COUR D'APPEL D'ORLÉANS
C H A M B R E C I V I L E
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 26/09/2022
la SCP LAVAL - FIRKOWSKI
la SCP THIERRY GIRAULT
la SCP CABINET LEROY & ASSOCIES
ARRÊT du : 26 SEPTEMBRE 2022
N° : - : N° RG 19/03633 - N° Portalis DBVN-V-B7D-GB4R
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ORLEANS en date du 16 Octobre 2019
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265245844989608
GROUPAMA PARIS VAL DE LOIRE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social
La [Adresse 8]
[Adresse 6]
[Localité 4]
représentée par Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI, avocat au barreau d'ORLEANS
D'UNE PART
INTIMÉES : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265249596621748
La SAS JALOUNEIX & ASSOCIES venant aux droits de Madame [M] [L], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Thierry GIRAULT de la SCP THIERRY GIRAULT, avocat postulant au barreau d'ORLEANS et représentée par Me Agnès GOLDMIC-TEISSIER de la SELAS BURGUBURU BLAMOUTIER CHARVET GARDEL & Associés, avocat plaidant au barreau de PARIS
- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265249587473290
La SCI MOULIN MONTEES, immatriculée au RCS d'ORLEANS sous le n° 412 355 869, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
La [Adresse 7]
[Localité 5]
représentée par Me NDIENG substituant Me Hugues LEROY de la SCP CABINET LEROY & ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du :22 Novembre 2019
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 26 avril 2022
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats, du délibéré :
Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,
Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller,
Madame Laure Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.
Greffier :
Madame Fatima HAJBI, Greffier lors des débats et du prononcé.
DÉBATS :
A l'audience publique du 09 MAI 2022, à laquelle ont été entendus Madame Laure-Aimée GRUA, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles en vertu de l'ordonnance N° 92/2020, en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries.
ARRÊT :
L'arrêt devait être initialement prononcé le 05 juillet 2022, à cette date, le délibéré a été prorogé au 19 juillet 2022 puis au 26 septembre 2022,
Prononcé le 26 septembre 2022 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
La SCI Moulin Montées a, par acte du 17 mars 2017, donné à bail commercial pour une durée de neuf années à MM. [K] [E] et [H] [E], agissant pour le compte de la société en formation la SARL l'Olivier, un ensemble immobilier situé [Adresse 2] à [Localité 3], à usage de restaurant.
Le 24 mars 2017, vers 4h30, un incendie a totalement détruit les locaux, le preneur n'avait pas assuré la chose louée.
La SCI Moulin Montées a déclaré le sinistre à son assureur, la compagnie Groupama, auprès de laquelle elle avait souscrit un contrat d'assurance 'propriétaire non occupant de bureaux' à effet du 1er juin 2010 par l'intermédiaire de son courtier le cabinet Jalouneix.
Les dommages ont été évalués contradictoirement suivant chiffrage du cabinet Roux à la somme de 530,549,79 euros.
Le 27 avril 2017, la société Groupama Paris Val de Loire a informé le cabinet Jalouneix de ce qu'elle entendait faire application de la règle proportionnelle conformément aux dispositions de l'article L.113-9 du code des assurances, l'enquête diligentée à sa demande suite à l'incendie lui ayant appris :
- que le bail commercial contenait une clause de renonciation à recours entre les parties ainsi qu'entre leur assureur respectif alors que le contrat d'assurance n'en fait pas état ;
- qu'une activité de restauration était exercée dans les locaux alors que c'est une activité de bureaux qui lui avait été déclarée ;
- que le bâtiment était constitué d'une ossature bois et charpente en fermette bois alors que le contrat avait été souscrit pour un bâtiment construit et couvert en matériaux durs.
Par acte d'huissier délivré le 21 décembre 2018 la société Moulin Montées a assigné la société Groupama ainsi que le cabinet Jalouneix en indemnisation de son préjudice.
Par jugement du 16 octobre 2019, le tribunal de grande instance d'Orléans a :
-Dit la compagnie Groupama recevable en ses demandes à l'encontre de Mme [M] [L],
-Condamné la compagnie Groupama à payer à la société Moulin Montées :
- la somme de 348 052,62 euros au titre de l'indemnité immédiate, acompte de 10 000 euros déduit,
- la somme de 124 262,35 euros au titre de l'indemnité différée sous réserve de la reconstruction du bâtiment dans un délai maximum de deux ans à compter de la présente décision devenue définitive,
- la somme de 28 200 euros à titre de dommages intérêts complémentaires,
-Débouté la société Moulin Montées de ses demandes à l'encontre de Mme [M] [L],
-Débouté la compagnie Groupama de ses demandes à l'encontre de Mme [M] [L],
-Prononcé la mise hors de cause de Mme [M] [L],
-Condamné la compagnie Groupama à payer à la SCI Moulin Montées la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à Mme [M] [L] la somme de 3 000 euros au même titre,
-Condamné la compagnie Groupama Paris Val de Loire aux dépens de l'instance et fait application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Hugues Leroy et de la SCP Girault-Celerier, avocats,
-Prononcé l'exécution provisoire de la décision.
Par déclaration du 22 novembre 2019, la société Groupama a relevé appel de ce jugement, sauf en ce qu'il a dit qu'elle est recevable en ses demandes à l'encontre de Mme [M] [L], débouté la SCI Moulin Montées de ses demandes à l'encontre de Mme [M] [L], et prononcé l'exécution provisoire, rejeté les moyens tendant à dénier sa garantie ou subsidiairement à l'application d'une réduction proportionnelle de 54,40 % de l'indemnité d'assurance.
Les parties ont conclu. L'ordonnance de clôture est intervenue le 26 avril 2022.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Les dernières écritures, remises les 22 avril 2022 par la société Groupama, 20 avril 2022 par la société Moulin Montées, 20 juillet 2020 par la SAS Jalouneix & Associés venant aux droits de Mme [M] [L], auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions, peuvent se résumer ainsi qu'il suit.
La société Groupama Paris Val de Loire demande de :
-La dire recevable et bien fondée en son appel,
Y faisant droit,
Réformer cette décision en ce qu'elle :
$gt;rejette les moyens tendant à dénier sa garantie ou subsidiairement à l'application d'une réduction proportionnelle de 54,40 % de l'indemnité d'assurance,
$gt;la condamne à payer à la SCI Moulin Montées la somme de 348 052,62 euros au titre de l'indemnité immédiate, acompte de 10 000 euros déduit, la somme de 124 262,35 euros au titre de l'indemnité différée sous réserve de la reconstruction du bâtiment dans un délai maximum de deux ans à compter de la décision devenue définitive, la somme de 28 200 euros à titre de dommage intérêts complémentaires,
$gt;la déboute de ses demandes à l'encontre de Mme [M] [L],
$gt;prononce la mise hors de cause de Mme [M] [L],
$gt;la condamne à payer à la SCI Moulin Montées la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à Mme [M] [L] la somme de 3 000 euros au même titre,
$gt;la condamne aux dépens de l'instance et fait application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Hugues Leroy et de la SCP Girault-Celerier, avocats,
Statuant à nouveau,
A titre principal,
Vu l'article L.121-12 alinéa 2 du code des assurances,
-La dire et juger recevable et bien fondée à opposer à la SCI Moulin Montées l'exception de subrogation et à lui refuser toute garantie,
En conséquence,
-Débouter purement et simplement la SCI Moulin Montées de toutes ses demandes d'indemnisation,
A titre subsidiaire,
Vu l'article L.113-9 du Code des assurances,
-La dire et juger recevable et bien fondée à opposer à la SCI Moulin Montées la réduction proportionnelle de l'indemnité due en application du contrat,
-Dire et juger la SCI Moulin Montées irrecevable en sa demande au titre de l'indemnité différée et l'en débouter purement et simplement,
En conséquence,
-Limiter le montant de l'indemnisation mise à sa charge au profit de la SCI Moulin Montées à la somme de 78 684,97 euros et subsidiairement à 241 930,70 euros si la cour devait estimer cette dernière recevable en sa demande d'indemnité différée,
-Dire et juger que conformément aux conditions de la police d'assurance, elle versera immédiatement à la SCI Moulin Montées la somme de 68 684,97 euros puis éventuellement, le solde, à hauteur de 163 245,73 euros sur présentation des factures afférentes à la reconstruction, si la cour devait estimer cette dernière recevable en sa demande d'indemnité différée,
A titre très subsidiaire,
Vu l'article 1382 devenu 1240 du code civil,
-Condamner Mme [M] [L] à lui verser des dommages et intérêts à hauteur des sommes excédant 241 930,70 euros qui viendraient à être mises à sa charge au profit de la SCI Moulin Montées en exécution du contrat d'assurance multirisque des professionnels à effet du 1er juin 2010,
En toute hypothèse,
-Dire et juger la SCI Moulin Montées mal fondée en son appel incident,
-L'en débouter ainsi que de toutes ses demandes, fins et conclusions,
-Débouter Mme [M] [L] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
-Condamner toute partie succombante à lui verser, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2 500 euros en remboursement des frais irrépétibles de première instance et la somme de 3 600 euros en remboursement des frais irrépétibles d'appel,
-La condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel et accorder, en ce qui concerne ces derniers, à la S.C.P. Laval-Firkowski, le droit prévu à l'article 699 du code de procédure civile.
La SCI Moulin Montées demande de :
-Réformer le jugement en ce qu'il a :
$gt;Limité la condamnation de la compagnie Groupama à lui payer la somme de 348 052,62 euros au titre de l'indemnité immédiate, acompte de 10 000 euros déduit,
la somme de 124 262.35 euros au titre de l'indemnité différée sous réserve de la reconstruction du bâtiment dans un délai maximum de deux ans à compter de la décision devenue définitive,
$gt;Débouté la SCI Moulin Montées de ses demandes à l'encontre de Madame [M] [L],
$gt;Prononcé la mise hors de cause de Madame [M] [L],
-Le confirmer en ses autres dispositions,
Et statuant à nouveau :
-Dire et juger la société Groupama irrecevable et mal fondée à lui opposer l'exception de subrogation,
-L'en débouter,
-Dire et juger la société Groupama irrecevable et mal fondée à lui opposer la réduction proportionnelle de l'indemnité due en application du contrat,
-L'en débouter,
-La dire et juger recevable et bien fondée à obtenir le paiement de l'indemnité différée,
-Condamner la société Groupama à l'indemniser de son entier préjudice consécutif à l'incendie ayant détruit ses locaux,
-La condamner à lui régler la somme de 393 860,34 euros au titre de l'indemnité immédiate, outre la somme de 136 689,44 euros au titre de l'indemnité différée à laquelle elle peut prétendre dès maintenant, soit la somme globale de 530 549,79 euros, montant de l'indemnisation de ses dommages suivant rapport contradictoire du Cabinet Roux,
-La condamner à lui régler la somme de 28 200 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires équivalent à un an de perte d'usage du bien tel qu'arbitré par le Cabinet Roux,
Subsidiairement si par impossible un défaut d'information venait à être retenu à son encontre,
-Condamner la SAS Jalouneix & Associés à supporter, à titre de dommages et intérêts l'éventuel montant d'indemnisation qui ne serait pas couvert en conséquence,
En tout état de cause,
-Rejeter toutes les demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires, autant irrecevables que mal fondées et plus généralement toutes les demandes formulées à son encontre,
-Condamner la société Groupama Paris Val de Loire à lui régler la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-Condamner la compagnie Groupama aux entiers dépens qui seront distraits au profit de la SCP Cabinet Leroy & Associés, avocat.
La SAS Jalouneix & Associés venant aux droits de Mme [M] [L] demande de :
-Confirmer le jugement,
Et ce faisant,
-Débouter tant la société Groupama que la SCI Moulin Montées de toutes leurs demandes, fins et prétentions à son encontre,
-La mettre hors de cause,
-Condamner la société Groupama et la SCI Moulin Montées à payer à Mme [L] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens dont distraction au profit de la SCP d'avocats Thierry Girault avocat.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la perte par la société Groupama de ses droits de subrogation
Aux termes de l'article L. 121-12, du code des assurances,
L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur.
L'assureur peut être déchargé, en tout ou en partie, de sa responsabilité envers l'assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l'assuré, s'opérer en faveur de l'assureur.
La société Groupama indique que le bail régularisé le 17 mars 2017 entre la société Moulin Montées et MM. [K] [E] et [H] [E] contient une clause de renonciation à recours, afférente aux risques locatifs de l'article 1733 du code civil, la privant d'une éventuelle subrogation dans ses droits contre les preneurs. Elle s'estime fondée à opposer à l'intimée l'exception de subrogation et à lui refuser toute garantie.
La société Moulin Montées répond que l'article L. 121-12 n'est pas d'ordre public et ne figure pas dans la police souscrite de sorte que l'appelante ne peut l'invoquer, que la renonciation à recours inscrite dans le bail ne concerne que les garanties visées à l'article 6.2 du contrat de bail commercial à savoir 'les agencements et embellissements, même immeuble par destination, son mobilier, son matériel et ses marchandises' alors que seule la structure immobilière est concernée et que même si cette clause devait trouver à s'appliquer elle n'aurait pas porté préjudice à la société Groupama à laquelle il est demandé de prendre en charge la structure immobilière. Elle soutient encore que l'assureur ne peut se prévaloir d'une déchéance de garantie pour être privé de son recours subrogatoire qu'à la condition d'établir une faute de l'assuré ayant pour effet de le priver du bénéfice de la subrogation. Elle ajoute que la société Groupama est d'autant moins fondée à dénier sa garantie du fait de cette clause de renonciation à recours que préalablement à la judiciarisation du dossier, elle avait accepté de prendre en charge le sinistre, moyennant l'application d'une règle proportionnelle, puis que, revoyant sa position, elle a fait une nouvelle offre ferme et définitive à hauteur de 65% du montant des dommages, que cete offre était faite à titre strictement confidentiel mais qu'il était indiqué que dans l'hypothèse où le dossier contentieux suivrait son cours, l'assureur reviendrait alors à sa position initiale, soit une indemnisation à hauteur de 45% en application de la règle proportionnelle, de sorte qu'elle ne peut plus invoquer la perte de son action subrogatoire.
En premier lieu, si l'acceptation de l'offre par l'assuré interdit à l'assureur de la rétracter, il est constant en revanche que l'offre d'indemnisation n'engage l'assureur que si elle est acceptée par l'assuré et ses ayants droit, tant en ce qui concerne l'étendue du droit à réparation que le montant des indemnités proposées (2ème Civ., 9 juillet 1997, n°93-17.286, Bull. II, n 216 : 2e Civ., 8 juin 2017, pourvoi n° 16-17.767, Bull. 2017, II, n° 123).
La société Groupama est donc recevable, dans la mesure où son offre n'a pas été acceptée par l'assurée, à opposer à l'assurée la clause de non recours prévue dans la bail pour dénier sa garantie.
En second lieu, il est constant que le fait de l'assuré justifiant, en application de l'article L.121-12, alinéa 2 du code des assurances, la décharge de responsabilité de l'assureur, doit présenter un caractère fautif (3e Civ 31 mars 2004 n°01-16.847 ; 3e Civ 8 février 2018 n°17-10.010), cette faute devant être caractérisée sans que la seule référence à une clause contractuelle privant l'assureur du bénéfice de la subrogation pouvant s'opérer en sa faveur soit suffisante (2ème Civ., 17 décembre 2020, n°18-24.915, publié).
En l'espèce, la société GROUPAMA soutient qu'elle est bien fondée à refuser sa garantie compte tenu du fait que son assuré l'a privée de son recours subrogatoire contre le locataire, lequel est présumé responsable de l'inccendie affectant les lieux donnés à bail par application de l'article 1733 du code civil contre le locataire.
Le fait que l'article L.121-12 du code des assurances ne figure pas dans la police d'assurance est sans emport dès lors que cet article instaure un mécanisme de subrogation légale qui s'applique quand bien même il n'est pas mentionné dans le contrat d'assurance.
S'agissant de la portée des stipulations contractuelles du contrat de bail, le contrat consenti à M. [E] et à M. [E] le 17 mars 2017 comporte une clause 6.3 ainsi rédigée :
'Renonciaiton à recours
Le bailleur renonce à tous recours contre le preneur et ses assureurs et s'engage à obtenir de ses assureurs qu'ils renoncent à recours contre le preneur et ses assureurs en cas de sinistre consécutif aux événements précités.
Par réciprocité, le preneur renonce à tous recours contre le bailleur et ses assureurs, et s'engage à obtenir de ses assureurs qu'ils renoncent à recours contre le bailleur et ses assureurs en cas de sinistre couvert par les garanties ci-dessus et à hauteur des montants indemnisés'.
Le bailleur s'est donc engagé, au terme de cette clause, non seulement à renoncer à tous recours contre le preneur et son assureur, mais également à obtenir de ses assureurs qu'ils renoncent à recours contre le preneur et ses assureurs en cas de sinistre consécutif aux 'événements précités'.
Il est soutenu que les 'événements précités' viseraient exclusivement, par application de l'article 6.2 de la police, les dommages affectant les agencements et embellissements, mobilier, matériel et marchandises.
Les articles 6.1 et 6.2 de la police d'assurance sont rédigés comme suit :
Article 6 Assurances
Article 6.1 Assurances souscrites par le bailleur
Le bailleur contractera auprès d'une compagnie d'assurance notoirement solvable une police d'assurance d'assurance pour garantir les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile qu'il peut encourir en qualité de propriétaire.
Cette assurance courira notamment lesdits biens contre les événements suivants : risque d'incendie, d'explosion, tempête, ouragan, cyclone, dégâts des eaux, chutes d'appareils de navigation aérienne, grèves, émeutes et mouvements populaires, attentats, catastrophes naturelles.
Article 6.2 Assurances souscrites par le preneur
Le preneur sera tenu de contracter, auprès d'une compagnie d'assurance notoirement solvable, une police d'assurance pour garantir les agencements et embellissements, même immeubles par destination, son mobilier, son matériel et ses marchandises.
Cette assurance couvrira notamment lesdits biens contre les événements suivants: risque d'incendie, d'explosion, foudre, ourage, tempêtes, attestants, catastrophes naturelles et extensions y compris émeutes et dégâts des eaux, vol et bris de glace, y compris les détériorations à la suite de vol ainsi que le recours des voisins et des tiers.
Le preneur fera également garantir sa responsabilité civile à l'égard des tiers, sa privation de jouissance, les frais de démolition et de déclais ainsi que les recours de voisins et des tiers.
Le preneur devra maintenir et continuer lesdites assurances pendant toute la durée du bail et justifier du paiement des primes à toute réquisition du bailleur.'
Ces clauses sont ambigues quant à leur portée puisqu'elles sont relatives à l'obligation d'assurance sans référence aux règles de responsabilité qui les sous-tendent.
Mais à supposer même que, comme le soutiennent les intimés, les 'évenements précités' renvoient aux seuls dommages affectant les biens mobiliers et que la clause de renonciation à recours ne trouve à s'appliquer que dans ce cas, il résulte en tout état de cause de ces clauses que le preneur n'était pas tenu de souscrire une assurance pour la partie immobilière des locaux, alors pourtant qu'aux termes de l'article 1733 du code civil, le preneur répond en principe de l'incendie des locaux loués, et que cette présomption s'applique tant en ce qui concerne le contenu de ceux-ci que la structure même de l'immeuble si elle est affectée par l'incendie de sorte que l'assureur du bailleur a un recours contre l'assureur du locataire pour l'ensemble des désordres affectant les locaux loués, et pas seulement pour les désordres affectant le mobilier, recours dont la société Groupama se trouve en l'espèce privée par l'effet des stipulations du bail puisque le preneur n'était pas tenu de souscrire une assurance pour assurer la structure de l'immeuble.
Les stipulations du contrat de bail ont donc bien pour effet de priver la société GROUPAMA de la possibilité de faire un recours contre l'assureur du locataire en cas d'incendie affectant les lieux loués, puisque le locataire était dispensé de s'assurer pour ce qui concerne la structure de l'immeuble et que le contrat de bail comporte une clause de non recours pour ce qui concerne les biens mobiliers.
Or il n'est pas établi que la SCI Moulin Montées, qui était titulaire de ce contrat d'assurance depuis le 1er juin 2010, a informé son assureur de ces dispositions contractuelles souscrites postérieurement, dispositions qui privaient la société GROUPAMA d'un recours contre l'assureur du locataire en cas d'incendie, en raison des clauses de non recours et de non assurance. L'assuré aurait dû a minima l'en informer puisque ces stipulations contractuelles, qui privaient l'assureur du recours contre un autre assureur résultant de la mise en oeuvre d'une présomption légale de responsabilité, avaient une incidence sur l'étendue de l'obligation de l'assureur, d'autant plus que le bailleur s'était pourtant engagé, au terme de la clause 6.3, à 'obtenir de ses assureurs qu'ils renoncent à recours contre le preneur et ses assureurs en cas de sinistre consécutif aux événements précités', et donc à obtenir l'accord de son assureur. A tout le moins, la SCI Moulin Montées aurait donc dû informer son assureur de ces stipulations contractuelles qui avaient une incidence sur l'étendue de l'obligation de l'assureur, ce qu'elle ne justifie, ni même ne soutient, avoir fait.
En conséquence, la SCI Moulin Montées a commis une faute en n'informant pas son assureur de la présence dans le contrat de clauses le privant d'un recours contre l'assureur du locataire, présumé responsable en cas d'incendie.
Il convient dès lors d'infirmer le jugement entrepris et de débouter la SCI Moulin Montées de sa demande d'indemnisation dirigée contre la société Groupama.
Sur les demandes contre la société Jalouneix & Associés
La société Moulin Montées prétend que la société Jalouneix & Associés avait connaissance, dès 2012, de la substitution d'une activité de restauration à l'activité de bureaux et elle en veut pour preuve le bail conclu avec Mme [N], sa pièce n°13.
Toutefois, ce n'est pas ce changement d'activités qui justifie le rejet des demandes d'indemnisation de la la SCI Moulin Montées, mais les stitpulations du contrat de bail du 17 mars 2017, dont rien n'indique que la société Jalouneix et associés a eu connaissance.
Il n'y a dès lors pas lieu de condamner la société Jalouneix et associés, qui n'a pas commis de faute à l'origine du préjudice, à supporter, à titre de dommages et intérêts, l''ventuel montant d'indemnisation non couvert par l'assureur.
Sur les demandes accessoires
La société Moulin Montées, qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP Laval-Firkowski et et de la SCP d'avocats Thierry Girault.
Les circonstances de la cause justifient de condamner la SCI Moulin Montées à verser une somme de 3000 euros à la société Jalouneix et associés sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et de rejeter toutes les autres demandes à ce titre.
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement, par décision mise à disposition au greffe et en dernier ressort ;
INFIRME en toutes ses dispositions critiquées le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
DECLARE la société Groupama Paris Val de Loire recevable à opposer un refus de garantie à la SCI Moulin Montées ;
DEBOUTE la SCI Moulin Montées de ses demandes dirigées contre la société Groupama Paris Val de Loire ;
REJETTE les demandes dirigées contre la société Jalouneix et associés ;
REJETTE les demandes plus amples ou contraires ;
CONDAMNE la SCI Moulin Montées à payer une somme de 3000 euros à la société Jalouneix et associés au titre de l'article 700 du code de procédure civile et rejette les autres demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SCI MOULIN MONTEES aux dépens de première instance et d'appel et accorde à la SCP Laval-Firkowski et à la SCP d'avocats Thierry Girault le droit prévu à l'article 699 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de Chambre et Madame Fatima HAJBI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT