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12/06/2023 | FRANCE | N°20/01570

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre civile, 12 juin 2023, 20/01570


COUR D'APPEL D'ORLÉANS



C H A M B R E C I V I L E



GROSSES + EXPÉDITIONS : le 12/06/2023

Me Coraly VINCENT

la SELARL AVENIR AVOCATS



ARRÊT du : 12 JUIN 2023



N° : - N° RG : 20/01570 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GGBF



DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ORLEANS en date du 20 Novembre 2019



PARTIES EN CAUSE



APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265256294433821



Monsieur [H] [C]

né le 30 Janvier 1980 à [Localité 9]
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[Localité 5]



représenté par Me Coraly VINCENT, avocat au barreau d'ORLEANS substituée par Me ET TOUMI



Madame [E] [Y]

née le 04 Mai 1977 à [Localité 8]

[Adres...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 12/06/2023

Me Coraly VINCENT

la SELARL AVENIR AVOCATS

ARRÊT du : 12 JUIN 2023

N° : - N° RG : 20/01570 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GGBF

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ORLEANS en date du 20 Novembre 2019

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265256294433821

Monsieur [H] [C]

né le 30 Janvier 1980 à [Localité 9]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représenté par Me Coraly VINCENT, avocat au barreau d'ORLEANS substituée par Me ET TOUMI

Madame [E] [Y]

née le 04 Mai 1977 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Coraly VINCENT, avocat au barreau d'ORLEANS substituée par Me ET TOUMI

D'UNE PART

INTIMÉS :

Maître [S] [O] ès qualité de liquidateur judiciaire de la S.A.S. ENERGIA immatriculée au R.C.S de LYON sous le numéro 479 588 063 dont le siège social est situé [Adresse 1] [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 7]

n'ayant pas constitué avocat

PARTIE INTERVENANTE : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265252882930435

La SELARL [M] [U] immaticulée au RCS de LYON sous le n° 901 604 736, représentée par Me [M] [U], venant aux droits de la SELARL ALLIANCE MJ, suivant jugement du tribunal de commerce de LYON du 3 août 2021, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS ENERGIA, fonctions auxquelles elle a été désignée suivant jugement rendu par le tribunal de commerce de LYON le 12 novembre 2020.

[Adresse 4]

[Localité 6]

représentée par Me Thierry OUSACI de la SELARL AVENIR AVOCATS, avocat postulant au barreau d'ORLEANS et par Me BARRIE de la SELARL BARRIE & ASSOCIES, avocat plaidant au barreau de LYON

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 19 Août 2020.

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 06 février 2023

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 04 Avril 2023, à 14h30, devant Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller, Magistrat Rapporteur, par application de l'article 786 et 910 alinéa 1 du Code de Procédure Civile.

Lors du délibéré :

Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller,

Madame Laure Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier :

Madame Fatima HAJBI, Greffier lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

L'arrêt qui devait initialement être prononcé le 06 juin 2023 a été prorogé au 12 juin 2023,

Prononcé le 12 JUIN 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant bon de commande du 20 janvier 2014, M. [C] et Mme [Y] ont commandé auprès de la société Energia la livraison et la pose d'un système de chauffage, de lots de menuiseries de fenêtres et coulissants, pour un montant total de 31'800 euros TTC.

Par acte d'huissier délivré le 15 janvier 2015, M. [C] et Mme [Y] ont fait assigner la société Energia devant le tribunal de grande instance d'Orléans aux fins de voir dire qu'elle a manqué à son obligation de livraison et de pose et constater la dénonciation valable du contrat en application, ou prononcer la résolution du contrat.

Par jugement du 20 novembre 2019, le tribunal de grande instance d'Orléans a':

- rejeté les demandes de résolution du contrat souscrit entre la société Energia et les consorts [C]-[Y] et d'enlèvement partiel formées par les consorts [C]-[Y]';

- condamné les consorts [C]-[Y] à payer à la société Energia la somme de 31'800 euros correspondant au prix fixé dans le bon de commande';

- dit qu'en revanche, la société Energia est responsable de l'exécution tardive de sa prestation qui engage sa responsabilité civile contractuelle';

- condamné la société Energia à payer aux consorts [C]-[Y] la somme totale de 18'549 euros en réparation de leurs préjudices financier et économique consécutifs à la réalisation tardive et fautive des prestations commandées';

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire';

- condamné la société Energia aux dépens de l'instance lesquels comprendront le frais du constat d'huissier dressé par Maître [K], dont distraction à la SELARL Moutoussamy et à payer aux consorts [C]-[Y] une indemnité de 1'500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

- rejeté tous autres chefs de demande.

Par déclaration du 19 août 2020, M. [C] et Mme [Y] ont interjeté appel de tous les chefs du jugement.

Par jugement du 12 novembre 2020, le tribunal de commerce de Lyon a ouvert une procédure de liquidation judiciaire au bénéfice de la société Energia et a nommé la SELARL Alliance MJ en qualité de liquidateur judiciaire.

Par acte d'huissier de justice du 19 novembre 2020, M. [C] et Mme [Y] ont fait assigner en intervention forcée la SELARL Alliance MJ ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Energia.

La SELARL Alliance MJ a été remplacée par la SELARL [M] [U] représentée par maître [M] [U] suivant jugement du tribunal de commerce de Lyon du 3 août 2021.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 6 janvier 2022, M. [C] et Mme [Y] demandent de':

- les déclarer recevables et bien fondés en leur appel et y faisant droit, infirmer ledit jugement';

En conséquence,

- les déclarer bien fondés en l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions';

- déclarer que la société Energia a manqué à son obligation de livraison et de pose, objet du bon de commande du 20 janvier 2014';

- déclarer que la rupture est imputable à la société Energia';

- ordonner la dénonciation valable du contrat en application des dispositions de l'article L.114-1 du code de la consommation';

En tant que besoin,

- ordonner la résolution du contrat aux torts de la société Energia sur le fondement des dispositions de l'article 1184 du code civil';

- condamner Maître [M] [U] de la SELARL Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Energia au paiement de la somme totale de 17'549'€, à leur profit en réparation des préjudices financiers et économiques';

- condamner Maître [M] [U] de la SELARL Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Energia au paiement de la somme totale de 2'000'€, à leur profit en réparation de leur préjudice moral';

- condamner Maître [M] [U] de la SELARL Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Energia au paiement de la somme totale de 5'000'€, à leur profit en réparation de leur préjudice économique et financier';

- enjoindre à Maître [M] [U] de la SELARL Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Energia de procéder à l'enlèvement de la livraison partielle sous astreinte de 150'€ à compter du «'jugement'» à intervenir';

En tout état de cause,

- les déclarer recevables et bien fondés à assigner en intervention forcée la prise en la personne de Maître [M] [U] de la SELARL Alliance MJ, ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Energia';

- déclarer et fixer leur créance chirographaire à l'encontre de la société Energia à l'ensemble des sommes auxquelles celle-ci sera condamnée';

- fixer aux sommes indiquées au dispositif des présentes leur créance à inscrire à la liquidation judiciaire de la société Energia';

- débouter la société Energia et le liquidateur judiciaire de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions';

- condamner Maître [M] [U] de la SELARL Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Energia au paiement de la somme de 5'000'€ à leur profit au titre de l'article 700 du code procédure civile';

- condamner Maître [M] [U] de la SELARL Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Energia au paiement des entiers frais et dépens, comprenant notamment les frais du procès-verbal dressé par Maître [K], Huissier de justice en date du 21 novembre 2014, dont distraction au profit de Maître Coraly Vincent, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile';

- ordonner l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 22 septembre 2021, la SELARL [M] [U], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Energia, demande de':

A titre principal,

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de résolution du contrat souscrit entre la société Energia et les consorts [C]-[Y] et d'enlèvement partiel formées par les consorts [C]-[Y]';

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné les consorts [C]-[Y] à payer à la société Energia la somme de 31'800'€ correspondant au prix fixé dans le bon de commande';

A titre incident,

- réformer le jugement en ce qu'il a dit que la société Energia est responsable de l'exécution tardive de sa prestation qui engage sa responsabilité civile contractuelle';

- réformer le jugement en ce qu'il a condamné la société Energia à payer aux consorts [C]-[Y] la somme totale de 18'549'€ en réparation de leurs préjudices financier et économique consécutifs à la réalisation tardive et fautive des prestations commandées';

- réformer le jugement en ce qu'il a condamné la société Energia aux dépens de l'instance lesquels comprennent les frais du constat d'huissier dressé par Maître [K], dont distraction à la SELARL Moutoussamy et à payer aux consorts [C]-[Y] une indemnité de 1'500'€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile';

En conséquence,

- débouter les consorts [C]-[Y] de l'ensemble de leurs demandes à son encontre, ès-qualités';

- condamner les consorts [C]-[Y] à lui verser, ès-qualités, la somme de 3'000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamner les consorts [C]-[Y] aux entiers frais et dépens.

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions récapitulatives.

La cour a demandé aux appelants de justifier de leur déclaration de créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Energia. Les appelants ont produit leur déclaration de créance d'un montant de 29'549 euros.

MOTIFS

Sur la dénonciation du contrat

Moyens des parties

M. [C] et Mme [Y] soutiennent que les parties ont contractuellement fixé la date limite de livraison et de pose au 20 juillet 2014, date reportée à l'initiative de la défenderesse au 20 novembre 2014'; que la société Energia n'a pas respecté ses obligations contractuelles dans le délai imparti'; que le report était de 4 mois et non de 6 mois'; que faute de livraison à la date du 20 novembre 2014, ils ont dénoncé le contrat en application de l'article L.114-1 ancien du code de la consommation'; que les prestations n'ont jamais été exécutées dans leur totalité, et la société en est la seule responsable'; qu'il n'y a pas eu d'opposition de leur part à la livraison et à la réalisation de la pose, mais ils ont seulement fait part de leurs doléances oralement et ont également adressé des réclamations écrites.

Le liquidateur judiciaire de la société Energia réplique que la prestation a été totalement exécutée dans les délais concernant le chauffage'; que par courrier du 6 août 2014, la société a annoncé aux clients un report du délai de pose de quatre mois supplémentaires, expirant ainsi le 21 novembre, délai qui a été accepté'; qu'un procès-verbal de réception sans réserve a été signé concernant le système de chauffage'; que la prestation de fourniture des menuiseries a été totalement exécutée et la prestation de pose des menuiseries a été rendue impossible du fait de l'attitude des clients'; que la société Energia s'est présentée le 21 novembre 2014 avec les menuiseries au domicile de M. [C] et de Mme [Y], lesquels étaient absents et injoignables'; que la société a déposé les menuiseries sur une terrasse extérieure accessible afin d'en effectuer la pose ultérieurement'; qu'elle a adressé un courrier aux clients le 21 novembre 2014, afin de convenir d'un nouveau rendez-vous permettant l'achèvement de la prestation'; que ce n'est que le 2 décembre 2014 que les clients ont répondu à la société Energia en remettant en cause l'accord intervenu entre les parties concernant les délais de réalisation des différentes prestations'; que M. [C] et Mme [Y] qui avaient parfaitement conscience que la société Energia a tenté de les joindre avant de se rendre à leur domicile, et le jour où elle s'y est présentée, ont fait en sorte de l'empêcher d'achever la prestation dans les temps, en se rendant injoignables juste avant l'achèvement du délai, puis le jour convenu de la pose des menuiseries'; que les clients ont ensuite sciemment attendu l'achèvement du délai légal de 7 jours à compter du dépassement de la date maximale d'exécution de la prestation, pour obtenir la résiliation du contrat, et adresser une mise en demeure à la société Energia'; que la société n'avait aucun intérêt à se délester d'une marchandise d'une valeur de 17'181,61 euros TTC, si elle ne comptait pas par la suite l'installer au domicile de ses clients'; que seule la partie pose des fenêtres et coulissants, pour un montant de 2'946,15 euros TTC n'a pas été exécutée, du fait de M. [C] et Mme [Y]'; que le jugement sera donc réformé en ce qu'il a jugé que la société Energia était responsable de l'exécution tardive et fautive des prestations commandées.

Réponse de la cour

L'article L.114-1 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur au jour du contrat, dispose':

«'Dans tout contrat ayant pour objet la vente d'un bien meuble ou la fourniture d'une prestation de services à un consommateur, le professionnel doit, lorsque la livraison du bien ou la fourniture de la prestation n'est pas immédiate et si le prix convenu excède des seuils fixés par voie réglementaire, indiquer la date limite à laquelle il s'engage à livrer le bien ou à exécuter la prestation.

Le consommateur peut dénoncer le contrat de vente d'un bien meuble ou de fourniture d'une prestation de services par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en cas de dépassement de la date de livraison du bien ou d'exécution de la prestation excédant sept jours et non dû à un cas de force majeure.

Ce contrat est, le cas échéant, considéré comme rompu à la réception, par le vendeur ou par le prestataire de services, de la lettre par laquelle le consommateur l'informe de sa décision, si la livraison n'est pas intervenue ou si la prestation n'a pas été exécutée entre l'envoi et la réception de cette lettre. Le consommateur exerce ce droit dans un délai de soixante jours ouvrés à compter de la date indiquée pour la livraison du bien ou l'exécution de la prestation'».

L'article R.114-1 du code de la consommation, dans sa version alors applicable, fixe à 500 euros le prix de vente ou de la prestation au-delà duquel les contrats conclus entre professionnels et consommateurs ayant pour objet la vente d'un bien meuble ou la fourniture d'une prestation de services sont soumis aux dispositions de l'article L. 114-1.

En l'espèce, le contrat conclu entre les parties était bien soumis aux dispositions de l'article L.114-1 du code de la consommation précité.

Le bon de commande signé de M. [C] et de Mme [Y] prévoyait la fourniture et la pose d'un système de chauffage et de menuiseries avec un délai contractuel de pose fixé au 20 juillet 2014.

Par courrier du 6 août 2014, la société Energia a informé M. [C] et Mme [Y] du report du délai de pose de 4 mois, les clients ayant accepté ce report en contresignant le courrier avec la mention «'bon pour accord'». En conséquence, le délai contractuel de pose était désormais fixé au 20 novembre 2014.

Suivant procès-verbal du 26 octobre 2014, M. [C] et Mme [Y] ont réceptionné sans réserve le système de chauffage.

S'agissant des menuiseries, le liquidateur judiciaire de la société Energia indique que celle-ci a livré les biens commandés au domicile le 21 novembre 2014, mais que la pose n'a pas pu être réalisée en l'absence des clients.

Le 21 novembre 2014, la société Energia a écrit à M. [C] et Mme [Y] un courrier rédigé en ces termes':

«'Notre équipe de 4 techniciens menuisiers s'est présentée ce jour à votre domicile afin d'achever l'exécution de votre commande n°16360000260/12 et ce, conformément notamment à notre accord particulier quant au délai.

Vous étiez absents sans nous en avoir prévenus et nos nombreux appels et messages sont restes sans réponses.

Nous attirons votre attention sur le fait qu'une équipe spécialisée de 4 techniciens a été vainement mobilisée et qu'en raison des contraintes de planning et sociales, notre équipe se présentera à nouveau les 29 et 30 janvier à 9h'; nous vous invitons à protéger avec tout le soin nécessaire le matériel à poser qui, de ce fait, est resté sur votre terrasse sans avoir pu être installé'».

M. [C] et Mme [Y] ont répondu, par l'intermédiaire de leur conseil, par un courrier de mise en demeure en date du 2 décembre 2014, se prévalant du dépassement du délai contractuel notamment en ces termes':

«'Eu égard aux engagements pris et plus particulièrement la souscription d'un crédit affecté à hauteur de 31'000 euros auprès de Sofinco et d'une demande de subvention conséquente, Madame [Y] et Monsieur [C] sont prêts à poursuivre la relation contractuelle aux conditions suivantes':

- Une prise en charge intégrale du système de chauffage dans sa totalité,

- Une livraison et une réalisation complète des travaux avant le 1er janvier 2015.

À défaut de réponse sous huitaine à compter de la date de la première présentation du présent courrier, le contrat sera dénoncé'».

Il résulte de ce courrier que M. [C] et Mme [Y] ont entendu faire du dépassement du délai de livraison une occasion d'imposer à la société Energia la réfaction du prix du système de chauffage pourtant réceptionné sans réserve. À aucun moment, M. [C] et Mme [Y] ne se sont expliqués, dans ce courrier, sur leur absence le 21 novembre 2014, date convenue pour la livraison et la pose des menuiseries, et ils n'ont pas contesté qu'un rendez-vous avait été pris pour l'exécution de ces prestations à cette date.

La cour relève que M. [C] et Mme [Y] étaient pourtant bien présents à leur domicile le 21 novembre 2014 pour faire établir un constat d'huissier de justice, afin de faire constater le défaut d'achèvement des travaux par la société Energia.

Il convient de rappeler qu'aux termes de l'article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°'2016-131 du 10 février 2016, les conventions conclues doivent être exécutées de bonne foi.

M. [C] et Mme [Y] qui avaient convenu d'un rendez-vous avec la société Energia, le 21 novembre 2014, bien que lendemain du délai contractuel de pose, ne pouvaient se délier de leur engagement afin de faire échec à la pose des menuiseries, aux seules fins de solliciter la poursuite du contrat à leurs conditions ou à défaut de le dénoncer, passé le délai de 7 jours à partir de l'expiration du délai d'exécution de la prestation.

Le comportement des clients de la société Energia constitue pour elle un cas de force majeure l'ayant empêchée de procéder à l'achèvement des travaux avant l'expiration du délai de sept jours suivant l'expiration du délai contractuel de pose, compte tenu de ses engagements avec ses autres clients les jours suivants la prestation prévue au domicile de M. [C] et Mme [Y].

Il s'ensuit que M. [C] et Mme [Y] sont mal fondés à se prévaloir de la dénonciation du contrat prévue à l'article L.114-1 du code de la consommation dans sa version applicable.

Sur la résolution judiciaire du contrat

Moyens des parties

Les appelants indiquent que la société Energia n'a pas procédé à la livraison de l'ensemble de la marchandise et a fortiori à sa pose'; que cette inexécution n'a pas été justifiée par la survenance d'une cause étrangère ou un cas de force majeure la rendant impossible'; qu'il y a donc lieu d'ordonner la résolution du contrat en application de l'article 1184 ancien du code civil.

Le liquidateur judiciaire de la société Energia explique que la prestation a été réalisée dans les délais fixés contractuellement concernant le système de chauffage et a été acceptée sans réserve par les clients'; que la prestation de fourniture des menuiseries a également été réalisée dans les délais'; que l'installation des menuiseries n'a en revanche jamais pu être réalisée qu'en raison de l'attitude de M. [C] et de Mme [Y] qui ont fait obstacle à l'achèvement de la prestation'; qu'il appartient au juge d'apprécier si l'inexécution est telle que la résolution doit être prononcée'; que la majeure partie des prestations fixées au contrat a été achevée, et dans ce cas, la jurisprudence considère que le bénéficiaire de la prestation doit ainsi payer la somme correspondant à la partie correctement réalisée.

Moyens des parties

L'article 1184 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°'2016-131 du 10 février 2016, applicable en l'espèce, dispose':

«'La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.

La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.'»

En l'espèce, si M. [C] et Mme [Y] ont fait échec à la pose des menuiseries du fait de leur absence non justifiée le 21 novembre 2014, la société Energia leur avait écrit pour leur indiquer que les menuiseries seraient posées les 29 et 30 janvier 2015.

Or, les menuiseries livrées au domicile de M. [C] et Mme [Y] n'ont pas été posées. La société Energia a produit en première instance un procès-verbal de réception des menuiseries au nom de [Y], ce qui a induit le tribunal en erreur, alors qu'il apparaît que ce document concernait un tiers et non M. [C] et Mme [Y], ainsi que le reconnaît le liquidateur judiciaire de la société Energia qui a retiré ce document des débats.

Nonobstant le courrier du 2 décembre 2014 émanant du conseil de M. [C] et Mme [Y], il appartenait à la société Energia qui se prévalait de l'absence de dénonciation valable du contrat par ses clients, d'exécuter la prestation de pose des menuiseries et à défaut de mettre en demeure ses clients de lui permettre d'exécuter la prestation contractuelle.

Or, le liquidateur judiciaire de la société Energia ne justifie d'aucune tentative d'exécution de la prestation de pose des menuiseries, ni de la délivrance d'une mise en demeure de M. [C] et Mme [Y] à cette fin. Il ne peut se prévaloir, au titre de la cause étrangère, de la seule absence des clients le 21 novembre 2014, dès lors que le contrat n'était point rompu à cette date, et que la société Energia s'était bien engagée, dans son courrier, du même jour, à exécuter sa prestation en janvier 2015.

S'agissant de la livraison des menuiseries, s'il n'est pas contestable que des biens ont été effectivement livrés au domicile de M. [C] et de Mme [Y], en l'absence de signature d'un procès-verbal de livraison, il n'est pas établi que toutes les menuiseries aient été livrées et qu'elles étaient conformes à la commande.

En conséquence, il convient d'ordonner la résolution partielle du contrat liant la société Energia et M. [C] et Mme [Y], quant à la fourniture et la pose des menuiseries.

Il convient donc d'ordonner au liquidateur judiciaire de la société Energia, ès qualités, de procéder à l'enlèvement des menuiseries livrées le 21 novembre 2014 au domicile de M. [C] et de Mme [Y], et non posées, sans qu'il y ait lieu de prévoir une astreinte.

Par voie de conséquence, M. [C] et Mme [Y] ne peuvent être condamnés au paiement de la totalité du prix du contrat, soit 31'800 euros.

Déduction faite de la fourniture et de la pose des menuiseries concernées par la résolution partielle du contrat, M. [C] et Mme [Y] seront condamnés à payer au liquidateur judiciaire de la société Energia, ès qualités, la somme de 11'496,84 euros.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de résolution du contrat souscrit entre la société Energia et les consorts [C]-[Y] et d'enlèvement partiel formées par les consorts [C]-[Y], et condamné les consorts [C]-[Y] à payer à la société Energia la somme de 31'800 euros correspondant au prix fixé dans le bon de commande.

Sur le préjudice de M. [C] et Mme [Y]

Moyens des parties

M. [C] et Mme [Y] soutiennent qu'ils ont subi d'importants préjudices liés directement aux graves manquements de la société Energia'; qu'ils avaient pris la décision de revoir entièrement leur installation chauffage, ainsi que leur menuiserie, et avaient souscrit un crédit affecté à cette fin'; qu'ils auraient pu prétendre non seulement à un crédit d'impôt d'un montant de 4'250'€ pour l'année 2014 mais également à une subvention d'un montant total de 13'299'€'; qu'il s'agit de préjudices certains qui trouvent leur cause dans les carences contractuelles de la société Energia et non simplement d'une perte de chance'; que la société Energia a elle-même rempli les documents relatifs à ces subventions'; qu'ils n'ont pas pu bénéficier des économies d'électricité escomptés'; qu'ils demandent donc réparation du préjudice économique qu'ils ont subi à la suite de la non-exécution du contrat, puisqu'ils ont subi une hausse significative et substantielle de leurs frais d'énergie'; qu'ils demandent ainsi la somme de 2'000'€ à titre de préjudice moral et 5'000'€ pour le préjudice financier subi.

Le liquidateur judiciaire de la société Energia réplique que les parties n'ont jamais convenu que la prestation devait être réalisée à une date particulière afin de permettre à M. [C] et Mme [Y] d'obtenir un crédit d'impôt ou une subvention'; que la société Energia n'était ni informée des contraintes liées à l'octroi d'une subvention, ni de celles liées à la situation fiscale de M. [C] et Mme [Y], et ne pouvait en conséquence prévoir un tel préjudice lors de la conclusion du contrat, pas plus qu'elle ne pouvait préjuger de la décision du conseil général s'agissant de l'acceptation de cette subvention'; que ces derniers n'ayant payé qu'un acompte de 240 euros, il est parfaitement logique qu'ils n'aient pas bénéficié des avantages liés à la subvention et au crédit d'impôt pour des frais qu'ils n'ont jamais exposés'; qu'il n'existe aucun lien de causalité entre le défaut d'installation des fenêtres et une hausse significative et substantielle de leurs frais d'énergie'; que la hausse des frais d'énergie invoquée peut parfaitement être issue d'une hausse des habitudes de consommations de M. [C] et Mme [Y]'; que ces derniers ne justifient pas du préjudice moral qu'ils invoquent'; que le report de la date maximale de pose initialement prévue a donné lieu à une indemnisation de 450 euros par la société Energia'; que l'installation des menuiseries n'a pu avoir lieu qu'en raison du comportement d'obstruction de M. [C] et de Mme [Y] qui ont été à l'origine du préjudice qu'ils invoquent, et ne sauraient ainsi solliciter la réparation d'un quelconque préjudice moral.

Réponse de la cour

L'article 1150 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°'2016-131 du 10 février 2016, applicable en l'espèce, dispose que «'le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors du contrat, lorsque ce n'est point par son dol que l'obligation n'est point exécutée'».

En l'espèce, le contrat liant les parties ne stipule aucune subvention ou crédit d'impôt dont le bénéfice serait conditionné par la date d'achèvement des travaux. Lors de la prolongation du délai initial de pose, le 6 août 2014, M. [C] et Mme [Y] n'ont pas plus mentionné de réserve sur la date d'achèvement des travaux sous peine de perdre le bénéfice de subventions ou de crédit d'impôt.

Les appelants ne justifient pas que la société Energia aurait elle-même rempli le dossier de subvention. En conséquence, ils n'établissent pas que la société Energia aurait pu prévoir le préjudice allégué de perte de subvention et de crédit d'impôt allégué. Au surplus, il résulte des pièces produites que les subventions du conseil général seraient versées sur justificatifs de paiement des dépenses engagées, alors que M. [C] et Mme [Y] n'établissent pas avoir réglé les travaux du système de chauffage réceptionné.

M. [C] et Mme [Y] seront donc déboutés de leur demande indemnitaire au titre de la perte de crédit d'impôt pour l'année 2014 et de la perte de subvention.

S'agissant de la perte d'économies d'énergie, les appelants ne justifient pas des performances d'isolation attendues des menuiseries commandées par rapport aux menuiseries existantes, et en conséquence des économies d'énergie qu'ils pouvaient attendre de la réalisation de la prestation confiée à la société Energia. En outre, les seules factures d'électricité produites ne permettraient pas, en l'absence d'une étude technique, d'établir la réalité d'un préjudice, dès lors que la consommation d'électricité est notamment dépendante des usages, du nombre et du type d'appareils équipant le domicile, et des conditions climatiques. M. [C] et Mme [Y] seront donc déboutés de leur demande de réparation d'un préjudice financier.

Les appelants qui ont eux-mêmes contribué à la non-réalisation de la pose des menuiseries par la société Energia, le 21 novembre 2014, sont mal fondés à se prévaloir d'un préjudice moral qui n'est pas explicité dans leurs conclusions. Cette demande sera donc rejetée.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a dit que la société Energia est responsable de l'exécution tardive de sa prestation qui engage sa responsabilité civile contractuelle et condamné la société Energia à payer aux consorts [C]-[Y] la somme totale de 18'549 euros en réparation de leurs préjudices financier et économique consécutifs à la réalisation tardive et fautive des prestations commandées.

Sur les dispositions accessoires

Compte tenu de la solution donnée au litige, il convient de condamner M. [C] et Mme [Y] aux entiers dépens de première instance et d'appel. Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions';

STATUANT À NOUVEAU':

DÉBOUTE M. [C] et Mme [Y] de leur demande tendant à voir constater la dénonciation du contrat';

PRONONCE la résolution judiciaire partielle du contrat liant M. [C] et Mme [Y] d'une part et la société Energia d'autre part, quant à la fourniture et la pose des menuiseries';

CONDAMNE en conséquence M. [C] et Mme [Y] à payer à la SELARL [M] [U], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Energia la somme de 11'496,84 euros';

ORDONNE à la SELARL [M] [U], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Energia de faire procéder à l'enlèvement des menuiseries livrées au domicile de M. [C] et de Mme [Y], et non posées';

DIT n'y avoir lieu à fixer une astreinte';

DÉBOUTE M. [C] et Mme [Y] de leurs demandes indemnitaires';

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

CONDAMNE M. [C] et Mme [Y] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président à la Cour d'Appel d'ORLEANS et Madame Fatima HAJBI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/01570
Date de la décision : 12/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-12;20.01570 ?
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