entrepris et débouter la Société Ymotour de l'ensemble de ses demandes en ce qu'elles sont notamment dirigées contre la Smabtp et son sociétaire la société OSM (anciennement Minka), depuis liquidée.

A titre subsidiaire,

- dire que les éléments de préjudice allégués par la société Ymotour ne sont pas démontrés.

- l'en débouter ou à tout le moins réduire les demandes indemnitaires à de plus justes proportions.

- dire n'y avoir lieu à condamnation solidaire.

- faire application de la franchise contractuelle qui s'élève à 10 % du montant des dommages, avec un minimum de 1 530 euros et un maximum de 6 120 euros.

- condamner in solidum tout succombant, la Société Caisse d'Epargne, la société Goodwill Trader, la société Altanot conseils notaires et Maître [D] [J], à relever indemne la Smabtp, sur un fondement quasi-délictuel, de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre au profit de la société Ymotour.

En toute hypothèse,

- débouter la société Goodwill Trader de son appel en garantie.

- condamner tout succombant à régler à la Smabtp une indemnité de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens dont distraction au profit de la société Valerie Desplanques, avocat au barreau d'Orléans.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 15 mars 2022, la société Caisse d'Epargne demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il n'a accordé à la concluante aucune indemnité au titre des frais de justice exposés ;

Statuant de nouveau,

- condamner la société Ymotour à verser à la société Caisse d'Epargne la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance;

En tout état de cause,

- condamner la société Ymotour à verser à la société Caisse d'Epargne la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel ;

- la condamner aux entiers frais et dépens de l'instance dont distraction au profit de Me Huygens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 7 mars 2022, la société Altanot notaires conseils demande à la cour de :

- déclarer, irrecevable l'appel de la société Ymotour ou à tout le moins mal fondé,

- débouter, la société Ymotour de l'ensemble de ses demandes,

En conséquence,

- confirmer, le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Tours en date du 13 juillet 2021, en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- débouter toute demande plus ample ou contraire à l'encontre de la société Altanot notaires conseils et de Me [J].

- condamner la société Ymotour au paiement d'une somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamner la société Ymotour aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 avril 2024.

MOTIFS

Sur la responsabilité du vendeur

1 - Sur le fondement de la garantie des vices cachés

Moyens des parties

La société Ymotour estime que le vendeur doit sa garantie sur le fondement de la garantie des vices cachés. Elle fait valoir que les conditions de mise en oeuvre de cette garantie sont réunies, en ce que :

- le bien vendu était affecté d'un vice antérieur à la vente puisque les travaux de pose de fenêtres, qui ont été effectués récemment vu le caractère récent des fenêtres posées, sont non conformes aux normes d'urbanisme résultant du plan de sauvegarde et de mise en valeur de la ville de Tours établi en 2001, et ont été effectués par le vendeur sans autorisation nécessaire ;

- elle n'a pas eu connaissance du vice ; qu'elle est un acquéreur profane, et non professionnel, son gérant étant expert comptable et donc non sachant en matière de travaux ; qu'elle n'a pas les compétences techniques lui permettant de déceler le vice ;

- la clause d'exclusion de la garantie des vices cachés stipulée dans l'acte de vente n'a pas à s'appliquer puisque :

- le vendeur avait connaissance du vice, ayant changé les menuiseries sans autorisation préalable de travaux alors qu'il ne pouvait ignorer que le bâtiment était en secteur sauvegardé puisque le certificat d'urbanisme délivré par la mairie le 16 décembre 2015 indique que l'immeuble est soumis au Plan de sauvegarde de la ville de Tours approuvé le 6 février 2014.

- le vendeur avait la qualité de vendeur professionnel, s'agissant d'un établissement bancaire dont le patrimoine foncier particulièrement conséquent est géré en interne par des professionnels de l'immobilier regroupés dans un service dédié 'Département Achats et Gestion immobilière'.

