COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE DES URGENCES
COPIES EXECUTOIRES + EXPÉDITIONS :
SCP LAVAL - FIRKOWSKI
SCP GUILLAUMA PESME
ARRÊT du 6 JUILLET 2022
n° : 261/22 RG 22/00177
n° Portalis DBVN-V-B7G-GQG6
DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Jugement, Juge des contentieux de la protection, Tribunal Judiciaire de BLOIS en date du 15 décembre 2021, RG 21/02223, n° Portalis DBYN-W-B7F-D46B ;
PARTIES EN CAUSE
APPELANTS : timbre fiscal dématérialisé n°: 1265 2755 5221 5525
Monsieur [F] [I]
SCC Sologne - Camping Car, ZAC du Patureau de la Grange - 41200 PRUNIERS EN SOLOGNE
représenté par Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL-FIRKOWSKI, avocats au barreau d'ORLÉANS
Madame [L] [T] épouse [I]
SCC Sologne Camping Car, ZAC du Patureau de la Grange - 41200 PRUNIERS EN SOLOGNE
représentée par Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL-FIRKOWSKI, avocats au barreau d'ORLÉANS
INTIMÉ : timbre fiscal dématérialisé n°: 1265 2764 5113 7029
Monsieur [R] [Y]
La Loge de Brande - 18120 MASSAY
représenté par Me Christophe PESME de la SCP GUILLAUMA PESME, avocats au barreau d'ORLÉANS
' Déclaration d'appel en date du 18 janvier 2022
' Ordonnance de clôture du 7 juin 2022
Lors des débats, à l'audience publique du 8 juin 2022, Monsieur Michel Louis BLANC, Président de Chambre, a entendu les avocats des parties, avec leur accord, par application des articles 786 et 910 du code de procédure civile ;
Lors du délibéré :
Monsieur Michel BLANC, président de chambre,
Monsieur Eric BAZIN, conseiller,
Madame Laure Aimée GRUA, conseiller,
Greffier : Madame Mireille LAVRUT, faisant fonction de greffier lors des débats et du prononcé par mise à disposition au greffe ;
Arrêt : prononcé le 6 juillet 2022 par mise à la disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Par acte sous seings privés en date du 1er avril 2017, [R] [Y] consentait un bail d'habitation à [F] [I] et [L] [T] épouse [I] portant sur une maison sise 35 rue des Varennes à Langon (41320) moyennant paiement d'un loyer mensuel de 700 € avec autres provisions sur charges ; le dépôt de garantie était fixé à 700 €.
Suivant acte du même jour, [R] [Y] consentait aux locataires une promesse de vendre le bien, objet du contrat de bail, pour la somme de 184'752 € et sous condition suspensive de l'obtention d'un prêt, au plus tard pour le 1er avril 2021, les loyers versés venant alors en déduction du prix de vente.
Par actes sous seings privés du 2 octobre 2019,un nouveau compromis de vente était conclu entre les parties au prix réduit de 171'000 € sous réserve de l'octroi d'un prêt au plus tard le 31 octobre 2019, prorogé au 31 décembre 2019 par acte du 27 novembre 2019 ; dans un troisième avenant, les parties convenaient de substituer aux acquéreurs initialement prévus la SCI Colline.
Les locataires n'ayant pas obtenu leur prêt, le bailleur, par un courrier électronique du 14 janvier 2020, réclamait l'arriéré de loyer d'un montant de 3037,76 € couvrant la période du 1er septembre 2019 au 31 décembre 2019.
Invoquant le refus des locataires de régler les loyers dus, [R] [Y] faisait délivrer à [F] [I] et [L] [T] épouse [I] le 11 mai 2021 un commandement de payer visant la clause résolutoire concernant un arriéré locatif d'un montant de 14'076, 43 €en principal.
Par acte en date du 30 juillet 2021, dénoncé le 17 août 2021 par voie dématérialisée au préfet de Loir-et-Cher, [R] [Y] faisait assigner [F] [I] et [L] [T] épouse [I] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Blois aux fins de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire et prononcer la résiliation du bail, de voir ordonner l'expulsion des locataires et de les entendre condamner à lui payer la somme de 14'076,43 € au titre des impayés de loyers pour la période comprise entre le mois de septembre 2019 et le mois de mars 2021 sauf à parfaire, réclamant également une indemnité d'occupation d'un montant mensuel de 726,55 €.
Par jugement réputé contradictoire en date du 15 décembre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Blois déclarait irrecevable les observations écrites et les pièces transmises par [N] [I] et [L] [T] épouse [I], constatait que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire sont réunies au 12 juillet 2021, constatait la résiliation du bail
conclu le 1er avril 2017, disait [N] [I] et [L] [T] épouse [I] occupants sans droit ni titre du logement objet du bail résilié et ordonnait en conséquence la libération des lieux, autorisant l'expulsion le cas échéant et statuant sur le sort des meubles.
[N] [I] et [L] [T] épouse [I] étaient condamnés à payer à [R] [Y] la somme de 14'076,43 € au titre des loyers et charges dus au 31 mars 2021 outre intérêts au taux
légal à compter de ce jugement, et au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 726,55 € à compter du jugement jusqu'à la libération effective des lieux et la remise des clés, ainsi que la somme de 700 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens incluant le coût du commandement
Par une déclaration déposée au greffe le 18 janvier 2022, [F] [I] interjetait appel de ce jugement.
Par leurs dernières conclusions en date du 30 mai 2022, les appelants sollicitent l'annulation de cette décision pour violation des articles 15 et 16 du code de procédure civile.
À titre subsidiaire, ils en sollicitent la réformation, demandant à la cour, statuant à nouveau, de constater la résolution du bail à la date du 31 mars 2021, de dire n'y avoir lieu à fixation d'une indemnité d'occupation, de constater le départ des locataires des lieux loués et la restitution des clés, de dire fondée l'exception d'inexécution soulevée dans le cadre du contrat de bail qui les liait à [R] [Y], demandant à être déchargés du paiement des loyers et des charges et de dire qu'ils sont libérés de leurs obligations.
À titre subsidiaire, ils invoquent une inexécution partielle par [R] [Y] de ses obligations du bailleur, demandant à la cour de réduire des deux tiers le montant des loyers. En tout état de cause, ils sollicitent la condamnation de [R] [Y] à leur verser une somme de 15'291,30 €, sauf à parfaire au titre des restitutions pour les travaux effectués par eux en lieu et place du bailleur, sollicitant la compensation des sommes. Ils sollicitent le rejet de la demande de [R] [Y] tendant à les voir condamner au paiement de la somme de 32'122,84 € au titre des travaux en mise en état. Ils réclament le paiement de la somme de 3000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions, [R] [Y] sollicite la confirmation du jugement du 15 décembre 2021 en toutes ses dispositions, demandant à la cour, y ajoutant, de condamner les consorts [I] à lui payer la somme de 2460,89 € au titre des loyers dus pour la période comprise entre le 1er avril 2021 et le 12 juillet 2021, date de l'acquisition de la clause résolutoire, et la somme de 5167,87 € au titre de l'indemnité d'occupation due pour la période comprise entre le 13 juillet 2021 et le 15 février 2022, date de la réception des clés. Il demande à la cour de débouter ses adversaires de leur demande de remboursement de travaux, et de les condamner au paiement de la somme de 32'122,84 € au titre des travaux de remise en état des lieux, comprenant la repose de la cloison, la démolition de la terrasse et de la dalle béton installée dans le jardin, le tout indexé sur l'indice BT 01 du coût de la construction, outre intérêts au taux légal, réclamant en outre le paiement de la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture était rendue le 7 juin 2022.
SUR QUOI :
Sur la demande d'annulation du jugement :
Attendu qu'à l'appui de leur demande d'annulation du jugement entrepris, les époux [I] reprochent à la juridiction de voir déclarer irrecevables leurs écritures et pièces produites, en violation du principe du contradictoire ;
Qu'ils exposent que le juge des contentieux de la protection a retenu que, s'agissant d'une procédure orale, les écrits doivent être soutenus lors de l'audience mais déclarent qu'ils avaient contacté le greffe du tribunal afin de connaître le déroulement de la procédure, et qu'il ne leur aurait pas été indiqué que leur présence le jour de l'audience était nécessaire, et encore moins qu'un argumentaire écrit ne serait pas retenu ;
Attendu qu'il y a lieu de préciser qu'il n'appartient pas au greffe de conseiller les parties ;
Que c'est à ces dernières qu'il appartient de se renseigner auprès de toute personne habilitée sur la manière de procéder afin que leur argumentation puisse être valablement retenue ;
Que le principe du contradictoire est applicable à toutes parties, qu'elles soient ou non assistées par un avocat ;
Qu'à supposer que leur affirmation soit exacte les indications qui ont pu leur être données, ou qui leur ont été données sans être suivies d'effet par une personne qui n'avait pas qualité pour les informer, ne les dispensent en aucune façon de respecter ce même principe du contradictoire qu'ils reprochent aujourd'hui à la juridiction du premier degré d'avoir violé en ne retenant pas leurs écritures alors qu'ils n'avaient pas cru devoir comparaître, prenant ainsi le risque, ainsi qu'il était indiqué sur l'acte introductif d'instance dont ils avaient eu connaissance, de voir la juridiction statuer sur les seuls éléments apportés par leur adversaire ;
Que c'est de façon tout à fait légitime que [R] [Y] a soulevé l'irrecevabilité d'écritures et de pièces qui ne lui avaient pas été communiquées ;
Que, pour pouvoir valablement invoquer les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, encore eut-il fallu qu'eux mêmes eussent fait en sorte que le procès soit équitable, et alors même que le courrier qui leur avait été adressé par l'huissier instrumentaire en application des dispositions de l'article 659 du code de procédure civile mentionnait que leur présence à l'audience était importante et qu'il était de leur plus grand intérêt de s'y présenter ;
Atendu qu'il n'y a pas lieu de prononcer l'annulation du jugement querellé ;
Sur la résolution du contrat de bail :
Attendu que pour contester la décision du premier juge en ce qu'il a constaté l'acquisition de la clause résolutoire, les époux [F] [I] déclarent avoir « unilatéralement mis fin au contrat de bail à raison de ce que le logement loué était impropre à une jouissance normale et paisible en contravention avec la loi du 6 juillet 1989 », citant à cet égard les dispositions de l'article 1224 du Code civil ;
Qu'ils reconnaissent ainsi une rupture unilatérale de leur part, alors qu'ils n'ont pas donné congé, qu'ils n'ont pas remis les clés à leur bailleur lors de leur départ, et qu'ils n'ont manifestement opéré aucune
démarche envers [R] [Y] pour lui faire part de leur volonté de quitter les lieux et de résilier le bail ;
Que la résiliation d'un contrat tel que le contrat de bail doit revêtir certaines formes qui n'ont pas été respectées ;
Attendu que par courrier en date du 14 mars 2022, les époux [F] [I] faisaient savoir à l'huissier qu'ils auraient quitté les lieux au mois de novembre 2020, ce qui est inexact, puisque le commandement de payer a été signifié le 11 mai 2021 à la personne de [L] [T] épouse [I] à l'adresse figurant sur le bail ;
Que, dans l'hypothèse où ils auraient réellement quitté les lieux en novembre 2020, ils n'auraient pas, le 14 juin 2021, mandaté un expert en bâtiment pour se rendre sur les lieux et constater les désordres allégués, démontrant ainsi d'une part qu'ils occupaient encore les lieux et que le bail était toujours en cours ;
Qu'à l'appui de leur contestation du montant de l'arriéré, ils prétendent avoir quitté les lieux le 31 mars 2021, ce qui infirme au surplus l'affirmation qu'ils avaient faite selon laquelle ils seraient partis en novembre 2020 ;
Que les clés n'ont finalement été remises au propriétaire que le 15 février 2022 ;
Attendu que c'est donc à juste titre que le premier juge a constaté la résiliation du bail à la date du 12 juillet 2021, et qu'il a fixé une indemnité d'occupation jusqu'à la libération effective des lieux et la remise des clés ;
Sur le montant de l'arriéré :
Attendu que les époux [I] reprochent au premier juge d'avoir prononcé leur condamnation au versement d'une somme de 14'076,43 € au titre des impayés de loyers et de charges à la date du 21 juillet 2021, demandant que le décompte soit arrêté au 31 mars 2021, date à laquelle ils auraient quitté les lieux loués ;
Que, si c'est à juste titre qu'ils indiquent que, lors de la signification de l'acte introductif d'instance du 31 juillet 2021, l'huissier a pu constater que la boîte aux lettres était condamnée et que la maison était inhabitée, il n'en demeure pas moins que le propriétaire n'avait toujours pas été avisé de leur départ, que les époux [I] n'avaient pris aucune initiative en vue de l'établissement d'un état des lieux de sortie et de la restitution des clés ;
Que c'est donc à bon droit que le juge des contentieux de la protection a retenu la date du 12 juillet 2021 comme date d'effet de la résiliation, et que [R] [Y] considère aujourd'hui que les créanciers d'une indemnité d'occupation pour la période comprise entre le 12 juillet 2021 et le 4 février 2022, soit six mois et 34 jours ;
Que les époux [I] sont donc redevables non seulement de la somme de 14'076,43 € telle qu'elle a été fixée par le premier juge, mais encore de la somme de 2460,89 € pour les loyers et charges dus entre le 1er avril 2021 et le 12 juillet 2021, et de la somme de 5167,87 € à titre d'indemnité d'occupation pour la période ayant couru du 13 juillet 2021 au 15 février 2022 ;
Attendu que les époux [F] [I] déclarent avoir procédé à différents travaux, à savoir le changement des anciens portails, le remblayage de passage depuis la route jusqu'à la véranda, la réalisation d'une tranchée, le changement de cumulus, des travaux de terrassement et de maçonnerie ainsi que l'ouverture du mur de la cuisine ;
Qu'ils n'apportent aucun élément relatif à un éventuel accord du propriétaire, étant observé que ces opérations s'inscrivaient manifestement dans un projet d'achat du bien, et que c'est donc dans leur propre intérêt prévisible que ces travaux ont été faits, [R] [Y] n'ayant pas aujourd'hui à subir les conséquences de leur changement d'avis, alors par ailleurs que le bail prévoit une clause selon laquelle les travaux d'amélioration restent acquis au bien ;
Qu'il y a lieu en outre d'observer que les travaux d'isolation, ainsi que le fait remarquer la partie intimée, s'inscrivent dans une politique étatique de subventions et de déduction fiscale dont ils ont manifestement bénéficié ;
Que, s'agissant de l'ensemble des travaux, ces derniers ont été opérés aux risques et périls des locataires, la décision de ne pas acheter la maison relevant de leur seule responsabilité ;
Attendu qu'il y a lieu de débouter les époux [F] [I] de leurs demandes de paiement de la somme de 15'291,30 € au titre des restitutions pour les travaux effectués ;
Attendu que [R] [Y] n'avait pas formulé devant le premier juge sa demande de paiement de la somme de 32'122,84 € au titre des travaux de remise en état ;
Que cette demande nouvelle et irrecevable au regard des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile ;
Qu'il y a lieu de la rejeter ;
Attendu que chacune des parties succombe au moins partiellement en ses prétentions, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu qu'il y a lieu d'inclure dans les dépens le commandement de quitter les lieux et le procès-verbal de reprise, ainsi que la moitié des frais d'établissement de l'état des lieux de sortie ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Dit n'y avoir lieu à annulation du jugement entrepris,
Déclare irrecevable la demande formée par [R] [Y] au titre du remboursement des travaux de remise en état des lieux,
Confirme ledit jugement en toutes ses dispositions, sauf s'agissant du montant de l'arriéré de loyer et de l'indemnité d'occupation,
Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,
Condamne [L] [T] épouse [I] et [F] [I] à payer à [R] [Y] la somme de 14'076,43 € au titre des loyers et charges dus au 31 mars 2021, outre intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2021,la somme de 2460,89 € au titre des loyers dus pour la période comprise
entre le 1er avril 2021 et le 12 juillet 2021 et la somme de 5167,87 € au titre de l'indemnité d'occupation pour la période comprise entre le 13 juillet 2021 et le 4 février 2022,
Déboute [L] [T] épouse [I] et [F] [I] de leur demande de remboursement de travaux,
Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne [L] [T] épouse [I] et [F] [I] aux dépens incluant les frais de commandement de quitter les lieux, de procès-verbal de reprise, et la moitié des frais de l'état des lieux de sortie, et autorise la SCP [P] [O] à se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Monsieur Michel Louis BLANC, président de chambre, et Madame Mireille LAVRUT, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire ;
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,