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02/07/2024 | FRANCE | N°21/02424

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre civile, 02 juillet 2024, 21/02424


COUR D'APPEL D'ORLÉANS



C H A M B R E C I V I L E



GROSSES + EXPÉDITIONS : le xx/2024

Me Alexis DEVAUCHELLE

la SELARL SYLVIE MAZARDO





ARRÊT du : 2 JUILLET 2024



N° : - 24



N° RG 21/02424 - N° Portalis DBVN-V-B7F-GN3S







DÉCISION ENTREPRISE : Jugement TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'Orléans en date du 01 Septembre 2021



PARTIES EN CAUSE



APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265268001202510



PÔLE EMPLOI pri

s en son établissement de Pôle emploi Centre Val De Loire, ayant son siège social, [Adresse 2] à [Localité 3]

agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le xx/2024

Me Alexis DEVAUCHELLE

la SELARL SYLVIE MAZARDO

ARRÊT du : 2 JUILLET 2024

N° : - 24

N° RG 21/02424 - N° Portalis DBVN-V-B7F-GN3S

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'Orléans en date du 01 Septembre 2021

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265268001202510

PÔLE EMPLOI pris en son établissement de Pôle emploi Centre Val De Loire, ayant son siège social, [Adresse 2] à [Localité 3]

agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège,

[Adresse 1]

[Localité 4]

ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat au barreau d'ORLEANS,

ayant pour avocat plaidant Me Ghislain DINTZNER, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

D'UNE PART

INTIMÉE :

- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265265602255255

COMITE SOCIAL ET ECONOMIQUE (anciennement C.E.) POLE EMPLOI pris en la personne de son secrétaire en exercice, domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Sylvie MAZARDO de la SELARL SYLVIE MAZARDO, avocat au barreau d'ORLEANS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 10 Septembre 2021.

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 25 mars 2024

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du 21 Mai 2024 à 14h00, l'affaire a été plaidée devant Madame Anne-Lise COLLOMP, présidente de chambre et Monsieur Laurent SOUSA, conseiller, en charge du rapport, en l'absence d'opposition des parties ou de leurs représentants.

Lors du délibéré, au cours duquel Madame Anne-Lise COLLOMP, présidente de chambre et Monsieur Laurent SOUSA, conseiller, ont rendu compte des débats à la collégialité, la Cour était composée de:

Madame Anne-Lise COLLOMP, Présidente de chambre,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller,

Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

GREFFIER :

Mme Karine DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé publiquement le 2 juillet 2024 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte d'huissier en date du 30 novembre 2018, le comité d'établissement de Pôle emploi a fait assigner l'établissement public Pôle emploi Centre Val de Loire, devant le tribunal de grande instance d'Orléans aux fins de le voir condamner à lui verser la somme de 15 000 € de dommages-intérêts pour défaut de consultation pour l'utilisation du contingent annuel d'heures supplémentaires pour l'année 2017.

Par jugement en date du 1er septembre 2021, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire d'Orléans a :

- déclaré recevable l'action diligentée par le comité d'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire à l'encontre de l'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire et les demandes des parties ;

- condamné l'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire, en raison de son manquement à son obligation légale et réglementaire de consultation du comité d'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire sur les modalités

d'utilisation des heures supplémentaires pour l'année 2017 ayant privé celui-ci du plein exercice de ses compétences, à verser au comité d'établissement

Pôle emploi Centre Val de Loire la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts ;

- débouté le comité d'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire de sa demande indemnitaire plus ample ;

- condamné l'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire aux entiers dépens de l'instance ;

- condamné l'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire à verser au comité d'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté l'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire de sa demande d'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 10 septembre 2021, Pôle emploi a interjeté appel de tous les chefs jugement sauf en ce qu'il a débouté le comité d'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire de sa demande indemnitaire plus ample.

Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 6 décembre 2021, Pôle emploi Centre-Val de Loire demande à la cour de :

- infirmer en toutes ces dispositions, le jugement déféré en ce qu'il a : déclaré recevable l'action diligentée par le comité d'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire à l'encontre de l'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire et les demandes des parties ; condamné l'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire à verser au comité d'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts ; condamné l'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire aux entiers dépens de l'instance ; condamné l'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire à verser au comité d'établissement la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; débouté l'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire de sa demande d'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau :

- débouter le comité social et économique (anciennement CE) de l'intégralité de ses demandes ;

- condamner le comité social et économique (anciennement CE) au versement d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 3 mars 2022, le comité social et économique (anciennement comité d'établissement) Pôle emploi, demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré et, en conséquence :

- condamner Pôle emploi Centre-Val de Loire à lui verser la somme de 10 000 € de dommages-intérêts par suite du défaut de consultation pour l'utilisation des heures supplémentaires pour l'année 2017 ;

- le condamner également à lui verser la somme de 2 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles de première instance ;

- le condamner en outre au paiement de la somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles d'appel ;

- débouter Pôle emploi Centre-Val de Loire de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires, notamment ses demandes formulées par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Pôle emploi Centre-Val de Loire aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.

MOTIFS

Sur la responsabilité de l'employeur pour défaut de consultation du comité d'établissement

Moyens des parties

Pôle emploi soutient que, suite à l'entrée en vigueur de l'article 18 de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, les nouvelles dispositions issues de cette loi ont simplifié de façon substantielle les obligations des employeurs en matière d'information et de consultation du comité d'établissement en substituant trois rendez-vous annuels, consacrés aux orientations stratégiques, à la situation économique et financière et à la politique sociale, à l'ensemble des obligations récurrentes d'information-consultation du comité d'établissement ; qu'il est fait obligation à l'employeur, lorsqu'il n'est pas couvert par un accord déterminant le contingent annuel d'heures supplémentaires, de fournir notamment au comité d'établissement des informations sur les modalités de leur utilisation en vue de sa consultation récurrente sur la politique sociale ; que cette consultation intervient annuellement, sans aucune obligation pour l'employeur quant au moment où elle doit avoir lieu dans l'année dès lors qu'il s'agit d'un point de consultation récurrent et non ponctuel en raison de l'élaboration d'un projet ; que le législateur a pris soin désormais d'opérer une distinction entre d'une part, les attributions générales du comité en prévoyant aux articles L.2312-8 et L.2312-14 du code du travail que les décisions de l'employeur portant en particulier sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'établissement, sont précédées de la consultation du CSE et ce, afin de garantir un effet utile à la consultation, et d'autre part, les attributions liées aux consultations stratégiques de l'entreprise, à la situation économique et financière et à la politique sociale, les conditions de travail et l'emploi mentionnées aux articles L. 2312-17 et suivants du code du travail prévoyant comme outil de ces consultations une base de données économiques et sociales rassemblant l'ensemble des informations nécessaires ; que le comité d'établissement lui fait grief de ne