La société Caisse d'Epargne répond que :

- elle n'a pas la qualité de professionnelle de l'immobilier puisque l'immeuble en cause, dans lequel elle avait ses bureaux, constituait un actif professionnel mis au service de son objet social et non un bien acquis dans une perspective spéculative;

- en revanche la société Ymotour a la qualité de professionnelle de l'immobilier, s'agissant non pas d'une SCI familiale classique ou d'une EURL patrimoniale mais d'une société en commandite simple dont la forme est peu répandue, que le régime fiscal applicable à l'opération est dit 'LMP' c'est à dire loueur en meublé professionnel. Elle souligne que la qualité de professionnel ou non doit, pour une personne morale, s'apprécier au regard de son activité et non de celle de son représentant légal. Or en considération de l'objet social de cette société, il s'agit bien d'une professionnelle de l'immobilier ;

- l'acquisition par la société Ymotour a été précédée d'une étude réalisée par ses soins, raison déterminante d'une vente consentie sans autre garantie que celle d'éviction, de sorte que la société a acquis en parfaite connaissance de cause technique, matérielle et juridique et a accepté l'aléa résultant d'un éventuel défaut de conformité et vices cachés, d'autant qu'elle connnaissait l'existence d'un PPRI puisqu'il est mentionné dans l'acte de vente, qu'elle savait que l'immeuble était situé en secteur sauvegardé et donc soumis au Plan de sauvegarde et de mise en valeur approuvé le 6 février 2014 imposant un certain nombre de prescriptions à respecter.

- elle conteste avoir changé les fenêtres, raison pour laquelle elle n'a pas pu déférer à la sommation qui lui a été faite de communiquer les devis et factures relatives à la pose des fenêtres.

- elle ajoute enfin que le vice, qui concerne les façades et les fenêtres, était apparent;

- elle souligne qu'il appartenait à la société Ymotour, ou aux professionnels qui l'entourait, de s'assurer avant d'acheter de la faisabiltié de son projet en prenant un rendez-vous avec le service de l'urbanisme ;

- elle soutient que les menuiseries litigieuses ne rendent pas le bien impropre à sa destination, qu'une simple non conformité ne constitue pas en soi un vice caché, et que les travaux à réaliser constituent la conséquence directe de l'opération réalisée, l'immeuble ne faisant auparavant l'objet d'aucune injonction particulière.

Réponse de la cour

En application de l'article 1641 du code civil :

'Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus'.

Selon l'article 1643 du code civil, le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

En l'espèce, l'acte de vente comporte, en page 6, une clause d'exclusion de garantie des vices cachés dont il résulte que l'acquéreur fera 'son affaire personnelle des vices apparents ou cachés de tous ordres, notamment juridique, administratif, environnemental ou techniques affectant ou susceptibles d'affecter l'immeuble, sauf si ces mêmes vices étaient connus du vendeur antérieurement à ce jour et non portés à la connaissance de l'acquéreur, ce que l'acquéreur accepte expressément.

L'acquéreur fera ainsi son affaire personnelle notamment des contraintes, contre-performances et éventuels défauts de conformité, vices apparents ou cachés de tous ordres, juridiques, administratifs, fiscaux, physiques et techniques susceptibles d'affecter ou qui ont pu affecter les biens, de leur situation au regard de l'environnement, de leur usage et de leur destination ; le vendeur ne pouvant et ne devantêtre inquiété pour quelque cause que ce soit à ces égards, le tout sauf effet de garanties légales auxquelles le vendeur serait tenu, ou de stipulations contraires des présentes'.

Il est encore stipulé, en page 19 de l'acte, que 'l'acquéreur prend le bien dans l'état où il se trouve au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le vendeur pour quelque cause que ce soit notamment en raison :

- des vices apparents ;

- des vices cachés.

S'agissant des vices cachés, il est précisé que cette exonération de garantie ne s'applique pas :

- si le vendeur a la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction, ou s'il est réputé ou s'est comporté comme tel ;

- s'il est prouvé par l'acquéreur, dans les délais légaux, que les vices cachés étaient en réalité connus du vendeur'.

Toutefois, il est constant que le vendeur qui, ayant connaissance d'un vice lors de la conclusion du contrat, stipule qu'il ne le garantira pas, ne peut se prévaloir de cette clause exonératoire et est tenu à garantie, nonobstant cette clause (3e Civ.,16 décembre 2009, pourvoi n° 09-10.540, Bull. III, n° 288).

Le vendeur professionnel est présumé avoir connaissance du vice.

