COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE
GROSSE à :
FNATH CENTRE EST
CPAM DE LA NIEVRE
EXPÉDITION à :
[F] [Y]
MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Pôle social du Tribunal judiciaire de NEVERS
ARRÊT du : 27 JUIN 2023
Minute n°279/2023
N° RG 22/00053 - N° Portalis DBVN-V-B7G-GP5L
Décision de première instance : Pôle social du Tribunal judiciaire de NEVERS en date du 7 Décembre 2021
ENTRE
APPELANT :
Monsieur [F] [Y]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 4]
Représenté par M. [D] [B] de la FNATH CENTRE EST, en vertu d'un pouvoir spécial
Dispensé de comparution à l'audience du 11 avril 2023
D'UNE PART,
ET
INTIMÉE :
CPAM DE LA NIEVRE
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Mme [K] [C], en vertu d'un pouvoir spécial
PARTIE AVISÉE :
MONSIEUR LE MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
[Adresse 1]
[Localité 5]
Non comparant, ni représenté
D'AUTRE PART,
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats et du délibéré :
Madame Nathalie LAUER, Président de chambre,
Madame Anabelle BRASSAT-LAPEYRIERE, Conseiller,
Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller.
Greffier :
Monsieur Alexis DOUET, Greffier lors des débats et du prononcé de l'arrêt.
DÉBATS :
A l'audience publique le 11 AVRIL 2023.
ARRÊT :
- Contradictoire, en dernier ressort.
- Prononcé le 27 JUIN 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Nathalie LAUER, Président de chambre, et Monsieur Alexis DOUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
M. [F] [Y], né en 1969, a présenté les 11 juillet et 28 août 2017 deux demandes de reconnaissance de maladie professionnelle pour un syndrome du canal carpien gauche et droit.
Après avis négatif du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) de [Localité 6], la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre, ci-après CPAM de la Nièvre, a refusé le 26 mars 2018 la prise en charge de ces pathologies au titre de la législation sur les risques professionnels. M. [Y] a contesté ces décisions devant la commission de recours amiable de la caisse, qui a rejeté ses recours lors de sa séance du 25 juin 2018.
Par requête du 19 mars 2019, M. [Y] a saisi le Pôle social du tribunal de grande instance de Nevers afin de contester ces décisions.
Le tribunal de grande instance est devenu le tribunal judiciaire le 1er janvier 2020 par l'effet de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019.
Par jugement avant dire droit du 30 novembre 2020, le Pôle social du tribunal judiciaire de Nevers a ordonné la saisine d'un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) et désigné celui de la région Centre Val de Loire, qui a rendu ses avis le 14 avril 2021.
Selon jugement du 7 décembre 2021, le Pôle social du tribunal judiciaire de Nevers a :
- débouté M. [Y] de sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle au titre des pathologies canal carpien droit et canal carpien gauche déclarées le 11 juillet 2017,
- condamné M. [Y] aux dépens de l'instance.
Suivant déclaration du 3 janvier 2022, M. [Y] a interjeté appel de cette décision.
L'affaire a été appelée à l'audience du 11 avril 2023.
Aux termes de ses conclusions visées à l'audience et soutenues oralement, M. [Y] demande à la Cour de :
- le déclarer recevable et bien-fondé en son appel,
A titre principal,
- constater au vu de l'ensemble des pièces versées aux débats que le canal carpien bilatéral décrit dans le certificat médical initial du 23 juin 2017 et du 28 août 2017 est en lien direct avec l'activité professionnelle d'agent polyvalent spécialisé en couverture, chauffage et plomberie exercée par ses soins et que le délai de prise en charge est respecté,
- infirmer le jugement et en conséquence dire et juger que cette pathologie doit faire l'objet d'une prise en charge au titre de la législation professionnelle,
- le renvoyer devant la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre pour la liquidation de ses droits,
A titre subsidiaire,
- désigner avant dire droit un nouveau CRRMP afin qu'il se prononce sur le délai de prise en charge entre la pathologie du canal carpien bilatéral décrite dans les certificats médicaux initiaux du 23 juin 2017 et du 28 août 2017 et son activité professionnelle d'agent polyvalent spécialisé en couverture, chauffage et plomberie,
- enjoindre à la CPAM de la Nièvre de communiquer son entier dossier à ce nouveau CRRMP, c'est-à-dire l'intégralité des pièces énumérées à l'article D. 461-29 du Code de la sécurité sociale, ainsi que le dossier de la présente procédure y compris l'avis du médecin du travail le Dr [H] [R],
- renvoyer les parties à une audience ultérieure.
Aux termes de ses conclusions visées à l'audience et soutenues oralement, la CPAM de la Nièvre demande à la cour de :
- confirmer le jugement du 7 décembre 2021 du tribunal judiciaire de Nevers en toutes ses dispositions ;
- débouter M. [Y] de l'ensemble de ses prétentions ;
- condamner M. [Y] aux entiers dépens.
En application de l'article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures et observations des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
MOTIFS DE LA DECISION
- Sur la reconnaissance de la maladie professionnelle
Aux termes de l'article L. 461-1 alinéa 2 du Code de la sécurité sociale, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau des maladies professionnelles et contractée dans les conditions prévues à ce tableau ; lorsque les conditions de prise en charge d'une maladie ne sont pas remplies, le texte prévoit qu'une maladie figurant dans un tableau peut être reconnue d'origine professionnelle s'il est établi, après avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1.
En l'espèce, M. [Y] soutient qu'il remplit les conditions du tableau n° 57 C, notamment s'agissant du délai de prise en charge. Il expose que le CRRMP n'a pas tenu compte des pièces médicales transmises qui établissent selon lui qu'il a été exposé aux risques de 2011 à 2014, étant alors adjoint technique polyvalent, spécialisé en couverture chauffage et plomberie et utilisant des outils vibrants. Le cas échéant, il sollicite la désignation d'un autre CRRMP, faisant notamment valoir que l'avis du médecin du travail n'a pas été transmis au CRRMP.
De son côté, la caisse fait valoir que le médecin conseil a retenu la date de première constatation médicale des deux maladies en se fondant sur la date de réalisation d'un EMG le 28 avril 2017 alors qu'il n'est pas contesté que la date de fin d'exposition au risque est le 18 mai 2016, dernier jour de travail de M. [Y] au sein de la société. Elle expose encore que la date de première constatation avancée par l'assuré n'est documentée par aucun élément et est au surplus contredite par certaines de ses pièces médicales. Elle demande à la Cour de considérer que le délai de prise en charge n'a pas été respecté et qu'il était nécessaire de saisir un CRRMP au cas présent. Elle s'oppose en revanche à la désignation d'un troisième CRRMP compte tenu de l'avis concordant de ceux précédemment saisis et affirme avoir demandé son avis au médecin du travail par courrier du 13 octobre 2017 à l'adresse du service de médecine du travail fournie par M. [Y].
Selon le tableau n° 57 C relatif aux poignets, plus précisément au syndrome du canal carpien, il apparaît que le délai de prise en charge est de 30 jours au titre des travaux comportant de façon habituelle, soit des mouvements répétés ou prolongés d'extension du poignet ou de préhension de la main, soit un appui carpien, soit une pression prolongée ou répétée sur le talon de la main.
Il ressort des pièces versées aux débats que M. [Y] a cessé son activité professionnelle chez son dernier employeur le 18 mai 2016 du fait de la prescription d'un arrêt de travail en rapport avec une autre pathologie que celle relative au canal carpien, gauche et droit.
Aux termes des certificats médicaux initiaux des 23 juin et 28 août 2017, il est indiqué par le Dr [G] comme date de première constatation de la maladie, celle du 1er juin 2017 pour le canal carpien gauche, et celle du 12 juillet 2017 pour le canal carpien droit, ces dates correspondant à des cures chirurgicales. En revanche, la demande de reconnaissance de la maladie professionnelle du 11 juillet 2017 mentionne celle du 28 avril 2017 qui est celle d'un électromyogramme (EMG).
Par ailleurs, ainsi que le fait pertinemment valoir la caisse, aucun élément ne vient corroborer les dires du Dr [G] du 6 décembre 2019 selon lequel l'assuré se plaint depuis 2014 d'un syndrome du canal carpien bilatéral, l'extrait de son dossier de la médecine du travail n'apportant aucune précision sur ce point.
Dans ces conditions, c'est à juste titre que la caisse a considéré que M. [Y] ne remplissait pas les conditions du tableau n° 57 C quant au délai d'exposition au risque et qu'il convenait de saisir un CRRMP.
Ceux désignés ont estimé que le non-respect du délai de pris en charge dans les proportions de l'espèce (entre 11 mois et 13 mois) constitue un obstacle à la reconnaissance de la maladie professionnelle des pathologies déclarées, l'existence d'un lien de causalité direct avec les activités professionnelles exercées par l'assuré ne pouvant dès lors être retenu.
Il s'ensuit que la décision déférée de rejet des demandes de reconnaissance de maladie professionnelle de M. [Y] sera confirmée, sans qu'il soit nécessaire de désigner un nouveau CRRMP, aucune irrégularité n'affectant les conclusions de ceux existants au regard des pièces soumises à l'appréciation de la Cour.
- Sur les demandes accessoires
Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens.
M. [Y], partie succombante, sera condamné aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS:
Statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement du Pôle social du tribunal judiciaire de Nevers du 7 décembre 2021 en toutes ses dispositions ;
Condamne M. [F] [Y] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,