pas l'avoir consulté conformément aux principes précédemment rappelés pour l'année 2017, alors que les règles de droit prévoient que l'examen des modalités d'utilisation des heures supplémentaires est désormais intégré dans le cadre de la consultation annuelle sur la politique sociale de l'entreprise ; que considérer, comme tente de le faire le comité en se référant à l'article L.3121-40, que cette question doit être traitée distinctement contreviendrait à l'objectif de simplification poursuivi par la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, en matière d'information et de consultation du comité d'entreprise ; qu'au cours de la réunion du 30 mars 2017, il a acté, dès lors que la consultation sur les heures supplémentaires avait déjà été opérée pour l'année 2016, de procéder pour les années à venir à une information en N-1 sur le recours aux heures supplémentaires ainsi que sur les conditions d'exécution, puis une information en vue de la consultation sur la politique sociale au cours des mois de juillet et août de l'année N, après avoir réalisé le bilan de l'année N-1 ; qu'en l'absence de temporalité fixée par les textes, le processus retenu a donc été celui d'une information préalable du comité sur le recours aux heures supplémentaires puis d'une information-consultation au cours de l'année considérée, dans le cadre de la consultation récurrente sur la politique sociale, sur les modalités d'exécution des heures supplémentaires comprises dans le contingent ; que ce procédé a été sanctionné de manière infondée par le tribunal qui a fait fi de la volonté du législateur de simplifier de façon substantielle les obligations des employeurs en matière d'information et de consultation du comité d'établissement ; que surtout, il ne tient pas compte du fait que les modalités d'utilisation du contingent d'heures supplémentaires sont les mêmes d'une année sur l'autre ; que la consultation du comité sur la réalisation d'heures supplémentaires pour 2016 a eu lieu lors de la réunion du 22 décembre 2015, et les élus ont dûment rendu leur avis lors de cette réunion ; que le comité ne saurait tirer argument de l'article 9 § 6 de la convention collective nationale de Pôle emploi pour affirmer qu'il devrait être consulté préalablement à l'utilisation des heures supplémentaires réalisées dans le cadre du contingent, cet article ne prévoyant une obligation préalable de consultation du CE qu'en cas de dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires ; qu'en l'espèce, Pôle emploi ne dépasse pas le contingent annuel d'heures supplémentaires ; que le comité a donc bien été consulté régulièrement au titre de l'année 2017 concernant le sujet des heures supplémentaires intégré à la consultation annuelle sur la politique sociale ; que le comité ne justifie d'aucun préjudice pour solliciter la somme 15 000 euros à titre de dommages et intérêts ; qu'en tout état de cause et si par extraordinaire la cour devait entrer en voie de condamnation, elle ne pourra qu'observer que les prétentions du comité sont disproportionnées ; que le comité social et économique devra par conséquent être débouté de l'intégralité de ses prétentions.

Le comité social et économique de Pôle emploi fait valoir que jusqu'aux modifications législatives récentes, le comité d'établissement était toujours consulté en amont quant aux cas et modalités de recours aux heures supplémentaires ; que pour l'année 2017, prenant prétexte des nouvelles dispositions législatives, Pôle emploi Centre-Val de Loire s'est dispensé de procéder à l'information/consultation de son comité d'établissement s'agissant des heures supplémentaires qui seraient réalisées ; qu'il est totalement inexact d'affirmer que la direction aurait procédé le 13 décembre 2016 à une information de ses élus, en visant la pièce adverse n° 4 qui est une note d'information du comité d'entreprise en vue de la réunion du 18 décembre 2018 ; que pour être utile, la consultation doit nécessairement précéder la décision elle-même, et à défaut, ce n'est plus une consultation, mais une information a posteriori ; que s'agissant des heures supplémentaires, selon l'article L.3121-40 du code du travail, à défaut d'accord, les modalités d'utilisation du contingent annuel d'heures supplémentaires et de son éventuel dépassement donnent lieu au moins une fois par an à la consultation du comité d'entreprise, ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent ; qu'il n'existe donc pas, au sein de Pôle emploi Centre-Val de Loire, d'accord réglementant les modalités d'utilisation du contingent d'heures supplémentaires ; que le comité d'établissement devait donc être consulté une fois par an en matière d'heures supplémentaires ; que dans le cas présent, il n'a jamais été consulté pour l'année 2017 ; que la dernière consultation conforme aux dispositifs légaux et conventionnels est intervenue, en effet, courant décembre 2015 pour l'année 2016 ; que Pôle emploi a considéré que c'est au moment de la note sur la politique sociale que le sujet des heures supplémentaires devait être abordé ; que de fait, aucune consultation n'est intervenue de manière préalable puisque la consultation sur la politique sociale est intervenue le 26 octobre 2017 pour des heures supplémentaires effectuées tout au long de l'année 2017 ; que Pôle emploi Centre-Val de Loire a donc méconnu ses obligations légales et il échoue à démontrer qu'il y aurait eu une consultation préalable pour l'utilisation des heures supplémentaires pour l'année 2016 ; qu'une telle situation s'est reproduite pour les heures supplémentaires 2018 ; que la note sur la politique sociale diffusée pour le comite d'établissement du 26 octobre 2017 ne contient aucune indication s'agissant des modalités d'utilisation des heures supplémentaires pour l'année 2018 permettant une consultation effective du comité d'établissement sur ce point avant la mise en 'uvre initiale de ces modalités ; qu'il est acquis que le défaut de consultation justifie l'indemnisation du comité d'entreprise sous forme de dommages-intérêts ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné l'établissement Pôle emploi Centre-Val de Loire, en raison de son manquement à son obligation légale et réglementaire de consultation du comité d'établissement Pôle Emploi Centre Val de Loire sur les modalités d'utilisation des heures supplémentaires l'ayant privé du plein exercice de ses compétences au paiement de la somme de 10 000 € de dommages-intérêts.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article L.2327-15 du code du travail, dans sa version applicable au litige, le comité d'établissement a les mêmes attributions que le comité d'entreprise, dans la limite des pouvoirs confiés au chef de cet établissement.

L'article L.3121-33 du code du travail, dans sa version alors applicable, dispose :

« Une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche ;

1° Prévoit le ou les taux de majoration des heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale ou de la durée considérée comme équivalente. Ce taux ne peut être inférieur à 10 % ;

2° Définit le contingent annuel prévu à l'article L. 3121-30 ;

3° Fixe l'ensemble des conditions d'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà du contingent annuel ainsi que la durée, les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire sous forme de repos prévue au même article L. 3121-30. [...]

Les heures supplémentaires sont accomplies, dans la limite du contingent annuel applicable dans l'entreprise, après information du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent.

Les heures supplémentaires sont accomplies, au-delà du contingent annuel applicable dans l'entreprise, après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent ».

À défaut d'accord, ce sont les dispositions supplétives prévues aux articles L.3121-35 à L.3121-40 qui ont vocation à s'appliquer.

L'article L.3121-39 du code du travail dispose qu'à défaut d'accord, un décret détermine le contingent annuel défini à l'article L.3121-30 ainsi que les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire sous forme de repos pour toute heure supplémentaire effectuée au-delà de ce contingent.

L'article L.3121-40 du code du travail, dans sa version alors applicable, dispose qu'à défaut d'accord, les modalités d'utilisation du contingent annuel d'heures supplémentaires et de son éventuel dépassement donnent lieu au moins une fois par an à la consultation du comité social et économique.

Il est établi qu'aucun accord n'a été établi au sein de Pôle emploi Centre-Val de Loire sur les modalités d'utilisation du contingent annuel d'heures supplémentaires et de son éventuel dépassement, et que jusqu'à l'année 2016, le comité d'établissement était consulté préalablement quant aux cas et modalités de recours aux heures supplémentaires du contingent annuel. Il s'ensuit que les dispositions des articles L.3121-35 à L.3121-40 doivent recevoir application, à l'exclusion des dispositions de l'article L.3121-33 du code du travail.

La consultation du comité d'établissement, devenu le comité social économique, prévue à l'article L.3121-40 du code du travail, vise à définir les motifs de recours aux heures supplémentaires du contingent réglementaire, les salariés concernés, ainsi que le volume d'heures supplémentaires auquel l'employeur souhaite avoir recours, en l'absence d'accord entre les

partenaires sociaux qui aurait pu définir ces éléments. En conséquence, la consultation prévue à l'article L.3121-40 du code du travail est nécessairement préalable au recours aux heures supplémentaires du contingent annuel réglementaire.

L'établissement Pôle emploi a, par suite de l'entrée en vigueur au 1er janvier 2016 de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, considéré que l'obligation consultative sur les heures supplémentaires a été intégrée à la consultation sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi et que cette consultation intervient annuellement, sans aucune obligation pour l'employeur quant au moment où elle doit avoir lieu dans l'année.

L'article L.2323-15 du code du travail, dans sa version résultant de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015, prévoit que la consultation annuelle sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi porte notamment sur la durée du travail.

L'article L.2323-17 du code du travail, dans sa version applicable, dispose qu'en vue de la consultation prévue à l'article L.2323-15, l'employeur met à la disposition du comité d'entreprise, dans les conditions prévues à l'article L.2323-9, les informations sur la durée du travail, portant sur :

« a) Les heures supplémentaires accomplies dans la limite et au-delà du contingent annuel applicable dans l'entreprise ;

b) À défaut de détermination du contingent annuel d'heures supplémentaires par voie conventionnelle, les modalités de son utilisation et de son éventuel dépassement dans les conditions prévues aux articles L. 3121-28 à L. 3121-39 ».

