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06/06/2023 | FRANCE | N°20/01320

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre civile, 06 juin 2023, 20/01320


COUR D'APPEL D'ORLÉANS



C H A M B R E C I V I L E





GROSSES + EXPÉDITIONS : le 06/06/2023

la SCP HERVOUET/CHEVALLIER/GODEAU

la SELARL CABINET AUDREY HAMELIN



ARRÊT du : 06 JUIN 2023



N° : - N° RG : 20/01320 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GFOZ



DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BLOIS en date du 14 Mai 2020



PARTIES EN CAUSE



APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265 1265257160148636



Madame [S] [A]

née le 20 Aoû

t 1945 à [Localité 16] (41)

[Adresse 5]

[Localité 7]



Madame [X] [Y] - [A]

[Adresse 13]

[Localité 2]



Monsieur [B] [A]

né le 27 Décembre 1964 à [Localité 15]

[Adresse 1]
...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 06/06/2023

la SCP HERVOUET/CHEVALLIER/GODEAU

la SELARL CABINET AUDREY HAMELIN

ARRÊT du : 06 JUIN 2023

N° : - N° RG : 20/01320 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GFOZ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BLOIS en date du 14 Mai 2020

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265 1265257160148636

Madame [S] [A]

née le 20 Août 1945 à [Localité 16] (41)

[Adresse 5]

[Localité 7]

Madame [X] [Y] - [A]

[Adresse 13]

[Localité 2]

Monsieur [B] [A]

né le 27 Décembre 1964 à [Localité 15]

[Adresse 1]

[Localité 8]

Madame [T] [A]

née le 23 Septembre 1967 à [Localité 15]

[Adresse 10])

NR18 ROYAUME UNI

ayant tous pour avocat Me Alexandre GODEAU de la SCP HERVOUET/CHEVALLIER/GODEAU, avocat au barreau de BLOIS

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265256416218582

Madame [E] [G]

née le 06 Février 1947 à [Localité 14]

[Adresse 6]

[Localité 7]

ayant pour avocat Me Audrey HAMELIN de la SELARL CABINET AUDREY HAMELIN, avocat au barreau de BLOIS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 17 Juillet 2020.

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 06 Février 2023

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 04 Avril 2023, à 14 heures, devant Madame Laure-Aimée GRUA, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles en vertu de l'ordonnance N° 92/2020, Magistrat Rapporteur, par application de l'article 786 et 910 alinéa 1 du Code de Procédure Civile.

Lors du délibéré :

Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,

Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, Conseiller,

Madame Laure Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier :

Madame Fatima HAJBI, Greffier lors des débats et du prononcé.

Prononcé le 06 JUIN 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Aux termes d'un acte notarié du 14 août 2003, M. [V] [A] et Mme [S] [A] ont acquis de M. [D] un bien immobilier situé [Adresse 5], cadastré section BO n°[Cadastre 9] et [Cadastre 3].

Ils ont comme voisine Mme [E] [G], propriétaire d'une maison à usage d'habitation avec garage et jardin, cadastrée BO [Cadastre 4], [Adresse 6], acquise des consorts [I]-[J] selon acte notarié du 12 septembre 2003.

Souhaitant se clore et faire réaliser des travaux et s'étant heurtée au refus de ses voisins, qui se prétendaient bénéficiaires d'une servitude de passage leur permettant de passer librement chez elle pour accéder à leur domicile, à pied ou en voiture, Mme [G] les a assignés en bornage de leurs propriétés par acte d'huissier du 24 juillet 2014, les propriétaires riverains étant appelés par un acte postérieur.

Par jugement du 11 février 2015, le tribunal d'instance de Blois a commis M. [Z] [K] aux fins de procéder aux opérations de bornage, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Blois pour connaître des demandes de Mme [G] tendant à se voir autoriser à clôturer sa propriété à ses frais exclusifs, priver les époux [A] de toute mitoyenneté sur cette clôture, autoriser à installer un ou deux portails à l'entrée et en bout du passage en cause et rappeler aux défendeurs qu'ils bénéficient d'un simple droit de passage et non de parking.

[V] [A] étant décédé le 8 octobre 2015, ses enfants, [B], [T] et [X] [A] sont intervenus à l'instance.

L'expert [K] a déposé son rapport le 21 mars 2017.

Par jugement du 27 juin 2018, rectifié le 24 octobre 2018, le tribunal d'instance de Blois a homologué le rapport de l'expert [K].

Par jugement de Blois du 14 mai 2020, le tribunal judiciaire de Blois a :

- Rejeté la demande de consorts [A] tendant à voir reconnaître une servitude de passage au profit de la parcelle cadastrée section BO [Cadastre 9],

- Dit que la servitude de passage créée par l'acte notarié du 6 février 1960 sur la parcelle BO n°[Cadastre 4] ne s'exerce qu'au profit de la parcelle BO n°[Cadastre 3],

- Constaté que Mme [G] peut clôturer sa propriété sur la longueur de la rive commune entre les parcelles BO [Cadastre 4] et BO [Cadastre 9], à condition que sa clôture se situe sur sa propriété, dont les limites ont été déterminées par le jugement du 27 juin 2018, rectifié le 24 octobre 2018 et à la condition de respecter la servitude de passage au bénéfice de la parcelle BO [Cadastre 3], ainsi que les dispositions relatives aux clôtures ('La clôture séparative entre les lots devra être constituée par un mur ne dépassant pas quarante centimètres surmontée d'une partie ajourée'),

- Rappelé que si Mme [G] pose un portail à l'emplacement de l'exercice de la servitude, elle devra en remettre les clés ou autre moyen d'ouverture aux consorts [A],

- Rappelé que les consorts [A] ne doivent pas stationner de véhicule sur la parcelle BO [Cadastre 4] appartenant à Mme [G],

- Rejeté toute autre demande,

- Ordonné l'exécution provisoire de la décision,

- Rejeté les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné les consorts [A] aux dépens.

Selon déclaration du 17 juillet 2020, Mme [S] [M] veuve [A], M. [B] [A], Mme [T] [A] et Mme [X] [A] épouse [Y], les consorts [A], ont relevé appel de cette décision, en tous chefs de son dispositif.

Les parties ont conclu. L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 février 2023.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Les dernières conclusions, remises les 17 octobre 2020 par les appelants, 3 décembre 2020 par l'intimée, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions, peuvent se résumer ainsi qu'il suit.

Les consorts [A] demandent, au visa des articles 690 et suivants du code civil de :

- Infirmer le jugement en ce qu'il rejette leur demande tendant à voir reconnaître une servitude de passage au profit de la parcelle BO [Cadastre 9] et en ce qu'il constate que Mme [G] peut clôturer sa propriété sur la longueur de la rive commune entre les parcelles BO [Cadastre 4] et BO [Cadastre 9],

Statuant à nouveau,

- Constater l'existence d'une servitude de passage sur la parcelle BO [Cadastre 4] au profit des parcelles BO [Cadastre 9]et [Cadastre 3] sur une largeur de trois mètres partant de la voie publique et allant jusqu'à la parcelle BO [Cadastre 3] et parallèlement aux parcelles BO [Cadastre 11] et [Cadastre 12], telle que définie par l'acte de division du 6 février 1960 et son croquis annexé,

- Dire et juger que Mme [G] ne pourra implanter une clôture sur sa parcelle BO [Cadastre 4] qu'à partir de la limite séparative formée par la limite entre les deux maisons d'habitation [A] et [G] et se dirigeant vers l'Est uniquement,

- Ordonner à Mme [G] de supprimer la clôture implantée le long de la parcelle BO [Cadastre 9] depuis la voie publique jusqu'à la limite de propriété entre les deux maisons [A] et [G] dans les 48 heures de la signification du jugement à intervenir et sous astreinte de 200 euros par jour de retard,

- Condamner Mme [G] à leur verser la somme de 11 000 euros à titre de dommages-intérêts sous réserve d'actualisation ultérieure,

- Condamner Mme [G] à leur verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Mme [G] aux entiers dépens.

Mme [G] demande de :

- confirmer la décision, sauf à dire que sa clôture sera édifiée sur toute la longueur de la rive commune des parcelles BO [Cadastre 4] et BO [Cadastre 9], sur bornes ; en étant la propriétaire exclusive, les consorts [A] devant être déchus de la mitoyenneté, pour avoir refusé de participer aux frais de sa construction, conformément aux articles 663 et 667 du code civil,

- condamner in solidum les consorts [A] à lui rembourser la moitié de toutes les factures d'entretien du chemin sur lequel ils sont autorisés à passer,

- les condamner sous astreinte de 250 euros par infraction constatée à ne laisser stationner aucun véhicule, d'aucune sorte, à moteur ou autre, eux-mêmes ou toute autre personne de leur chef, sur l'assiette du droit de passage déterminé en 1960,

- les condamner à lui payer des dommages-intérêts de 10 000 euros en raison des multiples désagréments subis depuis 2014,

- les condamner, outre les dépens de première instance auxquels ils ont déjà été condamnés, à lui verser une somme de 3 000 euros au titre des frais de défense en première instance,

- lui donner acte de ce qu'elle a sommé les consorts [A] de lui donner toutes explications utiles et rassurantes sur la finalité précise de la tranchée qu'ils viennent de creuser sur leur parcelle BO [Cadastre 9], en rive immédiate de sa propriété et des tuyaux plastique qu'ils ont ensuite enfoui,

- condamner les appelants, outre les dépens d'appel, à lui verser une indemnité de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de donner acte

La demande de donner acte, dépourvue de toute portée juridique, ne constituant pas une prétention, il ne peut y être répondu.

Sur la reconnaissance d'une servitude de passage au profit de la parcelle BO [Cadastre 9]

Les appelants font plaider que leur propriété et celle des intimés ont une origine commune, l'accès à leur parcelle BO [Cadastre 9] s'étant toujours fait par un chemin cadastré BO [Cadastre 4], aucun accès direct n'ayant existé au profit de leur parcelle, ainsi que le confirment les attestations qu'ils produisent. Ils reprochent au premier juge de s'être limité à affirmer que la servitude de passage n'était établie qu'au profit de la parcelle BO [Cadastre 3] et que la parcelle BO [Cadastre 9] n'est pas enclavée, alors que l'accès à celle-ci a toujours été permis par l'usage d'une partie de la parcelle [Cadastre 4] et ce, depuis plus de 30 ans. Ils soutiennent que c'est le propriétaire d'origine qui a mis les choses dans l'état duquel résulte la servitude au sens de l'article 693 du code civil ; au cours de la division intervenue en 1960, la servitude de passage a été créée sur le fonds [G] au profit du leur, son assiette sur la parcelle BO [Cadastre 4] partant de la voie publique pour s'étendre jusqu'à la parcelle BO [Cadastre 3], les lieux étant dans le même état qu'actuellement, à savoir que leur auteur, bénéficiaire de la servitude de passage, étant également propriétaire de la parcelle BO [Cadastre 9] jouxtant la voie publique. Ils en déduisent que l'état d'enclave n'était pas la raison de la création de la servitude de passage, ajoutant que seule la volonté commune des parties peut entraîner la modification d'une servitude conventionnelle.

Il est de principe, énoncé à l'article 688 du code civil, que la servitude de passage est une servitude discontinue, laquelle, selon l'article 691, ne peut s'établir que par titre. C'est donc vainement que les appelants se prévalent de la destination de père de famille, sans d'ailleurs établir l'identité du propriétaire commun qui l'aurait établie, ou d'une prescription.

Le titre de Mme [G], acte notarié du 12 septembre 2003, page 6, comme celui des consorts [A] acte notarié du 14 août 2003, page 8, indiquent, sous la rubrique 'Servitudes' que la servitude de passage sur la parcelle de la première, BO [Cadastre 4], a été créée par un acte reçu par Maître [C], notaire, le 6 février 1960, contenant vente par M. et Mme [I]-[J] à M. et Mme [I]-[H] de la parcelle BO [Cadastre 3], dans les termes suivants :

'Les parties conviennent d'un commun accord que Monsieur et Madame [I]-[H], acquéreurs aux présentes, auront un droit de passage sur une bande de terrain de trois mètres en largeur en bordure de la propriété [W] (appartenant aux vendeurs) et figurant au plan, pour aboutir à la parcelle présentement acquise, mais en suivant la ligne séparative d'avec la propriété appartenant à la Famille [W].'

Surtout, le titre des consorts [A] précise, pages 6 et 7, s'agissant de l'origine de propriété du bien immobilier, qu'il appartenait aux consorts [I] par suite des acquisitions suivantes :

- s'agissant du terrain cadastré section BO n°[Cadastre 9] pour l'avoir acquis de M. [R] [L] et Mme [N] [U] suivant acte reçu par Maître [P] [C], notaire, le 31 octobre 1959,

- s'agissant du terrain cadastré section BO n°[Cadastre 3] pour l'avoir acquis de M. [O] [I] et Mme [F] [J] suivant acte reçu par Maître [P] [C], notaire, le 6 février 1960.

Il apparaît donc que la servitude de passage précitée a été créée le 6 février 1960, jour de l'acquisition par les auteurs des consorts [A] de la parcelle BO [Cadastre 3], la parcelle BO [Cadastre 9] dont ces auteurs étaient déjà propriétaires, selon acte de Maître [C] du 31 octobre 1959, sur laquelle se trouve la maison d'habitation n'y étant pas mentionnée.

Il faut nécessairement en déduire que la servitude ne lui profite pas, puisqu'elle n'est établie qu'au profit de la parcelle BO [Cadastre 3].

En conséquence, la décision doit être confirmée en ce qu'elle rejette la demande des consorts [A] tendant à voir reconnaître une servitude de passage au profit de la parcelle cadastrée section BO [Cadastre 9] et dit que la servitude de passage créée par l'acte notarié du 6 février 1960 sur la parcelle BO n°[Cadastre 4] ne s'exerce qu'au profit de la parcelle BO n°[Cadastre 3].

La décision sera complétée en ce qu'il convient d'ordonner aux consorts [A] de ne laisser stationner aucun véhicule d'aucune sorte sur l'assiette du droit de passage, sous astreinte de 150 euros par infraction constatée.

Sur la clôture

Sollicitant la suppression de la clôture installée sur la parcelle BO [Cadastre 4], les appelants indiquent que Mme [G] a clôturé son héritage, les privant de pouvoir accéder avec leur voiture à la place de parking située sur la parcelle BO [Cadastre 9] et les obligeant à se contorsionner pour rentrer à pied sur cette parcelle, situation humiliante et préjudiciable à Mme [S] [A], âgée de 73 ans.

Cependant, ainsi qu'il l'a été ci-dessus jugé, la parcelle BO [Cadastre 9] ne bénéficiant d'aucun droit de passage sur la parcelle BO [Cadastre 4], la demande de suppression de la clôture ne peut qu'être rejetée, tout propriétaire pouvant se clore, à l'énoncé de l'article 647.

Mme [G] fait valoir que son chemin d'accès est d'une largeur de trois mètres, le droit de passage dont sont bénéficiaires les appelants sur celui-ci ayant une assiette de trois mètres ; si le premier juge a rappelé son droit de se clore, il a précisé que c'est 'à condition que sa clôture se situe sur sa propriété, dont les limites ont été déterminées par le jugement du 27 juin 2018, rectifié le 24 octobre 2018 et à la condition de respecter la servitude de passage au bénéfice de la parcelle BO [Cadastre 3], ainsi que les dispositions relatives aux clôtures ('La clôture séparative entre les lots devra être constituée par un mur ne dépassant pas quarante centimètres surmontée d'une partie ajourée')' ; alors que si la clôture doit être édifiée en retrait de rive, elle réduirait d'autant le droit de passage des consorts [A], la largeur du muret devant être d'au moins 40 centimètres. Elle demande l'autorisation d'édifier la clôture sur bornes, comme si elle devait être mitoyenne, même si elle sera sa propriété exclusive si elle en assume seule le coût de sa construction.

Il est certain que la faculté d'enclore le fonds ne doit pas empêcher celui-ci de remplir l'utilité promise à un autre fonds. Pour respecter la servitude de passage dont bénéficie la parcelle BO [Cadastre 3], Mme [G] édifiera sa clôture sur toute la longueur de la rive commune des parcelles BO [Cadastre 4] et BO [Cadastre 9], sur bornes, cette clôture sera sa propriété exclusive, les consorts [A] refusant de participer aux frais de sa construction. Le jugement est donc infirmé de ce chef.

Sur l'entretien de l'assiette de la servitude

Il est communément admis que dès lors qu'il existe une communauté d'usage de l'assiette de la servitude de passage par le propriétaire du fonds dominant et celui du fonds servant, ce dernier doit contribuer aux frais d'entretien et de réparation de cette servitude.

En conséquence, faisant droit à la demande de Mme [G], les consorts [A] seront condamnés, in solidum, à lui rembourser la moitié de toutes les factures d'entretien du chemin.

Sur les demandes de dommages-intérêts

Les appelants prétendent subir un préjudice du fait de l'attitude de Mme [G] les obligeant à subir la vision d'une clôture devant la maison de Mme [S] [A], avec impossibilité d'accéder facilement à pied chez elle et de façon totale en voiture.

