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22/11/2022 | FRANCE | N°20/01463

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre sécurité sociale, 22 novembre 2022, 20/01463


COUR D'APPEL D'ORLÉANS



CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE







GROSSE à :

SELARL [4]

URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE

EXPÉDITION à :

CENTRE HOSPITALIER DE [5]

MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Pôle social du Tribunal judiciaire d'ORLEANS





ARRÊT du : 22 NOVEMBRE 2022



Minute n°520/2022



N° RG 20/01463 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GFZT



Décision de première instance : Pôle social du Tribunal judiciaire d'ORLEANS en date du 18 Juin 20

20



ENTRE



APPELANT :



CENTRE HOSPITALIER DE [5]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représenté par Me Ghislain FREREJACQUES de la SELARL FD AVOCATS, avocat au barreau de





D'...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE

GROSSE à :

SELARL [4]

URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE

EXPÉDITION à :

CENTRE HOSPITALIER DE [5]

MINISTRE CHARGÉ DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Pôle social du Tribunal judiciaire d'ORLEANS

ARRÊT du : 22 NOVEMBRE 2022

Minute n°520/2022

N° RG 20/01463 - N° Portalis DBVN-V-B7E-GFZT

Décision de première instance : Pôle social du Tribunal judiciaire d'ORLEANS en date du 18 Juin 2020

ENTRE

APPELANT :

CENTRE HOSPITALIER DE [5]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Ghislain FREREJACQUES de la SELARL FD AVOCATS, avocat au barreau de

D'UNE PART,

ET

INTIMÉE :

URSSAF CENTRE VAL DE LOIRE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par M. [G] [K], en vertu d'un pouvoir spécial

PARTIE AVISÉE :

MONSIEUR LE MINISTRE CHARGE DE LA SECURITE SOCIALE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Non comparant, ni représenté

D'AUTRE PART,

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats :

L'affaire a été débattue le 27 SEPTEMBRE 202., en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant la cour composée, en double rapporteur, de Madame Carole CHEGARAY, Président de chambre et de Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller.

Lors du délibéré :

Madame Carole CHEGARAY, Président de chambre,

Madame Anabelle BRASSAT-LAPEYRIERE, Conseiller,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller

Greffier :

Monsieur Alexis DOUET, Greffier lors des débats et du prononcé de l'arrêt.

DÉBATS :

A l'audience publique le 27 SEPTEMBRE 2022.

ARRÊT :

- Contradictoire, en dernier ressort.

- Prononcé le 22 NOVEMBRE 2022 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Carole CHEGARAY, Président de chambre, et Monsieur Alexis DOUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Le centre hospitalier de [5] est affilié en qualité d'employeur auprès de l'URSSAF Centre Val de Loire.

Le 28 septembre 2018, le cotisant a formulé une demande de remboursement auprès de l'URSSAF de la somme totale de 677 915 euros au titre de l'exonération alléguée des cotisations accidents du travail/maladies professionnelles (AT/MP) de certains de ses agents pour les années 2015 à 2017.

L'URSSAF n'ayant pas fait droit à sa demande, le centre hospitalier a, le 19 décembre 2018, saisi la commission de recours amiable de l'URSSAF, qui a rejeté sa requête par décision du 28 février 2019. Le centre hospitalier a alors saisi le pôle social du tribunal de grande instance d'Orléans.

Par jugement du 18 juin 2020, le tribunal judiciaire d'Orléans a :

- débouté le centre hospitalier de [5] de ses demandes ;

- confirmé la décision de la commission de recours amiable du 28 février 2019 ;

- condamné le centre hospitalier de [5] aux dépens.

Le jugement ayant été notifié le 6 juillet 2020, le centre hospitalier de [5] en a relevé appel par déclaration du 28 juillet 2020.

Dans ses conclusions visées par le greffe le 27 septembre 2022 et soutenues oralement à l'audience du même jour, le centre hospitalier de [5] demande de :

- infirmer le jugement du tribunal judiciaire d'Orléans du 18 juin 2020 ;

Statuant à nouveau,

- dire et juger que les contractuels salariés de l'établissement ont par l'effet de la loi et en particulier de l'article L. 413-14 du Code de la sécurité sociale, été couverts en matière d'accident du travail et de maladie professionnelle par l'établissement lui-même à compter de l'année 2015 ;

- dire et juger que l'établissement était fondé à solliciter le remboursement des cotisations versées pour le compte de ces derniers à tout le moins à compter de 2015 et pour les années 2016 et 2017 ;

- annuler la décision de la commission de recours amiable du 7 mars 2019 ;

- condamner en conséquence l'URSSAF à lui rembourser les cotisations versées pour le compte de ses salariés :

· en 2015 pour un montant de 108 566 €

· en 2016 pour un montant de 319 545 €

· en 2017 pour un montant de 249 804 €

- condamner l'URSSAF à lui payer les intérêts aux taux légaux sur cotisations à compter du 28 septembre 2018 ;

- en tout état de cause, condamner l'URSSAF à lui régler une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans ses conclusions visées par le greffe le 27 septembre 2022 et soutenues oralement à l'audience du même jour, l'URSSAF Centre Val de Loire demande de :

- valider en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

- valider la décision rendue parla commission de recours amiable le 28 février 2019 ;

- rejeter toutes les demandes fins et conclusions du centre hospitalier de [5].

En application de l'article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.

SUR CE

L'appelant soutient que depuis la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, les établissements hospitaliers relèvent du droit commun des établissements publics et que l'établissement emploie plus de 1 000 agents ; que le régime applicable aux contractuels en matière d'AT/MP au sein des centres hospitaliers est défini par le décret n° 91-155 du 6 février 1991 qui prévoit l'affiliation des contractuels aux caisses primaires d'assurance maladie, sauf dispositions contraires ; que depuis 1985, l'article L. 413-14 du Code de la sécurité sociale prévoit une disposition contraire ; qu'il résulte de la lecture combinée de ces dispositions que les agents contractuels des centres hospitaliers sont affiliés au régime général des AT/MP sauf dans le cas où l'établissement a un effectif d'agent supérieur à 1 000 et dans ce cas, les agents concernés sont assurés directement par leur employeur en ce qui concerne la couverture accident du travail et maladie professionnelle ; que l'URSSAF et le tribunal ont fait une application tronquée du décret dans sa rédaction en vigueur à savoir celle de 2011, refusant de tenir compte de la mention expresse 'sauf dispositions contraires' ; qu'il y a donc bien lieu de condamner l'URSSAF à rembourser l'ensemble des sommes correspondant aux cotisations AT/MP versées pour le compte de ses salariés contractuels.

L'URSSAF réplique que plusieurs décrets sont intervenus pour préciser les modalités d'application de l'article L. 413-14 du Code de la sécurité sociale ; que la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière a vu ses dispositions précisées dans un premier temps par le décret n° 91-155 du 6 février 1991 qui avait alors entendu affilier aux CPAM, pour les risques maladie, maternité, invalidité, décès et accidents du travail et maladies professionnelles, l'ensemble des agents contractuels de la fonction publique hospitalière ; que par suite, le décret n° 2010-19 du 6 janvier 2010 est revenu sur ces dispositions en ce qu'il a entendu soumettre de nouveaux les agents non-titulaires de la fonction publique hospitalière aux mêmes règles que les agents contractuels de la fonction publique d'État (donc en affiliant pour le risque accidents du travail les seuls agents qui ont été recrutés ou employés à temps incomplet ou bien en CDD d'une durée de moins d'un an) ; qu'enfin, le décret n° 2011-257 du 9 mars 2011 a opéré un retour aux dispositions précédentes en précisant que désormais ces agents 'sont, dans tous les cas, sauf dispositions contraires, affiliés aux caisses primaires d'assurance maladie pour les risques maladie, maternité, invalidité, décès et accidents du travail et maladies professionnelles' ; que la volonté du législateur était d'affilier l'ensemble des agents au régime général pour les différents risques précités ; que les cotisations AT/MP acquittées par le centre hospitalier n'ont pas été indûment versées et la demande de remboursement doit être rejetée ; que le mécanisme de l'abrogation tacite ne peut fonctionner en cas de conflit entre une règle générale et une règle spéciale de sorte que c'est bien l'article 2 du décret n° 91 -155 du 6 février 1991 qui doit s'appliquer en l'espèce.

L'article 2 du décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de la fonction publique hospitalière, dans sa version résultant du décret n° 2011-257 du 9 mars 2011 applicable à la cause, dispose :

'Les agents contractuels mentionnés à l'article 1er du présent décret :

1° Sont, dans tous les cas, sauf dispositions contraires, affiliés aux caisses primaires d'assurance maladie pour les risques maladie, maternité, invalidité, décès et accidents du travail et maladies professionnelles'.

L'article 8 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a modifié l'article L. 6141-1 du Code de la santé publique en prévoyant que 'les établissements publics de santé sont des personnes morales de droit public dotées de l'autonomie administrative et financière. Ils sont soumis au contrôle de l'État dans les conditions prévues par leur présent titre'.

Il est établi et non contesté qu'en supprimant leur rattachement territorial, la loi de réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a fait entrer les établissements publics de santé dans le droit commun des établissements publics de l'État.

L'article L. 413-14 du Code de la sécurité sociale en ses 1er, 3e, 4e alinéas applicables à la cause, dispose :

'Nonobstant toutes dispositions contraires les administrations, services, offices et établissements publics de l'État autres que les établissements publics à caractère industriel ou commercial versent directement à leur personnel les prestations d'accident du travail prévues au présent livre.

[...]

Cependant, les établissements publics de l'État mentionnés au premier alinéa ci-dessus et comptant un effectif d'agents inférieur à un nombre fixé par arrêté interministériel devront affilier au régime général de sécurité sociale, pour la couverture du risque accidents du travail, ceux de leurs agents qui sont soumis aux dispositions du présent livre.

Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret'.

Le seuil d'effectif en dessous duquel les établissements publics de l'État doivent affilier les agents contractuels au régime général de la sécurité sociale est fixé à 1 000 par l'arrêté du 27 février 1961 portant application des dispositions de l'article 57 du décret n° 60-452 du 12 mai 1960 relatif à l'organisation et au fonctionnement de la sécurité sociale.

Il ne résulte pas du décret n° 2011-257 du 9 mars 2011 portant modification du décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, qu'il s'agissait d'un décret d'application de l'article L. 413-14 du Code de la sécurité sociale.

En l'espèce, le centre hospitalier de [5] comporte un effectif supérieur à 1 000 et l'appelant revendique l'application de l'alinéa 1er de l'article L. 413-14 du Code de la sécurité sociale qui dérogerait à l'article 2 du décret n° 91-155 du 6 février 1991.

Ce décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de la fonction publique hospitalière, a été pris en application de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, notamment de son article 10 qui dispose, dans sa version applicable au litige : 'un décret en Conseil d'État pris après avis du Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière fixe les dispositions générales applicables aux agents contractuels recrutés dans les conditions prévues aux articles 9 et 9-1. Il comprend notamment, compte tenu de la spécificité des conditions d'emploi de ces agents, des règles de protection sociale équivalentes à celles dont bénéficient les agents homologues des collectivités territoriales'.

Les dispositions de l'article L. 413-14 du Code de la sécurité sociale ont été instaurées par l'article 57 du décret n° 60-452 du 12 mai 1960 relatif à l'organisation et au fonctionnement de la sécurité sociale, puis codifiées par le décret n° 85-1353 du 17 décembre 1985 relatif au Code de la sécurité sociale, à l'article L. 413-14 du Code de la sécurité sociale, en partie législative. Elles édictent une règle générale relative au personnel de l'État, de ses services, offices et établissements publics, et non une exception aux règles d'affiliation des agents contractuels de la fonction publique hospitalière.

En effet, ce sont la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 et le décret n° 91-155 du 6 février 1991 qui régissent spécifiquement le statut, les conditions d'emploi et les règles de protection sociale des agents contractuels de la fonction publique hospitalière dont le régime était inexistant lors de l'établissement de l'article 57 du décret n° 60-452 du 12 mai 1960 ensuite codifié à l'article L. 413-14 du Code de la sécurité sociale.

La loi spéciale dérogeant à la loi générale devant donc s'appliquer lors d'un conflit de dispositions internes, les agents contractuels de la fonction publique hospitalière demeurent affiliés aux caisses primaires d'assurance maladie pour les risques maladie, maternité, invalidité, décès et accidents du travail et maladies professionnelles, nonobstant l'entrée en vigueur de l'article 8 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009. Il n'est en effet pas démontré que le législateur ou le pouvoir réglementaire ait, consécutivement à cette loi, voulu déroger à la règle d'affiliation des agents contractuels au régime général telle que prévue à l'article 2 du décret n° 91-155 du 6 février 1991.

La demande de restitution des sommes versées par le centre hospitalier au titre des cotisations accidents du travail et maladies professionnelles de ses agents contractuels pour les années 2015 à 2017 doit donc être rejetée. Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

Compte tenu de la solution donnée au litige, il y a lieu de condamner l'appelant aux dépens d'appel et de rejeter sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

Confirme le jugement du 18 juin 2020 du tribunal judiciaire d'Orléans en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute le centre hospitalier de [5] de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne le centre hospitalier de [5] aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 20/01463
Date de la décision : 22/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-22;20.01463 ?
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