La société Ymotour soutient que la société Caisse d'Epargne doit être considérée comme un professionnel de l'immobilier.

Toutefois, la Caisse d'Epargne est un établissement bancaire et non un professionnel de l'immobilier, et l'immeuble en cause constituait l'immeuble qui abritait ses bureaux.

Elle ne peut donc être considérée comme un vendeur professionnel, ayant en cette qualité nécessairement eu connaissance du vice.

Il appartient dès lors à la société Ymotour de rapporter la preuve :

- de l'existence d'un vice caché,

- de ce que la Caisse d'Epargne en avait connaissance avant la vente.

* Sur l'existence d'un vice antérieur à la vente

Il est reproché à la société Caisse d'Epargne d'avoir changé les fenêtres en contravention avec les règles d'urganisme en vigueur à la date des travaux, alors

qu'une autorisation d'urbanisme préalable était nécessaire en considération du Plan de sauvegarde et de mise en valeur de la ville de Tours, établi en 2001.

Toutefois, il convient de relever que la société Ymotour, à qui incombe la charge de la preuve de l'existence d'un vice, ne prouve nullement que lorsque les fenêtres en PVC ont été posées, celles-ci n'étaient pas conformes aux normes d'urbanisme en vigueur à cette date.

En effet, le 'Plan de Sauvegarde et de mise en valeur de la ville de Tours' auquel se réfère le permis de construire a été établi le 6 février 2014, et modifé en 2016.

Or il n'est nullement établi que le changement des fenêtres a eu lieu postérieurement au au 6 février 2014, d'autant moins qu'il est stipulé dans l'acte de vente du 17 juin 2016 que le vendeur déclare qu' 'aucune construction ou rénovation n'avait été effectuée sur cet immeuble dans les dix dernières années ou depuis son acquisition si elle est plus récente, et qu'aucun élément constitutif d'ouvrage ou équipement indissociable de l'ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil n'a été réalisé sur cet immeuble dans ce délai' (page 21).

Il sera ajouté qu'à supposer que le plan de sauvegarde ait été instauré en 2001 comme le soutient la société Ymotour, il n'est justifié ni de ce qu'il interdisait à cette date la pose de menuiserie en PVC, ni le cas échéant que la société Caisse d'Epargne a procédé au remplacement des fenêtres après cette date.

La société Ymotour ne rapporte donc pas la preuve, qui lui incombe, que le remplacement des menuiseries était, à l'époque des travaux, subordonné à une autorisation administrative qui n'aurait pas été sollicitée et que les travaux ont été réalisés en contravention avec les normes d'urbanisme en vigueur à cette date.

Il n'est donc pas démontré que le bien était affecté d'un vice antérieur à la vente et connu du vendeur.

* sur le caractère caché du vice

Il sera enfin surabondamment ajouté qu'en application de l'article 1642 du code civil, le vendeur n'est pas tenu des vices apparents dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

Le vice apparent est celui qui apparaît après une vérification élémentaire.

Or le fait que les fenêtres étaient en PVC était non seulement visible à l'oeil nul mais de surcroît mentionné dans le 'Constat de risque d'exposition au plomb' annexé à l'acte de vente, et la société Ymotour ne peut prétendre avoir ignoré les règles d'urbanisme applicables au bien en cause puisque le certificat d'urbanisme délivré le 16 décembre 2015 par le maire de la commune et annexé à l'acte de vente, qui en fait expressément état, indique que le bien en cause est soumis aux dispositions du règlement du 'Plan de Sauvegarde et de Mise en valeur du secteur sauvegardé de la ville Tours approuvé le 6 février 2014" . Ce certificat précise que les 'constructions dont le réaménagement, susceptible de modifier la structure et/ ou la répartition des volumes intérieurs existants, est autorisé sous conditions'.

La société Ymotour, qui ne saurait être qualifié d'acquéreur profane comme elle le prétend compte tenu de son objet social ('location en meublé de tous biens immobiliers d'habitation, location équipée de locaux professionnels et commerciaux dont la société est propriétaire'), de sa forme commerciale, et du fait que son gérant, de profession expert-comptable, est ou a été gérant de 3 SCI et d'une société [W] Bros ayant pour activité 'administraton d'immeubles et autres biens immobiliers' (pièce 3 à 6 de la SMABTP), ce qui témoigne au contraire d'une compétence certaine en matière immobilière, avait donc la possibilité de s'informer sur les contraintes urbanistiques résultant de tant de l'existence d'un PPRI que d'un Plan de sauvegarde susceptibles d'avoir une incidence sur son projet, et au besoin de subordonner la réitération de la vente à l'obtention des autorisations administratives nécessaires à la réalisation de son projet, possibilité qu'elle ne pouvait ignorer et dont elle n'a pas usé.

Elle était donc parfaitement en mesure de se convaincre elle-même du fait que les fenêtres en PVC n'étaient pas conformes au Plan de sauvegarde et que la création de logements en rez-de-chaussée n'était pas possible en raison du PPRI.

Les conditions de mise en oeuvre de la garantie des vices cachés ne sont en tout état de cause pas réunies et le jugement sera confirmé de ce chef.

2 - Sur le fondement de la garantie d'éviction

Moyens des parties

La société Ymotour fait valoir que le vendeur doit être condamné sur le fondement de l'article 1626 du code civil, en ce que le vendeur a réalisé des travaux non autorisés puisque les menuiseries ont été changées postérieurement à 1967, date à laquelle il est devenu propriétaire du bien, de sorte qu'il a réalisé des travaux non autorisés.

Réponse de la cour

En application de l'article 1626 du code civil :

'Quoique lors de la vente il n'ait été fait aucune stipulation sur la garantie, le vendeur est obligé de droit à garantir l'acquéreur de l'éviction qu'il souffre dans la totalité ou partie de l'objet vendu, ou des charges prétendues sur cet objet, et non déclarées lors de la vente'.

Il convient d'ajouter aux motifs du premier juge que la cour adopte que, pour les motifs ci-dessus exposés, la société Ymotour ne démontre nullement que le vendeur a réalisés des travaux non autorisés et non conformes aux normes urbanistiques en vigueur à la date à laquelle ils ont été réalisés.

3 - Sur le fondement du dol

Moyens des parties

La société Ymotour fait enfin valoir que le vendeur a délibérément menti en indiquant dans l'acte de vente qu'aucun travaux n'avait été effectué sans autorisation, et que cette manoeuvre frauduleuse a trompé la société Ymotour sur un élément déterminant du contrat.

Réponse de la cour

En application de l'article 1116 du code civil dans sa rédaction applicable jusqu'au 1er octobre 2016, applicable au litige :

'Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.

Il ne se présume pas et doit être prouvé'.

La société Ymotour reproche au vendeur d'avoir commis un dol en affirmant faussement dans l'acte qu'il n'avait pas effectué de travaux sans autorisation.

Il est stipulé, en page 18 de l'acte de vente, que le vendeur déclare que la consistance du bien n'a pas été modifiée de son fait par des travaux non autorisés.

Il n'est nullement démontré qu'à la date à laquelle ont été changées les menuiseries, leur remplacement était subordonné à une autorisation administrative et soumis aux contraintes urbanistiques du Plan de sauvegarde de la ville de Tours, pour les motifs ci-avant développés.

Il n'est donc nullement démontré que le vendeur a fait de fausses déclarations constitutives de manoeuvres dolosives.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Ymotour de ses demandes dirigées contre la société Caisse d'Epargne sur le fondement du dol.

Sur la responsabilité de la société Goodwill Trader en qualité d'intermédiaire de la vente

Moyens des parties

La société Ymotour soutient que l'agent immobilier a commis une faute, en ce qu'elle a omis de la renseigner correctement sur les contraintes urbanistiques du projet.

Elle soutient que contrairement à ce qu'elle affirme, l'agent immobilier était parfaitement informé du projet de la société Ymotour puisqu'il s'agissait de la reprise du projet de M. [K], candidat acquéreur s'étant rétracté, ainsi qu'il résulte des pièces produites, dont il résulte notamment que M. [Z] avait écrit au maître d'oeuvre, et à la société Exelto, conseil d'Ymotour, pour l'informer de l'absence de nécessité de justifier de places de parking. Elle ajoute que le compromis de vente consenti le 3 mai 2016 par la société Caisse d'Epargne et négocié par la société Goodwill indique, selon les conclusions du notaire 'Le bien est actuellement utilisé à usage de bureaux et d'habitations. L'acquéreur déclare qu'il entend l'utiliser à usage d'habitation', de sorte qu'elle ne peut prétendre avoir ignoré le contenu du compromis de vente qu'elle a négocié.

Elle considère que les fautes commises par la société Goodwill sont les suivantes :

- absence d'information et de mise en garde quant à l'inadéquation des fenêtres et menuiseries à la réglementation applicable au secteur sauvegardé de la ville de Tours,

- absence d'information et de mise en garde sur l'impossibilité de construire des logements au rez-de-chaussée compte tenu des prescriptions du PPRI.

La société Goodwill Trader, exerçant sous l'enseigne Cabinet d'affaires [Z] et Ameteau, expose que dans le cadre de son activité d'agence immobilière, elle s'est vue confier par la société Caisse d'Epargne un mandat de vente en date du 3 février 2015, qu'elle a reçu une offre d'achat de M. [W], que le notaire l'a informée que les parties avaient rendez-vous pour la signature d'un compromis de vente mais mais qu'elle a été tenue dans l'ignorance totale des discussions qui se sont tenues entre les parties. Elle conteste avoir travaillé de concert avec le maître d'oeuvre et affirme :

- n'avoir jamais eu connaissance du projet de réhabilitation de la société Ymotour.

- n'avoir pas été informée de la régularisation du compromis de vente et de l'acte authentiques, auxquels elle n'a pas participé.

- n'avoir pas été informée des difficultés suvenues postérieurement.

Elle fait valoir qu'à défaut de convention la liant à la société Ymotour, sa responsabilité ne peut être recherchée que sur un fondement délictuel.

Elle soutient qu'elle n'a commis aucune faute contracutelle à l'égard de la CECL, et aucun faute à l'égad de la société Ymotour, puisque :

- au regard des contraintes du PPRI :

- elle n'est intervenue que comme intermédiaire de la vente et ignorait le projet de la société Ymotour de créer des logements, étan précisé qu'en tout éat de cause, cela ne signifierait pas qu'elle ait eu connaissance des spécificités concrètes du projet immobilier.

- la société Ymotour connaissait les contraintes d'urbanisme liées à son acquisition, l'acte de vente précisant que l'immeuble est situé dans le périmètre du PPRI et il appartenait le cas échéant à son maître d'oeuvre de lui apporter tous conseils utiles à cet égard.

- au regard des règles d'urbanisme liées au Plan de Sauvegarde : elle n'avait pas à vérifier si les travaux réalisés en leur temps l'ont été en conformité avec les règles applicable à l'époque en matière d'urbanisme. Elle n'était pas en mesure de savoir que les travaux avaient été réalisés sans autorisation.

Réponse de la cour

Le mandataire répond sur un fondement extracontractuel des fautes dont il se rend coupable envers les tiers.

L'agent immobilier, mandataire des parties, est de première part tenu, en sa qualité de rédacteur d'actes, d'assurer l'efficacité juridique des actes passés par son entremise. Il n'est toutefois ni soutenu ni établi en l'espèce que le compromis de vente, qui n'est pas versé aux débats, a été conclu par l'entremise de la société Goodwill.

De seconde part, en sa qualité de négociateur professionnel, l'agent immobilier est également tenu d'une obligation de renseignement et de conseil non seulement vis-à-vis de son mandant, mais à l'égard de toutes les parties à l'acte conclu par son entremise (1ère Civ., 26 mars 1996, Bull. n°154 (3 Civ., 20 déc. 1971, n 70-12.467 ; 1 Civ., 14 janv. 2016, n 14-26.474, Bull. 10). Toutefois, là encore, aucun acte n'a été conclu par son entremise, la société Goodwill, liée par un mandat à la société Caisse d'Epargne, lui ayant présenté la société Ymotour mais n'ayant pas participé à la signature du compromis.

De seconde part, en sa qualité de négociateur professionnel, l'agent

immobilier est tenu d'un devoir d'information à l'égard non seulement de son mandant, mais également de toutes les parties à l'opération envisagée, quant aux modalités de l'opération et aux difficultés éventuelles. Il doit notamment vérifier que l'immeuble qu'il propose à la vente est adapté à l'usage auquel l'acheteur le destine (1ère Civ., 26 mars 1996, n 94-12.228).

En revanche, sauf cas de discordance avérée, l'agent immobilier n'est pas tenu de procéder à des investigations approfondies qui sont hors du champ de sa compétence.

Il convient dès lors de rechercher si la société Goodwill disposait d'éléments de nature à lui faire suspecter l'existence de difficultés susceptibles de faire obstacle au projet de l'acquéreur.

S'agissant en premier lieu du l'incidence du PPRI sur le projet de la société Ymotour, qui interdisait de faire des logements au rez-de-chaussée et diminuait donc le nombre de logements pouvant être réalisés, passant de 11 à 8, il convient de relever qu'il n'est pas démontré que l'agent immobilier avait connaissance avec précision du projet de la société Ymotour.

Sont produits des mails envoyés par M. [Z] (de la société Goodwill) à M. [S] (de la société Minka, maître d'oeuvre) en octobre 2015, par lesquels il l'informe qu'il n'était pas nécessaire de justifier de places de parking, ce qui démontre qu'il n'ignorait pas que des transformations étaient envisagées dans le cadre de ce projet. Mais d'une part ce projet concernait à cette date un autre client, M. [K], et il ne résulte pas des pièces produites que la société Goodwill a été informée de ce que la société Ymotour entendait s'approprier ce projet et surtout, il n'est nullement établi que la société Goodwilll en connaissait les détails. La conception en avait été en effet confiée à la société Minka. Il n'est dès lors pas établi qu'elle avait connaissance de ce que la création de logements au rez-de-chaussée était envisagée.

Aucun manquement à une obligation d'information et de conseils ne peut donc à cet égard lui être reproché.

S'agissant en second lieu de l'absence de conformité des fenêtres aux normes en vigueur, il n'appartient pas à l'agent immobilier de procéder à des investigations approfondies et notamment il ne lui appartient pas, n'étant pas un professionnel de la construction, de vérifier la conformité des fenêtres au Plan de Sauvegarde de la ville de Tours à défaut de tout élément de nature à faire suspecter une difficulté à ce titre, d'autant qu'en l'espèce, la société Ymotour, qui n'était pas un acquéreur profane, avait la possibilité de se renseigner sur ce point.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Ymotour dirigées contre la société Goodwill.

Sur la reponsabilité de la société OSM en qualité de maître d'oeuvre

Moyens des parties

La société Ymotour soutient que la société OSM, avec laquelle elle avait conclu un contrat de maîtrise d'oeuvre le 1er juin 2016, a manqué à ses obligations

contractuelles et notamment à son devoir de conseil. Il lui appartenait de diriger les opérations de construction et par là-même d'en assurer la validité, y compris au regard des règles d'urbanisme.

Elle souligne que la société Minka devenue OSM était en charge de l'étude préalable du projet de réhabilitation visé dans l'acte authentique, que c'est sur la base des travaux d'OSM que la société Exelto a proposé ce produit d'investissement à M. [W]. Elle ajoute que le dépôt d'un permis de construire était déjà prévu pour le projet de M. [K] de sorte que la société OSM savait qu'un permis de construire était nécessaire.

La SMABTP, assureur de la société OSM, estime que la société OSM n'a pas commis de faute dans l'exercice de sa mission. Elle rappelle que la convention de maîtrise d'oeuvre a été signée le 1er juin 2016, que le maître d'oeuvre avait pour mission l'établissement des plans d'exécution mais uniquement pour les plans d'aménagement intérieurs, le dossier de consultation des entreprises pour les travaux de maçonnerie, chapente-couverture, plâtrerie, chauffage, électricité, revêtements de sol, peintures, et d'assurer le suivi des travaux, mais nullement d'éclairrer le maître de l'ouvrage professionnel quant à l'environnement urbanistique de l'opération. La société Ymotour ayant pris le parti d'assumer la charge des missions de conception, elle doit en assumer les risques sans pouvoir les reporter sur les autres.

Réponse de la cour

En aplication de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige : 'Les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites'.

La société Ymotour a conclu avec la société Minka, par acte du 1er juin 2016, un contrat de maîtrise d'oeuvre, moyennant le prix de 19800 euros TTC, portant sur les prestations suivantes:

Article 2 : MISSION DE CONCEPTION

Descriptif (plan sommaire permettant l'établissement d'un chiffrage),

Etablisement des plans d'exécution pour les ouvrages suivants : plans d'aménagement intérieur,

Dossier de consultation des entreprises pour les corps d'état suivants : maçonnerie, charpente, plâtrerie, chauffage, électricité, revêtement de sol, peinture vitrification.

Suivi des travaux : le maître d'oeuvre procédera à des visites régulières du chantier jusqu'à la réception des travaux. Des visites minimum tous les 7 jours sont prévues, sur les lots retenus et plus si nécessité suivant l'avancement des entreprises (...).

Le contrat prévoyait expressément, en son article 1 : 'Le maître d'ouvrage s'engage à communiquer au maître d'oeuvre l'ensemble des renseignements relatifs à sa propriété, notamment les limites séparatives, les éventuelles servitudes de droit privé ou de droit public inhérentes à la destination des lieux ou à son environnement, les renseignements d'urbanisme et notamment ceux résultant d'un certificat d'urbanisme en cours de validité à la date du présent contrat. (...)'.

Il en résulte que les parties avaient contractuellement convenues que c'était au maître de l'ouvrage d'informer le maître d'oeuvre des renseignements d'urbanisme, et notamment des renseignements résultant du certificat d'urbanisme délivré par la mairie.

La société Ymotour ne justifie pas l'avoir fait. Elle ne justifie notamment pas avoir porté à sa connaissance le certificat d'urbanisme délivré par la mairie comme convenu dans ce document, pas plus qu'elle ne justifie l'avoir informée de l'existence d'un PPRI et le lui avoir communiqué.

Etant liée par les termes de ce contrat, elle ne peut dès lors reprocher à la société Minka de n'avoir pas tenu compte des contraintes d'urbanisme, qu'elle s'était engagée à lui communiquer, ou de ne pas avoir prévu lors de la conclusions du contrat la nécessité de déposer un permis de construire, qui en découlait.

Le fait que la société Minka ait prévu dans le projet établi pour un autre candidat acquéreur le dépot d'un permis de construire ne démontre nullement que la société Minka savait qu'un tel permis était nécessaire, étant observé que rien n'indique que le contrat de maîtrise d'oeuvre conclu avec la société Ymotour, qui prévoit une rémunération (19800 euros) inférieure de 10 000 euros à la rémunération prévue pour M. [K] (29700 euros), portait sur ce même projet.

Par ces motifs et ceux non contraires du tribunal que la cour adopte, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il retient que la preuve d'une faute commise par la société Minka devenue OS n'est pas engagée.

Les demandes de la société Ymotour dirigée contre la SMABTP en qualité d'assureur de la société OS seront donc rejetées.

Les demandes en garantie sont dès lors sans objet.

Sur les demandes accessoires

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Ymotour sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel, dont distraction au profit de la SCP Lemaignen de Gaullier agissant par Maître Benoît de Gaullier, avocat postulant, de la SCP Valérie Desplanques, avocat, de Maître Huygens, avocat.

Les circonstances de la cause justifient de condamner la société Ymotour à payer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, une somme de 2000 euros à la société Caisse d'Epargne et de rejeter les autres demandes à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Statuant par mise à disposition au greffe, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME en ses dispositions critiquées le jugement entrepris ;

Y ajoutant :

CONDAMNE la société Ymotour à payer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, une somme de 2000 euros à la société Caisse d'Epargne et rejette les autres demandes à ce titre ;

CONDAMNE la société Ymotour aux dépens de la procédure d'appel, dont distraction au profit de la SCP Lemaignen de Gaullier agissant par Maître Benoît de Gaullier, avocat postulant, de la SCP Valérie Desplanques, avocat et de Maître Huygens, avocat conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Présidente de Chambre et Mme Karine DUPONT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/02448
Date de la décision : 15/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-15;21.02448 ?
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