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11/06/2024 | FRANCE | N°24/01330

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre des rétentions, 11 juin 2024, 24/01330


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Étrangers



ORDONNANCE du 11 JUIN 2024

Minute N°

N° RG 24/01330 - N° Portalis DBVN-V-B7I-G77F

(1 pages)





Décision déférée : Juge des libertés et de la détention d'Orléans en date du 7 juin 2024 à 11h30



Nous, Alexandre David, président de chambre à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assisté de Hermine Bildstei

n, greffier stagiaire en pré-affectation sur poste, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,





APPELANT :

M. [J] [T] [K]

né le 5 octobre 2001 à [Loc...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Étrangers

ORDONNANCE du 11 JUIN 2024

Minute N°

N° RG 24/01330 - N° Portalis DBVN-V-B7I-G77F

(1 pages)

Décision déférée : Juge des libertés et de la détention d'Orléans en date du 7 juin 2024 à 11h30

Nous, Alexandre David, président de chambre à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assisté de Hermine Bildstein, greffier stagiaire en pré-affectation sur poste, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,

APPELANT :

M. [J] [T] [K]

né le 5 octobre 2001 à [Localité 1], de nationalité guinéenne,

actuellement en rétention administrative dans des locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire du centre de rétention administrative d'[Localité 2],

comparant par visioconférence, assisté de Me Chloé Beaufreton, avocat au barreau d'Orléans,

avec l'assistance de M. [S] [D], interpète en langue soussou, expert près la cour d'appel de Douais, qui a prêté son concours par voie téléphonique lors de l'audience et du prononcé ;

INTIMÉ :

LA PRÉFECTURE DE LA LOIRE-ATLANTIQUE

non comparante, non représentée ;

MINISTÈRE PUBLIC : avisé de la date et de l'heure de l'audience ;

À notre audience publique tenue en visioconférence au Palais de Justice d'Orléans, conformément à l'article L. 743-8 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), le 11 juin 2024 à 10 heures ;

Statuant en application des articles L. 743-21 à L. 743-23 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), et des articles R. 743-10 à R. 743-20 du même code ;

Vu l'ordonnance rendue le 7 juin 2024 à 11h30 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Orléans ordonnant la prolongation du maintien de M. [J] [T] [K] dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de trente jours à compter du 6 juin 2024 ;

Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 10 juin 2024 à 10h20 par M. [J] [T] [K] ;

Vu les observations et pièces de la préfecture reçues au greffe le 10 juin 2024 à 18h05 ;

Après avoir entendu :

- Me Chloé Beaufreton, en sa plaidoirie,

- M. [J] [T] [K], en ses observations, ayant eu la parole en dernier ;

AVONS RENDU ce jour, publiquement et contradictoirement, l'ordonnance suivante :

Aux termes de l'article L. 742-4 du CESEDA : « Le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu'à l'article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :

1° En cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public ;

2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;

3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement

b) de l'absence de moyens de transport.

L'étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l'article L. 742-2.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours ».

M. [J] [T] [K], se fondant sur les dispositions de l'article L. 742-4 du CESEDA, estime insuffisantes les diligences de l'administration. Il affirme que la préfecture n'a pas effectué les diligences nécessaires pour obtenir un laissez-passer et un vol, en ce qu'elle n'a adressé aucune relance au consulat de Guinée depuis son placement en rétention du 7 mai 2024.

Aux termes de l'article L. 741-3 du CESEDA, « un étranger ne peut être placé ou maintenu que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet ».

L'article 15.1 alinéa 4 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier prévoit : « toute rétention est aussi brève que possible et n'est maintenue qu'aussi longtemps que le dispositif d'éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise ».

Ainsi, pour voir accueillir une demande de deuxième prolongation, l'administration doit non seulement démontrer qu'elle se trouve dans l'un des cas de figure énumérés à l'article L. 742-4 du CESEDA mais également justifier des diligences accomplies pour organiser le départ de l'étranger.

Il n'y a pas lieu d'imposer à l'administration d'effectuer des actes sans réelle effectivité, tels que des relances auprès des consulats, dès lors que celle-ci ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires (1ère Civ., 9 juin 2010, pourvoi n° 09-12.165). Le juge demeure toutefois tenu de vérifier que les autorités étrangères ont été requises de manière effective.

En l'espèce, la préfecture de Loire-Atlantique a saisi les autorités consulaires guinéennes par courriel du 7 mai 2024, en informant l'ambassade du placement en rétention administrative de l'intéressé, et en précisant que le dossier leur serait déposé, selon la procédure habituelle, par la police aux frontières.

Il ressort des termes de ce courriel que la préfecture de Loire-Atlantique fait référence à la saisine de l'Unité Centrale d'Identification, service affilié au Pôle Central d'Eloignement de la Police Aux Frontières.

Il résulte notamment de l'information du 9 janvier 2019 relative à la réorganisation de l'appui aux demandes de laissez-passer consulaires (LPC) et aux modalités de centralisation des demandes que l'UCI est chargée de la centralisation des demandes de laissez-passer consulaire adressées à une liste de pays parmi lesquels figure la Guinée.

Dans ce dossier, la préfecture de Loire-Atlantique ne justifie pas de la saisine de l'Unité Centrale d'Identification. Toutefois, cela relève d'une organisation interne de l'administration, qui échappe au contrôle du juge judiciaire.

La cour demeure néanmoins compétente pour s'assurer de la saisine effective des autorités consulaires, qui doivent être en mesure d'identifier l'étranger afin de le reconnaître comme un de leurs ressortissants et de délivrer un laissez-passer consulaire. Or, le courriel du 7 mai 2024 adressé à l'ambassade de Guinée ne comprend qu'une seule pièce jointe intitulée « Diligences » et aucune autre correspondance avec cette dernière n'a eu lieu durant la première période de rétention administrative de 30 jours. Dans ces conditions, il n'est pas établi que les éléments utiles à l'identification de M. [J] [T] [K], tels que des photographies, des empreintes ou encore une audition sur sa situation administrative, aient été transmis aux autorités consulaires.

Par conséquent, l'autorité administrative ne justifie pas d'une saisine effective des autorités consulaires guinéennes. Il n'est pas établi qu'elle ait accompli des diligences suffisantes pour mettre à exécution l'éloignement de l'intéressé.

En présence d'une carence dans les diligences de l'administration, le maintien en rétention ne saurait se justifier, sauf à méconnaître les exigences résultant de l'article L. 741-3 du CESEDA et du droit de l'Union.

La circonstance que M. [J] [T] [K] ait été impliqué dans des incidents pendant la période de rétention et ait été placé à deux reprises à l'isolement ne suffit pas à caractériser une menace pour l'ordre public au sens de l'article L. 742-4 du CESEDA.

Il convient donc, par voie d'infirmation de l'ordonnance déférée, de dire n'y avoir lieu à une seconde prolongation de la rétention administrative de M. [J] [T] [K].

PAR CES MOTIFS,

DÉCLARONS recevable l'appel de M. [J] [T] [K] ;

INFIRMONS l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 7 juin 2024 ayant ordonné la prolongation de la rétention administrative pour une durée de 30 jours.

STATUANT À NOUVEAU,

DÉCLARONS irrégulière la procédure diligentée à l'égard de M. [J] [T] [K],

DISONS n'y avoir lieu à une seconde prolongation de la rétention administrative de M. [J] [T] [K] dans les locaux non pénitentiaires,

ORDONNONS en conséquence la remise en liberté de M. [J] [T] [K] ;

LAISSONS les dépens à la charge du Trésor ;

ORDONNONS la remise immédiate d'une expédition de la présente ordonnance à la préfecture de la Loire-Atlantique, à M. [J] [T] [K] et son conseil, et au procureur général près la cour d'appel d'Orléans ;

Et la présente ordonnance a été signée par Alexandre David, président de chambre, et Hermine Bildstein, greffier présent lors du prononcé.

Fait à Orléans le ONZE JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE, à heures

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Hermine BILDSTEIN Alexandre DAVID

Pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien la rétention et au ministère public. Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification. Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

NOTIFICATIONS, le 11 juin 2024 :

La préfecture de la Loire-Atlantique, par courriel

Monsieur le procureur général près la cour d'appel d'Orléans, par courriel

M. [J] [T] [K] , copie remise par transmission au greffe du CRA

Me Chloé Beaufreton, avocat au barreau d'Orléans, copie remise en main propre contre récépissé

L'avocat de l'intéressé


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre des rétentions
Numéro d'arrêt : 24/01330
Date de la décision : 11/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-11;24.01330 ?
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