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12/06/2023 | FRANCE | N°20/01968

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre civile, 12 juin 2023, 20/01968


COUR D'APPEL D'ORLÉANS



C H A M B R E C I V I L E





GROSSES + EXPÉDITIONS : le 12/06/2023

la SELARL LAVILLAT-BOURGON

la SELARL CASADEI-JUNG





ARRÊT du : 12 JUIN 2023



N° : - N° RG : 20/01968 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GG3R



DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MONTARGIS en date du 02 Juillet 2020



PARTIES EN CAUSE



APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°:1265254515259433



SARL GUILHERME CONSTRUCTION, immatr

iculée au Registre du Commerce et des Sociétés d'ORLEANS, sous le n°B 522 516 152, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

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COUR D'APPEL D'ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 12/06/2023

la SELARL LAVILLAT-BOURGON

la SELARL CASADEI-JUNG

ARRÊT du : 12 JUIN 2023

N° : - N° RG : 20/01968 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GG3R

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MONTARGIS en date du 02 Juillet 2020

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°:1265254515259433

SARL GUILHERME CONSTRUCTION, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés d'ORLEANS, sous le n°B 522 516 152, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Cécile BOURGON de la SELARL LAVILLAT-BOURGON, avocat au barreau de MONTARGIS

D'UNE PART

INTIMÉ : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265252064858043

Monsieur [Z] [O]

né le 06 Décembre 1976 à [Localité 4] (Congo RDC)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Emmanuel POTIER de la SELARL CASADEI-JUNG, avocat au barreau d'ORLEANS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 07 Octobre 2020.

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 06 février 2023

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 04 Avril 2023, à 14h30, devant Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller, Magistrat Rapporteur, par application de l'article 786 et 910 alinéa 1 du Code de Procédure Civile.

Lors du délibéré :

Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller,

Madame Laure Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier :

Madame Fatima HAJBI, Greffier lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

L'arrêt qui devait initialement être prononcé le 06 juin 2023 a été prorogé au 12 juin 2023,

Prononcé le 12 JUIN 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant devis du 17 janvier 2015, M. et Mme [O] ont confié à la société Guilherme Construction l'édification de leur maison individuelle située à [Localité 3].

Par acte d'huissier de justice en date du 5 février 2019, la société Guilherme Construction a fait assigner M. [O] devant le tribunal de grande instance de Montargis en paiement du solde de la facture de travaux.

Par jugement du 2 juillet 2020, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire de Montargis a':

- condamné M. [O] à payer à la société Guilherme Construction le solde restant dû de 4'000 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2017';

- débouté la société Guilherme Construction du surplus de sa demande en paiement concernant la somme de 9'960'euros au titre de la réalisation d'une cour de pavés';

- débouté la société Guilherme Construction de sa demande de dommages et intérêts pour un montant de 2'000 euros';

- ordonné la remise à M. [O] par la société Guilherme Construction de l'attestation de prise en compte de la réglementation thermique 2012, suite à l'achèvement des travaux, de la déclaration d'achèvement et de conformité des travaux, après l'obtention d'un permis de modification du permis de construire initial';

- débouté M. [O] de sa demande à fin d'assortir cette ordonnance de remise d'actes sous astreinte';

- prononcé la réception des travaux tels que décrits dans le devis signé par les parties le 10 juin 2015, à la date du 1er juillet 2017, sans réserve';

- rejeté la demande de M. [O] afin d'assortir la réception de travaux d'une réserve relative à la non-conformité des pentes des toitures par rapport au permis de construire';

- condamné la société Guilherme Construction et M. [O] par parts égales aux dépens de l'instance, soit par moitié chacun';

- accordé à la SELARL Casadei-Jung, avocats au barreau d'Orléans, le droit de recouvrer directement contre leur client et la société Guilherme Construction, à proportion de leur condamnation aux dépens, ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision, en application de l'article 699 du code de procédure civile';

- débouté la société Guilherme Construction et M. [O] de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 7 octobre 2020, la société Guilherme Construction a interjeté appel du jugement en ce qu'il a':

- débouté la société Guilherme Construction du surplus de sa demande en paiement concernant la somme de 9'960'euros au titre de la réalisation d'une cour de pavés';

- débouté la société Guilherme Construction de sa demande de dommages et intérêts pour un montant de 2'000 euros';

- ordonné la remise à M. [O] par la société Guilherme Construction de l'attestation de prise en compte de la réglementation thermique 2012, suite à l'achèvement des travaux, de la déclaration d'achèvement et de conformité des travaux, après l'obtention d'un permis de modification du permis de construire initial';

- condamné la société Guilherme Construction et M. [O] par parts égales aux dépens de l'instance, soit par moitié chacun';

- débouté la société Guilherme Construction et M. [O] de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 2 décembre 2021, la société Guilherme Construction demande de':

- la dire et juger bien fondée en son appel limité';

- dire et juger M. [O] non fondé en son appel incident et l'en débouter';

- confirmer en conséquence le jugement en ce qu'il a condamné M. [O] en exécution du contrat de travaux de gros 'uvre conclu avec elle selon devis accepté et signé entre les parties le 16 juin 2015, à lui payer le solde restant dû de 4'000 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2017, date de réception par M. [O] de la lettre de mise en demeure de payer';

- débouter M. [O] de sa demande de restitution de la somme de 4'365,48 euros qu'il a payée au titre de l'exécution provisoire';

- faire droit à son appel principal et réformer le jugement entrepris';

- condamner M. [O] à lui payer la somme totale de 9'960 euros TTC au titre des travaux réalisés et des matériaux fournis avec intérêts au taux légal à compter de la première lettre de mise en demeure de payer en date du 16 novembre 2017';

- subsidiairement, condamner M. [O] à lui payer la somme totale de 9'960 euros TTC au titre des travaux réalisés et des matériaux fournis avec intérêts au taux légal à compter de la première lettre de mise en demeure de payer en date du 16 novembre 2017 sur le fondement de l'enrichissement sans cause';

- condamner M. [O] à lui payer la somme de 2'000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive';

- constater que l'attestation RT 2012 a été remise à M. [O]';

- lui donner acte de ce que la déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux sera déposée en Mairie, après remboursement par M. [O] de la facture de la société ID Global de 200 euros au titre des plans modificatifs, et après signature et obtention par M. [O] du dossier de permis modificatif suite au changement de la pente de la toiture du garage et de l'emplacement du portillon';

- condamner M. [O] à lui payer une indemnité de 5'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamner M. [O] aux dépens de première instance et d'appel';

- rejeter toutes demandes contraires.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 14 octobre 2021, M. [O] demande de':

- dire l'appel partiel interjeté par la société Guilherme Construction irrecevable et mal fondé';

- dire son appel partiel incident recevable et bien fondé et y faire droit,

En conséquence,

- confirmer le jugement en ce qu'il a': débouté la société Guilherme Construction de sa demande de paiement concernant la somme de 9'960'€ au titre de la réalisation d'une cour de pavés'; débouté la société Guilherme Construction de sa demande de dommages et intérêts pour un montant de 2'000'€'; ordonné la remise par la société Guilherme Construction de l'attestation de prise en compte de la réglementation thermique 2012 suite à l'achèvement des travaux, de la déclaration d'achèvement et de conformité des travaux, après l'obtention d'un permis de modification du permis de construire initial'; prononcé la réception des travaux à la date du 1er juillet 2017, sans réserve';

- infirmer ce jugement en ce qu'il l'a condamné à payer à la société Guilherme Construction la somme de 4'000'€ TTC avec intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2017 à titre de solde de l'exécution du contrat de travaux de gros 'uvre et condamner en conséquence la société Guilherme Construction à lui restituer la somme de 4'365,48'€ qu'il a réglée en respect de l'exécution provisoire du jugement';

- débouter la société Guilherme Construction de l'ensemble de ses demandes plus amples ou contraires';

- condamner la société Guilherme Construction à lui payer une indemnité de 5'000'€ au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel en vertu de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamner la société Guilherme Construction aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SELARL Casadei-Jung, avocat aux offres de droit.

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions récapitulatives.

MOTIFS

Les demandes aux fins de constater ou de donner acte ne sont pas des chefs de demande emportant des conséquences juridiques de sorte qu'il n'y a pas lieu à statuer sur les demandes de l'appelante tendant à constater que l'attestation RT 2012 a été remise à M. [O] et à lui donner acte de ce que la déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux sera déposée en mairie près remboursement par M. [O] de la facture de la société ID Global de 200 euros au titre des plans modificatifs, et après signature et obtention par M. [O] du dossier de permis modificatif suite au changement de la pente de la toiture du garage et de l'emplacement du portillon.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a ordonné la remise par la société Guilherme Construction à M. [O] de l'attestation de prise en compte de la réglementation thermique 2012, suite à l'achèvement des travaux, de la déclaration d'achèvement et de conformité des travaux, après l'obtention d'un permis de modification du permis de construire initial.

Sur le solde de la facture de travaux

'Sur les travaux suivant devis initial

Moyens des parties

L'appelante expose que les travaux de construction ont été ramenés à la somme totale de 185'676,36 euros TTC'; que sur la facture globale n° 01/10/15 de 5'676,36 euros, M. [O] n'a réglé que la somme de 1'676,36 euros et reste devoir la somme de 4'000 euros'; qu'elle conteste l'existence d'un accord portant sur la réfaction du prix en raison de prétendues malfaçons commises par le plaquiste dans le cadre de ses travaux'; que les malfaçons alléguées par le maître d'ouvrage ne sont pas démontrées'; que la facture de 1'676,36 euros est une facture d'acompte et non une facture globale et récapitulative conforme au devis signé'; que dans ses courriers des 12 décembre 2017 et 15 janvier 2018, elle a clairement sollicité paiement du solde de 4'000 euros'; qu'il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [O] à lui payer la somme de 4'000 euros au titre du solde restant sur de la facture n° 01/10/15.

L'intimé indique que les deux parties s'accordent pour fixer le montant des travaux de gros 'uvre à la somme totale de 185'676,36 euros TTC, sur laquelle la somme de 181'676,36 euros a été réglée'; qu'il conteste devoir le solde de 4'000 euros qui correspond à la réfaction de prix convenue entre les parties pour les malfaçons imputées au plaquiste mandaté par la société Guilherme Construction en qualité de sous-traitant'; que plutôt que de supporter le coût d'une expertise, les parties ont convenu d'une réfaction forfaitaire de prix de 4'000 euros dont il apporte la preuve'; qu'en effet, la facture litigieuse de 5'676,36 euros a été annulée par une seconde facture réduite à la somme de 1'676,36 euros'; que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il l'a condamné à tort à payer la somme de 4'000 euros, et l'appelante sera condamnée à lui restituer cette somme outre la somme de 365,48 euros d'intérêts qu'il a réglées en application de l'exécution provisoire.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°'2016-131 du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

L'article 1315 alinéa 2 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°'2016-131 du 10 février 2016, dispose que celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, suivant devis signé le 10 juin 2015, les parties ont convenu de fixer le prix total des travaux de gros 'uvre et de second 'uvre à la somme de 185'676,36 euros TTC, dont 181'679,36 euros ont été réglés par M. [O].

M. [O] allègue l'existence d'un accord de réfaction du prix à la somme de 181'679,36 euros, qui n'a nullement été formalisé par écrit.

Or, en application de l'article 1341 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°'2016-131 du 10 février 2016, il ne peut être prouvé contre un acte juridique d'une valeur supérieure à 1'500 euros que par un autre écrit, inexistant en l'espèce.

Les photographies produites par l'intimé pour tenter d'établir l'existence de malfaçons ne peuvent permettre de prouver l'existence d'un accord de réfaction du prix des travaux.

Si M. [O] produit aux débats deux factures d'acompte n° 7 établies par la société Guilherme Construction le 21 juin 2017, l'une d'un montant de 5'676,36 euros et la seconde d'un montant de 1'676,36 euros, aucune mention ne figure sur ces documents sur une prétendue annulation de la facture à hauteur de 4'000 euros.

M. [O] n'a réglé que la somme de 1'676,36 euros sur le solde restant dû de 5'676,36 euros par chèque daté du 6 octobre 2017. La facture d'acompte d'un montant de 1'676,36 euros correspond ainsi à la réédition de la facture du 21 juin 2017 lors de la réception de ce paiement, la société Guilherme construction n'ayant pas modifié la date de la facture initiale. Elle ne fait foi que de la réception du paiement de la somme de 1'676,36 euros et ne valait pas libération du maître d'ouvrage pour le solde dû de 4'000 euros.

À cette fin, il ne peut qu'être relevé que deux mois après la réception de ce dernier paiement de 1'676,36 euros, la société Guilherme Construction a mis en demeure M. [O] de lui régler le solde de 4'000 euros, par un courrier recommandé avec demande d'avis de réception daté du 12 décembre 2017 et rédigé en ces termes':

«'Vous m'avez remis un chèque d'un montant de 1'676,36 euros correspondant à la facture d'acompte n° 7 pour le dernier paiement à la réception du chantier, je tiens à vous rappeler qu'à ce jour, je n'ai toujours pas reçu le solde total de cette facture.

Le total de la construction est de 185'676,36 euros, à ce jour votre compte reste toujours débiteur de la somme de 4'000 euros concernant la partie construction.

Les suppléments de travaux réalisés par votre peintre ne me concernent en aucun cas.

Ces travaux de finition pour un rendu visuel plus esthétique ont été réalisés par votre peintre à votre demande et non pour une mauvaise finition des bandes.

Aucune réclamation écrite n'a été faite à ce sujet'».

M. [O] n'allègue ni justifie avoir répondu à ce courrier en se prévalant du prétendu accord de réfaction du prix qui l'aurait libéré de tout autre paiement.

L'intimé ne rapporte pas l'existence d'un commencement de preuve par écrit pour démontrer la réfaction du prix invoquée.

En conséquence, M. [O] doit être condamné à payer à la société Guilherme Construction avec intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2017, date de réception de la lettre de mise en demeure. Le jugement sera donc confirmé de ce chef, et M. [O] sera débouté de sa demande de restitution de la somme de 4'365,48 euros réglée en exécution du jugement.

'Sur les travaux supplémentaires de cour en pavés

Moyens des parties

L'appelante fait valoir qu'en cours de chantier, M. [O] a demandé, en supplément du devis initial, la création d'une cour en pavés qui a donné lieu à l'établissement d'un second devis en date du 19 avril 2016 et d'une facture en date du 3 juillet 2017 ramenée après négociation à un montant de 11'280 euros TTC'; que par mégarde, elle ne s'est pas assurée du bon retour par M. [O] du devis en date du 25 avril 2016 d'un montant de 12'480 euros TTC signé par lui'; que M. [O] a déposé son ancien portail d'entrée pour permettre la réalisation de cette cour qui a impliqué l'enlèvement de l'ancien revêtement pour la pose de pavés neufs'; qu'il utilise et stationne ses véhicules dans cette cour entièrement refaite en pavés neufs et y a installé un nouveau portail, de sorte qu'il a nécessairement et sans aucune équivoque possible commandé et accepté ces travaux supplémentaires et le devis correspondant'; qu'il convient donc de condamner M. [O] à lui payer la somme de 9'960 euros TTC au titre de ces travaux'; que subsidiairement, il sera fait droit à sa demande sur le fondement de l'enrichissement sans cause, dès lors qu'elle a livré des matériaux désormais en possession de M. [O].

L'intimé réplique qu'aux termes de l'article 1359 du code civil, l'acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant 1'500 euros doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique'; qu'il n'a signé aucun document contractuel par lequel il se serait engagé à payer à la société Guilherme Construction un prix convenu en contrepartie de travaux à réaliser'; que le fondement de l'enrichissement injustifié ne peut être admis qu'à défaut de toute autre action ouverte au demandeur et en aucun cas pour suppléer à une action que celui-ci ne peut intenter faute de pouvoir apporter les preuves qu'elle exige'; qu'en l'absence d'un écrit attestant de l'existence d'un contrat d'entreprise, le jugement sera confirmé en ce que la société Guilherme Construction a été déboutée de sa demande en paiement de la somme de 9'960 euros.

Réponse de la cour

Il convient de rappeler que le contrat étant antérieur à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°'2016-131 du 10 février 2016, seules les dispositions du code civil dans leur rédaction antérieure à celle-ci doivent s'appliquer en l'espèce.

L'article 1315 alinéa 1er du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°'2016-131 du 10 février 2016, dispose que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

La preuve de l'acceptation des travaux réalisés ne fait pas la preuve du consentement au prix, lequel ne peut résulter du seul silence gardé à réception d'une facture, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation (3e Civ., 9 juillet 2020, pourvoi n° 19-16.371).

L'article 1341 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°'2016-131 du 10 février 2016, dispose qu'il doit être passé acte devant notaires ou sous signatures privées de toutes choses excédant une somme de 1'500 euros.

Ces dispositions s'appliquent à la preuve de la commande de travaux supplémentaires par un maître d'ouvrage non-commerçant, de sorte qu'en l'absence d'écrit ou de commencement de preuve par écrit, la demande d'un constructeur formée contre un non-commerçant et portant sur des travaux supplémentaires d'un montant supérieur à 1'500 euros doit être rejetée (3e Civ., 17 novembre 2021, pourvoi n° 20-20.409).

En l'espèce, la société Guilherme Construction reconnaît que le devis de travaux supplémentaires de création d'une cour, en date du 25 avril 2016, n'est pas signé du maître d'ouvrage dont la qualité de commerçant n'est ni alléguée ni établie.

L'appelante ne se prévalant pas d'un commencement de preuve par écrit au sens de l'article 1347 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°'2016-131 du 10 février 2016, la preuve de la commande de travaux supplémentaires n'est donc pas établie.

L'envoi de la facture de travaux supplémentaires ne peut établir la preuve de la commande de travaux par le maître d'ouvrage ni même de son consentement au prix.

S'agissant de l'action fondée sur l'enrichissement sans cause, il convient de rappeler que son caractère subsidiaire s'oppose à ce qu'elle soit admise pour suppléer à une autre action exercée à titre principal pour laquelle demandeur échoue à apporter les preuves qu'elle exige (3e Civ, 29 avril 1971, Bull. n° 277'; 1re Civ., 31 mars 2011, pourvoi n° 09-13.966, Bull. 2011, I, n° 67'; 1re Civ., 3 juin 2015, pourvoi n° 14-17.408).

La société Guilherme Construction ne peut donc pallier sa carence dans l'administration de la preuve de l'accord du maître d'ouvrage sur le prix et les travaux supplémentaires allégués, en se fondant subsidiairement sur le fondement de l'enrichissement sans cause.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Guilherme Construction du surplus de sa demande en paiement concernant la somme de 9'960'euros au titre de la réalisation d'une cour de pavés.

Sur la demande de dommages et intérêts de la société Guilherme Construction

Moyens des parties

L'appelante soutient que M. [O] est de la plus parfaite mauvaise foi et n'a cherché qu'à esquiver son obligation de paiement des travaux réalisés qui ne comportent strictement aucune malfaçon'; que c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.

L'intimé réplique que les demandes de la société Guilherme Construction étant infondées, il n'est nullement de mauvaise foi à les contester'; qu'ainsi que l'a rappelé le tribunal, la simple résistance à une action en justice ne peut constituer un abus de droit'; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Guilherme Construction de sa demande de dommages et intérêts.

Réponse de la cour

L'article 1153 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°'2016-131 du 10 février 2016, dispose que dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal. Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.

La société Guilherme Construction n'alléguant ni ne justifiant avoir subi un préjudice indépendant du retard dans le paiement de la somme de 4'000 euros qui ne serait pas réparé par les intérêts moratoires, la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive sera rejetée. Le jugement sera donc également confirmé sur ce point.

Sur les dispositions accessoires

Le jugement sera confirmé en ses chefs statuant sur les dépens et les frais irrépétibles. La société Guilherme Construction succombant à l'instance, il y a lieu de la condamner aux dépens d'appel dont distraction au profit de la SELARL Casadei-Jung, et à payer à M. [O] la somme de 1'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions critiquées';

Y AJOUTANT':

DÉBOUTE M. [O] de sa demande de restitution de la somme de 4'365,48 euros';

CONDAMNE la société Guilherme Construction à payer à M. [O] la somme de 1'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

CONDAMNE la société Guilherme Construction aux dépens d'appel';

DIT que la SELARL Casadei-Jung pourra recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans en avoir reçu provision.

Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président à la Cour d'Appel d'ORLEANS et Madame Fatima HAJBI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/01968
Date de la décision : 12/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-12;20.01968 ?
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