COUR D'APPEL D'ORLÉANS
C H A M B R E C I V I L E
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 07/05/2024
Me Véronique HERMELIN
la SCP SIMARD VOLLET OUNGRE CLIN
ARRÊT du : 7 MAI 2024
N° : - 24
N° RG 21/01749 - N° Portalis DBVN-V-B7F-GMM6
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Blois en date du 06 Mai 2021
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: exonération
Madame [O] [L] épouse [S]
née le [Date naissance 3] 1969 à [Localité 28]
[Adresse 9]
[Localité 28]
représentée par Me Véronique HERMELIN, avocat au barreau D'ORLEANS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/004000 du 21/06/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ORLEANS)
D'UNE PART
INTIMÉS :
- Timbre fiscal dématérialisé N°: exonération
Madame [Z] [L] divorcée [B]
née le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 27]
[Adresse 30]
[Adresse 34]
[Localité 29]
représentée par Me Antoine VOLLET de la SCP SIMARD VOLLET OUNGRE CLIN, avocat au barreau D'ORLEANS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/005416 du 20/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ORLEANS)
- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265285207905634
Monsieur [M] [L]
né le [Date naissance 4] 1958 à [Localité 27]
[Adresse 32]
[Localité 25]
représenté par Me Nathalie VAILLANT, avocat au barreau de BLOIS
- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265266809362249
Monsieur [N] [L]
né le [Date naissance 13] 1987 à [Localité 40]
[Adresse 31]
[Localité 18]
représenté par Me Nelly GALLIER, avocat au barreau de BLOIS
Monsieur [K] [L]
[Adresse 15]
[Localité 19]
non représenté
Madame [J] [L]
[Adresse 21]
[Localité 23]
non représentée
Madame [H] [L]
Chez M. [A] [U], [Adresse 11]
[Localité 24]
non représentée
Madame [P] [L]
[Adresse 22]
[Localité 14]
non représentée
Madame [E] [L]
née le [Date naissance 16] 1985 à [Localité 28]
[Adresse 20]
[Localité 5]
non représentée
Madame [Y] [L]
[Adresse 6]
[Localité 28]
non représentée
Monsieur [V] [L]
né le [Date naissance 2] 1978 à [Localité 28]
chez M. [A] [U], [Adresse 11]
[Localité 24]
non représenté
Monsieur [F] [L]
[Adresse 12]
[Localité 26]
non représenté
Monsieur [C] [L]
[Adresse 17]
[Localité 27]
non représenté
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du :24 Juin 2021
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 19 février 2024
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats, du délibéré :
Mme Anne-Lise COLLOMP, Présidente de chambre,
M. Laurent SOUSA, Conseiller,
Mme Laure-Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, en charge du rapport.
Greffier :
Mme Karine DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé.
DÉBATS :
Les débats ont eu lieu à l'audience publique du 11 mars 2024,
ARRÊT :
Prononcé le 7 mai 2024 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
***
FAITS ET PROCÉDURE
[W] [L] est décédé le [Date décès 10] 2007, laissant pour lui succéder,
- ses cinq enfants, [K], [Z], [G], [M] et [O] [L],
- ses huit petits-enfants, [P], [V], [F], [H], [C] et [J] [L] venant en représentation de leur père [I] [L] prédécédé, [E] et [Y] [L] venant en représentation de leur père [D] [L] également prédécédé.
Par actes d'huissier en date des 17, 24 juillet et 17 septembre 2008, [K], [Z], [J], [H] et [P] [L] ont fait assigner [O], [M], [E], [Y], [G], [V], [F] et [C] [L] devant le tribunal de grande instance de Blois aux fins notamment de voir ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation partage de la succession d'[W] [L] et déclarer nul le testament produit à la succession daté du 12 novembre 2001.
