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25/06/2024 | FRANCE | N°24/01521

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre des rétentions, 25 juin 2024, 24/01521


ARÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Étrangers



ORDONNANCE du 25 JUIN 2024

Minute N°

N° RG 24/01521 - N° Portalis DBVN-V-B7I-HALV

(1 pages)



Décision déférée : Juge des libertés et de la détention d'Orléans en date du 22 juin 2024 à 15h40



Nous, Alexandre David, président de chambre à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assisté de Hermine Bildstein, gre

ffier, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,





APPELANT :

M. X se disant [G] [E]

né le 9 septembre 1997 à [Localité 2], de nationalité algé...

ARÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Étrangers

ORDONNANCE du 25 JUIN 2024

Minute N°

N° RG 24/01521 - N° Portalis DBVN-V-B7I-HALV

(1 pages)

Décision déférée : Juge des libertés et de la détention d'Orléans en date du 22 juin 2024 à 15h40

Nous, Alexandre David, président de chambre à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assisté de Hermine Bildstein, greffier, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,

APPELANT :

M. X se disant [G] [E]

né le 9 septembre 1997 à [Localité 2], de nationalité algérienne,

actuellement en rétention administrative dans des locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire du centre de rétention administrative d'[Localité 5],

comparant par visioconférence, assisté de Me Karim Zemmouri, avocat au barreau d'Orléans,

en présence de Mme [I] [T], interpète en langue arabe, expert près la cour d'appel d'Orléans, qui a prêté son concours lors de l'audience et du prononcé ;

INTIMÉ :

LA PRÉFECTURE D'EURE-ET-LOIR

non comparante, non représentée ;

MINISTÈRE PUBLIC : avisé de la date et de l'heure de l'audience ;

À notre audience publique tenue en visioconférence au Palais de Justice d'Orléans, conformément à l'article L. 743-8 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), le 25 juin 2024 à 10 heures ;

Statuant en application des articles L. 743-21 à L. 743-23 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), et des articles R. 743-10 à R. 743-20 du même code ;

Vu l'ordonnance rendue le 22 juin 2024 à 15h40 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Orléans ordonnant la jonction des procédures de demande de prolongation par la préfecture et de recours contre l'arrêté de placement en rétention administrative par le retenu, rejetant l'exception de nullité soulevée, rejetant le recours formé contre l'arrêté de placement en rétention administrative, et ordonnant la prolongation du maintien de M. X se disant [G] [E] dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de vingt huit jours à compter du 22 juin 2024 à 8h30 ;

Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 24 juin 2024 à 15h33 par M. X se disant [G] [E] ;

Après avoir entendu :

- Me Karim zemmouri, en sa plaidoirie,

- M. X se disant [G] [E], en ses observations, ayant eu la parole en dernier ;

AVONS RENDU ce jour, publiquement et contradictoirement, l'ordonnance suivante :

Il résulte de l'article 66 de la Constitution et de l'article L. 743-9 du CESEDA que le juge des libertés doit s'assurer que l'étranger est pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir lorsqu'il se trouve placé en rétention administrative.

Aux termes de l'article L. 743-12 du CESEDA, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la main levée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.

Selon l'article L. 741-3 du CESEDA , « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps nécessaire à son départ, l'administration étant tenue d'exercer toutes diligences à cet effet, dès le placement en rétention »,

Il convient de considérer que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qu'il y a lieu d'adopter que le premier juge a statué sur l'ensemble des moyens de nullité et de fond soulevés devant lui et repris devant la cour, étant observé, au vu des termes de la déclaration d'appel du retenu du 24 juin 2024 et des moyens repris lors des débats de ce jour :

1. Sur la régularité de la procédure

Sur l'information du procureur de la République de la mesure de placement, M. [G] [E], qui reprend les moyens de nullité soulevés en première absence, invoque l'irrégularité de l'avis fait au procureur avant la notification du placement.

Il résulte des dispositions de l'article L.741-8 du CESEDA que le procureur de la République est informé du placement en rétention du retenu, et ce dès le début de la mesure.

Seule une circonstance insurmontable peut justifier un éventuel retard dans l'information du procureur.

Le défaut d'information du procureur de la République quant au placement en rétention de l'étranger entache la procédure d'une nullité d'ordre public, sans qu'il soit nécessaire de démontrer l'existence d'une atteinte portée à ses droits (1ère Civ. 14 octobre 2020, pourvoi n°19 15.197), et il en est de même pour le retard de cette information (1ère Civ. 17 mars 2021, pourvoi n° 19-22.083).

Toutefois aucun formalisme n'est exigé quant à cette information, et rien n'empêche que cet avis soit effectué antérieurement à la décision de placement, pourvu que le magistrat compétent ait été avisé de la mesure dans des conditions lui permettant d'exercer son contrôle.

En l'espèce, la préfecture d'Eure-et-Loir a avisé les parquets de Chartres et d'Orléans, par courriel du 16 juin 2024, que Monsieur X se disant [E] [G], né le 9 septembre 1997 à [Localité 2] en Algérie et se déclarant de nationalité algérienne, serait libéré le jeudi 20 juin 2024 et placé en rétention administrative ce même jour à 8h30, puis transféré au CRA d'[Localité 5].

Ce faisant, les services préfectoraux n'ont commis aucune erreur et ont donné au procureur de la République des informations claires et précises sur la procédure devant être diligentée à l'encontre de M. [G] [E], ce qui permettait à ce magistrat d'exercer son contrôle. Le moyen est donc rejeté.

Sur le moyen tiré de la notification du placement en rétention, M. [G] [E] se prévaut du défaut de mention de la date et du nom de l'agent ayant notifié la décision. Toutefois, il ressort de la fiche de notification de l'arrêté de placement que cet acte a eu lieu, par l'intermédiaire du gendarme [Z], agent de la force publique, concomitamment à la levée d'écrou de l'intéressé le 20 juin 2024 de 8h30 à 8h45. À cette occasion, le retenu s'est vu remettre une copie des documents suivants : la fiche de notification, l'arrêté portant placement en rétention administrative, les voies et délais de recours, les droits en rétention, et le règlement intérieur du CRA. Dès lors, il sera considéré que la notification de l'arrêté de placement en rétention et des droits y afférents a été immédiatement réalisée, conformément aux exigences de l'article L.744-4 du CESEDA.

Au surplus, à le supposer établi, le défaut de date et d'heure mentionnée sur le procès-verbal de notification des droits en rétention dressé en application de l'article R. 744-16 du CESEDA n'était pas susceptible de faire grief à M. [G] [E], dans la mesure où le registre du centre de rétention précise que ses droits lui ont été notifiés au CRA le 20 juin 2024 à 10h40 soit 20 minutes après son arrivée au centre d'[Localité 5]. Enfin, il est constant que le retenu a pu exercer ses droits puisqu'il a contesté son placement en rétention a pu bénéficier de l'assistance d'un avocat. Le moyen est rejeté.

2. Sur le placement en rétention administrative

Sur le défaut d'examen de la situation personnelle du retenu, M. [G] [E], se fondant sur les dispositions combinées des articles L. 731-1, L. 741-1 et L. 612-3 8° du CESEDA, reproche à l'administration d'avoir privilégié la décision de placement sans prendre en considération son adresse stable au [Adresse 1] à [Localité 6] (Seine Saint-Denis), chez son frère. Il conteste également le fait que son comportement soit constitutif d'un trouble à l'ordre public et susceptible de caractériser un risque de fuite.

Sur ce point, la cour rappelle au préalable que le préfet n'est pas tenu, dans sa décision, de faire état de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé dès lors que les motifs positifs qu'il retient suffisent à justifier le placement en rétention, qui est la date à laquelle le juge doit se placer pour apprécier la légalité de la décision de placement.

En l'espèce, le préfet d'Eure-et-Loir a notamment justifié sa décision de placement en rétention du 19 juin 2024 par l'absence de document d'identité et de voyage en cours de validité détenu par l'intéressé, l'impossibilité pour ce dernier d'acquérir légalement les moyens de quitter le territoire français dans la mesure où il est dépourvu de droit au travail, le fait qu'il ne justifie pas de l'hébergement dont il dispose chez son frère, et la menace qu'il représente pour l'ordre public.

S'agissant de la menace à l'ordre public, l'administration justifie, par la production d'une fiche pénale, que l'intéressé a été récemment condamné, par jugement du 9 mai 2023 du tribunal correctionnel de Versailles, à une peine de 18 mois d'emprisonnement avec maintien en détention et d'interdiction définitive du territoire, pour des faits de vol par ruse, effraction ou escalade dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt aggravé par une autre circonstance en récidive et d'escroquerie. Il est également observé que si l'intéressé a bénéficié de plusieurs mois de remise de peine, sa libération sous contrainte a été refusée, par décision de la Commission d'Application des Peines du 23 mai 2024. En tout état de cause, le caractère récent de cette condamnation, qui a justifié l'interdiction définitive du territoire français, est de nature à caractériser un trouble à l'ordre public aggravant le risque de fuite au sens des articles L. 741-1 et L.612-3 8° du CESEDA.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, le préfet d'Eure-et-Loir a justifié sa décision de placement et n'a commis aucune erreur d'appréciation, l'intéressé étant dépourvu de garanties effectives de représentation propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure d'éloignement dont il fait l'objet. La seule présence d'un hébergement, qui n'est justifiée par aucun document probant, ne pouvait permettre de privilégier une assignation à résidence dans la situation de M. [G] [E]. Le moyen est rejeté.

La demande d'assignation à résidence judiciaire est insusceptible de prospérer, l'intéressé étant dépourvu de document de voyage en cours de validité et ne disposant pas de garanties effectives de représentation propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure d'éloignement dont il fait l'objet, ce qui a déjà été développé ci-dessus. Il ne répond donc pas aux exigences de l'article L743-13 du CESEDA. Le moyen est rejeté.

3. Sur la requête en prolongation de la rétention

M. [G] [E] invoque un défaut d'actualisation du registre.

Aux termes de l'article R. 743-2 du CESEDA : « À peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l'étranger ou son représentant ou par l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.

Lorsque la requête est formée par l'autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L. 744-2 (') ».

En l'espèce, les pièces transmises par le préfet d'Eure-et-Loir à l'appui de sa demande de prolongation de la rétention administrative de M. [G] [E] comportent bien la copie du registre de rétention et l'intéressé n'apporte aucun élément permettant de conclure au défaut d'actualisation de ce document. Le moyen est rejeté.

Enfin, s'agissant des diligences de l'administration, M. [G] [E] invoque le caractère insuffisant des démarches entreprises par la préfecture d'Eure-et-Loir qui aurait dû, selon lui, saisir le consulat avant sa levée d'écrou.

Toutefois, il n'y a pas lieu d'imposer à l'administration l'accomplissement de diligences nécessaires à l'éloignement de l'étranger durant la période d'incarcération ayant précédé son placement en rétention (1ère Civ. 17 octobre 2019, pourvoi n° 19-50.002, publié).

Parmi les pièces associées à la requête préfectorale du 21 juin 2024 figure la saisine des autorités consulaires algériennes par courriels des 11 et 20 juin 2024, dans lesquels sont joints les éléments utiles à l'identification de l'intéressé, à savoir son audition administrative ainsi que l'ensemble de la procédure contradictoire dont il a fait l'objet avant son placement en rétention, la copie du jugement prononçant son interdiction définitive du territoire, et des photographies d'identité.

Ainsi, l'autorité administrative a effectué des diligences nécessaires et suffisantes à ce stade de la procédure administrative de rétention, s'agissant d'une première demande de prolongation. Il est également rappelé qu'elle ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires, de sorte qu'il ne peut lui être reproché le défaut de réponse du consulat.

Au surplus, il convient de relever que le retenu a lui-même fait obstacle à son identification en refusant d'être extrait du centre de détention de [Localité 3] en vue de l'audition consulaire qui était prévue le 14 juin 2024 au consulat de [Localité 4]. Le moyen est rejeté.

Étant observé qu'en cause d'appel, la requête du préfet tendant à la prolongation motivée tant en droit qu'en fait a été réitérée et en l'absence de toute illégalité susceptible d'affecter les conditions, découlant du droit de l'Union, de la légalité de la rétention et à défaut d'autres moyens présentés en appel, il y a lieu de confirmer l'ordonnance attaquée.

PAR CES MOTIFS,

DÉCLARONS recevable l'appel de M. [G] [E] ;

DÉCLARONS non fondés l'ensemble des moyens et les rejetons ;

CONFIRMONS l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 22 juin 2024 ayant ordonné la prolongation de la rétention administrative pour une durée de vingt huit jours ;

LAISSONS les dépens à la charge du Trésor ;

ORDONNONS la remise immédiate d'une expédition de la présente ordonnance à la préfecture d'Eure-et-Loir, à M. X se disant [G] [E] et son conseil, et au procureur général près la cour d'appel d'Orléans ;

Et la présente ordonnance a été signée par Alexandre David, président de chambre, et Hermine Bildstein, greffier présent lors du prononcé.

Fait à Orléans le VINGT CINQ JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE, à heures

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Hermine BILDSTEIN Alexandre DAVID

Pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien la rétention et au ministère public. Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification. Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

NOTIFICATIONS, le 25 juin 2024 :

La préfecture d'Eure-et-Loir, par courriel

Monsieur le procureur général près la cour d'appel d'Orléans, par courriel

M. X se disant [G] [E] , copie remise par transmission au greffe du CRA

Me Karim Zemmouri, avocat au barreau d'Orléans, copie remise en main propre contre récépissé

L'interprète L'avocat de l'intéressé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre des rétentions
Numéro d'arrêt : 24/01521
Date de la décision : 25/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-25;24.01521 ?
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