COUR D'APPEL D'ORLÉANS
C H A M B R E C I V I L E
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 25/05/2023
Me Estelle GARNIER
Me Alexis DEVAUCHELLE
ARRÊT du : 25 MAI 2023
N° : - : N° RG 20/01449 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GFYX
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'ORLEANS en date du 10 Juin 2020
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265254109115971
Organisme LA DIRECTION REGIONALE DES FINANCES PUBLIQUES DE PROVENCE ALPES COTE D'AZUR ET DES BOUCHES DU RHONE agissant poursuites et diligences du Directeur Régional des Finances Publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Me Estelle GARNIER, avocat au barreau d'ORLEANS
D'UNE PART
INTIMÉS : - Timbre fiscal dématérialisé N°:1265253766884548
Madame [E] [H]
née le [Date naissance 5] 1942 à [Localité 7]
[Adresse 4]
[Localité 6]
ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Maud BONDIGUEL-SCHINDLER de la SELARL BONDIGUEL & ASSOCIES, avocat au barreau de RENNES
Monsieur [K] [H]
né le [Date naissance 1] 1941 à [Localité 7]
[Adresse 4]
[Localité 6]
ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Maud BONDIGUEL-SCHINDLER de la SELARL BONDIGUEL & ASSOCIES, avocat au barreau de RENNES
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du :31 Juillet 2020
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 06 février 2023
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats, du délibéré :
Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,
Monsieur Laurent SOUSA,Conseiller,
Madame Laure Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.
Greffier :
Madame Karine DUPONT, Greffier lors des débats.
Madame Fatima HAJBI, Greffier lors du prononcé.
DÉBATS :
A l'audience publique du 03 AVRIL 2023, à laquelle ont été entendus Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller, en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries.
ARRÊT :
Prononcé le 25 MAI 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
M. et Mme [H] ont, afin de bénéficier d'une réduction d'impôt conformément à l'article 885-0 V bis du code général des impôts (CGI), joint à leur déclaration d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour l'année 2010, les documents attestant de leur souscription, le 14 juin 2010, au capital de la société Finaréa Private, se présentant comme une société holding animatrice de groupe.
Considérant que la société Finaréa Private n'avait pas cette qualité, de sorte que M. et Mme [H] ne pouvaient prétendre à l'avantage en cause, l'administration fiscale leur a adressé une proposition de rectification le 17 janvier 2013.
Le 23 septembre 2013, la direction générale des finances publiques (DGFIP) a émis un avis de mise en recouvrement pour la somme de 22'250 euros en principal et 2'790 euros au titre des intérêts de retard.
Par acte d'huissier de justice en date du 6 août 2016, M. et Mme [H] ont saisi le tribunal de grande instance d'Orléans aux fins de contestation de l'avis de mise en recouvrement.
Par jugement du 10 juin 2020, le tribunal judiciaire d'Orléans a':
- dit que la procédure de contrôle opérée selon avis de mise en recouvrement du 23/09/2013 par l'administration fiscale à l'égard de M. et Mme [H] est irrégulière, au regard des dispositions des articles L57 et L76 B al.1 du livre des procédures fiscales (LPF)';
- prononcé la décharge des rappels d'ISF contestés par les époux [H] et confirmés par décision du 16/06/2016 de l'administration fiscale';
- condamné M. le responsable des finances publiques ès-qualités (direction régionale des finances publiques du Centre Val de Loire et du département du Loiret) à payer à M. et Mme [H] la somme de 3'000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';
- condamné M. le responsable des finances publiques ès-qualités aux dépens.
Par déclaration du 31 juillet 2020, la DGFIP a interjeté appel de tous les chefs du jugement.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 16 février 2022, la DGFIP demande de':
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a': dit que la procédure fiscale diligentée contre le contribuable est irrégulière'; prononcé la décharge des rehaussements'; condamné l'État, représenté par M. le directeur des finances publiques, à payer au contribuable la somme de 3'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile'; condamné l'État aux dépens tels que visés dans l'article R207-1 du livre des procédures fiscales';
En conséquence,
- confirmer la décision administrative de rejet du 16 juin 2016';
- rejeter les demandes du contribuable';
- condamner les intimés, in solidum, aux entiers dépens d'appel, dont distraction pour ces derniers au profit de Me Estelle Garnier, avocat aux offres de droit';
- condamner les intimés, in solidum, à verser à l'État la somme de 3'000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 16 décembre 2021, M. et Mme [H] demandent de':
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions';
En tout état de cause':
- déclarer irrégulière la procédure fiscale préalable à la présente procédure contentieuse';
- en conséquence, annuler ladite procédure fiscale et prononcer la décharge des rehaussements';
- rejeter comme étant infondée la décision de rehaussement puis de mise en recouvrement prise à leur encontre';
- en conséquence, prononcer la décharge des rehaussements';
Le cas échéant':
- ordonner la communication par la DGFIP, ès qualités, sous astreinte provisoire, pendant deux mois, de 1'000'€ par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de la décision à intervenir, des rescrits Truffle et Partech dans leur version originale ou expurgée des éléments prétendument confidentiels';
- ordonner que, passé ce délai de deux mois, la partie qui y a intérêt pourra saisir le juge de céans d'une demande de liquidation de l'astreinte provisoire et fixation de l'astreinte définitive';
-en cas de difficulté d'interprétation du droit de l'Union européenne, poser à la Cour de justice de l'Union européenne des questions préjudicielles, dans les termes suivants':
«'La décision de la Commission européenne réservant la réduction ISF-PME aux PME en phases liminaires de développement doit-elle être interprétée comme interdisant la réduction aux investissements dans des holdings animatrices ne détenant pas encore de participation à la date de la souscription voire dont l'actif n'est pas encore principalement composé de titres de participations'''»';
«'Le droit des aides d'État (articles 107 et 108 du TFUE, règlement n° 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d'application de l'article 93 du Traité CE, règlement n° 994/98 du Conseil du 7 mai 1998 sur l'application des articles 92 et 93 du Traité instituant la Communauté européenne à certaines catégories d'aides d'État horizontales) doit-il être interprété comme interdisant l'édiction de rescrits accordant un avantage fiscal aux seuls souscripteurs à certains véhicules d'investissement dans les PME'' Pareil rescrit ne doit-il pas donner lieu à notification préalable'''»';
«'En présence d'un contribuable revendiquant l'application à son bénéfice de la norme fiscale énoncée dans un rescrit délivré à un autre contribuable, le principe d'effectivité du droit de l'Union européenne, ensemble la réglementation des aides d'État (articles 107 et 108 du TFUE, règlement n° 994/98 du Conseil du 7 mai 1998 sur l'application des articles 92 et 93 du Traité instituant la Communauté européenne à certaines catégories d'aides d'État horizontales) et les principes de libertés de circulation des capitaux, d'établissement et de prestations de services, ne commandent-ils pas au juge national d'ordonner la production du rescrit litigieux ''»';
- condamner la DGFIP, ès qualités au paiement de 10'000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions récapitulatives.
Par conclusions notifiées par RPVA le 22 mars 2023, la DGFIP a sollicité de voir déclarer irrecevables les observations et pièces adressées à la cour par M. et Mme [H] après l'ordonnance de clôture.
MOTIFS
Sur la communication de pièces après l'ordonnance de clôture
Aux termes de l'article 802 du code de procédure civile auquel renvoie l'article 907 du même code, après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.
Le 13 mars 2023, M. et Mme [H] ont communiqué un courrier d'observations et des pièces. La clôture ayant été prononcée le 6 février 2023, ces observations et pièces sont irrecevables.
Sur la régularité du rehaussement
'Sur l'obligation d'information du contribuable
L'appelante soutient que le contribuable était actionnaire de la société Finaréa de sorte qu'il disposait d'informations privilégiées sur le fonctionnement de cette société'; que dans la proposition de rectification, elle a expressément précisé au requérant le constat qu'elle a opéré lors de la procédure de vérification de comptabilité de la société Finaréa et les conséquences de ce constat au regard des dispositions de l'article 885-0 V bis du CGI et de la doctrine administrative'; que le courrier adressé par le mandataire du contribuable à l'administration consécutivement à la proposition de rectification illustre sa parfaite connaissance du contexte du contrôle dont il a fait l'objet mais également de la situation du groupe Finaréa'; que la proposition de rectification contenait l'ensemble des informations permettant de connaître la position de l'administration et de débuter un dialogue contradictoire ce qui fut effectivement le cas'; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'oblige l'administration à lister les documents qu'elle cite dans la proposition de rectification'; que si aucun document n'est cité dans la proposition de rectification adressée au contribuable, cette circonstance n'a pas privé le contribuable d'exercer de manière éclairée son droit de défense'; que la réponse aux observations du contribuable ne contenait aucune analyse juridique nouvelle qui se serait fondée sur des éléments eux-mêmes nouveaux'; que le requérant ne saurait lui reprocher de ne pas avoir évoqué, dans la proposition de rectification, tous les éléments qu'il estime être «'à décharge'»'; que la Cour de cassation a jugé que la vérification de comptabilité de la société Finaréa n'a pas conduit à une prise de position formelle ou implicite de la part de l'administration qui puisse lui être ultérieurement opposable et que l'administration pouvait remettre en cause la qualité d'animatrice de groupe de la société Finaréa dans le cadre de la rectification concernant un contribuable bien qu'elle n'ait pas procédé au redressement de cette société au terme de la vérification de sa comptabilité'; que le principe des droits de la défense tel qu'interprété par la Cour de justice de l'Union européenne n'impose pas à l'administration fiscale une obligation générale de fournir un accès intégral au dossier dont elle dispose'; qu'en tout état de cause, les dispositions de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne sont inapplicables en l'espèce, car les dispositions de l'article 885-0 V bis du CGI ne constituent pour une aide d'État (dont seules les entreprises sont la cible), ni une mesure résultant de la transposition d'un texte communautaire'; que les prétendus éléments «'à décharge'» étaient également évoqués dans les affaires pour lesquelles la Cour de cassation a estimé qu'il n'était pas établi que la société Finaréa exerçait une activité effective d'animation de son groupe'; que ces mêmes éléments prétendument «'à décharge'» sont cités par le contribuable dans sa réponse à la proposition de rectification laissant manifestement supposer qu'il en avait pleinement connaissance'; qu'il n'est pas exigé de l'administration qu'elle évoque, dans la proposition de rectification, l'ensemble des éléments ou des documents qu'elle examine ou recueille à l'occasion de ses opérations de contrôle'; qu'aucune disposition ne prévoit que l'administration communique les documents qui n'ont pas été utilisés pour fonder une imposition'; qu'en précisant que la vérification de comptabilité de la société Finaréa avait révélé qu'elle n'avait pris aucune participation dans une société opérationnelle au moment de la souscription du contribuable, l'administration a régulièrement informé le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements obtenus de tiers'; que les griefs du contribuable selon lesquels certaines informations ne lui auraient pas été communiquées sont infondés'; que les informations déposées au greffe du tribunal de commerce en vertu d'une obligation légale ayant pour objet de les rendre accessibles au public n'entraient pas dans le champ pour de l'obligation de communication de l'administration fiscale.
Les intimés font valoir que l'administration aurait dû organiser la circulation de l'information fondant sa prétention à disqualifier la holding Finaréa d'«'animatrice'» en «'holding passive'»'; qu'il ressort de la combinaison des articles L57 et L76 B du LPF que par le biais de la proposition de rectification, l'administration est tenue d'informer pleinement le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus auprès de tiers qu'elle a consultés pour proposer les rappels, et qu'elle doit communiquer, avant la mise en recouvrement, une copie de ces documents au contribuable, s'il en fait la demande'; que la France ayant mis en 'uvre une aide d'État, c'est-à-dire du droit de l'Union européenne (articles 107 et suivants du TFUE), elle doit respecter le principe général des droits de la défense et l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne'; qu'en l'espèce, la proposition de rectification reçue par le contribuable se fondait sur des pièces obtenues auprès de tiers, sans que la liste en ait été clairement énoncée par le service, de sorte que cela suffit à déclarer la procédure irrégulière'; que la proposition de rectification devait d'emblée préciser l'origine exacte de ces pièces recueillies auprès de tiers, or l'origine des pièces mentionnée dans la proposition de rectification s'est avérée inexacte'; que le contribuable n'a eu aucune précision sur les «'informations légales et financières accessibles au public'» mobilisées par l'administration'; que le service ne pouvait pas valablement se contenter de ne retenir du dossier recueilli auprès de tiers que les éléments à charge, sans intégrer les éléments à décharge, dont on sait qu'elle les détient'; que les pièces recueillies auprès de tiers devaient être communiquées sans se limiter à communiquer les seuls éléments sélectionnés pour fonder les rappels.
Aux termes de l'article L57 du LPF l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée.
L'article L76 B du LPF dispose':
«'L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande'».
Il résulte de ces dispositions que l'administration fiscale a l'obligation de communiquer au contribuable faisant l'objet d'un redressement, sur la demande de ce dernier, les documents fondant le redressement et dont, n'en étant ni l'auteur ni le destinataire, il n'a pas connaissance et, dès lors, d'indiquer au contribuable dans le redressement la nature de ces documents, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation (Com., 6 octobre 1998, pourvoi n° 96-20.306'; Com., 3 juillet 2001, pourvoi n° 98-19.034).
En revanche, cette obligation de communication ne s'étend pas aux informations nécessairement détenues par les différents services de l'administration fiscale lorsque celles-ci sont librement accessibles à toute personne intéressée (Com., 10 avril 2019, pourvoi n° 17-15.819).
En l'espèce, après avoir exposé le droit applicable, la proposition de rectification émise par la DGFIP le 17 janvier 2013, énonce':
«'À l'occasion de la vérification de comptabilité de la société Finaréa Private, il a été constaté les faits suivants.
La société Finaréa Private a été constituée le 23 mai 2008. Au moyen des fonds apportés par ses différents associés, dont vous faites partie, la société Finaréa Private n'avait pris aucune participation dans aucune société opérationnelle à la clôture de son exercice social au 30 juin 2010.
3.2 Analyse au regard des constats effectués
Les constatations reprises ci-avant ne permettent pas de considérer que la société Finaréa Private remplit les conditions prévues par la doctrine administrative 7 S 3323, n° 16, pour être qualifiée de holding animatrice.
a) En effet, lors du versement de votre souscription au capital de la société Finaréa Private en 2009, date d'appréciation des conditions pour bénéficier de la réduction d'ISF prévue à l'article 885-0 V bis du CGI, cette dernière ne détenait aucune participation dans des sociétés et, par conséquent ne pouvait avoir le caractère de holding animatrice en application de la jurisprudence de la Cour de Cassation 'Sala' précitée.
b) Par ailleurs, en l'absence de prise de participation, la société Finaréa Private ne respectait pas les critères de la doctrine administrative précitée qui réserve le bénéfice du régime des holdings animatrices aux «'sociétés dont l'actif est principalement composé de participations'».
Par conséquent, cette société ne pouvait pas revendiquer la qualité de société holding animatrice à la date du versement que vous avez effectué au titre de la souscription au capital de cette société'».
Il résulte donc de la proposition de rectification que l'administration fiscale s'est fondée sur les éléments comptables de la société Finaréa Private établissant l'absence de participation dans des sociétés pour justifier le rehaussement d'ISF. La nature des documents sur lesquels l'administration fiscale s'est appuyée était donc connue du contribuable qui ne peut exiger que la proposition de rectification énumère toutes les pièces en possession de l'administration.
Il est établi que l'administration fiscale a communiqué au contribuable, par courriers du 22 janvier 2013 et du 9 août 2013, le tableau 2050 de l'actif du bilan de la société Finaréa Private au 30 juin 2010.
Par courrier du 2 mai 2013, le contribuable, par l'intermédiaire de son mandant, M. [N], président de la société Finaréa, a relevé une communication partielle des pièces sur lesquelles la procédure de vérification était fondée, et a sollicité la communication des éléments suivants': la prise de position complète de l'administration centrale du 6 juillet 2012'; l'intégralité des autres pièces obtenues dans le cadre du contrôle fiscal externe de la société holding animatrice et dans le cadre du contrôle 'scal externe du GIE Finaréa services.
Il résulte des pièces versées aux débats que la proposition de rectification ne mentionne pas et ne s'appuie pas sur le courrier émis le 6 juillet 2012 par la DGFIP, évoqué pour la première fois par le mandataire du contribuable, dans son courrier d'observations du 18 février 2013.
Par courrier en date du 9 avril 2013 de réponse à observations, l'administration n'a fait que répondre à M. [N], ès qualités de mandataire du contribuable, sur le contenu du courrier que la DGFIP lui avait adressé le 6 juillet 2012, et qu'il avait évoqué à l'appui de ses observations. En conséquence, d'une part ce courrier ne servait pas de fondement à la rectification, et d'autre part, M. et Mme [H] étaient à même de connaître le contenu de ce courrier mentionné et reçu par le président de la société Finaréa qu'ils avaient mandaté dans le cadre de la phase d'échanges contradictoires avec l'administration fiscale.
S'agissant des pièces obtenues dans le cadre du contrôle fiscal externe de la société holding animatrice et dans le cadre du contrôle fiscal externe du GIE Finaréa services, le contribuable était mal fondé à les solliciter et ne peut se prévaloir d'un défaut de communication, dès lors que la proposition de rectification n'était nullement fondée sur le contrôle fiscal opéré par l'administration fiscale, le mandataire du contribuable confondant manifestement ses propres griefs à l'encontre de l'administration avec ceux pouvant être formulés pour le compte de ses mandants.
L'article L232-23 du code de commerce, dans sa version applicable, dispose que toute société par actions est tenue de déposer au greffe du tribunal, pour être annexés au registre du commerce et des sociétés, dans le mois suivant l'approbation des comptes annuels par l'assemblée générale des actionnaires, les comptes annuels, le rapport de gestion, le rapport des commissaires aux comptes sur les comptes annuels, le cas échéant, éventuellement complété de leurs observations sur les modifications apportées par l'assemblée aux comptes annuels qui ont été soumis à cette dernière ainsi que, le cas échéant, les comptes consolidés, le rapport sur la gestion du groupe, le rapport des commissaires aux comptes sur les comptes consolidés et le rapport du conseil de surveillance.
Il s'ensuit que ces documents que la société Finaréa Private était tenue de déposer au greffe du tribunal de commerce, étaient accessibles au public, de sorte que l'administration fiscale n'était nullement tenue de les communiquer au contribuable, sous peine d'irrégularité du redressement établi. M. et Mme [H], qui étaient en outre actionnaires de la société Finaréa Private et disposaient à ce titre du droit à l'information propre à cette qualité, ne peuvent donc se prévaloir d'un défaut de communication de la comptabilité de la société Finaréa Private ayant fondé le rehaussement de l'ISF. Il y a, en outre, lieu de relever que les intimés qui se prévalent d'un défaut de communication du rapport de gestion de la société Finaréa Private, le produisent eux-mêmes aux débats (pièce 21), établissant qu'ils avaient accès aux informations comptables qu'il contient.
S'agissant des éléments «'à décharge'» dont se prévaut le contribuable, qui ne lui auraient pas été communiqués, il convient de rappeler qu'aux termes de l'article L76 B du livre des procédures fiscales, le droit de communication de l'administration ne porte que sur les renseignements et documents sur lesquels elle s'est fondée pour établir la proposition de rectification, le contribuable pouvant alléguer et produire lui-même les éléments propres à éviter ladite rectification d'imposition dans le cadre de la procédure contradictoire. Le moyen formulé par les intimés, tiré du défaut de communication des éléments «'à décharge'» est donc inopérant.
À défaut de manquement de l'administration à son obligation d'information, la procédure de rehaussement ne peut être déclarée irrégulière sur ce fondement.
'Sur l'obligation de motivation de la réponse aux observations du contribuable
L'appelante explique que la lecture du point I de la réponse aux observations du contribuable permet de considérer que l'administration a répondu à ses critiques sur le prétendu manque de cohérence de l'action de l'administration'; que le 2.2 du II de la réponse aux observations du contribuable montre que l'administration s'attache à démontrer que la société holding ne peut être considérée comme animatrice d'un groupe et qu'elle exerce les prérogatives usuelles d'un actionnaire'; que l'argumentation selon laquelle la réponse aux observations du contribuable ne serait pas motivée n'est donc pas fondée.
Les intimés font valoir que l'administration n'a pas répondu à leurs observations présentées à l'appui de leur contestation des redressements, qui étaient pourtant clairement posées, soulignant notamment la crainte que d'importants éléments aient été occultés'; que ces observations appelaient une réponse circonstanciée pour lever une apparente incohérence de l'action de l'administration dès lors qu'ils avaient fait valoir la bonne fin de la vérification fiscale subie en 2010 par Finaréa SAS et qu'il en était de même en 2012 pour toutes les sociétés holdings Finaréa'; que la réponse formulée par le service ne satisfait donc pas au standard posé par l'article L57 du LPF.
L'administration fiscale a répondu aux observations du contribuable par un courrier de 9 pages en date du 9 avril 2013, exposant de manière distincte et complète la position du contribuable avant d'expliciter la position du service, tant sur la procédure qu'au fond (phase de démarrage, rôle animateur de la holding).
S'agissant de l'incohérence alléguée de l'administration, celle-ci a notamment répondu':
«'Il est rappelé également que la proposition de rectification qui vous a été adressée fait suite à un contrôle sur pièces de vos déclarations d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et ne se fonde pas uniquement sur des éléments recueillis dans le cadre du contrôle de la société Finaréa Private dont vous êtes associé, mais également sur des informations légales et financières accessibles au public, telles que la composition du bilan, les rapports de gestion de cette société.
[...]
Par ailleurs, s'agissant de la vérification de comptabilité de la société Finaréa Private, les documents éventuellement fournis à un autre service de la DGFIP dans le cadre de cette vérification n'ont pas fait l'objet d'un examen critique au regard du caractère animateur ou non de cette société, dès lors que vos déclarations d'ISF n'entraient pas dans le périmètre des impôts dus par cette société et ayant fait l'objet de ce contrôle'».
Il résulte également du courrier de réponse à observations du contribuable que l'administration fiscale a répondu à toutes les contestations soulevées s'agissant des conditions de reconnaissance d'une holding animatrice, en examinant successivement les points suivants': la définition de la stratégie initiale'; l'existence de conventions'; les moyens de la société'; la composition de l'actif de la société'; la définition de la société holding animatrice'; la participation active au contrôle des filiales'; l'absence de majorité au niveau des filiales.
Il s'ensuit que les intimés n'établissent aucun manquement de l'administration à son obligation de motivation, étant précisé que l'insatisfaction d'un contribuable à la réponse apportée à ses observations ne peut établir le fait que les arguments soulevés aient été occultés par l'administration.
En conséquence, la procédure suivie par la DGFIP est régulière. Il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit que la procédure de contrôle opérée selon avis de mise en recouvrement du 23 septembre 2013 par l'administration fiscale à l'égard de M. et Mme [H] est irrégulière, au regard des dispositions des articles L57 et L76 B du livre des procédures fiscales.
Sur le bien-fondé du rehaussement
L'appelante expose que la Cour de cassation a déjà jugé que les sociétés holdings se trouvant en phase d'étude d'investissement et n'ayant encore pris aucune participation dans des sociétés opérationnelles, elles ne peuvent être assimilées à des sociétés holdings animatrices, et que s'agissant des sociétés holdings ayant procédé à des prises de participation dans des sociétés opérationnelles, l'animation doit être effective et justifiée'; que les investissements au capital de PME via une holding animatrice de groupe ne sont pas prévus par la loi mais par la doctrine administrative qui a admis que le dispositif de l'article 885-0 V bis du CGI puisse être étendu aux investissements réalisés dans des sociétés holding qui, sans être interposées, assurent effectivement un rôle d'animation de groupe'; que parmi les sociétés holding dont l'actif est principalement composé de participations financières dans d'autres entreprises, la doctrine administrative opère une distinction entre celles qui ne font qu'exercer les prérogatives usuelles d'un actionnaire (exercice du droit de vote et des droits financiers), considérées comme ayant pour activité la gestion de leur patrimoine (holding «'passives'») et celles qui sont les animatrices effectives de leur groupe, participent activement à la conduite de sa politique et au contrôle des filiales et rendent, le cas échéant et à titre purement interne au groupe, des services spécifiques administratifs, juridiques, comptables, financiers ou immobiliers (holding «'animatrices'»)'; que le contribuable ne développe aucune argumentation factuelle qui justifierait le caractère animateur de la société Finaréa'; que la preuve de la matérialité et de la réalité du caractère animateur d'une société s'apprécie au plus tard au jour du fait générateur de l'impôt'; qu'au jour de la souscription du contribuable au capital de la société Finaréa Private, celle-ci ne pouvait être considérée comme une société opérationnelle, dès lors qu'elle n'exerçait pas d'activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale durant cette année'; que pour que les investissements au sein d'une holding dite «'interposée'» soient éligibles à la réduction d'ISF, elle doit détenir au moins 90'% de son actif brut comptable en titres de sociétés opérationnelles, alors que le bilan de l'exercice clos le 30 juin 2010 de la société Finaréa montre que son actif brut était majoritairement composé de valeurs mobilières de placement, de disponibilités et de créances'; que la société Finaréa ayant pris une participation au sein de la société Groupe In Visu le 27 juillet 2010 à hauteur de 21,05'% de son capital, cette participation minoritaire est incompatible avec la nécessité du contrôle de la société cible, de sorte que l'investissement n'est pas éligible à la réduction d'impôt'; que le contribuable ne justifie pas que les principales décisions relatives à la politique économique et stratégique ou à la gestion du groupe ont bien été prises par la holding qualifiée d'animatrice et non par les filiales opérationnelles'; qu'en réalité, la société Finaréa poursuit une activité de placements financiers'; que le contribuable n'est pas fondé à contester la remise en cause de la réduction d'ISF au titre de l'année 2010 pour son investissement dans une société sans activité opérationnelle présente ou future.
Les intimés expliquent que la souscription au capital de la holding Finaréa Private est éligible à la réduction d'ISF, car la société remplit les conditions pour être qualifiée de holding animatrice à la date de la souscription litigieuse'; que la holding est entrée au capital d'une première PME, dénommée Groupe In Visu le 27 juillet 2010'; qu'elle a toujours eu pour objet social, dès sa création, la prise de participation dans de jeunes PME et l'animation de ces participations, c'est-à-dire l'implication dans la gestion desdites PME'; qu'elle s'est d'emblée dotée des moyens de réaliser cet objet social en mettant en place son comité d'investissement conformément à ses statuts'; que le processus de prise de décision au sein de la filiale a été aménagé pour faire en sorte qu'aucune décision importante ne puisse être prise sans l'accord de la holding Finaréa Private.
L'article 885-0 V bis du CGI, dans sa version alors applicable, dispose que':
«'I.-1. Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 75'% des versements effectués au titre de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés, en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, à l'exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières, ainsi qu'au titre de souscriptions dans les mêmes conditions de titres participatifs dans des sociétés coopératives ouvrières de production définies par la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 ou dans d'autres sociétés coopératives régies par la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération. Cet avantage fiscal ne peut être supérieur à 50'000 euros.
La société bénéficiaire des versements mentionnée au premier alinéa doit satisfaire aux conditions suivantes':
a) Être une petite et moyenne entreprise au sens de l'annexe I au règlement (CE) n° 800 / 2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d'exemption par catégorie);
b) Exercer exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l'exclusion des activités de gestion de patrimoine mobilier définie à l'article 885 O quater, notamment celles des organismes de placement en valeurs mobilières, et des activités de gestion ou de location d'immeubles. Cette condition n'est pas exigée pour les entreprises solidaires au sens de l'article L. 443-3-2 du code du travail qui exercent une activité de gestion immobilière à vocation sociale';
c) Avoir son siège de direction effective dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale';
d) Ses titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger';
e) Être soumise à l'impôt sur les bénéfices dans les conditions de droit commun ou y être soumise dans les mêmes conditions si l'activité était exercée en France';
f) Être en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion au sens des lignes directrices concernant les aides d'État visant à promouvoir les investissements en capital-investissement dans les petites et moyennes entreprises (2006 / C 194 / 02)';
g) Ne pas être qualifiable d'entreprise en difficulté au sens des lignes directrices communautaires concernant les aides d'État au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté ou relever des secteurs de la construction navale, de l'industrie houillère ou de la sidérurgie';
h) Le montant des versements mentionnés au premier alinéa ne doit pas excéder le plafond fixé par décret. Ce plafond ne peut excéder 1, 5 million d'euros par période de douze mois'».
Les intimés ne soutiennent pas avoir investi au capital d'une petite ou moyenne entreprise (PME) ouvrant droit à réduction d'impôt en application de ce texte, mais au capital d'une holding dont l'objet est la prise de participations dans ce type de sociétés.
Il est établi qu'une société la société holding qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations, a pour activité principale la participation active à la conduite de la politique de son groupe et au contrôle de ses filiales constituant des PME exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale et se trouvant en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion, et, le cas échéant et à titre purement interne, la fourniture à ces filiales de services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers, est assimilée à une PME exerçant exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et se trouvant en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion, pour lesquelles les souscriptions au capital de contribuables peuvent bénéficier d'une réduction d'ISF, à concurrence de 75'% du montant de leur investissement.
Si la qualification de holding animatrice n'est pas subordonnée à une participation majoritaire au capital d'une filiale exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale, une société holding qui ne contrôle aucune filiale opérationnelle ne peut cependant être qualifiée de holding animatrice et ne peut donc être assimilée aux PME visées par l'article 885-0 V bis du code général des impôts, de sorte que la souscription à son capital n'est pas éligible à la réduction d'ISF prévue par ce texte, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation (Com., 3 mars 2021, pourvoi n° 19-22.397).
En outre, aux termes de la doctrine administrative applicable, le bénéfice du régime de holding animatrice est réservé aux sociétés dont l'actif est principalement composé de titres de participations, l'activité de simple gestion du patrimoine mobilier étant exclue du dispositif prévu à l'article 885-0 V bis du code général des impôts.
Il résulte également du Bulletin officiel des impôts 7 S-3-08 que si la société bénéficiaire des versements doit être en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion, en cas d'investissement indirect via une société holding, la condition relative à la phase de développement de la société ne s'applique qu'à la société cible.
En l'espèce, lors de l'exercice clos le 30 juin 2010, la société Finaréa Private disposait d'un actif brut composé de 0,08'% de participations au titre des immobilisations financières, l'essentiel de l'actif reposant sur les disponibilités. Le compte de résultat ne fait apparaître que des produits financiers, et le bilan ne mentionne aucune charge de salaires.
Il en résulte qu'au jour de la souscription en capital de M. et Mme [H], le 14 juin 2010, la société Finaréa Private ne disposait que d'un actif principalement composé de titres de participations, de sorte que son activité de simple gestion de patrimoine mobilier était exclue du dispositif prévu à l'article 885-0 V bis du CGI. Les intimés ne se prévalent d'ailleurs d'une prise de participation de la société Finaréa Private dans une PME opérationnelle, la société Groupe In Visu, que postérieurement à leur souscription en capital, soit le 27 juillet 2010.
S'agissant de l'animation de la société Groupe In Visu par la société Finaréa Private, M. et Mme [H] se prévalent':
- d'un modèle de statuts-types que la société holding exigeait, en contrepartie de ses prises de participation';
- d'un contrat d'animation, relatant dans le détail les prestations qui seraient fournies moyennant rémunération, aux PME cibles';
- d'un pacte d'actionnaires type qui serait imposé, également, aux PME, de sorte qu'aucune décision importante ne puisse être prise sans l'accord de la holding';
- du fait que la société holding a effectivement exercé ses prérogatives en conditionnant l'apport en capital à la réalisation conforme du plan d'affaires ou business plan, en surveillant la réalisation des objectifs validés avec la PME, en obtenant la mise en place d'un reporting mensuel, en refusant de valider le budget 2012 tant qu'elle ne disposait pas d'une information suffisante, en travaillant sur les synergies commerciales qui pouvaient être créées et en validant le développement à l'international.
Il convient de mentionner qu'aux termes de la doctrine administrative, sont des sociétés holding animatrices les sociétés qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations':
- participent activement à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales';
- et rendent le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers.
Le pacte d'associés de la société Groupe In Visu conclu entre les entrepreneurs et la société Finaréa Private mentionne que celle-ci a accepté d'investir dans la société Groupe In Visu en considération de facteurs déterminants suivants':
«'(i) La personnalité et l'expérience des entrepreneurs et leur implication personnelle dans la direction de la société';
(ii) Le maintien dans la société de la propriété de ses éléments d'actifs essentiels, des principaux droits relatifs à son activité actuelle et à ses développements futurs';
(iii) Le souci des entrepreneurs d'associer l'investisseur au sein de la société en qualité de holding animatrice [']
(v) La volonté de la société de conduire la stratégie de développement présentée à l'investisseur, ce qui représente un objectif commun aux parties';
(vi) L'engagement des fondateurs de faciliter, à terme, la liquidité de la participation de l'investisseur dans la société'».
L'objet de ce pacte d'associés ne permet pas d'établir que la société Finaréa Private disposerait d'un réel rôle d'animation de la société Groupe In Visu dont il apparaît que seule cette dernière conduirait la stratégie de développement.
Le pacte d'associés prévoit un conseil de direction composé d'au moins trois membres, le président de la société, un membre investisseur désigné par la majorité en nombre d'actions des titulaires d'actions A'; deux membres désignés par la majorité en nombre d'actions des titulaires d'actions ordinaires. La société Finaréa Private étant minoritaire au regard de sa participation au capital, elle ne dispose pas de la possibilité d'influer sur le choix des deux membres du conseil de direction désignés par les titulaires d'actions majoritaires.
Le conseil de direction détermine les orientations de l'activité de la société et veille à leur mise en 'uvre, et exerce le contrôle permanent de la gestion de la société par le président. Ces décisions étant prises à la majorité simple, la société Finaréa Private ne dispose pas de la capacité de s'opposer aux décisions concernant l'orientation de la société ou le contrôle de gestion. Elle ne peut le faire que s'agissant des décisions prises à la majorité qualifiée, telles que la proposition d'affectation du résultat annuel, la nomination ou la révocation des mandataires sociaux, l'embauche et le licenciement des cadres dirigeants, toute dépense ou engagement d'un montant supérieur à 100'000 euros, l'approbation et la modification du budget annuel, la modification du contrat d'animation.
Le contrat d'animation conclu entre la société Finaréa Private «'le prestataire'» et la société Groupe In Visu «'le bénéficiaire'», décrit des activités de prestation et d'accompagnement. Ainsi, il est prévu que la holding disposera d'une mission d'accompagnement stratégique comprenant les prestations suivantes': définition conjointe du plan d'action annuel fixant la stratégie de l'entreprise, listage des actions à mener, vérification semestrielle du bon déroulement du plan. La holding a également une mission de mise en place et de réalisation du contrôle de gestion reposant notamment sur la réalisation d'un reporting trimestriel détaillé. Il est également prévu que la holding prestataire est tenue d'une obligation de moyens au titre du contrat et que sa responsabilité ne saurait être engagée que pour faute prouvée dans les moyens déployés en exécution de ces missions. Les prestations de la société holding étaient rémunérées à hauteur de 6'000 euros HT par an au titre de l'accompagnement stratégique, et à hauteur de 2'000 euros HT par an au titre de la mise en place initiale du contrôle de gestion, puis une somme de 8'000 euros HT par an.
Le contrat d'animation ne définit donc pas l'existence d'une activité de direction et de contrôle de la société Groupe In Visu par la société Finaréa Private, mais des activités d'un simple prestataire rémunéré.
M. et Mme [H] ne justifient pas que, nonobstant les termes du pacte d'associé et du contrat d'animation précités, la société Finaréa Private a, dans les faits, exercé un contrôle de la société Groupe In Visu et assuré une animation effective de celle-ci, les actes dont ils se prévalent étant insuffisants à démontrer celle-ci.
En conséquence, l'investissement du contribuable au capital de la société Finaréa Private n'était pas éligible à la réduction de l'ISF en application de l'article 885-0 V bis du CGI, et le rehaussement pratiqué par l'administration était fondé en son principe.
Sur la production des rescrits fiscaux
L'appelante fait valoir que les deux décisions de rescrit délivrées aux sociétés Truffle et Partech ne constituent pas des prises de position de portée générale, mais se rapportent à la situation de deux sociétés avec lesquelles le contribuable n'entretient aucun lien juridique ou de fait'; que ces décisions ne sont donc ni opposables à des tiers ni communicables'; que seule une publication officielle aurait conféré aux rescrits une portée générale et un statut créateur de droit, et la référence à ces rescrits dans les prospectus diffusés par ces deux sociétés ne saurait valoir publication officielle'; qu'il ne s'agit donc en aucun cas de documents qui fixent juridiquement l'état du droit pour tous les contribuables'; que les réponses aux demandes de rescrit ne protègent pas les investisseurs d'une remise en cause des réductions d'ISF'; que la communication des rescrits est sans intérêt pour la résolution du présent litige qui repose sur l'appréciation de circonstances de fait'; que les deux décisions de rescrit ne constituent pas des aides d'État'; que la règle du secret professionnel s'oppose en l'espèce à la communication des décisions de rescrit en application de l'article L103 du LPF.
Les intimés indiquent qu'au début de l'année 2010, l'administration fiscale a délivré des rescrits aux concurrents de la société Finaréa, les sociétés Truffle et Partech, qui ont mobilisé le même schéma de souscription en capital de PME via des holdings animatrices'; que l'existence et le contenu de ces rescrits sont retracés notamment par des prospectus d'appel public à l'épargne visés par l'Autorité des marchés financiers et l'administration ne conteste pas la reconstitution qui en a été faite, qui fixe l'état du droit applicable jusqu'à la fin du mois d'octobre 2010, à savoir la validation de prises de participations minoritaires par la holding animatrice aux côtés des actionnaires et dirigeants historiques, après une phase de levées de fonds et de recherche de participations'; qu'il y a lieu d'ordonner la production de ces rescrits sous astreinte.
L'article L80 A alinéa 1 du livre des procédures fiscales dispose':
«'Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration'».
L'article L80 B du livre des procédures fiscales dispose':
«'La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable':
1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal'; elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi'».
Il résulte de ces dispositions que le rescrit constitue une prise de position formelle de l'administration fiscale sur une situation de fait d'un redevable au regard d'une disposition juridique particulière, sur la demande de ce redevable. Ce rescrit est opposable à l'administration par le redevable pour éviter une imposition ou rehaussement lorsque sa situation au regard de la même disposition juridique est conforme à la position formelle prise par l'administration.
Il s'ensuit que le rescrit fiscal n'a pas vocation à édicter des règles de portée générale applicables à tous les redevables de l'impôt qui ne sont pas nécessairement dans la même situation de fait, qui est appréciée au cas par cas par l'administration saisie d'une demande de rescrit.
Ainsi, seuls peuvent se prévaloir des dispositions de l'article L80 B du livre des procédures fiscales, les contribuables qui se trouvent dans la situation de fait sur laquelle l'appréciation invoquée a été portée, ainsi que les contribuables qui ont participé à l'acte ou à l'opération qui a donné naissance à cette situation, sans que les autres contribuables ne puissent utilement invoquer une rupture à leur détriment du principe d'égalité (Conseil d'État, 17'juin 1996, n°'145594, SA France Sud Diffusion'; Conseil d'État 21 avril 2017, n° 400297, société Ultramarine 1101).
Les intimés produisent aux débats la «'reconstitution'» des rescrits dont ils demandent la production sous astreinte, dont il ressort que les sociétés Partech et Truffe ont interrogé l'administration fiscale sur l'éligibilité à la réduction d'impôt prévue à l'article 885-0 V bis du CGI, des investissements de personnes soumises à l'ISF dans le capital de sociétés holding animatrices à créer, ayant pour objet la prise de participations au capital de PME.
L'administration fiscale a pris position en faveur de l'éligibilité des sommes versées en contrepartie des souscriptions au capital des holdings à la réduction de l'ISF, sous réserve cependant que ces sociétés holding participent activement à la conduite de leur groupe et au contrôle de leurs filiales, et rendent le cas échéant, à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers. Ainsi, l'administration n'a pas eu une autre interprétation du droit existant que celle imposant l'existence d'une animation effective des filiales répondant aux conditions de l'article 885-0 V bis du CGI pour que les investissements au capital des holdings ouvrent droit à la réduction d'impôt prévue à cet article.
Il convient de rappeler M. et Mme [H] ne démontrent pas que la société Finaréa Private disposait d'un actif principalement constitué de participations au sein de PME opérationnelles, ni même qu'elle assurait l'animation effective de la filiale au sein de laquelle elle avait pris une participation minoritaire en juillet 2010.
M. et Mme [H] ne se trouvent pas dans la situation de fait sur laquelle l'appréciation invoquée a été portée sur la demande de holdings ayant vocation à animer des PME opérationnelles. N'ayant pas participé à l'acte ou à l'opération qui a donné naissance à cette situation de fait, différente de la situation existante lors de l'investissement au capital de la société Finaréa Private qui était déjà créée mais qui n'assurait pas l'animation effective de filiales, ils ne peuvent se prévaloir des rescrits fiscaux précités dont la production serait sans incidence sur la solution du litige.
En outre, l'existence d'un rescrit fiscal édicté avant la création de sociétés holdings ne saurait faire obstacle à la remise en cause de la réduction d'ISF octroyée à des investisseurs au capital de ces sociétés, dont les conditions d'octroi ne seraient pas effectivement réunies au moment du fait générateur de l'impôt.
En conséquence, il convient de rejeter la demande de M. et Mme [H] tendant à la production sous astreinte des rescrits fiscaux délivrés aux sociétés Truffle et Partech.
Sur le renvoi préjudiciel
Les intimés soutiennent que le dispositif de réduction ISF-PME a donné lieu à notification préalable par la France à la Commission européenne dès lors qu'elle avait conscience que le dispositif en constituait une aide d'État'; que la Commission n'a validé le dispositif qu'à la condition que les sociétés éligibles n'en soient qu'aux stades liminaires de leur développement, ce qui incluait l'amorçage et le démarrage outre l'expansion'; que seule la holding dans les phases initiales de son développement et donc notamment en phase de démarrage, pouvait proposer à ses souscripteurs d'investir à son capital en bénéficiant de la réduction d'impôt prévue pour les holdings animatrices'; que la société Finaréa avait été confortée en ce sens par les débats parlementaires précédant le vote de la loi TEPA puis par les rescrits délivrés par l'administration fiscale aux sociétés Truffle et Partech'; que dès lors, la Cour de justice de l'Union européenne pourrait être interrogée pour savoir s'il est possible de réserver le bénéfice de cette réduction aux holdings d'ores et déjà pleinement animatrices, en excluant celles qui sont en phase de démarrage'; qu'une deuxième question préjudicielle pourrait être posée quant à l'inégalité de traitement résultant de l'édiction des rescrits qui ne profitent qu'aux sociétés Truffle et Partech'; que la troisième question préjudicielle qui mériterait d'être posée porte sur l'obligation portant sur le juge d'ordonner la production des rescrits.
L'administration indique que dans sa décision du 11 mars 2008, la Commission a considéré que les risques de distorsion ou d'éviction de la concurrence qui pourraient découler du dispositif de l'article 885-0 V bis du CGI soumis à son approbation étaient limités'; que le dispositif critiqué ne saurait fausser la concurrence au niveau de la fourniture du marché de capital-investissement au sens des articles 107 et 108 du traité de fonctionnement de l'Union européenne (TFUE)'; qu'aux termes de la doctrine administrative, ce sont les sociétés opérationnelles qui doivent être en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion et non la société holding et toute autre interprétation conduirait à redoubler la phase dans laquelle doit se trouver la société au niveau de la société détentrice des titres et de la société opérationnelle'; que les sociétés Truffle, Partech et Finaréa Private ne se trouvaient pas dans une situation identique pour apprécier utilement les dispositions du TFUE relatives aux aides d'État'; qu'en l'espèce, l'issue du litige ne dépend pas de la réponse à une question de droit communautaire controversée.
Aux termes de l'article 267 du TFUE, les juridictions des États membres peuvent saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question portant sur l'interprétation ou la validité du droit de l'Union lorsqu'elles estiment qu'une décision de la Cour sur ce point est nécessaire pour rendre leur jugement.
Par lettre datée du 11 octobre 2007, la France a notifié à la Commission européenne le dispositif d'investissement dans les PME, résultant de la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat du 21 août 2007. Par décision C(2008)1055 du 11 mars 2008, la Commission européenne a jugé l'aide comme «'compatible avec le traité CE, en application de son article 87(3) c'» en considérant notamment que «'les risques d'éviction ou de distorsion de la concurrence sont limités étant donné que la mesure favorise dans une large mesure un fonctionnement de marché qui encourage l'investisseur privé à davantage libérer de capital-risque'».
Il s'ensuit que la décision de la Commission européenne n'a pas édicté de règles déterminant les conditions d'application de la réduction d'impôt issues du seul droit interne, mais a seulement analysé et considéré que le dispositif de l'ISF-PME était conforme aux règles régissant le marché commun.
Le litige opposant les parties n'est pas relatif à des règles de droit interne ou interprétations modifiant le dispositif exposé à la commission européenne et validé par sa décision du 11 mars 2008, qui seraient de nature à fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. Les intimés ne contestent que les conditions d'éligibilité de la réduction d'impôt prévue à l'article 885-0 bis CGI qui n'est pas issue d'une disposition du droit de l'Union européenne. De même, les règles relatives aux rescrits fiscaux ne relèvent que du droit interne.
Les questions préjudicielles proposées par les intimés ne sont donc pas relatives à une question portant sur l'interprétation ou la validité du droit de l'Union qui commanderait la solution du litige.
En conséquence, il convient de dire n'y avoir lieu à renvoi préjudiciel à la Cour de justice de l'Union européenne.
Sur la décharge des rehaussements
Au regard de ce qui précède, il convient de confirmer la décision administrative de rejet du 16 juin 2016 et de débouter M. et Mme [H] de leur demande de décharge de rehaussement de l'ISF dès lors que les conditions de réduction d'impôt prévues à l'article 885-0 bis CGI ne sont pas établies. Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a prononcé la décharge des rappels d'ISF contestés par les époux [H] et confirmés par décision du 16/06/2016 de l'administration fiscale.
Sur les dispositions accessoires
Compte tenu de la solution donnée au litige, il convient d'infirmer le jugement en ses chefs statuant sur les dépens et les frais irrépétibles. M. et Mme [H] seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, et à verser à l'appelante la somme de 2'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
DÉCLARE irrecevables les observations et pièces communiquées par M. et Mme [H] le 13 mars 2023':
INFIRME le jugement en toutes ses dispositions';
STATUANT À NOUVEAU':
DÉCLARE la procédure fiscale de rehaussement régulière';
CONFIRME la décision administrative de rejet du 16 juin 2016';
DÉBOUTE M. et Mme [H] de leur demande de décharge de rehaussement de l'impôt sur la fortune et de production sous astreinte de rescrits fiscaux';
DIT n'y avoir lieu à renvoi préjudiciel à la Cour de justice de l'Union européenne';
CONDAMNE in solidum M. et Mme [H] aux entiers dépens de première instance et d'appel';
DIT que Maître Estelle Garnier pourra recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont il a fait l'avance sans en avoir reçu provision.
Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de Chambre et Madame Fatima HAJBI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT