COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE
GROSSE à :
Me Maria DE SOUSA
MDPH DE L'INDRE
EXPÉDITION à :
[S] [G]
MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Pôle social du Tribunal judiciaire de CHATEAUROUX
ARRÊT DU : 14 MARS 2023
Minute n°102/2023
N° RG 21/01202 - N° Portalis DBVN-V-B7F-GLEZ
Décision de première instance : Pôle social du Tribunal judiciaire de CHATEAUROUX en date du 15 Décembre 2020
ENTRE
APPELANTE :
Madame [S] [G]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Maria DE SOUSA, avocat au barreau de CHATEAUROUX, substituée par Me Loïc ROY, avocat au barreau d'ORLEANS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2022/00065 du 02/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'ORLEANS)
D'UNE PART,
ET
INTIMÉE :
MDPH DE L'INDRE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Dispensée de comparution à l'audience du 8 novembre 2022
PARTIE AVISÉE :
MONSIEUR LE MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
[Adresse 1]
[Localité 5]
Non comparant, ni représenté
D'AUTRE PART,
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 8 NOVEMBRE 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Carole CHEGARAY, Président de chambre, chargé du rapport.
Lors du délibéré :
Madame Carole CHEGARAY, Président de chambre,
Madame Anabelle BRASSAT-LAPEYRIERE, Conseiller,
Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller
Greffier :
Monsieur Alexis DOUET, Greffier lors des débats et du prononcé de l'arrêt.
DÉBATS :
A l'audience publique le 8 NOVEMBRE 2022.
ARRÊT :
- Contradictoire, en dernier ressort.
- Prononcé le 14 MARS 2023, après prorogation du délibéré, par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- Signé par Madame Carole CHEGARAY, Président de chambre et Monsieur Alexis DOUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le Magistrat signataire.
* * * * *
Le 21 décembre 2017, Mme [S] [G], née le 16 janvier 1970, a formé auprès de la maison départementale des personnes handicapées de l'Indre une demande tendant d'une part au renouvellement du bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés, d'autre part à l'attribution du complément de ressources.
Le 23 août 2018, la maison départementale des personnes handicapées a rejeté la demande au titre de l'allocation aux adultes handicapés au motif que le taux d'incapacité de Mme [S] [G] était évalué comme supérieur à 50 %, mais inférieur à 80 % et qu'elle ne présentait pas une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, ainsi que sa demande de complément de ressources.
Le 17 septembre 2018, Mme [S] [G] a formé un recours administratif préalable obligatoire à l'encontre du rejet opposé à sa demande de renouvellement de son allocation aux adultes handicapés, exposant que l'allocation aux adultes handicapés lui a été attribuée du 1er février 2017 au 31 juillet 2018 et que, depuis, son état de santé ne s'est pas amélioré.
Par décision du 29 novembre 2018, la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées a confirmé le rejet de sa demande d'allocation aux adultes handicapés au motif que Mme [S] [G] ne présentait ni un taux d'incapacité supérieur ou égal à 80 %, ni une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi.
Par requête du 4 février 2019, Mme [S] [G] a saisi le Pôle social du tribunal de grande instance de Châteauroux d'un recours contentieux contre cette décision portant uniquement sur le refus d'allocation aux adultes handicapés.
Le tribunal de grande instance est devenu le tribunal judiciaire à compter du 1er janvier 2020.
Par jugement du 15 décembre 2020 notifié le 13 mars 2021, le Pôle social du tribunal judiciaire de Châteauroux a :
- déclaré recevable mais mal fondé le recours de Mme [S] [G] à l'encontre de la décision de la maison départementale des personnes handicapées du 29 novembre 2018,
En conséquence,
- débouté Mme [S] [G] de l'ensemble de ses demandes,
- confirmé la décision de la maison départementale des personnes handicapées du 29 novembre 2018,
- condamné Mme [S] [G] aux dépens.
Suivant déclaration effectuée par lettre recommandée avec accusé de réception du 9 avril 2021, Mme [S] [G] a relevé appel de ce jugement.
Dans ses conclusions viséees par le greffe le 8 novembre 2022 et soutenues à l'audience du même jour, Mme [S] [G] demande à la Cour de :
- la déclarer bien fondée en son appel,
En conséquence,
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire Pôle social de Châteauroux en date du 15 décembre 2020,
- dire que la restriction substantielle et durable d'accès à l'emploi est confirmée,
- dire que la MDPH doit accorder le renouvellement de l'allocation aux adultes handicapés à compter du 1er août 2018,
- condamner la MDPH à la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la même aux entiers dépens.
Dispensée de comparution à l'audience du 8 novembre 2022 en application des articles 446-1 du Code de procédure civile et R.142-10-4 du Code de la sécurité sociale, la maison départementale des personnes handicapées de l'Indre demande à la Cour, aux termes de conclusions du 26 novembre 2021 adressées à la partie adverse, la confirmation du jugement entrepris.
En application de l'article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs écritures respectives.
MOTIFS
Selon l'article L. 244-1 du Code de l'action sociale et des familles, les règles relatives à l'allocation aux adultes handicapés sont fixées par le Code de la sécurité sociale.
L'article L. 821-1 du Code de la sécurité sociale prévoit que toute personne dont l'incapacité permanente est au moins égale à un pourcentage fixé à 80 % par l'article D. 821-1 du même code perçoit, dans les conditions prévues au titre II du livre VIII, une allocation aux adultes handicapés.
L'article L. 821-2 du Code de la sécurité sociale dispose que :
'L'allocation aux adultes handicapés est également versée à toute personne qui remplit l'ensemble des conditions suivantes:
1° Son incapacité permanente, sans atteindre le pourcentage fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L.821-1, est supérieure ou égale à un pourcentage fixé par décret ;
2° La commission mentionnée à l'article L.146-9 du code de l'action sociale et des familles lui reconnaît, compte tenu de son handicap, une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, précisée par décret.
Le versement de l'allocation aux adultes handicapés au titre du présent article prend fin à l'âge auquel le bénéficiaire est réputé inapte au travail dans les conditions prévues au cinquième alinéa de l'article L.821-1".
Le taux d'incapacité permanente visé au 1° ci-dessus est fixé à 50% par l'article D. 821-1 du même code.
Selon l'article D. 821-1-2 du Code de la sécurité sociale, la restriction pour l'accès à l'emploi subie par une personne handicapée qui demande à bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés est substantielle lorsque le demandeur rencontre, du fait de son handicap même, des difficultés importantes d'accès à l'emploi.
A cet effet sont à prendre en considération les déficiences à l'origine du handicap, les limitations d'activités résultant directement de ces mêmes déficiences, les contraintes liées aux traitements et prises en charge thérapeutiques induits par le handicap, les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et ces limitaitons d'activités. Pour apprécier si les difficultés importantes d'accès à l'emploi sont liées au handicap, elles sont comparées à la situation d'une personne sans handicap qui présente par ailleurs les mêmes caractéristiques en matière d'accès à l'emploi.
La restriction pour l'accès à l'emploi est dépourvue d'un caractère substantiel lorsqu'elle peut être surmontée par le demandeur au regard soit des réponses apportées aux besoins de compensation mentionnés à l'article L. 114-1-1 du Code de l'action sociale et des familles qui permettent de faciliter l'accès à l'emploi sans constituer des charges disproprotionnées pour la personne handicapée, soit des réponses suceptibles d'être apportées aux besoins d'aménagement du poste de travail de la personne handicapée par tout employeur au titre des obligations d'emploi des handicapés sans constituer pour lui des charges disproportionnées, soit des potentialités d'adaptation dans le cadre d'une situation de travail.
La restriction est durable dès lors qu'elle est d'une durée prévisible d'au moins un an à compter du dépôt de la demande d'allocation aux adultes handicapés, même si la situation médicale du demandeur n'est pas stabilisée. La restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi est reconnue pour une durée de un à cinq ans.
Aux termes de l'article R. 821-5 du Code de la sécurité sociale, 'l'allocation aux adultes handicapés prévue à l'article L.821-2 est accordée par ladite commission pour une période de un à deux ans. La période d'attribution de l'allocation peut excéder deux ans sans toutefois dépasser cinq ans, si le handicap et la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi prévue au 3ème alinéa de cet article ne sont pas susceptibles d'une évolution favorable au cours de la période d'attribution.
Toutefois, avant la fin de la période ainsi fixée et à la demande de l'intéressé, de l'organisme débiteur ou du préfet du département, les droits à l'allocation et au complément de ressources peuvent être révisés, en cas de modification de l'incapacité du bénéficiaire'.
En l'espèce, Mme [S] [G] qui présente une pathologie cardiaque, en l'occurrence une valvulopathie métro aortique rhumatismale, une dépression réactionnelle, une dyspnée d'effort, des ronflements et une fatigabilité, se prévaut d'une part de ce que malgré ses suivis médicaux, son état de santé ne présente aucune amélioration par rapport à sa première demande d'allocation aux adultes handicapés à laquelle il a été fait droit le 21 septembre 2017 par la maison départementale des personnes handicapées, d'autre part de ce qu'il lui a été reconnu par le médecin conseil de la caisse primaire d'assurance maladie un état d'invalidité réduisant les deux tiers au moins de ses capacités de travail et de gain justifiant son classement en invalidité dans la catégorie 1 à compter du 1er novembre 2017.
Le taux d'incapacité permanente retenu entre 50 et 79 % n'est pas discuté, le litige portant uniquement sur la condition tenant à la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi.
A cet égard, Mme [S] [G] justifie que par décision du 21 septembre 2017, il lui a été accordé l'allocation aux adultes handicapés du 1er février 2017 au 31 juillet 2018 en application de l'article L. 821-2 du Code de la sécurité sociale, à raison d'un taux d'incapacité d'au moins 50 % et inférieur à 80 % et d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi. Aucun élément du dossier ne permet d'établir que son état s'est amélioré depuis lors et que la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi qui lui a été reconnue n'existe plus, puisque la maison départementale des personnes handicapées se prévaut dans ses écritures d'une amélioration de l'état de santé de Mme [S] [G] depuis son intervention en mars 2016, soit antérieurement à l'octroi en 2017 de l'allocation aux adultes handicapés.
Par ailleurs, Mme [S] [G] justifie percevoir depuis le 1er novembre 2017 une pension d'invalidité d'un montant brut mensuel de 282,79 euros suivant une décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret aux termes de laquelle 'le médecin conseil a estimé que celle-ci présente un état d'invalidité réduisant des 2/3 au moins sa capacité de travail ou de gain justifiant son classement dans la catégorie 1".
Il résulte de ces éléments que la restriction à l'accès à l'emploi de Mme [S] [G], lors de sa demande au mois de décembre 2017, doit être considérée comme substantielle et durable et ouvrir droit à la perception de l'allocation aux adultes handicapés à compter du 1er août 2018.
A cet égard, il convient de rappeler que la pension d'invalidité et, le cas échéant, l'allocation supplémentaire d'invalidité est versée prioritairement sur l'allocation aux adultes handicapés, lesquelles ne se cumulent pas. Une allocation aux adultes handicapés différentielle ne peut ainsi être versée à Mme [S] [G] que si le montant des avantages invalidité est inférieur à celui de l'allocation aux adultes handicapées qui lui est attribuée par la présente décision.
En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé et la demande de renouvellement de l'allocation aux adultes handicapés accueillie pour une période de deux ans, la cour considérant qu'il n'est pas établi que le handicap et la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi ne sont pas susceptibles d'une évolution favorable au cours de la période d'attribution.
La maison départementale des personnes handicapées de l'Indre, qui succombe, supportera la charge des entiers dépens.
Il n'y a pas lieu en équité à application de l'article 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS:
Infirme le jugement rendu le 15 décembre 2020 par le Pôle social du tribunal judiciaire de Châteauroux ;
Statuant à nouveau,
Constate qu'à l'époque de la demande, Mme [S] [G] présentait un taux d'incapacité permanente compris entre 50 % et 79 % ainsi qu'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi en raison de son handicap ;
Dit que Mme [S] [G] est en droit de percevoir l'allocation aux adultes handicapés à compter du 1er août 2018 pour une période de deux ans ;
Condamne la maison départementale des personnes handicapées de l'Indre aux entiers dépens ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,