L'article L.2323-17 du code du travail prévoit donc une procédure d'information du comité d'entreprise sur les heures supplémentaires réalisées et sur les modalités d'utilisation du contingent annuel, et non une procédure de consultation du comité d'entreprise qui est nécessairement antérieure à l'utilisation des heures supplémentaires.

Surtout, la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 n'a pas modifié les dispositions de l'article L.3121-40 du code du travail, prévoyant qu'à défaut d'accord, les modalités d'utilisation du contingent annuel d'heures supplémentaires et de son éventuel dépassement donnent lieu au moins une fois par an à la consultation du comité social et économique.

Il s'ensuit que, si en application de l'article L.2323-15 du code du travail, le comité social et économique est consulté sur la durée du travail lors de la consultation annuelle sur la politique sociale de l'entreprise, la consultation sur les modalités d'utilisation du contingent annuel d'heures supplémentaires et de son éventuel dépassement ne peut être réalisée que préalablement à la réalisation des heures supplémentaires, soit au cours de l'année précédente.

En conséquence, Pôle emploi n'est pas fondé à soutenir que la consultation du comité d'établissement sur les modalités d'utilisation du contingent annuel d'heures supplémentaires et de son éventuel dépassement peut être réalisée

à tout moment, et notamment au cours de l'année pendant laquelle les heures supplémentaires en-deçà ou au-delà du contingent annuel ont été réalisées.

Pôle emploi ne justifie pas avoir consulté le comité d'établissement préalablement à l'utilisation des heures supplémentaires du contingent annuel pour l'année 2017. Ainsi, le document en date du 13 décembre 2016 dont il se prévaut, ne constitue pas une consultation du comité d'établissement mais une simple note d'information, laquelle précisait expressément que « pour 2017, c'est bien dans le cadre de la note sur la politique sociale que sera examinée la question des modalités d'application des heures supplémentaires en 2017 ».

Il n'est donc justifié d'aucune consultation du comité d'établissement sur les modalités d'utilisation du contingent annuel d'heures supplémentaires et de son éventuel dépassement.

En conséquence, le manquement de l'établissement Pôle emploi Centre-Val de Loire à son obligation légale de consultation annuelle du comité d'établissement sur les modalités d'utilisation des heures supplémentaires pour l'année 2017, est établi. Ainsi que le tribunal l'a retenu, ce manquement n'a pas permis au comité d'établissement de donner son avis et de faire des propositions alternatives lors de la consultation annuelle que l'établissement Pôle emploi Centre- Val de Loire devait réaliser, de sorte que le comité d'établissement a subi un préjudice résultant du non-respect de sa mission d'expression collective des salariés.

Le préjudice subi sera intégralement réparé par l'allocation de la somme de 5 000 euros à laquelle Pôle emploi Centre-Val de Loire sera condamnée. Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a condamné l'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire à verser au comité d'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts.

Sur les frais de procédure

Le jugement sera confirmé en ses chefs statuant sur les dépens et les frais irrépétibles.

Pôle emploi Centre-Val de Loire sera condamnée aux dépens d'appel, mais il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement en ce qu'il a condamné l'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire à verser au comité d'établissement Pôle emploi Centre Val de Loire la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts ;

CONFIRME le jugement en ses autres dispositions critiquées ;

STATUANT À NOUVEAU sur le chef infirmé et Y AJOUTANT :

CONDAMNE Pôle emploi Centre-Val de Loire à verser au comité social et économique de Pôle emploi une indemnité de 5 000 euros ;

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Pôle emploi Centre-Val de Loire aux entiers dépens d'appel.

Arrêt signé par Mme Anne-Lise COLLOMP, Présidente de Chambre et Mme Karine DUPONT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/02424
Date de la décision : 02/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-02;21.02424 ?
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