Cependant, il est de principe que le propriétaire d'un fonds grevé d'une servitude de passage conserve le droit de se clore, énoncé à l'article 647 du code civil. Aucun préjudice ne pouvant être tiré de la vision d'une clôture que Mme [G] était en droit d'édifier, les appelants seront déboutés de leur demande de dommages-intérêts. Le jugement est donc confirmé.

Mme [G] sollicite la réparation du préjudice que lui ont fait subir les consorts [A] depuis de nombreuses années alors que leur titre était dénué de toute ambiguïté relativement à leur droit de passage.

Il apparaît, en effet, que le titre de propriété des consorts [A] était particulièrement clair en ce qu'il ne mentionnait aucun droit de passage bénéficiant à la parcelle BO [Cadastre 9] sur laquelle est édifiée leur maison d'habitation. Depuis 2014, Mme [G] a mis en oeuvre de multiples démarches pour tenter amiablement de régler le problème de la servitude de passage en adressant aux consorts [A] un courrier recommandé le 14 mai 2014, pièce n°7, auquel ils ont répondu négativement le 9 mai suivant, pièce n°7 ; en leur dénonçant un constat d'huissier le 28 mai 2014, leur faisant défense d'emprunter le passage autrement que pour accéder à leur parcelle BO [Cadastre 3], acte qu'ils ont refusé, pièce n°9 ; en leur écrivant par l'intermédiaire de son conseil le 19 juin 2014 un courrier leur rappelant que leur titre de propriété exposait clairement la situation, auquel ils ont répondu le 30 juin en invoquant la protection possessoire, pièce n°11 ; ayant saisi le juge des référés de la suppression des poteaux de grillage venant d'être posés, en se prévalant d'un trouble manifestement illicite ne lui permettant pas de stationner son véhicule sur le passage, par ordonnance du 14 juin 2016, ce juge a débouté Mme [A] de sa demande au motif qu'elle ne justifiait ni d'un droit de passage au profit de la parcelle BO [Cadastre 9] ni de ce que celle-ci était enclavée.

Il apparaît donc que les tracasseries inutilement imposées à Mme [G] depuis près de 20 ans ont pour origine unique le refus des consorts [A] de reconnaître les limites d'une servitude de passage qui ne leur a jamais été contestée et de respecter les droits de leur voisine. En conséquence, ils seront condamnés, in solidum, à lui verser des dommages-intérêts de 5 000 euros.

Sur les demandes annexes

Les consorts [A] qui succombent seront condamnés au paiement des entiers dépens d'appel et d'une indemnité de procédure de 4 000 euros à Mme [G] au titre de l'article 700 du code de procédure civile, étant, eux-mêmes déboutés de leur demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe ;

CONFIRME le jugement, sauf en ce qu'il, - conditionne la pose de la clôture de Mme [E] [G] à son édification sur sa propriété, - rejette la demande de condamnation sous astreinte relative au stationnement de véhicule, - rejette la demande relative à l'entretien du chemin, rejette la demande de dommages-intérêts formée par Mme [E] [G] ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

DIT n'y avoir lieu de répondre à la demande de donner acte de Mme [E] [G] ;

ORDONNE à Mme [S] [M] veuve [A], M. [B] [A], Mme [T] [A] et Mme [X] [A] épouse [Y] de ne laisser stationner aucun véhicule, d'aucune sorte, sur l'assiette du droit de passage, sous astreinte de 150 euros par infraction constatée ;

DIT que Mme [E] [G] devra édifier sa clôture sur toute la longueur de la rive commune des parcelles BO [Cadastre 4] et BO [Cadastre 9], sur bornes, et que cette clôture sera sa propriété exclusive ;

DIT que Mme [S] [M] veuve [A], M. [B] [A], Mme [T] [A] et Mme [X] [A] épouse [Y] devront rembourser à Mme [E] [G] la moitié des factures d'entretien du chemin ;

LES CONDAMNE, in solidum, à payer à Mme [E] [G] des dommages-intérêts de 5 000 euros ;

LES DÉBOUTE de leur demande d'indemnité de procédure ;

CONDAMNE Mme [S] [M] veuve [A], M. [B] [A], Mme [T] [A] et Mme [X] [A] épouse [Y], in solidum, au paiement des entiers dépens d'appel et d'une indemnité de procédure de 4 000 euros à Mme [E] [G].

Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président à la Cour d'Appel d'ORLEANS et Madame Fatima HAJBI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/01320
Date de la décision : 06/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-06;20.01320 ?
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