COUR D'APPEL D'ORLÉANS
C H A M B R E C I V I L E
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 07/05/2024
la SELARL RABILIER
la SCP LAVAL - FIRKOWSKI - DEVAUCHELLE AVOCATS ASSOCIES
la SCP BLACHER - GEVAUDAN
ARRÊT du : 7 MAI 2024
N° : - 24
N° RG 21/01619 - N° Portalis DBVN-V-B7F-GMDF
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOURS en date du 1er Avril 2021
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265269172904213
UNION DEPARTEMENTALE DES SYNDICATS FORCE OUVRIERE D'INDRE ET LOIRE
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Charlotte RABILIER de la SELARL RABILIER, avocat au barreau de TOURS
D'UNE PART
INTIMÉES : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265268300675945
S.A.R.L. ESTIVIN GROUPE HOLDING FINANCE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social
[Adresse 5]
[Localité 6]
ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI - DEVAUCHELLE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS,
ayant pour avocat plaidant Me Eric BERTHOME de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de BLOIS
S.A.S. ESTIVIN PRIMEURS DE LOIRE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social
[Adresse 4]
[Localité 2]
ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI - DEVAUCHELLE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS,
ayant pour avocat plaidant Me Eric BERTHOME de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de BLOIS
S.A. ESTIVIN LOGISTIQUE SERVICES devenue PRIMEVER [Localité 6] depuis le 01/10/2020, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social
[Adresse 5]
[Localité 6]
ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI - DEVAUCHELLE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS,
ayant pour avocat plaidant Me Eric BERTHOME de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de BLOIS
S.A.R.L. LOGIPREST prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social
[Adresse 5]
[Localité 6]
ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI - DEVAUCHELLE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS,
ayant pour avocat plaidant Me Eric BERTHOME de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de BLOIS
S.A.R.L. GROUPE ESTIVIN DEVELOPPEMENT prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social
[Adresse 5]
[Localité 6]
ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI - DEVAUCHELLE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS,
ayant pour avocat plaidant Me Eric BERTHOME de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de BLOIS
S.A.S. FRAICH'ENVIE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social
[Adresse 5]
[Localité 6]
ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI - DEVAUCHELLE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS,
ayant pour avocat plaidant Me Eric BERTHOME de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de BLOIS
S.A.R.L. TOURAINE PRIMEURS ESTIVIN MARCHE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social
[Adresse 5]
[Localité 6]
ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI - DEVAUCHELLE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS,
ayant pour avocat plaidant Me Eric BERTHOME de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de BLOIS
- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265269591445924
Syndicat REGIONAL DES TRANSPORTS DU CENTRE CFDT FGTE (SRTC- CFDT-FGTE)
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Nathalie BLACHER de la SCP BLACHER - GEVAUDAN, avocat au barreau de TOURS
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du :18 Juin 2021
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 8 janvier 2024
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats, du délibéré :
Mme Anne-Lise COLLOMP, Présidente de chambre,
M. Laurent SOUSA, Conseiller, en charge du rapport,
Mme Laure-Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Greffier :
Mme Karine DUPONT, Greffier lors des débats et du prononcé.
DÉBATS :
Les débats ont lieu publiquement à l'audience du 11 mars 2024.
ARRÊT :
Prononcé le 7 mai 2024 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
***
FAITS ET PROCÉDURE
L'unité économique et sociale (UES) Groupe Estivin est composée de :
- la SARL Estivin Groupe Holding finance ;
- la SAS Estivin Primeurs de Loire ;
- la SAS Primever [Localité 6] (anciennement dénommée Estivin Logistique Services) ;
- la SARL Logiprest ;
- la SARL Groupe Estivin Développement ;
- la SAS Fraich'envie ;
- la SARL Touraine Primeurs Estivin Marché.
Un accord d'entreprise a été signé le 27 juillet 2018 entre les sociétés de l'UES Estivin et le syndicat CFDT portant avenant à l'accord du 12 mai 2001 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail, et portant sur la quatrième partie relative au personnel d'entrepôt des sociétés de l'UES.
Par acte d'huissier de justice en date du 16 novembre 2018, l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire (UD FO 37) a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Tours les sociétés composant l'UES Estivin et l'union départementale des syndicats CFDT d'Indre-et-Loire aux fins notamment d'annulation de l'accord d'entreprise signé le 27 juillet 2018.
Le syndicat régional des transports du Centre CFDT-FGTE est volontairement intervenu aux débats.
Par jugement en date du 1er avril 2021, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire de Tours a :
- mis hors de cause l'union départementale des syndicats CFDT d'Indre-et-Loire ;
- reçu le syndicat régional des transports du Centre CFDT-FGTE en son intervention volontaire ;
- dit que les sociétés du groupe Estivin ont engagé des négociations avec M. [C], délégué syndical FO ;
- débouté en conséquence l'UD FO 37 de sa demande d'annulation de l'avenant du 27 juillet 2018 à l'accord du 12 mai 2001 sur l'aménagement et la réduction du temps de travail ;
- débouté l'UD FO 37 de sa demande tendant à voir constater les effets de la dénonciation de l'accord d'entreprise du 12 mai 2001 ainsi que de l'ensemble de ses demandes relatives à l'octroi de dommages et intérêts ;
- rejeté l'ensemble des demandes d'astreinte ;
- condamné l'UD FO 37 à verser au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile, une indemnité de 1 000 € d'une part aux sociétés du groupe Estivin et d'autre part au syndicat régional des transports du Centre CFDT-FGTE ;
- condamné l'UD FO 37 à verser sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les sommes suivantes : 3 500 € à l'ensemble des sociétés du groupe Estivin, 2 000 € au syndicat régional des transports du Centre CFDT-FGTE ;
- rejeté toutes autres demandes ;
- condamné l'UD FO 37 aux entiers dépens.
Par déclaration en date du 18 juin 2021, l'UD FO 37 a interjeté appel du jugement sauf en ce qu'il a mis hors de cause l'union départementale des syndicats CFDT d'Indre-et-Loire et reçu le syndicat régional des Transports du Centre CFDT-FGTE en son intervention volontaire.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 3 septembre 2021, l'UD FO 37 demande à la cour de :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement sauf en ce qu'il a mis hors de cause l'union départementale CFDT d'Indre-et-Loire et admis l'intervention volontaire du syndicat régional du transport du Centre CFDT ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés en y ajoutant,
- annuler, avec toutes conséquences de droit, l'accord d'entreprise signé le 27 juillet 2018 entre les sociétés de l'UES groupe Estivin et le syndicat CFDT, portant avenant à l'accord du 12 mai 2001 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail ;
- dire et juger que la dénonciation par l'UD Force Ouvrière d'Indre-et-Loire de l'accord d'entreprise en date du 12 mai 2001 est parfaite et a produit effet le 13 mai 2021 à zéro heure, ou subsidiairement le 19 mai 2021 à zéro heure ;
- ordonner aux sociétés Estivin Groupe Holding Finance, Estivin Primeurs de Loire, Primever [Localité 6], Logiprest, Groupe Estivin Développement, Fraich'envie et Touraine Primeurs Estivin Marché de régulariser sous quinze jours la situation de leurs salariés et anciens salariés au regard de l'accord du 12 mai 2001, notamment au titre des jours ARTT, sous peine d'une astreinte de 1 000 € par jour et par salarié concerné ;
- débouter les sociétés Estivin Groupe Holding Finance, Estivin Primeurs de Loire, Primever [Localité 6], Logiprest, Groupe Estivin Développement, Fraich'envie et Touraine Primeurs Estivin Marché et le syndicat régional des transports du Centre CFDT de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
- condamner in solidum les sociétés Estivin Groupe Holding Finance, Estivin Primeurs de Loire, Primever [Localité 6], Logiprest, Groupe Estivin Développement, Fraich'envie et Touraine Primeurs Estivin Marché à lui payer les sommes suivantes :
5 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice personnel résultant de l'entrave à la liberté syndicale ;
5 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice porté à l'intérêt collectif des salariés de la profession résultant de ladite entrave ;
5 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice porté à l'intérêt collectif des salariés de la profession du fait de l'inexécution de l'accord du 12 mai 2001 ;
- condamner in solidum les sociétés Estivin Groupe Holding Finance, Estivin Primeurs de Loire, Primever [Localité 6], Logiprest, Groupe Estivin Développement, Fraich'envie et Touraine Primeurs Estivin Marché et le syndicat régional des Transports du Centre CFDT à lui restituer les sommes payées en exécution du jugement infirmé ;
- condamner in solidum les sociétés Estivin Groupe Holding Finance, Estivin Primeurs de Loire, Primever [Localité 6], Logiprest, Groupe Estivin Développement, Fraich'envie et Touraine Primeurs Estivin Marché et le syndicat régional des transports du Centre CFDT à lui payer la somme de 10 000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel ;
- condamner in solidum les sociétés intimées et le SRTC-CFDT aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SELARL Rabilier en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 30 novembre 2021, les sociétés composant l'UES Estivin demandent à la cour de :
- confirmer le jugement dans son intégralité ;
En conséquence :
- constater que M. [W] [C], délégué syndical FO de l'UES groupe Estivin n'a pas été évincé du processus de négociation de l'avenant modifiant l'accord ARTT du 12 mai 2001, et qu'il a été convoqué le 18 juin 2018 à une réunion de signature de l'avenant, fixée au 22 juin 2018 ;
- constater que le syndicat CFDT est toujours représentatif au sein de l'UES groupe Estivin ;
- dire et juger que les sociétés défenderesses n'ont pas engagé de négociations bilatérales avec le seul syndicat CFDT ;
- dire et juger que l'avenant du 27 juillet 2018 s'est substitué de plein droit à l'accord initial du 12 mai 2001 ;
- débouter l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire de sa demande relative à la dénonciation de l'accord ;
- débouter l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire de sa demande d'annulation de l'avenant du 27 juillet 2018 à l'accord ARTT du 12 mai 2001 ;
- débouter l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire de sa demande de régularisation sous quinze jours de la situation des salariés de l'UES Groupe Estivin et de la société Primever [Localité 6], et la débouter de sa demande de 1 000 € au titre de l'astreinte, par jour et par salarié concerné ;
- débouter l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire au titre des dommages et intérêts à hauteur de 5 000 € pour entrave à la liberté syndicale, de 5 000 € pour préjudice porté à l'intérêt collectif des salariés résultant de ladite entrave, de 5 000 € pour préjudice à l'intérêt collectif des salariés de la profession ;
- débouter l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire de sa demande de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- constater que la présente instance en appel est abusive et condamner en conséquence l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire à leur verser la somme supplémentaire de 5 000 € au titre des articles 32-1 et 559 du code de procédure civile ;
- condamner l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire à leur verser la somme supplémentaire de 8 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire aux entiers dépens d'appel.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 27 octobre 2021, le syndicat régional des transports du Centre CFDT FGTE (le SRTC CFDT-FGTE) demande à la cour de :
- confirmer purement et simplement le jugement déféré ;
Et, y ajoutant,
- débouter l'UD FO 37 de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner l'UD FO 37 à lui verser une somme de 5 000 euros, à titre de dommages et intérêts, pour appel abusif ;
- condamner l'UD FO 37 à lui verser une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner l'UD FO 37 aux entiers dépens de la présente instance.
Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions.
MOTIFS
Sur la nullité de l'accord d'entreprise du 27 juillet 2018
Moyens des parties
L'appelante soutient que la signature d'un accord collectif doit être précédée, à peine de nullité, d'une négociation loyale avec l'ensemble des organisations syndicales représentatives ; que des négociations séparées ont été organisées par les sociétés de l'UES Estivin avec la CFDT ; qu'en effet, les négociations n'étaient pas achevées, puisque les parties devaient se rencontrer le 22 juin 2018 pour poursuivre la négociation, mais cette réunion a été annulée du fait de l'absence du délégué syndical CFDT ; qu'une nouvelle réunion a été organisée le 27 juillet 2018 à l'insu de la délégation FO, au cours de laquelle l'avenant a été présenté à la signature du délégué syndical CFDT, caractérisant dès lors une négociation déloyale de la part de l'entreprise ; que M. [C], délégué syndical FO, était arrêté pour cause de maladie depuis le 1er juillet 2018 et n'a pas été informé de cette réunion ; que les réunions antérieures au 27 juillet 2018 ne concernaient pas la négociation de l'accord litigieux ; qu'aucune négociation véritable n'a eu lieu, et en tout état de cause aucune négociation avec le syndicat FO qui a été informé du texte de l'accord envisagé par l'employeur le 21 septembre 2018 ; qu'il est donc manifeste que la seule réelle négociation qui a été réalisée dans l'entreprise l'a été lors de la réunion du 27 juillet 2018, au cours de laquelle seule la CFDT a été conviée pour signature de l'accord ; qu'au surplus, la cour constatera que le syndicat SRTC CFDT-FGTE, signataire de l'accord litigieux, n'est pas représentatif et n'a donc pas qualité pour négocier et signer l'accord d'entreprise litigieux ; qu'en effet, le SRTC CFDT-FGTE se permet d'intervenir à l'instance pour demander le rejet des demandes portant sur l'exécution de l'accord d'entreprise ARTT du 12 mai 2001 et à la condamnation de l'employeur à indemniser le préjudice porté à l'intérêt collectif des salariés de la profession résultant de l'inexécution de cet accord ; qu'on ne voit pas quel serait l'intérêt légitime et la qualité du syndicat CFDT à intervenir à l'instance pour voir exonérer un employeur de sa responsabilité ou encore pour s'opposer à l'exécution d'un accord collectif qu'il a lui-même signé, ce qui constitue à tout le moins une violation flagrante des dispositions de l'article L.2262-4 du code du travail ; qu'en devenant, par son intervention volontaire, le bras armé des entreprises de l'UES groupe Estivin, dont il entend défendre les intérêts sans avoir aucune qualité pour ce faire, le syndicat SRTC CFDT-FGTE a démontré qu'il ne remplissait pas la condition d'indépendance nécessaire à la reconnaissance de sa représentativité, conformément aux dispositions de l'article L. 2121-1, 2° du code du travail.