Par jugement du 31 octobre 2013, le tribunal a notamment :
- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation ;
- désigné Maître [T], notaire ;
- rappelé que les parties devaient lui remettre tout document ;
- rejeté la demande de nullité du testament du 12 novembre 2001 ;
- rejeté la demande de rapport à succession, au titre des contrats d'assurance vie ;
- dit que Mme [O] [S] rapporterait à la succession la somme de 2 265 euros et qu'elle serait privée de tout droit sur cette somme ;
- dit que Mme [O] [S] rapporterait à la succession, en ce qui concerne l'immeuble situé [Adresse 35] à [Localité 28], la valeur du bien au jour de l'aliénation, d'après son état à l'époque de la donation laquelle est contemporaine de l'acquisition,
- dit que Mme [O] [S] rapporterait à la succession, en ce qui concerne l'immeuble situé [Adresse 7] à [Localité 28], dans la mesure où elle n'établit pas qu'il a été subrogé à l'immeuble situé [Adresse 35], la valeur du bien à l'époque du partage, d'après son état au jour de l'acquisition ou d'après le montant correspondant à l'acquisition du terrain et au coût de la construction dont la défenderesse devra justifier auprès du notaire liquidateur ;
- rejeté toute demande de dommages et intérêts formée contre Mme [O] [S].
Par arrêt du 7 septembre 2015, la cour d'appel d'Orléans a confirmé le jugement.
Le 5 janvier 2018, Maître [R] a dressé un procès-verbal de difficultés.
Le [Date décès 33] 2019, M. [K] [L] est décédé, laissant pour lui succéder son fils unique, [N] [L], intervenu volontairement à l'instance encore pendante devant le tribunal de grande instance de Blois.
Par jugement en date du 6 mai 2021, le tribunal judiciaire de Blois a :
- donné acte à M. [N] [L] de son intervention volontaire en qualité d'ayant droit de son défunt père, M. [K] [L] ;
- condamné Mme [O] [S] à verser à l'indivision successorale, à titre de provision, la somme de 2 265 euros correspondant à son rapport à la succession et autorisé le notaire liquidateur désigné à recouvrer cette somme par toutes voies de droit à son encontre ;
- condamné Mmes [E] et [Y] [L] à verser à l'indivision successorale, à titre de provision, la somme de 6 097 euros et autorisé le notaire liquidateur désigné à recouvrer cette somme par toutes voies de droit à leur encontre ;
- dit que le notaire liquidateur désigné procédera à la vente sur licitation à la barre du
tribunal judiciaire de Blois de l'immeuble indivis situé [Adresse 36] à [Localité 28] sur les prévisions du cahier des charges qu'il aura établi et sur la mise à prix de 90 000 euros avec, à défaut d'enchères, baisse de mise à prix du tiers, en application des dispositions de l'article 1273 du code de procédure civile ;
- débouté M. [N] [L] et Mme [Z] [L] de leurs demandes tendant à voir ordonner la vente amiable dudit immeuble, de désigner un mandataire chargé de représenter l'indivision successorale aux fins de mise en vente amiable de celui-ci avec mise à la charge de chacun des indivisaires d'une provision à valoir sur la rémunération du mandataire ;
- enjoint à Mme [O] [S] de remettre au notaire liquidateur les actes concernant l'acquisition et la vente du terrain situé [Adresse 8] à [Localité 28] et les factures de construction afférentes à ce bien immobilier, dans un délai d'un mois à compter de la signification qui lui sera faite de la décision, à peine d'astreinte de 150 euros par jour de retard ;
- dit que Mme [O] [S] rapportera à la succession de M. [W] [L] la somme de 125 288 euros au titre de l'immeuble situé [Adresse 35] à [Localité 28] ;
- renvoyé les parties devant le notaire liquidateur désigné aux fins d'établissement des comptes et du partage de la succession à l'issue de la vente sur licitation du bien immobilier situé [Adresse 36] à [Localité 28] ;
- condamné Mme [O] [S] à payer à Mme [Z] [L] et à M. [N] [L] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté les parties de toutes leurs demandes plus amples et contraires,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- condamné Mme [O] [S] aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions légales relatives à l'aide juridictionnelle.
Par déclaration en date du 24 juin 2021, Mme [O] [L] épouse [S] a relevé appel de l'intégralité des chefs de ce jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser à l'indivision successorale, à titre de provision, la somme de 2 265 euros correspondant à son rapport à la succession et autorisé le notaire liquidateur désigné à recouvrer cette somme par toutes voies de droit à son encontre ; enjointe de remettre au notaire liquidateur les actes concernant l'acquisition et la vente du terrain situé [Adresse 8] à [Localité 28] et les factures de construction afférentes à ce bien immobilier, dans un délai d'un mois à compter de la signification qui lui sera faite de la décision, à peine d'astreinte de 150 euros par jour de retard ; dit qu'elle rapportera à la succession de M. [W] [L] la somme de 125 288 euros au titre de l'immeuble situé [Adresse 35] à [Localité 28] ; condamnée à payer à Mme [Z] [L] et à M. [N] [L] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; ordonné l'exécution provisoire de la décision et condamnée aux dépens.
Mme [O] [S], Mme [Z] [B], MM. [M] et [N] [L] ont constitué avocat et ont conclu.
La déclaration d'appel a été signifiée à domicile à M. [F] [L] et par remise en étude à Mme [P] [L] par actes d'huissier en date du 31 août 2021 ; par remise en étude à Mme [H] [L] par acte d'huissier en date du 1er septembre 2021 ; par remise en étude à Mme [J] [L] par acte d'huissier en date du 26 août 2021 ; à personne à Mme [Y] [L], par remise en étude à M. [C] [L], par remise en étude à M. [V] [L] par actes d'huissier en date du 10 septembre 2021 ; par procès-verbal de recherches infructueuses à Mme [E] [L] par acte d'huissier en date du 15 septembre 2021.
Par ordonnance d'incident en date du 24 mai 2022, le conseiller de la mise en état a :
- rejeté les demandes tendant à voir prononcer l'irrecevabilité de l'appel interjeté par
Mme [S],
- dit n'y avoir lieu de déclarer irrecevables comme nouvelles les demandes formées en cause d'appel par Mme [S],
- dit n'y avoir lieu d'ordonner la radiation de l'affaire du rôle des affaires en cours,
- dit que le conseiller de la mise en état n'a pas compétence pour statuer sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- rejeté les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,
- condamner MM. [N] et [M] [L], in solidum, aux dépens de l'incident, dont
distraction au profit de Maître Véronique Hermelin, avocat.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 février 2024.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 11 janvier 2024, Mme [O] [S] demande à la cour de :
- juger irrecevable la demande de dommages et intérêts de M. [M] [L], présentée par conclusions du 21 décembre 2023,
Subsidiairement, l'en débouter
- débouter MM. [M] et [N] [L] de l'ensemble de leurs prétentions,
- débouter Mme [Z] [L] de l'ensemble de ses prétentions dirigées à l'encontre de la concluante,
- donner acte à l'appelante qu'elle s'en rapporte à justice sur la demande incidente de Mme [Z] [L] du chef de la vente amiable du bien immobilier sis [Adresse 36] à [Localité 28],
- recevoir Mme [O] [S] en son appel et l'en déclarée bien fondée,
- infirmer le jugement du 6 mai 2021 du chef du rapport à la succession de M. [W]
[L], par sa fille Mme [O] [S], au titre de l'immeuble situé [Adresse 35] à [Localité 28], chiffré à la somme de 125 288 euros,
Statuant à nouveau,
A titre principal,
- dire que Mme [O] [S] rapportera à la succession la somme de 39 636,75 euros pour l'immeuble situé [Adresse 35] à [Localité 28],
A titre subsidiaire,
- dire que Mme [O] [S] rapportera à la succession la somme de 57 930,63 euros pour l'immeuble situé [Adresse 35] à [Localité 28],
- infirmer le jugement du 6 mai 2021 en ce qu'il a enjoint à Mme [O] [S] de remettre au notaire liquidateur les actes relatifs à l'acquisition et à la vente du terrain situé [Adresse 9] a [Localité 28], les factures de construction afférentes à ce bien immobilier et ce, dans un délai d'un mois à compter de la signification de la décision, à peine d'astreinte de 150 euros par jour de retard,
Statuant à nouveau :
- constater que nonobstant son recours, Mme [O] [S], de bonne foi, a remis lesdits documents au notaire liquidateur,
- juger que le rapport à succession n'est dû par Mme [O] [S] que pour la valeur d'acquisition des deux terrains situés [Adresse 9] a [Localité 28], soit la somme de 25 916,33 euros,
- infirmer le jugement du 6 mai 2021 du chef des frais irrépétibles et des dépens,
Statuant à nouveau :
- laisser à la charge de chacune des parties, ses propres dépens de première instance,
Y ajoutant et en cause d'appel,
- laisser à la charge de chacune des parties les dépens par elles exposés et les y condamner,
- condamner in solidum MM. [M] et [N] [L] et Mme [Z] [L], à payer et porter à Me Véronique Hermelin, avocat au barreau d'Orléans, la somme de 3 600 euros TTC représentant 3 000 euros HT au visa de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile,
- rejeter toutes demandes plus amples ou contraires.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 3 janvier 2024, Mme [Z] [B] demande à la cour de :
- accueillir Mme [Z] [L] en son appel incident et l'en déclarer bien fondé,
- infirmer le jugement rendu le 6 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Blois en ce qu'il a refusé d'ordonner la vente amiable du bien situé [Adresse 36] à [Localité 28],
- ordonner la vente amiable dudit bien immobilier,
- confirmer le jugement entrepris pour le surplus,
- rejeter les demandes de Mme [O] [S],
- condamner Mme [O] [S] à payer à Me Antoine Vollet, avocat, la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile.
- dire qu'en cas de recouvrement forcé, les droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement devront être supportés par Mme [O] [S] en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme [O] [S] aux entiers dépens sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 21 décembre 2023, M. [M] [L] demande à la cour de :
Statuant sur l'appel de Mme [O] [S] à l'encontre du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Blois le 6 mai 2021,
- débouter Mme [S] de l'ensemble de ses demandes,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Blois le 6 mai 2021,
Y ajoutant,
- condamner Mme [S] à verser à titre de provision 57 930,63 euros à l'indivision successorale correspondant à ce qu'elle considère comme son rapport à succession et autoriser le notaire liquidateur désigné à recouvrer cette somme par toutes voies de droit à son encontre,
- donner acte à M. [M] [L] de ce qu'il s'en rapporte sur l'appel incident de Mme [B] du jugement dont appel en ce qu'il a refusé d'ordonner la vente amiable du bien situé [Adresse 36] à [Localité 28] et désigner un mandataire à cette fin,
- condamner Mme [S] à verser à M. [M] [L] la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamner Mme [S] à verser à M. [M] [L] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme [S] aux entiers dépens en cause d'appel.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 13 décembre 2023, M. [N] [L] demande à la cour de :
- déclarer mal fondée Mme [O] [S] en toutes ses demandes,
En tout état de cause,
- confirmer dans toutes ses dispositions ledit jugement,
- débouter Mme [S] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- la condamner à verser la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif,
- la condamner à verser la somme complémentaire de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me N. Gallier, avocat.
Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les fins de non recevoir
Moyens des parties
Mme [O] [S] soulève l'irrecevabilité de la demande de dommages et intérêts de M. [M] [L], présentée par conclusions du 21 décembre 2023, comme nouvelle en cause d'appel.
Elle se prévaut du principe de concentration des prétentions dans les délais pour conclure et de l'article 910-4 du code de procédure civile obligeant les parties à présenter dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910 l'ensemble de leurs présentions alors que M. [M] [L] n'a pas présenté sa demande dans ses premières conclusions du 17 décembre 2021.
M. [M] [L] n'a pas répondu à ce moyen.
Mme [S] demande également de débouter MM. [N] et [M] [L] de leurs fins de non recevoir.
Réponse de la cour
A l'énoncé de l'article 910-4 du code de procédure civile, A peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
La demande de dommages-intérêts de M. [M] [L], fondée sur les articles 32-1 du code de procédure civile et 1240 du code civil, qui permet de réparer la faute commise par celui qui agit en justice de manière dilatoire et abusive devait donc être formée dès ses premières conclusions d'intimé remise le 17 décembre 2021, alors qu'il l'a présentée dans celles du 21 décembre 2023.
En conséquence, accueillant Mme [O] [S] en sa fin de non recevoir, il doit être jugé irrecevable en sa prétention à des dommages-intérêts.
Par ailleurs, l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile exige que les conclusions d'appel 'comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens et un dispositif...' Il précise que 'La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.'
Tant M. [N] [L] que M. [M] [L] n'ayant énoncé aucune fin de non recevoir au dispositif de leurs conclusions, il sera dit n'y avoir lieu de statuer sur les fins de non recevoir évoquées dans la partie discussion de leurs conclusions.
Sur le rapport d'une somme de 125 288 euros par Mme [S]
Moyens des parties
Mme [S] reproche au premier juge d'avoir retenu qu'elle devrait rapporter la somme de 125 288 euros au titre de l'immeuble situé [Adresse 35] à [Localité 28] alors que le jugement du 31 octobre 2013, confirmé par l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, a dit qu'elle devra rapporter à la succession de son père, la valeur du bien au jour de l'aliénation, d'après son état à l'époque de la donation laquelle est contemporaine de l'acquisition.
