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11/07/2024 | FRANCE | N°24/01729

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre des rétentions, 11 juillet 2024, 24/01729


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Étrangers



ORDONNANCE du 11 JUILLET 2024

Minute N°

N° RG 24/01729 - N° Portalis DBVN-V-B7I-HAW2

(1 pages)



Décision déférée : Juge des libertés et de la détention d'Orléans en date du 9 juillet 2024 à 12h02



Nous, Ferréole Delons, conseiller à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Hermine Bildstein, greffier

, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,



APPELANT :

M. [G] [S]

né le 15 octobre 1989 à [Localité 1], de nationalité marocaine,



actuelleme...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Étrangers

ORDONNANCE du 11 JUILLET 2024

Minute N°

N° RG 24/01729 - N° Portalis DBVN-V-B7I-HAW2

(1 pages)

Décision déférée : Juge des libertés et de la détention d'Orléans en date du 9 juillet 2024 à 12h02

Nous, Ferréole Delons, conseiller à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Hermine Bildstein, greffier, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,

APPELANT :

M. [G] [S]

né le 15 octobre 1989 à [Localité 1], de nationalité marocaine,

actuellement en rétention administrative dans des locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire du centre de rétention administrative d'[Localité 2],

comparant par visioconférence, assisté de Me Charlotte Tournier, avocat au barreau d'Orléans,

en présence de Mme [X] [O], interprète en langue arabe, expert près la cour d'appel d'Orléans, qui a prêté son concours lors de l'audience et du prononcé ;

INTIMÉ :

LA PRÉFECTURE DE LA SEINE-MARITIME

non comparante, non représentée ;

MINISTÈRE PUBLIC : avisé de la date et de l'heure de l'audience ;

À notre audience publique tenue en visioconférence au Palais de Justice d'Orléans, conformément à l'article L. 743-8 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), le 11 juillet 2024 à 14 heures ;

Statuant en application des articles L. 743-21 à L. 743-23 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), et des articles R. 743-10 à R. 743-20 du même code ;

Vu l'ordonnance rendue le 9 juillet 2024 à 12h02 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Orléans ordonnant la jonction des procédures de demande de prolongation par la préfecture et de recours contre l'arrêté de placement en rétention administrative par le retenu, rejetant les exceptions de nullité soulevées, rejetant le recours formé par le retenu contre l'arrêté de placement en rétention administrative, et ordonnant la prolongation du maintien de M. [G] [S] dans les locaux non pénitentiaires pour une durée de vingt huit jours à compter du 8 juillet 2024 à 15h10 ;

Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 9 juillet 2024 à 16h43 par M. [G] [S] ;

Après avoir entendu :

- Me Charlotte Tournier, en sa plaidoirie,

- M. [G] [S], en ses observations, ayant eu la parole en dernier ;

AVONS RENDU ce jour, publiquement et contradictoirement, l'ordonnance suivante :

Il résulte de l'article 66 de la Constitution et de l'article L. 743-9 du CESEDA que le juge des libertés doit s'assurer que l'étranger est pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir lorsqu'il se trouve placé en rétention administrative.

Aux termes de l'article L. 743-12 du CESEDA, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la main levée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.

Selon l'article L. 741-3 du CESEDA , « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps nécessaire à son départ, l'administration étant tenue d'exercer toutes diligences à cet effet, dès le placement en rétention »,

Il convient de considérer que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents qu'il y a lieu d'adopter que le premier juge a statué sur l'ensemble des moyens de fond soulevés devant lui et repris devant la cour, étant observé, au vu des termes de la déclaration d'appel du retenu du 9 juillet 2024 et des moyens repris lors des débats de ce jour :

1. Sur l'irrégularité de la procédure précédant le placement en rétention administrative

Le moyen tiré de l'irrégularité du contrôle de police fondé sur l'article 78-2 alinéa 1er du code de procédure pénale s'analyse comme une exception de procédure au sens de l'article 74 du code de procédure civile, devant être soulevée avant toute défense au fond. Étant en l'espèce soulevé pour la première fois en cause d'appel, il doit être déclaré irrecevable.

Toutefois, il convient de réexaminer les autres moyens portant sur la régularité de la procédure dans la mesure où l'acte d'appel du 9 juillet 2024 porte la mention suivante : « je reprends les moyens de nullité soulevés en 1ère instance ».

Sur l'information du procureur de la république de la mesure de placement, le conseil de M. [G] [S] soulève l'irrégularité de la procédure de placement au motif que cette information a eu lieu le 6 juillet 2024 à 14h46 alors que la préfecture avait placé l'intéressé dès 9h24.

Or, un placement en rétention ne prend effet qu'à compter de sa notification, ce qui ressort du deuxième alinéa de l'article L. 741-6 du CESEDA. Il s'en déduit que le délai d'information du procureur de la République, visé à l'article L. 741-8 du CESEDA ne débute qu'à compter de cette notification.

En l'espèce, il ressort des pièces produites que l'arrêté de placement en rétention administrative est signé à 9h22 et du procès-verbal d'attache téléphonique avec le service éloignement de la préfecture de la Seine-Maritime que les agents de police ont été informés, le 6 juillet 2024 à 11h20, de la décision du préfet de placer M. [G] [S] en rétention, une place étant réservée au centre de rétention administrative d'[Localité 2] à cet effet. La mesure de placement n'est, à cet instant, pas effective et aucune obligation légale n'imposait l'information du procureur de la République.

En revanche, il est constaté que la notification de l'arrêté de placement en rétention est intervenue le 6 juillet 2024 à 15h10, heure de levée de garde à vue, et que les parquets d'Orléans et de Rouen en ont été avisés par courriels le même jour, à 14h46.

Les mails correspondants ont bien été joints en procédure, de même que les pièces jointes, à savoir les lettres d'informations aux procureurs de la république près les tribunaux judiciaires de Rouen et d'Orléans, avisant ces derniers d'un placement de M. [G] [S] au centre de rétention administrative d'[Localité 2] du samedi 6 juillet 2024 au lundi 8 juillet 2024.

Rien n'empêche l'information anticipée du parquet vis-à-vis d'un placement en rétention, pourvu que ce dernier soit mis en mesure d'effectuer son contrôle sur la procédure, ce qui a été le cas en l'espèce. Le moyen est donc rejeté.

2. Sur la contestation de l'arrêté de placement

M. [G] [S] reprend en cause d'appel le moyen portant sur l'absence de signature de l'arrêté de placement en rétention, alors même que ce dernier a été signé électroniquement par Mme [B] [U] (pièce « Saisine JLD1 [S] complète », page n° 174), qui a compétence pour cela, au regard de la délégation de signature du 14 février 2024, également jointe en procédure. Le moyen est rejeté.

Sur le défaut de motivation de l'arrêté de placement, il est soulevé que la préfecture ne mentionne ni l'entrée de M. [G] [L] en situation irrégulière sur le territoire, ni sa situation personnelle ou professionnelle.

Sur ce point, la cour rappelle au préalable que le préfet n'est pas tenu, dans sa décision, de faire état de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé dès lors que les motifs positifs qu'il retient suffisent à justifier le placement en rétention, qui est la date à laquelle le juge doit se placer pour apprécier la légalité de la décision de placement.

En l'espèce, le préfet de la Seine-Maritime a notamment justifié sa décision de placement en rétention du 6 juillet 2024 par l'absence de document d'identité ou de voyage en cours de validité détenu par l'intéressé, le maintien sur le territoire français malgré la présence d'une obligation de quitter le territoire notifiée à son encontre le 14 décembre 2023, la non-justification de liens stables sur le territoire dans la mesure où il est divorcé et sans enfant à charge, et le fait qu'il soit sans domicile fixe.

S'agissant plus précisément de la domiciliation de M. [G] [S], l'attestation de domiciliation du 1er juillet 2024 n'a été produite qu'à l'occasion de la contestation de l'arrêté de placement, devant le juge des libertés et de la détention puis devant la Cour, alors que l'intéressé avait effectivement déclaré, à l'occasion de son audition du 5 juillet 2024, être « sans domicile fixe mais vivre habituellement à [Localité 4] ». Ainsi, le préfet n'ayant pu avoir connaissance de cet hébergement à la date d'édiction de la décision de placement, il ne saurait lui être reproché de ne pas en avoir tenu compte.

Enfin, il ressort des pièces produites par l'intéressé lui-même qu'il ne travaille plus dans la fibre optique et qu'il est inscrit à pôle emploi. Il ne justifie par ailleurs d'aucune ressource lui permettant de financer la mise en 'uvre de son éloignement. A titre surabondant, la production d'une copie de permis de conduire, qui n'est pas un document de voyage, est insuffisante, étant constaté que rien ne permet d'établir la volonté de M. [G] [S] d'engager lui-même des démarches auprès des autorités consulaires pour se procurer un nouveau passeport ou un laissez-passer et quitter volontairement le territoire, compte tenu de sa présence en France malgré trois obligations de quitter le territoire prises à son encontre le 30 novembre 2018, le 21 juillet 2022 et le 14 décembre 2023, et du non-respect des obligations de pointage relatives à une assignation à résidence du 29 décembre 2022, constaté par procès-verbal du 10 janvier 2023.

Par conséquent, le préfet de la Seine-Maritime a motivé sa décision et n'a commis aucune erreur d'appréciation, l'intéressé ne disposant pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la décision d'éloignement dont il fait l'objet. Le moyen est rejeté.

Sur la demande d'assignation à résidence judiciaire, la demande est insusceptible de prospérer, l'intéressé étant dépourvu de document de voyage en cours de validité et ne disposant pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure d'éloignement dont il fait l'objet, ce qui a déjà été développé ci-dessus. Il ne répond donc pas aux exigences de l'article L. 743-13 du CESEDA. Le moyen est rejeté.

3. Sur la requête en prolongation

Sur les diligences de l'administration, M. [G] [S] reprend les dispositions de l'article L. 741-3 du CESEDA et estime ces dernières insuffisantes en l'espèce. Toutefois, la cour constate que parmi les pièces associées à la requête préfectorale du 8 juillet 2024 figure la saisine des autorités consulaires marocaines par courriel du 6 juillet 2024, auquel est jointe la copie d'un ancien laissez-passer délivré le 18 décembre 2023 par le consulat général du royaume du Maroc à [Localité 3].

En parallèle, un routing a été sollicité auprès des services de la Direction Nationale de la Police Aux Frontières (DNPAF) le même jour.

Ainsi, l'autorité administrative a effectué des diligences nécessaires et suffisantes à ce stade de la procédure administrative de rétention, s'agissant d'une première demande de prolongation, étant rappelé qu'elle ne détient aucun pouvoir de contrainte ou d'instruction sur les autorités consulaires, de sorte qu'il ne peut lui être reproché le défaut de réponse du consulat.

En l'absence de toute illégalité susceptible d'affecter les conditions, découlant du droit de l'Union, de la légalité de la rétention et à défaut d'autres moyens présentés en appel, il y a lieu de confirmer l'ordonnance attaquée.

PAR CES MOTIFS,

DÉCLARONS recevable l'appel de M. [G] [S] ;

DÉCLARONS non fondés l'ensemble des moyens et les rejetons ;

CONFIRMONS l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 9 juillet 2024 ayant ordonné la prolongation de la rétention administrative pour une durée de vingt-huit jours ;

LAISSONS les dépens à la charge du Trésor ;

ORDONNONS la remise immédiate d'une expédition de la présente ordonnance à la préfecture de la Seine-Maritime, à M. [G] [S] et son conseil, et au procureur général près la cour d'appel d'Orléans ;

Et la présente ordonnance a été signée par Ferréole Delons, conseiller, et Hermine Bildstein, greffier présent lors du prononcé.

Fait à Orléans le ONZE JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE, à heures

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Hermine BILDSTEIN Ferréole DELONS

Pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien la rétention et au ministère public. Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification. Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

NOTIFICATIONS, le 11 juillet 2024 :

La préfecture de la Seine-Maritime, par courriel

Monsieur le procureur général près la cour d'appel d'Orléans, par courriel

M. [G] [S], copie remise par transmission au greffe du CRA

Me Charlotte Tournier, avocat au barreau d'Orléans, copie remise en main propre contre récépissé

L'interprète L'avocat de l'intéressé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre des rétentions
Numéro d'arrêt : 24/01729
Date de la décision : 11/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-11;24.01729 ?
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