Les sociétés composant l'UES Estivin répliquent que l'UD FO 37 qui doit, dans le cadre de ses écritures d'appel, critiquer le jugement aux fins de la réformation de son annulation, ne parvient pas à démontrer qu'elles auraient engagé des négociations avec le seul syndicat CFDT, ni qu'elles auraient évincé l'UD FO 37 des réunions de négociation ; que les affirmations de l'appelante sont totalement mensongères et sont contredites par l'ensemble des pièces versées aux débats ; que, lors de la réunion du 22 juin 2018, M. [C] a signé l'accord relatif à la valorisation des heures de délégation, mais a refusé de signer l'avenant à l'accord du 12 mai 2001 ; que M. [C] a toujours été convoqué à l'ensemble du processus de négociation ; que lors de la réunion du 14 février 2018, M. [C], et donc le syndicat UD FO, était assisté de Maître Louis Palheta, en sa qualité de conseil de FO, et ils ont eu l'occasion de discuter et débattre de tous les sujets, dont l'avenant modifiant l'accord d'entreprise du 12 mai 2001 ; que par courrier daté du 8 mars 2018, Maitre Palheta fera même état, au nom du syndicat UD FO 37, de ses désaccords ; que l'UD FO 37 a eu, tout au long du processus de négociation, la possibilité d'exprimer ses propositions, de motiver son refus, de former des contre-propositions ou d'exprimer ses accords ou ses désaccords ; qu'il n'y a pas eu de négociation bilatérale, mais une signature bilatérale ; qu'il est demandé à la cour de confirmer le jugement ainsi entrepris.
Le SRTC-CFDT-FGTE fait valoir que les délégués syndicaux FO et CFDT ont été convoqués à chacune des réunions en vue des échanges concernant un avenant portant sur la quatrième partie relative au personnel d'entrepôt de l'UES groupe Estivin de l'accord du 12 mai 2001 ; que la réunion du 22 juin 2018, au cours de laquelle M. [C] n'a pas souhaité signer l'accord, n'a pas été annulée ; que le délégué CDFT était absent mais a indiqué qu'il acceptait de signer l'accord sans nouvelles négociations au plus tard le 27 juillet 2018 ; que le délégué CFDT a donc signé l'accord le 27 juillet 2018, qui était identique au texte présenté le 22 juin 2018 ; que les négociations n'ont donc pas eu lieu de manière séparée, seule la signature de l'avenant ayant été retardée ; qu'aucune réunion n'a été organisée à l'insu de M. [C], la date du 27 juillet étant uniquement la date de signature de l'avenant qui n'avait pas été modifié depuis sa présentation le 22 juin 2018 ; que l'UD FO 37 n'établit pas avoir été victime de manquements caractérisant une déloyauté des autres parties ; que la négociation a été régulièrement menée et n'y a eu aucune réunion bilatérale ; que l'avenant signé le 27 juillet 2018 est valable et se substitue de plein droit aux stipulations de l'accord du 12 mai 2001 qu'il modifie, même en l'absence de la signature du délégué syndical FO ; que le jugement dont appel sera par conséquent confirmé.
Réponse de la cour
L'article L.2231-1 du code du travail dispose que la convention ou l'accord est conclu entre :
- d'une part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord ;
- d'autre part, une ou plusieurs organisations syndicales d'employeurs, ou toute autre association d'employeurs, ou un ou plusieurs employeurs pris individuellement.
L'article L.2232-16 du code du travail dispose que la convention ou les accords d'entreprise sont négociés entre l'employeur et les organisations syndicales de salariés représentatives dans l'entreprise. Une convention ou des accords peuvent être conclus au niveau d'un établissement ou d'un groupe d'établissements dans les mêmes conditions.
Il est établi que la nullité d'une convention ou d'un accord collectif est encourue lorsque toutes les organisations syndicales n'ont pas été convoquées à sa négociation, ou si l'existence de négociations séparées est établie, ou encore si elles n'ont pas été mises à même de discuter les termes du projet soumis à la signature en demandant le cas échéant la poursuite des négociations jusqu'à la procédure prévue pour celle-ci, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation (Soc., 10 octobre 2007, pourvoi n° 06-42.721, Bull. 2007, V, n° 156 ; Soc., 8 mars 2017, pourvoi n° 15-18.080, Bull. 2017, V, n° 46).
En l'espèce, l'appelant considère qu'en l'absence d'achèvement des négociations, l'UES groupe Estivin a poursuivi les négociations en l'excluant de la réunion prévue le 27 juillet 2018.
L'appelante reconnaît donc avoir été convoquée et avoir participé aux négociations de l'avenant litigieux jusqu'au 22 juin 2018, ainsi qu'il résulte des pièces versées aux débats.
L'accord d'entreprise portant la date du 27 juillet 2018 portant sur l'aménagement et la réduction du temps de travail au sein de l'UES groupe Estivin mentionne :
« Ont participé aux réunions de discussion et de négociation des 14 février 2018, 23 avril 2018 et 5 juin 2018 :
- Pour la délégation syndicale CFDT, Monsieur [X] [B] [F], Délégué Syndical et Monsieur [A] [U],
- Pour la délégation syndicale FO, Monsieur [W] [C], Délégué Syndical et Monsieur [V] [Y].
À la demande des représentants du personnel, et comme convenu lors de la réunion du 14 février 2018, une consultation des membres du personnel de l'entrepôt Estivin Logistique Services a été conduite sur l'organisation du temps de travail. »
Les sociétés composant l'UES groupe Estivin justifient aux débats de la convocation du délégué syndical FO aux réunions de négociation des 14 février, 23 avril et 5 juin 2018 et des procès-verbaux de réunion mentionnant que le sujet relatif à la modulation du temps de travail dans les entrepôts de l'UES a bien été abordé.
Suivant convocation adressée aux délégués syndicaux CFDT et FO le 18 juin 2018, la direction du groupe Estivin a proposé aux organisations syndicales représentatives de signer un avenant à la quatrième partie de l'accord relative au personnel d'entrepôt des entreprises de l'UES groupe Estivin prenant notamment en compte les demandes de l'inspection du travail, en fixant la date de signature du projet d'accord à la date de la réunion de négociation obligatoire du 22 juin 2018.
Il était précisé qu'à défaut, « un procès-verbal de désaccord devra être conclu ce jour-là sur ce point précis, a'n que la mise en place de l'engagement de la Direction puisse être effective et qu'il soit ainsi répondu aux souhaits exprimés par l'inspection du travail ».
Lors de la réunion du 22 juin 2018, le délégué syndical FO, M. [C] était présent, mais pas le délégué syndical CFDT. Au cours de cette réunion, le délégué syndical FO a pris connaissance du projet d'avenant à l'accord du 12 mai 2001 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail, mais ne l'a pas signé.
En l'absence du délégué syndical CFDT et de signature de l'accord par le délégué syndical FO, la direction du groupe Estivin a différé l'établissement d'un procès-verbal de désaccord.
Il ne résulte d'aucune pièce versée aux débats qu'une réunion s'est tenue le 27 juillet 2018. Si cette date a bien été apposée sur l'accord litigieux par le directeur du groupe Estivin, elle ne permet pas d'établir que le délégué syndical CFDT aurait été convoqué seul à une réunion à cette date.
En effet, il résulte des pièces produites que la direction du groupe Estivin a convoqué, le 10 juillet 2018, les délégués syndicaux FO et CDFT à une nouvelle réunion de négociation annuelle le 17 juillet 2018. M. [C], délégué syndical FO, a bien été convoqué à cette réunion, mais il en était absent en raison d'un arrêt de travail. Le délégué syndical CFDT, présent à cette réunion, a alors signé l'accord litigieux qu'il n'avait pu signer lors de la réunion du 22 juin 2018.
Il résulte de ces éléments qu'aucune réunion postérieure au 5 juin 2018 n'a porté sur la négociation de l'accord d'entreprise litigieux, la réunion du 22 juin 2018 étant limitée à la signature de l'accord, lequel mentionne d'ailleurs que des réunions de négociation jusqu'au 5 juin 2018.
La signature de l'accord par le délégué syndical CFDT lors de la réunion du 17 juillet 2018 à laquelle le délégué syndical FO, bien que convoqué, n'a pu assister, ne permet pas d'établir qu'une nouvelle phase de négociation aurait été effectuée entre la direction du groupe Estivin et le syndicat CFDT. Il est d'ailleurs établi que le projet d'accord communiqué par la direction du groupe Estivin en juin 2018 est conforme à l'accord signé par le délégué syndical CFDT.
L'appelante n'établit donc pas qu'elle aurait été écartée de la négociation de l'accord d'entreprise ou qu'elle n'aurait pas pu en discuter les termes de sorte que la nullité de l'accord ne peut être prononcée.
S'agissant de la représentativité du syndicat SRTC CFDT-FGTE, il convient de constater que l'UD FO 37 avait elle-même fait assigner, par erreur, l'union départementale des syndicats CFDT d'Indre-et-Loire, alors que le délégué syndical CFDT avait été désigné non par celle-ci par le SRTC CFDT-FGTE qui est donc intervenu volontairement pour régulariser la procédure.
Aux termes de l'article L.2121-1 du code du travail, l'indépendance est l'un des critères cumulatifs de la représentativité des organisations syndicales.