Elle fait valoir que le bien acquis le 17 février 1988 pour un prix de 260 000 francs, soit 39 636,75 euros, a été revendu le 2 décembre 1997 pour le prix de 380 000 francs, soit 57 930,63 euros ; elle considère que même si elle ne peut prouver les travaux qui y ont été réalisés, le rapport doit être du prix d'acquisition, révélateur de l'état du bien au jour de la donation, subsidiairement, du prix de sa revente, soit 57.930,63 euros.
M. [N] [L] demande que cette dernière valeur soit retenue, comme M. [M] [L].
Mme [Z] [B] prétend que les pièces versées au débat sont insuffisantes pour fonder l'évaluation proposée par Mme [S].
Réponse de la cour
Il faut rappeler que le jugement du 31 octobre 2013, confirmé par l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, a dit qu'elle devra rapporter à la succession de son père, la valeur du bien au jour de l'aliénation, d'après son état à l'époque de la donation laquelle est contemporaine de l'acquisition, rappelant ainsi le principe énoncé à l'article 922 alinéa 2 du code civil.
Ce jugement n'a pas précisé, dans son dispositif, le montant de la valeur du bien.
En conséquence, la valeur du bien doit être fixée à 57 930,63 euros, valeur au jour de son aliénation le 2 décembre 1997, à défaut de preuve que son état s'est trouvé amélioré depuis son acquisition. Mme [S] devra, infirmant la décision, rapporter ce montant à la succession de son père.
Sur le versement par Mme [S] d'une provision de 57 930,63 euros
Moyen des parties
M. [M] [L] demande le paiement de cette somme afin de permettre la mise en oeuvre de la licitation par le notaire, faute de liquidités dans la succession.
Mme [S] ne répond pas de chef.
Réponse de la cour
Il est de principe, énoncé à l'article 858 du code civil, que 'Le rapport se fait en moins prenant', qui s'effectue habituellement par le procédé de l'imputation consistant dans une incorporation fictive du montant du rapport à la masse partageable, puis dans une imputation de la valeur des biens donnés ou légués sur la part de l'héritier gratifié, ce dernier ne recevant d'attribution effective sur la masse successorale que dans la mesure où sa part héréditaire excède la valeur des biens soumis au rapport.
En conséquence, M. [M] [L] ne peut qu'être débouté de sa demande en paiement d'une provision.
Sur la condamnation de Mme [S] sous astreinte à produire des documents
Mme [S] reproche au premier juge de lui avoir enjoint de remettre au notaire liquidateur les actes concernant l'acquisition et la vente du terrain situé [Adresse 8] à [Localité 28] et les factures de construction afférentes à ce bien immobilier, dans un délai d'un mois à compter de la signification qui lui sera faite de la décision, à peine d'astreinte de 150 euros par jour de retard, alors que le rapport n'est dû qu'à concurrence du prix d'acquisition des deux terrains, soit 25 916,33 euros, et qu'il n'était pas justifié de lui enjoindre de produire les factures afférentes à la construction de sa résidence principale, construction réalisée par certains membres de la famille et des amis, ainsi que le reconnaît [M] [L].
Elle indique que le conseiller de la mise en état a, dans son ordonnance du 24 mai 2022, débouté MM. [N] et [M] [L] de leur demande de radiation, constatant qu'elle a produit au notaire liquidateur les éléments qu'il lui était ordonné de produire.
M. [M] [L] relève que Mme [S] s'est contentée de verser au débat l'attestation qu'il lui avait donnée le 9 octobre 2014, dans laquelle il indiquait avoir effectué les travaux de fondation et d'autres travaux avec leur père. Il ajoute avoir participé à la construction d'un double garage après la construction de la maison.
M. [N] [L] considère que c'est à bon droit que Mme [S] a été condamnée sous astreinte à produire divers documents puisqu'elle ne les a remis au notaire que le 24 juin 2021 et relève que les décomptes établis par ses soins ne permettent pas au notaire d'apprécier la valeur de sa construction.
Mme [Z] [L] conclut dans le même sens.
Réponse de la cour
Dans son procès-verbal de difficulté du 5 janvier 2018, le notaire liquidateur a indiqué, page 6, ne pouvoir parvenir, notamment, à l'établissement d'un compte en raison de l'impossibilité d'obtenir de Mme [S] les éléments requis, à savoir les actes d'achat et de vente du bien sis [Adresse 35] et [Adresse 39] et les factures de construction. Il précisait l'avoir sollicité les 11 avril 2016, 20 janvier 2017 et par courrier recommandé du 25 juillet 2017, sans réponse de sa part.
Cependant, les terrains situés [Adresse 39] n'ayant pas été vendus par Mme [S], qui habite l'immeuble qu'elle y a fait édifier, elle ne peut produire un quelconque acte de vente.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
Par contre, c'est à raison que le premier juge lui a enjoint de remettre au notaire liquidateur les actes concernant l'acquisition du terrain situé [Adresse 8] à [Localité 28], dans un délai d'un mois à compter de la signification qui lui sera faite de la décision, à peine d'astreinte de 150 euros par jour de retard, ces actes étant nécessaires pour déterminer la valeur à rapporter, le jugement du 31 octobre 2013 ayant dit que Mme [O] [S] rapporterait à la succession, en ce qui concerne l'immeuble situé [Adresse 7] à [Localité 28], dans la mesure où elle n'établit pas qu'il a été subrogé à l'immeuble situé [Adresse 35], la valeur du bien à l'époque du partage, d'après son état au jour de l'acquisition ou d'après le montant correspondant à l'acquisition du terrain et au coût de la construction dont la défenderesse devra justifier auprès du notaire liquidateur.
La décision ne peut qu'être confirmée, étant relevé que Mme [S] n'a remis au notaire les pièces réclamées que postérieurement au jugement du 6 mai 2021, soit le 24 juin 2021, ainsi qu'il l'a été constaté par le conseiller de la mise en état dans son ordonnance du 24 mai 2022.
Sur le rapport par Mme [S] de l'immeuble situé [Adresse 38]
Moyens des parties
Mme [S] fait valoir que le rapport est dû à concurrence du prix d'acquisition des deux terrains, pour un montant de 25 916,33 euros et qu'il n'était pas justifié de lui enjoindre de justifier des factures afférentes à la construction de sa résidence principale, construite par elle-même, son époux, certains membres de la famille et des amis.
M. [M] [L] indique que Mme [S] justifie avoir fait l'acquisition de deux terrains à bâtir [Adresse 38] à [Localité 28], le premier le 28 février 1995 au prix de 80 000 francs, le second le 17 juin 1995 pour un prix de 90.000 francs, soit, au total 170 000 francs ou 25 016,33 euros.
Il prétend que le rapport ne doit pas être limité au prix d'acquisition du terrain, la construction s'y trouvant ayant été financée grâce aux deniers de son père.
Réponse de la cour
L'article 860-1 du code civil énonce que Le rapport d'une somme d'argent est égal à son montant. Toutefois, si elle a servi à acquérir un bien, le rapport est dû de la valeur de ce bien, dans les conditions prévues à l'article 860, à savoir, à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation.
Le jugement du 31 octobre 2013 a dit que Mme [O] [S] rapporterait à la succession, en ce qui concerne l'immeuble situé [Adresse 7] à [Localité 28], dans la mesure où elle n'établit pas qu'il a été subrogé à l'immeuble situé [Adresse 35], la valeur du bien à l'époque du partage, d'après son état au jour de l'acquisition ou d'après le montant correspondant à l'acquisition du terrain et au coût de la construction dont la défenderesse devra justifier auprès du notaire liquidateur.
L'acquisition d'un bien diffère de son édification. Ne constitue pas une acquisition au sens de l'article 860-1 le financement, par des fonds donnés, de travaux de construction effectués par le propriétaire du terrain, Cass. 1re civ., 14 mai 2014, n°12-25.735.
Pour ce qui concerne le financement de l'immeuble édifié sur les terrains, il appartenait aux intimés de rapporter la preuve des dons manuels faits par leur père à l'époque de l'édification par leur soeur de l'immeuble sur les terrains acquis, lors de la procédure ayant abouti au jugement précité. Ce jugement, confirmé par l'arrêt rendu par notre cour le 7 septembre 2015 étant définitif en ce qu'il dit que Mme [O] [S] rapportera à la succession la somme de 2 265 euros et qu'elle sera privée de tout droit sur cette somme, il n'y a pas lieu d'évaluer l'immeuble édifié, lequel ne fait donc pas partie de la succession.
Il appartient donc au notaire liquidateur d'évaluer les terrains acquis par Mme [S] à la date la plus proche du partage, sans qu'il soit possible de retenir la valeur de l'immeuble édifié.
Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a été enjoint à Mme [O] [S] de justifier des factures afférentes à la construction de sa résidence principale, [Adresse 38], les terrains devant être évalués comme dit ci-dessus, abstraction faite de l'immeuble édifié par Mme [S].
Sur la vente amiable de l'immeuble sis [Adresse 37]
Mme [Z] [B] demande que la vente amiable du bien immobilier soit autorisée, estimant qu'il sera vendu plus rapidement à un prix plus intéressant que s'il faisait l'objet d'une licitation.
Mme [S] et M. [M] [L] s'en rapportent à justice. Les autres intimés n'ont pas conclu de ce chef.
Réponse de la cour
Aux termes de l'article 842 du code civil, A tout moment, les copartageants peuvent abandonner les voies judiciaires et poursuivre le partage à l'amiable si les conditions prévues pour un partage de cette nature sont réunies.
Les copartageants n'ont donc pas besoin d'être autorisés à vendre à l'amiable un bien de la succession.
Il faut préciser que Mme [Z] [B] n'ayant pas repris sa prétention à voir désigner un mandataire chargé de représenter l'indivision au dispositif de ses conclusions, la cour n'a pas à statuer, en application de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, précité.
Sur la demande de dommages-intérêts de M. [N] [L]
M. [N] [L] demande que Mme [O] [S] soit condamnée à lui payer des dommages-intérêts pour procédure abusive, soutenant qu'elle aurait été condamnée à payer une somme de 2 265 euros par le jugement du 31 octobre 2013, qu'elle n'a jamais réglé ; si elle reconnaît le montant des rapports dus à la succession, elle n'a pas effectué le moindre règlement.
Cependant, l'appel de Mme [O] [S] ne saurait être jugé abusif puisqu'elle triomphe en certaines de ses prétentions. Par ailleurs, ainsi qu'il l'a été ci-dessus rappelé le rapport d'une somme ne constitue pas une condamnation à son paiement.
En conséquence, M. [N] [L] sera débouté de sa demande.
Sur les demandes accessoires
Eu égard à la nature familiale de l'affaire, chaque partie supportera ses propres dépens, tant en première instance qu'en cause d'appel, et les frais générés par sa défense, tant en première instance qu'en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par défaut et en dernier ressort ;
Infirme le jugement en ce qu'il fixe le montant du rapport dû par Mme [O] [S] au titre du bien situé [Adresse 35] à [Localité 28] à la somme de 125 288 euros, enjoint à Mme [S] de produire l'acte de vente de l'immeuble située [Adresse 8] à [Localité 28] et de justifier des factures afférentes à la construction de sa résidence située en ce lieu et en ce qu'il statue sur les dépens et l'indemnité de procédure ;
Le confirme pour le surplus des chefs de dispositif critiqués ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
Dit la cour non saisie des fins de non recevoir soulevées tant par M. [N] [L] que par M. [M] [L] ;
Dit que Mme [O] [S] devra rapporter à la succession la somme de 57 930,63 euros au titre de l'immeuble situé [Adresse 35] à [Localité 28] ;
Rappelle que le rapport se fait en moins-prenant ;
Déboute M. [M] [L] de sa demande tendant à la condamnation de Mme [O] [S] au paiement d'une provision de 57 930,63 euros ;
Déboute Mme [O] [S] de sa demande tendant à voir évaluer les deux terrains situés [Adresse 38] à [Localité 28] à la date de leur acquisition, soit à 25 916,33 euros ;
Dit qu'il appartient au notaire liquidateur d'évaluer ces terrains, acquis par Mme [O] [S], en vue de déterminer le montant du rapport, à la date la plus proche du partage et abstraction faite de l'immeuble qu'elle y a édifié ;
Déboute Mme [Z] [B] de sa demande d'autorisation de vendre à l'amiable le bien situé [Adresse 36] à [Localité 28] ;
Rappelle qu'à tout moment les copartageants peuvent abandonner la voie judiciaire ;
Dit la cour non saisie de la désignation d'un mandataire représentant l'indivision ;
Déboute Mme [O] [S] de la fin de non recevoir tirée de la demande de dommages-intérêts de M. [M] [L] ;
Déclare M. [M] [L] irrecevable en sa prétention à des dommages-intérêts ;
Déboute M. [N] [L] de sa demandes de dommages-intérêts ;
Dit que chaque partie supportera ses propres dépens, tant en première instance qu'en cause d'appel, et les frais générés par sa défense, tant en première instance qu'en cause d'appel.
Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Présidente de Chambre et Mme Karine DUPONT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT