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07/03/2023 | FRANCE | N°21/01736

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre sécurité sociale, 07 mars 2023, 21/01736


COUR D'APPEL D'ORLÉANS



CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE







GROSSE à :

Me Bruno FIESCHI

CPAM DE LA NIEVRE

EXPÉDITION à :

SAS [6]

MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Pôle social du Tribunal judiciaire de NEVERS





ARRÊT DU : 7 MARS 2023



Minute n°88/2023



N° RG 21/01736 - N° Portalis DBVN-V-B7F-GMMB



Décision de première instance : Pôle social du Tribunal judiciaire de NEVERS en date du 27 Avril 2021



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APPELANTE :



SAS [6]

[Adresse 7]

[Localité 4]



Représentée par Me Bruno FIESCHI, avocat au barreau de PARIS



D'UNE PART,



ET



INTIMÉE :



CPAM DE LA NIEVRE

[Adresse 2]

[Localité 3]



R...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE

GROSSE à :

Me Bruno FIESCHI

CPAM DE LA NIEVRE

EXPÉDITION à :

SAS [6]

MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Pôle social du Tribunal judiciaire de NEVERS

ARRÊT DU : 7 MARS 2023

Minute n°88/2023

N° RG 21/01736 - N° Portalis DBVN-V-B7F-GMMB

Décision de première instance : Pôle social du Tribunal judiciaire de NEVERS en date du 27 Avril 2021

ENTRE

APPELANTE :

SAS [6]

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentée par Me Bruno FIESCHI, avocat au barreau de PARIS

D'UNE PART,

ET

INTIMÉE :

CPAM DE LA NIEVRE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Mme [Z] [U], en vertu d'un pouvoir spécial

PARTIE AVISÉE :

MONSIEUR LE MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

[Adresse 1]

[Localité 5]

Non comparant, ni représenté

D'AUTRE PART,

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 JANVIER 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nathalie LAUER, Président de chambre, chargé du rapport.

Lors du délibéré :

Madame Nathalie LAUER, Président de chambre,

Madame Anabelle BRASSAT-LAPEYRIERE, Conseiller,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller

Greffier :

Monsieur Alexis DOUET, Greffier lors des débats et du prononcé de l'arrêt.

DÉBATS :

A l'audience publique le 10 JANVIER 2023.

ARRÊT :

- Contradictoire, en dernier ressort

- Prononcé le 7 MARS 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- Signé par Madame Nathalie LAUER, Président de chambre et Monsieur Alexis DOUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le Magistrat signataire.

* * * * *

Le 23 août 2016, M. [B] [C] a rempli une déclaration de maladie professionnelle pour un adénocarcinome pulmonaire lié à l'amiante accompagné d'un certificat médical du 26 juillet 2016 diagnostiquant une tumeur maligne du lobe supérieur gauche.

Après enquête administrative, la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre a informé la société [6], employeur de M. [B] [C], par courrier du 27 décembre 2016 de sa décision de prise en charge de la pathologie de M. [B] [C] comme maladie professionnelle inscrite au tableau 30 bis des maladies professionnelles.

Par courrier recommandé reçu le 6 juin 2017, la société [6] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Nevers afin que lui soit déclarée inopposable cette prise en charge, après saisine de la commission de recours amiable de la caisse et décision de rejet du 15 mai 2017.

Par jugement avant dire droit du 4 février 2020, le Pôle social du tribunal judiciaire de Nevers a ordonné une expertise afin de déterminer si la pathologie dont est atteint M. [B] [C] est la même que celle prévue au tableau 30 bis des maladies professionnelles.

L'expert judiciaire, le Docteur [Y], a rendu son rapport le 22 octobre 2020.

Par jugement contradictoire et susceptible d'appel du 27 avril 2021, le Pôle social du tribunal judiciaire de Nevers a :

- débouté la société [6] de sa demande d'inopposabilité,

- déclaré opposable à la société [6] la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre du 27 décembre 2016 de prendre en charge au titre de la législation professionnelle la pathologie déclarée par M. [B] [C] le 13 août 2016,

- condamné la société [6] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la société [6] aux dépens de l'instance en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception parvenue au greffe de la Cour le 26 mai 2021, la société [6] a interjeté appel dudit jugement.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 28 avril 2022, soutenues oralement à l'audience du 10 janvier 2023, la société [6] invite la Cour à:

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté la société [6] de sa demande d'inopposabilité,

- déclaré opposable à la société [6] la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du 27 décembre 2016 de prendre en charge au titre de la législation professionnelle la pathologie déclarée par M. [B] [C] le 13 août 2016,

- condamné la société [6] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la société [6] aux dépens de l'instance en ce compris les frais de l'expertise judiciaire,

Statuant à nouveau,

- juger que l'exposition au risque n'est pas caractérisée à défaut pour la caisse primaire d'assurance maladie de rapporter la preuve que M. [C] effectuait bien l'un des travaux limitativement énumérés au tableau 30 bis des maladies professionnelles,

- juger que la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre a manqué à son obligation d'information à l'égard de la société [6],

En conséquence,

- juger inopposable à la société [6] la décision de prise en charge de la maladie de M. [B] [C],

- condamner la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre à payer à la société [6] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel.

Par conclusions soutenues oralement à l'audience du 10 janvier 2023, la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre prie la Cour de :

- confirmer le jugement du 2 mars 2021 du tribunal judiciaire de Nevers,

- débouter la société [6] de l'ensemble de ses prétentions,

- condamner la société [6] à 1 000 euros au titre de l'article 700,

- condamner la société [6] aux entiers dépens.

SUR CE, LA COUR

- La demande d'inopposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de M. [C]

Moyens des parties

La société [6] poursuit l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de cette demande. À l'appui, elle invoque deux moyens :

* L'absence de preuve de l'exposition au risque

La société [6] soutient que la caisse primaire d'assurance maladie ne démontre pas l'origine professionnelle de la maladie de M. [C] en ce qu'elle n'a pas vérifié que les conditions prévues par le tableau n° 30 bis étaient réunies. Elle observe que l'agent enquêteur a considéré en particulier que le secteur de son activité comportant une forte proportion de sujets exposés à l'amiante alors qu'il n'existe pas de présomption d'exposition au risque. Elle affirme qu'il n'est pas plus démontré que M. [C] a accompli les travaux limitativement énumérés par le tableau n° 30 bis des lors que la caisse primaire d'assurance maladie ne s'est fondée que sur les propres déclarations de l'intéressé et de ses collègues.

La caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre conclut à la confirmation du jugement de ce chef. Elle expose que M. [C] a indiqué avoir été exposé à l'amiante lorsqu'il était technicien de fabrication, ce qu'ont confirmé plusieurs de ses collègues, et ce pour avoir notamment pratiqué la découpe manuelle mécanique de différents produits en amiante. Elle souligne qu'il est ainsi apparu au vu des témoignages que M. [C] avait manipulé et découpé des plaques et joints en amiante dans le but d'installer, d'adapter de réparer l'isolation, en matériaux à base d'amiante, des lingotières, brûleurs, poches et tuyaux, tâches inscrites à la liste limitative des travaux du tableau n° 30 bis. Elle oppose que la société [6] n'a fait qu'affirmer que l'amiante avait été substituée par d'autres matériaux sans apporter d'éléments de preuve et qu'elle n'a pas retourné le questionnaire qui lui avait été envoyé.

* Le non-respect par la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre de

son obligation d'information

La société [6] soutient que la caisse primaire d'assurance maladie a débuté l'instruction du dossier sur la base d'un certificat médical imprécis ne satisfaisant pas aux prescriptions légales et d'ordre public de l'article L. 461-5 du Code de la sécurité sociale et du tableau des maladies professionnelles concernées. Elle pointe le caractère imprécis du certificat médical initial et le changement de qualification de la maladie au stade de la clôture de l'instruction. Elle ajoute qu'aucun courrier adressé par la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre ne vise précisément le libellé requis par le tableau n° 30 bis ou le tableau considéré, et ce, préalablement à la clôture de la procédure d'instruction. Elle conclut qu'elle a été privée d'éléments d'information lui faisant grief puisqu'elle n'a pas été informée du diagnostic d'une maladie justifiant une instruction au titre d'un tableau de maladies professionnelles, et ce dès le début de la procédure d'instruction. Elle souligne qu'elle n'a été informée du fondement de l'instruction diligentée par la caisse primaire d'assurance maladie au titre du tableau n° 30 bis des maladies professionnelles que par courrier du 7 décembre 2016, c'est-à-dire au stade de la clôture de l'instruction alors que la Cour de cassation exige que la caisse primaire d'assurance maladie informe l'employeur d'un changement de qualification de maladie lors de l'instruction. Au visa de l'article R. 441-13 du Code de la sécurité sociale, elle reproche enfin à la caisse primaire d'assurance maladie de ne pas avoir mis à sa disposition un dossier complet, celle-ci ne lui ayant pas adressé les éléments médicaux volontairement et spontanément annexés par M. [C] à son questionnaire d'exposition au risque, lequel a donc levé lui-même le secret médical. Elle en déduit que la caisse primaire d'assurance maladie, subrogée dans les droits de l'assuré, n'est donc pas fondée à invoquer le secret médical pour justifier cette absence de transmission des éléments médicaux fournis par M. [B] [C] lui-même.

La caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre conteste tout manquement à son obligation d'information de l'employeur. Elle expose qu'il résulte de l'article L. 461-5 alinéas 3 et 4 et de l'article R. 441-11 II du Code de la sécurité sociale que l'employeur n'est destinataire que de la copie de la déclaration de maladie professionnelle et non de la copie du certificat médical initial, lors de l'ouverture de la procédure ; que le dossier de maladie professionnelle comprenant une copie de ce certificat peut, à sa demande, être consulté par l'employeur lors de la phase de consultation du dossier, à la fin de la procédure, comme le prévoit l'article R. 441-14 du Code de la sécurité sociale ; qu'il n'est pas contesté que la société [6] a bien été destinataire de la déclaration de maladie professionnelle et des différents courriers d'information du recours. Elle rappelle que l'expertise judiciaire a conclu à la concordance entre la pathologie déclarée par M. [C] et la maladie désignée dans le tableau 30 bis des maladies professionnelles. Elle conclut qu'il ne saurait lui être reproché d'avoir débuté l'instruction sur le fondement d'un certificat médical imprécis dans la mesure où la détermination de la condition médicale d'un tableau fait l'objet d'un avis par le service médical. Elle oppose qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'impose aux caisses primaires d'informer l'employeur du tableau retenu pour l'instruction du dossier dès le début de la procédure ; que le seul tableau auquel il est fait référence dans le colloque médico-administratif du 5 décembre 2016 est le tableau 30 bis ; que le dossier a été envoyé à la société [6] pour consultation qui n'a émis ensuite aucune observation sur ce tableau ; que les documents médicaux sont soumis au secret médical alors que l'expertise judiciaire permettait à un médecin mandaté par l'employeur de consulter le dossier médical de M. [C] et d'émettre ses observations sur la nature de la maladie déclarée.

Appréciation de la Cour

* La preuve de l'exposition au risque

Il résulte de l'article L. 461-1 du Code de la sécurité sociale que des tableaux annexés aux décrets énumèrent les manifestations morbides d'intoxications aiguës ou chroniques présentées par les travailleurs exposés d'une façon habituelle à l'action des agents nocifs mentionnés par lesdits tableaux, qui donnent, à titre indicatif, la liste des principaux travaux comportant la manipulation ou l'emploi de ces agents. Ces manifestations morbides sont présumées d'origine professionnelle.

Selon l'annexe II : Tableaux des maladies professionnelles prévus à l'article R. 461-3 (Articles Annexe II : Tableau n° 1 à Annexe II : Tableau n° 102)

Annexe II : Tableau n° 30 bis

Modifié par Décret n°2000-343 du 14 avril 2000 - art. 2 () JORF 21 avril 2000

CANCER BRONCHO-PULMONAIRE PROVOQUE PAR L'INHALATION DE POUSSIERES D'AMIANTE.

DÉSIGNATION DE LA MALADIE

DÉLAI de prise en charge

LISTE LIMITATIVE DES TRAVAUX SUSCEPTIBLES de provoquer cette maladie

Cancer broncho-pulmonaire primitif.

40 ans (sous réserve d'une durée d'exposition de 10 ans)

Travaux directement associés à la production des matériaux contenant de l'amiante.

Travaux nécessitant l'utilisation d'amiante en vrac.

Travaux d'isolation utilisant des matériaux contenant de l'amiante.

Travaux de retrait d'amiante.

Travaux de pose et de dépose de matériaux isolants à base d'amiante.

Travaux de construction et de réparation navale.

Travaux d'usinage, de découpe et de ponçage de matériaux contenant de l'amiante.

Fabrication de matériels de friction contenant de l'amiante.

Travaux d'entretien ou de maintenance effectués sur des équipements contenant des matériaux à base d'amiante.

En l'espèce, M. [B] [C] a produit à l'appui de sa déclaration de maladie professionnelle un certificat médicale initial attestant de ce qu'il souffre d'une tumeur maligne du lobe supérieur gauche opérée par lobectomie le 2 juin 2016.

À réception de ce certificat médical initial et de cette déclaration, la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre a adressé un questionnaire à M. [C] qui a déclaré avoir été exposé à l'amiante en ce que en tant que technicien de fabrication, il était amené à effectuer toutes les opérations nécessaires à la fusion du métal, son usinage, sa solidification et son expédition et utilisait pour accomplir ses tâches différents matériaux à base d'amiante. Il a précisé avoir été exposé par inhalation à des plaques, nappes, bourrelets et vêtements en amiante. Six de ses collègues, par attestation sur l'honneur, rédigées connaissance prise des dispositions de l'article 441-7 du Code pénal, réprimant l'établissement d'attestations faisant état de faits matériellement inexacts, ont confirmé ces faits.

En outre, par jugement avant dire droit du 4 février 2020, le Pôle social du tribunal judiciaire a ordonné une expertise afin de déterminer si la pathologie dont est atteint M. [B] [C] est la même que celle prévue au tableau 30 bis des maladies professionnelles.

Dans son rapport, l'expert judiciaire a constaté que le nodule pulmonaire avait été découvert dans le cadre de la surveillance médicale des sujets exposés professionnellement à l'amiante.

Il en résulte que l'exposition au risque est donc parfaitement démontrée alors que, de son côté, la société [6] ne démontre par aucun commencement de preuve que, conformément à ce qu'elle indiquait dans sa lettre de réserves du 15 septembre 2016, la substitution de l'amiante par d'autres matériaux avait été réalisée en octobre 1981. A fortiori, cette lettre démontre bien l'utilisation de cette matière par la société [6] puisqu'elle indique, sans aucun élément de preuve à l'appui, que ce matériau a été substitué.

En outre, l'expertise judiciaire confirme bien que M. [C] souffre d'un cancer primitif lié à l'exposition à l'amiante correspondant au tableau 30 bis des maladies professionnelles du régime général.

Le moyen visant à contester l'exposition au risque sera donc rejeté. Il sera revenu ci-après sur les conditions de la prise en charge.

* L'obligation d'information de la caisse primaire d'assurance maladie

La procédure d'information de l'employeur par la caisse est prévue par les articles R. 441-10 et suivants du Code de la sécurité sociale et notamment par l'article R. 441-14. Dans sa rédaction applicable au jour de la déclaration de maladie professionnelle, celui-ci prévoit que la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins 10 jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.

Selon ce texte, le dossier constitué par la caisse doit comprendre :

1 la déclaration d'accident,

2 les divers certificats médicaux détenus par la caisse

3 les constats faits par la caisse

4 les informations parvenues à la caisse de chacune des parties

5 les éléments communiqués par la caisse régionale.

Ce dossier peut être communiqué à leur demande à l'assuré, ses ayants droit et à l'employeur ou à leurs mandataires. Il ne peut être communiqué à des tiers que sur demande de l'autorité judiciaire.

En l'espèce, c'est aux termes de justes motifs adoptés par la cour que la juridiction de première instance a constaté que la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre avait transmis à la société [6] l'ensemble des éléments dont elle disposait.

Il y a lieu d'ajouter les éléments suivants.

Si la société [6] fait valoir que le certificat médical initial ne remplit pas les prescriptions légales et d'ordre public de l'article L. 461-5 du Code de la sécurité sociale et du tableau des maladies professionnelles concernées, il est à noter que la décision de prise en charge ne fait pas suite à ce seul certificat puisque la caisse primaire d'assurance maladie a diligenté une enquête. Comme l'ont exactement retenu les premiers juges, elle ne pouvait transmettre à l'employeur, conformément à ses obligations, que le document dont elle disposait. Si elle ne l'avait pas fait, la société [6] aurait pu au contraire le lui reprocher. En l'absence de toute décision de prise en charge sur la base de ce seul document, son caractère imprécis ne fait pas grief à la société [6] à qui les résultats de l'enquête à l'origine de la décision de prise en charge ont bien été communiqués puiqu'il a pris connaissance du dossier.

La jurisprudence invoquée par la société [6] imposant à la caisse primaire d'assurance maladie d'informer l'employeur d'un changement de qualification de maladie lors de l'instruction est inopérante puisqu'aucun élément du dossier ne démontre un tel changement de qualification entre le début de l'instruction, diligentée sur la base d'une tumeur maligne du lobe supérieur gauche, et la fin de l'instruction qui a permis de retenir un cancer bronchopulmonaire inscrit au tableau n° 30 bis des maladies professionnelles, ce qu'a confirmé l'expertise judiciaire.

Il ne peut être soutenu à la fois que le certificat médical initial était imprécis et que l'employeur n' a été informé d'une pathologie retenue au titre du tableau n° 30 bis qu'à la clôture de l'instruction puisque, justement, en présence toutefois d'une tumeur maligne du lobe supérieur gauche, l'imprécision du certificat médical initial, imposait une procédure d'instruction dont la caisse primaire d'assurance maladie ne pouvait préjuger des conclusions.

Par ailleurs, comme l'ont exactement retenu les premiers juges, les éléments médicaux transmis par M. [B] [C] à l'appui de son questionnaire, sont antérieurs à la déclaration de maladie professionnelle et ne figurent pas au nombre de ceux prévus par l'article R. 441-13 du Code de la sécurité sociale.

La caisse primaire d'assurance maladie n'a donc pas manqué à son obligation d'information de l'employeur à cet égard en ne les communiquant pas à l'employeur sans que sa qualité de subrogée dans les droits de l'assuré ne l'autorise à lever le secret médical d'initiative, aucune disposition ne lui imposant non plus de solliciter son assuré en ce sens. En tout état de cause, lors des opérations d'expertise judiciaire, dont il n'est pas contesté qu'elles se sont déroulées dans le respect du principe de la contradiction, le médecin conseil de la société [6] était présent, il a donc pu avoir accès à l'ensemble des éléments médicaux dans le respect du secret médical. Il s'en infère que la société [6] a été complètement informée de la situation de son salarié justifiant la prise en charge de sa pathologie à titre de maladie professionnelle.

Ce moyen sera donc également rejeté.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté la société [6] de sa demande d'inopposabilité et lui a déclaré opposable la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre du 27 décembre 2016 de prendre en charge au titre de la législation professionnelle la pathologie déclarée par M. [B] [C] le 13 août 2016.

- Les dispositions accessoires

Compte tenu du sens du présent arrêt, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a exactement statué sur les dépens ainsi que sur l'application de l'article 700 du Code de procédure civile.

En tant que partie perdante tenue aux dépens, la société [6] sera déboutée de sa propre demande sur ce même fondement et versera à ce titre à la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre une somme complémentaire de 500 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS:

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 27 avril 2021 par le Pôle social du tribunal judiciaire de Nevers ;

Et, y ajoutant,

Déboute la société [6] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

La condamne à payer à ce titre à la caisse primaire d'assurance maladie de la Nièvre une indemnité complémentaire de 500,00 euros ;

Condamne la société [6] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 21/01736
Date de la décision : 07/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-07;21.01736 ?
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