Le syndicat SRTC CFDT-FGTE, dans le cadre de son droit d'agir en justice, est en droit de défendre la validité de l'accord d'entreprise qu'elle a conclu avec la direction du groupe Estivin et de s'opposer ainsi aux demandes présentées par l'UD FO 37. Le seul fait que sa position ne soit pas contraire à celle défendue par l'employeur, alors qu'elle n'est pas représentée à l'instance par le même conseil, n'est pas de nature à établir un défaut d'indépendance, de sorte que sa représentativité ne peut être remise en cause. Ce moyen formé à l'appui à la demande de nullité de l'accord d'entreprise est donc inopérant.
Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté l'UD FO 37 de sa demande d'annulation de l'avenant du 27 juillet 2018 à l'accord du 12 mai 2001 sur l'aménagement et la réduction du temps de travail.
Sur la dénonciation de l'accord du 12 mai 2021
Moyens des parties
L'appelante soutient que par lettres du 10 février 2020 adressées au président de l'UES groupe Estivin, au syndicat CFDT et au syndicat CFTC, elle a déclaré dénoncer l'accord d'entreprise ARTT du 12 mai 2001, modifié par l'avenant du 27 juillet 2018 ; que conformément aux dispositions de l'article L.2261-10 alinéa 4 du code du travail, elle est en droit de dénoncer cet accord d'entreprise ; que la première condition de la dénonciation relative à la perte de représentativité d'une organisation syndicale est remplie, car il résulte du procès-verbal des élections du comité social et économique de l'UES groupe Estivin en date du 21 mars 2019 que la CFTC n'a pu franchir le seuil d'audience électorale de 10 % prévu par l'article L.2122-1 du code du travail ; que la deuxième condition de la dénonciation est que l'organisation syndicale dénonçant l'accord ait préalablement recueilli la majorité des suffrages exprimés à l'élection du comité social et économique, et la cour constatera qu'elle a obtenu au premier tour des élections du 21 mars 2019, tous collèges confondus, un total de 76 voix pour le scrutin des titulaires sur total de 115 suffrages exprimés ; que la défense opposée par le syndicat CFDT, selon lequel il est le seul signataire de l'avenant du 27 juillet 2018, sera écartée, dès lors que l'avenant ne peut subsister indépendamment de l'accord global ; que cette dénonciation prendra plein et entier effet à l'expiration du délai de préavis de trois mois puis du délai légal de survie de douze mois ; que la dénonciation ayant été notifiée au président de l'UES groupe Estivin le 12 février 2020, elle prendra effet le 13 mai 2021 à zéro heure, et subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour prendrait en compte comme point de départ le dépôt de la dénonciation à la DIRECCTE, elle prendrait alors effet le 19 mai 2021 à zéro heure ; que le jugement attaqué sera dès lors infirmé de ces chefs.
Les sociétés composant l'UES groupe Estivin répliquent que les avenants successifs à un accord collectif se substituent de plein droit à l'accord initial qu'ils modifient et redonnent pleine et entière existence à cet accord en l'actualisant ; que tant les dispositions légales que conventionnelles prévoient l'adhésion, par les signataires, à l'accord initial en cas de conclusion d'un avenant qui se substitue à l'accord initial ; que l'accord collectif du 12 mai 2001 a donc toujours fait l'objet d'avenants signés par une organisation syndicale, la CFDT, qui est d'ailleurs toujours représentative au 10 février 2020, de sorte qu'il ne peut être dénoncé que par un syndicat signataire, à l'heure actuelle, la CFDT ; que l'accord a été conclu en 2001 entre l'UES groupe Estivin, le syndicat CFTC et le syndicat CFDT ; que le syndicat CFTC n'est plus représentatif au sein de l'UES groupe Estivin depuis plusieurs cycles électoraux, ce qui explique que l'avenant litigieux n'a été signé que par le seul syndicat CFDT ; que la première condition du 4e alinéa de l'article L.2261-10 du code du travail, tenant à la perte de la qualité d'organisation syndicale représentative, n'est pas remplie puisque le syndicat CFDT est quant à lui toujours représentatif au sein de l'UES groupe Estivin ; que si le syndicat UD FO 37 veut dénoncer l'accord du 12 mai 2001 et tous les avenants successifs qui s'y substituent, il doit d'abord y adhérer pour acquérir la qualité de syndicat signataire ; qu'il conviendra de confirmer le jugement ayant rejeté la demande de dénonciation de l'accord de 2001.
Le SRTC CFDT-FGTE indique qu'étant signataire de l'accord, et toujours représentatif, la dénonciation de l'accord par l'UD FO37 n'entre pas dans le champ d'application de l'alinéa 4 de l'article L.2261-10 du code du travail ; qu'en tout état de cause, cette dénonciation ne peut être étendue à l'avenant de 2018, compte tenu du fait que, seul signataire de cet avenant, il n'a pas perdu sa représentativité ; que l'annulation ou la dénonciation de l'accord de 2001 ne peut s'étendre à l'avenant de 2018, celui-ci portant sur une catégorie précise de salariés et se suffisant à lui-même.
Réponse de la cour
L'article L.2261-10 du code du travail dispose :
« Lorsque la dénonciation émane de la totalité des signataires employeurs ou des signataires salariés, la convention ou l'accord continue de produire effet jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis, sauf clause prévoyant une durée déterminée supérieure.
Une nouvelle négociation s'engage, à la demande d'une des parties intéressées, dans les trois mois qui suivent le début du préavis mentionné à l'article L.2261-9. Elle peut donner lieu à un accord, y compris avant l'expiration du délai de préavis.
Il en est de même, à la demande d'une des organisations syndicales représentatives de salariés intéressées, en cas de dénonciation de la convention ou de l'accord dans les conditions prévues à l'article L.2261-12, s'agissant du secteur concerné par la dénonciation.
Lorsqu'une des organisations syndicales de salariés signataires de la convention ou de l'accord perd la qualité d'organisation représentative dans le champ d'application de cette convention ou de cet accord, la dénonciation de ce texte n'emporte d'effets que si elle émane d'une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans son champ d'application ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés dans les conditions prévues au chapitre II du titre III. »
Ces dispositions sont relatives à la dénonciation par la totalité des signataires employeurs ou des signataires salariés, ainsi que le précise l'alinéa 1er, et leur inclusion dans la sous-section du code du travail intitulée « dénonciation par la totalité des signataires employeurs ou salariés ».
En l'espèce, l'accord d'entreprise du 12 mai 2001 sur l'aménagement et la réduction du temps de travail n'a été signé que par les syndicats CFTC et CFDT. L'UD FO 37 n'ayant pas la qualité de signataire de cet accord, elle ne peut le dénoncer en application de l'alinéa 4 de l'article L.2261-10 du code du travail, quand bien même le syndicat CFTC a perdu sa qualité d'organisation représentative.
Le syndicat CFDT étant toujours représentatif dans le groupe Estivin, il dispose seul de la qualité pour dénoncer l'accord d'entreprise du 12 mai 2001.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté l'UD FO 37 de sa demande tendant à voir constater les effets de la dénonciation de l'accord d'entreprise du 12 mai 2001.
Sur les autres demandes de l'UD FO 37
En l'absence d'annulation de l'avenant du 27 juillet 2018, qui se substitue l'accord du 12 mai 2001, celui-ci n'a plus vocation à s'appliquer indépendamment de son avenant. La demande tendant à voir ordonner aux sociétés de l'UES groupe Estivin de régulariser sous quinze jours la situation de leurs salariés et anciens salariés au regard de l'accord du 12 mai 2001, notamment au titre des jours ARTT, sous peine d'une astreinte de 1000 € par jour et par salarié concerné, sera rejetée. Le jugement sera complété en ce sens, et il sera confirmé quant au rejet de l'astreinte.
En l'absence d'annulation de l'avenant du 27 juillet 2018 et de dénonciation valable de l'accord du 12 mai 2001, les demandes indemnitaires formées par l'UD FO 37 afférentes à ces prétentions seront également rejetées. Le jugement sera donc confirmé de ce chef.
Sur les demandes reconventionnelles de dommages et intérêts
Moyens des parties
L'appelante soutient que la présente procédure n'est manifestement pas abusive ; que les sociétés intimées et le syndicat CFDT seront dès lors déboutés de leurs demandes d'indemnité et de frais irrépétibles et le jugement attaqué sera par conséquent infirmé de ces chefs.
Les sociétés composant l'UES groupe Estivin exposent qu'il ressort de l'ensemble des pièces versées aux débats que l'UD FO 37 et M. [C] n'ont jamais été évincés du processus de négociation ; que devant la clarté de la décision rendue par le tribunal, une procédure en appel est véritablement abusive de sorte qu'il y a lieu de condamner l'appelante à la somme de 5 000 € de dommages et intérêts en complément des sommes allouées en première instance.
Le SRTC CFDT-FGTE indique que contrairement aux dires de l'UD FO 37, la signature de l'avenant du 27 juillet 2018 a été précédée d'une négociation loyale avec l'ensemble des organisations syndicales représentatives ; qu'il est donc incontestable que l'UD FO 37 use d'une mauvaise foi certaine en affirmant que les négociations n'ont pas été loyales, alors que plusieurs réunions se sont déroulées en sa présence ; qu'en outre, l'action en nullité intentée par l'UD FO 37 laisse entendre qu'il aurait accepté la signature d'un accord collectif conclu dans des conditions déloyales et en contravention avec l'intérêt collectif des salariés ; qu'une telle insinuation porte nécessairement un préjudice à son image et porte atteinte à la confiance des salariés dans les organisations syndicales qui les représentent, en laissant planer le doute sur leur honnêteté ; que l'instance engagée par l'UD FO 37 est manifestement abusive et lui porte préjudice de sorte que c'est à bon droit que le tribunal a alloué une somme de 1 000 euros ; que l'UD FO 37 a entendu faire appel de la décision du tribunal, sans apporter d'argumentation nouvelle ou de contestation utile du jugement, reprenant ses affirmations de première instance ; que pour ces raisons, et compte tenu de l'atteinte portée à son image, il est sollicité la condamnation de l'UD FO 37 au paiement d'une somme de 5 000 euros, à titre de dommages et intérêts pour appel abusif.
Réponse de la cour
L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
Le seul fait pour une partie de voir ses prétentions rejetées, n'établit pas l'existence d'une faute ayant fait dégénérer le droit d'agir en justice en faute.
En l'espèce, le tribunal a retenu la mauvaise foi de l'UD FO 37 au motif que son action en justice introduite n'était pas fondée en fait et en droit, dès lors qu'il est établi qu'elle n'a pas été évincée du processus de négociation de l'accord du 27 juillet 2018 et que n'étant pas signataire de l'accord du 12 mai 2001, elle ne pouvait en solliciter la dénonciation. Cependant, il ne ressort pas de la motivation du tribunal, l'existence d'une faute caractérisant un abus du droit d'agir en justice.
En effet, l'UD FO 37 était en droit de contester la validité de l'accord d'entreprise du 27 juillet 2018, quand bien même sa prétention n'a pas été jugée fondée, étant précisé que cet acte a été signé postérieurement à la réunion à laquelle elle avait été convoquée, sous peine de voir établir un « procès-verbal de désaccord ». En outre, l'erreur de droit portant sur le fondement duquel l'UD FO 37 a entendu dénoncer l'accord d'entreprise, n'est pas plus de nature à établir l'existence de sa mauvaise foi.
En conséquence, l'action diligentée par l'UD FO 37 n'était pas abusive et les intimés seront déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts fondées sur l'article 32-1 du code de procédure civile. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné l'UD FO 37 à verser au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile, une indemnité de 1 000 € d'une part aux sociétés du groupe Estivin et d'autre part au syndicat régional des transports du Centre CFDT-FGTE.
L'article 559 du code de procédure civile dispose qu'en cas d'appel principal dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui lui seraient réclamés.
Le fait que l'appel ne fait que reprendre des moyens que les premiers juges ont clairement et de façon motivée rejetés, n'est pas de nature à établir le caractère abusif de la procédure intentée, ainsi que l'a d'ailleurs jugé la Cour de cassation (3e Civ., 31 mars 2005, pourvoi n° 03-20.096).
Ainsi, si l'UD FO 37 a entendu soumettre à un second regard, en cause d'appel, les mêmes moyens que ceux soumis aux premiers juges, qui n'étaient pas en soi empreints de mauvaise foi, ne permet pas d'établir l'existence d'un appel abusif. Les intimés seront donc déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts formées à ce titre.
Sur les frais de procédure
Le jugement sera confirmé en ses chefs statuant sur les dépens et les frais irrépétibles.
L'UD FO 37 sera condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer une somme complémentaire de 1 000 euros d'une part aux sociétés du groupe Estivin agissant ensemble, et d'autre part au SRTC CFDT-FGTE.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement en ce qu'il a condamné l'UD FO 37 à verser au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile, une indemnité de 1 000 € d'une part aux sociétés du groupe Estivin et d'autre part au syndicat régional des transports du Centre CFDT-FGTE ;
CONFIRME le jugement en ses autres dispositions critiquées ;
STATUANT À NOUVEAU sur le chef infirmé et Y AJOUTANT :
DÉBOUTE l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire de sa demande aux fins de condamnation des sociétés de l'UES groupe Estivin à régulariser sous quinze jours la situation de leurs salariés et anciens salariés au regard de l'accord du 12 mai 2001, notamment au titre des jours ARTT ;
DÉBOUTE les sociétés de l'UES groupe Estivin et le syndicat régional des transports du Centre CFDT FGTE de leurs demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
CONDAMNE l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire à payer aux sociétés de l'UES groupe Estivin ensemble, la somme complémentaire de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire à payer au syndicat régional des transports du Centre CFDT FGTE la somme complémentaire de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE l'union départementale des syndicats Force Ouvrière d'Indre-et-Loire aux entiers dépens d'appel.
Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Présidente de Chambre et Mme Karine DUPONT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT