COUR D'APPEL D'ORLÉANS
C H A M B R E C I V I L E
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 05/07/2022
SCP GUILLAUMA PESME
Me Alexis DEVAUCHELLE
SARL ARCOLE
ARRÊT du : 05 JUILLET 2022
N° : - : N° RG 19/02322 - N° Portalis DBVN-V-B7D-F7GX
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ORLEANS en date du 22 Mai 2019
PARTIES EN CAUSE
APPELANTES :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265243221527802
La CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES PARIS VAL DE LOIRE - GROUPAMA PVL prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité
161 avenue Paul Vaillant Couturier
94258 GENTILLY CEDEX
représentée par Me Christophe PESME de la SCP GUILLAUMA PESME, avocat postulant au barreau d'ORLEANS substituée par Me Loïc ROY, avocat au barreau d'ORLEANS,
représentée par Me Agathe MOREAU de la SELARL REINHART MARVILLE TORRE, avocat plaidant au barreau de PARIS
La SARL AVENIR ELECTRICITE D'ORLEANS -AEO, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité
344 rue du Moulin
45520 GIDY
représentée par Me Christophe PESME de la SCP GUILLAUMA PESME, avocat postulant au barreau d'ORLEANS substituée par Me Loïc ROY, avocat au barreau d'ORLEANS,
représentée par Me Agathe MOREAU de la SELARL REINHART MARVILLE TORRE, avocat plaidant au barreau de PARIS
D'UNE PART
INTIMÉS : - Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265249552594612
La Société SMABTP - SOCIETE D'ASSURANCE MUTUELLE DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° D 775 684 764, prise en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siège
8 rue Louis Armand
75015 PARIS cedex
représentée par Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat postulant au barreau d'ORLEANS et par Me Michel -Louis COURCELLES de la SCP PACREAU COURCELLES, avocat plaidant au barreau d'ORLEANS,
La S.E.L.A.R.L. VILLA FLOREK, immatriculée au RCS de TOURS sous le n° D 501 383 608, prise en la personne de Maître [R] [L], élisant domicile 54, rue de la Bretonnerie, 45000 ORLEANS, es qualité de liquidateur judiciaire de la société SABAM, appelée à cette fonction par jugement de liquidation judiciaire rendu le 12 juin 2013 par le tribunal de commerce d'ORLEANS
( BODACC A n° 20130123 publié le 28 juin 2013)
18 rue Nericault Destouches
37000 Tours / France
représentée par Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat postulant au barreau d'ORLEANS et par Me Michel -Louis COURCELLES de la SCP PACREAU COURCELLES, avocat plaidant au barreau d'ORLEANS,
- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265248964569069
La CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU LOIRET, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
Place du Général de Gaulle
45021 ORLEANS CEDEX
représentée par Me François CHAUMAIS de la SARL ARCOLE, avocat au barreau de TOURS
Monsieur [Z] [X] décédé le 26 septembre 2017.
n'ayant pas constitué avocat
Monsieur [W] [D]
né le 09 Décembre 1962 à EAUBONNE (95600)
20 promenade de Barchelin
45190 BEAUGENCY
n'ayant pas constitué avocat
La S.A.S. SAULNIER [V] ET ASSOCIES, prise en la personne de Me [G] [V], prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL HLC, immatriculée au RCS d'ORLEANS sous le n° 328 618 582, désigné à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce d'ORLEANSdu 09 janvier 2019 en remplacement de Me [P] co-liquidateur précédemment désigné à compter du 14 janvier 2019.
6 bis rue des Anglaises
45000 ORLÉANS
n'ayant pas constitué avocat
La SAS SABAM immatriculée au RCS d'ORLEANS sous le n° B086 980 893, en liquidation judiciaire, représentée par la société VILLA FLOREK.
2 rue Alfred Nobel
BP 20091
45802 SAINT JEAN DE BRAYE
n'ayant pas constitué avocat
La SARL HABITAT LOISIRS CONSTRUCTION (HLC) immatriculée au RCS de d'ORLEANS sous le n° 328 618 582 en liquidation judiciaire, représentée par la SAS SAULNIER [V] ET ASSOCIES
RN 152
'Les Vallées'
45130 BAULE
n'ayant pas constitué avocat
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du :18 Juillet 2019
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 05 Avril 2022
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats, du délibéré :
Madame Anne-Lise COLLOMP,, Président de chambre,
Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller,
Mme Laure Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.
Greffier :
Madame Fatima HAJBI, Greffier lors des débats et du prononcé.
DÉBATS :
A l'audience publique du 09 MAI 2022, à laquelle ont été entendus Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de Chambre, en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries.
ARRÊT :
Prononcé le 05 JUILLET 2022 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
FAITS ET PROCEDURE
M. [F] [U] a été embauché comme apprenti au sein de la société Avenir Electricité d'Orléans (AEO), ayant pour activité l'électricité et le chauffage.
Cette société était assurée auprès de la société Groupama PVL.
La société AEO s'est vue attribuer le lot 'électricité' dans le cadre d'un marché de travaux portant sur la construction d'un ensemble de logements.
La société HLC, ayant pour dirigeant [W] [D], était quant à elle en charge du lot n°8 'menuiseries extérieures PVC'.
La société Sabam, dirigée par M. [Z] [X], était en charge du lot n°3 'gros-oeuvre maçonnerie' de ce même marché de travaux.
Les sociétés Sabam et HLC étaient assurées auprès de la la SMABTP.
Le 8 mars 2000, vers 13h30, M. [U], encore mineur, a chuté d'un balcon situé au troisième étage, dont les gardes-corps avaient été retirés pour permettre d'effectuer un approvisionnement de blocs menuiseries. Il a été gravement blessé.
Procédure pénale :
Par jugement du 27 novembre 2007, le tribunal correctionnel d'Orléans a déclaré la société Sabam, M. [X], la société HLC et M. [D] coupables de faits de blessures involontaires pour n'avoir pas 'veillé au respect du maintien en place des protections collectives à l'intérieur des bâtiments pendant toute la durée du chantier et n'avoir pas remis en place les protections des gardes-corps après livraison des châssis de fenêtre en PVC'.
Ce même tribunal, statuant sur intérêts civils, les a déclarés solidairement et entièrement responsables du préjudice subi par la vicitme, les a condamnés à verser une provision de 15 000 euros à M. [U] et a ordonné une expertise médicale confiée au Docteur [O].
Ce jugement a été confirmé par un arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 14 octobre 2008.
Par jugement du 11 septembre 2014, le tribunal correctionnel d'Orléans, statuant sur intérêts civils a, pour l'essentiel, ordonné une nouvelle expertise médicale de M. [U], et a condamné la société SABAM, M. [X], la société HLC, M. [D] par décision commune à la SMABTP, à payer à M. [U] une provision complémentaire de 20 000 €.
Par un jugement du 23 février 2021, le tribunal correctionnel d'Orléans a maintenu la société AEO dans la cause afin que le jugement pénal lui soit déclaré opposable.
La procédure est pendante devant la chambre des intérêts civils du tribunal correctionnel d'Orléans.
Procédure devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Orléans :
Par jugement du 7 février 2012, le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Orléans a retenu la faute inexcusable de la société AEO à l'origine de l'accident dont a été victime M. [F] [U] et ordonné la majoration de la rente servie par la caisse primaire d'assurance maladie à M. [U].
La CPAM du Loiret a, par voie de conséquence, réclamé à la société AEO le paiement du montant du capital représentatif de la rente majorée, soit 67 929,18 €, somme qui a été réglée par la société Groupama PVL pour le compte de son assurée.
La présente procédure :
Par acte d'huissier du 3 mars 2011, la SMABTP, assureur de la société SABAM, la société SABAM et son Président, M. [Z] [X] ont assigné la société AEO et son assureur la société Groupama Paris Val de Loire (PVL) devant le tribunal de grande instance d'Orléans aux fins notamment de voir la société AEO jugée coresponsable de l'accident à hauteur de 90 %.
Par acte d'huissier du 3 mai 2012, la SMABTP, la société SABAM et M. [Z] [X] ont fait assigner la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Loiret aux fins principales de jonction avec la précédente instance et de sursis à statuer dans l'attente de la décision du tribunal correctionnel d'Orléans statuant sur les intérêts civils.
Par exploits des 4 et 9 mai 2012, la société AEO et son assureur la société Groupama PVL ont fait assigner la société SABAM, la société HLC, la SMAPTB et la CPAM du Loiret aux fins notamment d'obtenir le remboursement du capital représentatif de la rente majorée accordée à M. [F] [U] du fait de la reconnaissance par un jugement définitif du TASS d'Orléans en date du 7 février 2012, de la faute inexcusable de l'employeur, ou à tout le moins d'une partie de celle-ci à concurence de la part de responsabilité leur incombant.
La société HLC et Monsieur [W] [D] ont fait signifier le 4 mai 2012 des conclusions d'intervention volontaire.
Ces procédures ont été jointes.
La société Sabam a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire rendu le 12 juin 2013 par le tribunal de commerce d'Orléans, et la société Villa a été nommée en qualité de liquidateur judiciaire de cette société.
La société HLC a également été placée en liquidation judiciaire.
Par jugement en date du 9 janvier 2019, le tribunal de commerce d'Orléans a désigné la société Saulnier [V] et associés, prise en la personne de Maître [V], en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL HLC.
Par jugement en date du 22 mai 2019, le tribunal de grande instance d'Orléans a :
- donné acte à la SELARL Villa prise en la personne de Me [R] [L] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SABAM, ainsi qu'à la société HLC et son dirigeant M. [W] [D], de leur intervention volontaire,
- constaté la mise en liquidation judiciaire des sociétés HLC et SABAM, et constaté que la société HLC n'est plus représentée valablement,
- donné acte à la SMABT'P, puis la société Villa, en la personne de Me [L] ès qualités de liquidateur de la société SABAM et à M. [Z] [X] qu'ils se sont désistés de leurs demandes formulées à rencontre de la société AEO devant le tribunal correctionnel d'Orléans statuant sur intérêts civils par conclusions déposées le 28/02/2012, se bornant, devant cette juridiction, à solliciter que le jugement à intervenir soit déclaré commun et opposable à la société AEO,
- déclaré recevable l'action de la SMABTP, de la société Villa, en la personne de Me [L] ès qualités de liquidateur de la société SABAM, de M. [Z] [X] et de M. [W] [D], en ce qu'elle tend à établir un partage de responsabilités en vue du recours de la CPAM du Loiret contre le ou les auteurs de l'accident,
- déclaré irrecevable et pour partie prescrite l'action de la société AEO et de son assureur Groupama Paris Val de Loire à l'encontre de la SMABTP, la société Villa, en la personne de Me [L] ès qualités de liquidateur de la société SABAM, de M. [Z] [X], de la société HLC et de M. [W] [D],
- déclaré recevables M. [W] [D] et la CPAM du Loiret en leurs demandes,
- déclaré la société AEO co-responsable de l'accident dont son préposé, [F] [U], a été victime le 8 mars 2000, aux côtés de la société SABAM, la société HLC, M. [Z] [X] et M. [W] [D],
- dit que la part de responsabilité de la société AEO est fixée à 33 %, tandis que la société SABAM, représentée par la société Villa, en la personne de Me [L] ès qualités de liquidateur de la société SABAM, M. [Z] [X],la société HLC (en liquidation judiciaire et non représentée par ses liquidateurs) et M. [W] [D] sont tenus responsables ensemble à 67 %,
- dit qu'en conséquence, le recours de la CPAM du Loiret est limité, concernant la société Villa en la personne de Maître [L] ès qualités de liquidateur de la société SABAM, M. [Z] [X] et M. [W] [D], à la part excédant le taux de responsabilité mis à la charge de la société AEO,
- déclaré le rapport d'expertise du Dr [O] opposable à la société AEO et à son assureur la société Groupama Paris Val de Loire,
- condamné in solidum M. [W] [D], M. [Z] [X], la société AEO, sans omettre la garantie des assureurs des sociétés, soit la société SMABTP et la société Groupama Paris Val de Loire, et dans la limite des proportions précitées, à verser à la CPAM du Loiret la somme de 292.592,92 € au titre des sommes versées par elle à [F] [U],
- fixé la créance de la CPAM du Loiret dans la liquidation judiciaire des sociétés SABAM et HLC à la somme correspondant au prorata de leur part de responsabilité, et débouté la CPAM du Loiret de ses demandes de condamnations à l'égard de ces sociétés en liquidation judiciaire,
- débouté la société AEO et la société Groupama Paris Val de Loire de l'ensemble de leurs demandes y compris celles à l'égard de la CPAM du Loiret,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné in solidum M. [W] [D], M. [Z] [X], la société AEO ainsi que les assureurs SMABTP et Groupama Paris Val de Loire, dans les proportions de responsabilité précitées, à payer à la CPAM du Loiret une indemnité forfaitaire de 1066 €, au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion de l'article L376-1 du code de la sécurité sociale,
- fixé la créance de la CPAM du Loiret dans la liquidation judiciaire des sociétés SABAM et HLC à la somme correspondant au prorata de leur part de responsabilité pour cette indemnité forfaitaire de gestion, et déboute la CPAM du Loiret de ses demandes de condamnations à l'égard de ces sociétés en liquidation judiciaire,
- rejeté toute autre demande, plus ample ou contraire,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné in solidum la société AEO et la société Groupama Paris Val de Loire à payer à la SMABTP, la société Villa, en la personne de Me [L] ès qualités de liquidateur de la société SABAM et à M. [Z] [X] la somme de 6000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure,
- condamné in solidum la société AEO et la société Groupama Paris Val de Loire à payer à M. [W] [D] la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société AEO et la société Groupama Paris Val de Loire à payer à la CPAM du Loiret la somme de 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société AEO et la société Groupama Paris Val de Loire aux dépens, et dit que les avocats de la cause pourront recouvrer directement ceux dont ils auront fait l'avance sans avoir reçu provision.
Par déclaration en date du 27 juin 2019, la société Groupama PVL et la société AEO ont interjeté appel de tous les chefs de ce jugement sauf en ce qu'il a donné acte à la Selarl Villa prise en la personne de Me [R] [L] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SABAM, ainsi qu'à la société HLC et son dirigeant M. [W] [D], de leur intervention volontaire, constaté la mise en liquidation judiciaire des sociétés HLC et SABAM, et constaté que la société HLC n'est plus représentée valablement et donné acte à la SMABT'P, puis la société Villa, en la personne de Me [L] ès qualités de liquidateur de la société SABAM et à M. [Z] [X] qu'ils se sont désistés de leurs demandes formulées à rencontre de la société AEO devant le Tribunal correctionnel d'Orléans statuant sur intérêts civils par conclusions déposées le 28/02/2012, se bornant, devant cette juridiction, à solliciter que le jugement à intervenir soit déclaré commun et opposable à la société AEO.
La déclaration d'appel a été signifiée :
- à M. [W] [D], par acte d'huissier en date du 28 août 2019, signifié à personne,
- à la SCP Saulnier, Ponroy et associés, en qualité de liquidateur judiciaire de la la société HLC, par acte d'huissier en date du 28 août 2019, signifié à personne,
- à M. [X] : la tentative de signification n'a pu aboutir en raison du décès de M. [X] le 26 septembre 2017. L'huissier a établi un procès-verbal de perquisition.
- à la société Villa-Florek, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société SABAM, par acte d'huissier en date du 29 août 2019, signifié à personne,
- à la SMABTP, par acte d'huissier signifié le 28 août 2019, à personne,
- à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret, par acte d'huissier en date du 28 août 2019, signifié à personne.
M. [D] et la SCP Saulnier, Ponroy et associés en qualité de liqudiateur judiciaire de la société HLC n'ont pas constitué avocat.
[Z] [X] est décédé le 26 septembre 2017.
Suivant conclusions récapitulatives n°3 notifiées par voie électronique le 11 janvier 2022, la société AEO et la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles Paris Val de Loire ' Groupama PVL demandent à la cour de :
Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de grande instance d'Orléans le 22 mai 2019 en ce qu'il a :
- Déclaré la société AEO co-responsable de l'accident de Monsieur [F] [U] à hauteur de 33% ;
- Déclaré le rapport d'expertise du Dr [O] opposable à la société AEO et à la société Groupama PVL ;
- Condamné in solidum, Messieurs [Z] [X], [W] [D], la société AEO, avec la garantie des assureurs SMABTP et Groupama PVL, à verser à la CPAM la somme de 292.592, 92 euros, dans la limite pour chacun des proportions prédéterminées ;
- Condamné in solidum Messieurs [Z] [X] et [W] [D] et les sociétés AEO, SMABTP et Groupama PVL à régler à la CPAM, dans les proportions précitées, une somme de 1.066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;
- Déclaré irrecevable l'action de la société AEO et de Groupama PVL contre la SMABTP, la Société Villa es qualité de liquidateur de la société SABAM, Monsieur [Z] [X], la société HLC et Monsieur [W] [D] tendant à les voir condamnés à supporter à concurrence de leur part de responsabilité, le coût du capital représentatif de la rente majorée servie Monsieur [F] [U] du fait de la reconnaissance de la faute inexcusable de la société AEO ;
- Condamné in solidum les sociétés AEO et Groupama PVL à payer les sommes de 6.000 euros à la société Villa es qualité de liquidateur de la société SABAM, de Monsieur [Z] [X] et de la SMABTP, 2.500 euros à Monsieur [W] [D] et 1.000 euros à la CPAM, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.
Statuant à nouveau
A titre principal :
- Juger que la responsabilité de la société AEO est recherchée en sa qualité d'employeur de la victime ;
- Juger qu'aucune faute, si ce n'est résiduelle, a fortiori en lien avec l'accident n'a été commise par la société AEO ;
- Juger que les fautes commises par les sociétés HLC et SABAM et leur dirigeant respectif constituent les causes exclusives et premières de l'accident ;
- Juger que la société AEO, garantie par Groupama PVL, a supporté seul le coût du capital représentatif de la rente majorée du fait de la reconnaissance de la faute inexcusable, soit la somme de 67.929,18 euros ;
- Donner acte aux sociétés AEO et Groupama PVL qu'aucune demande de condamnation n'est plus formée à leur encontre par la CPAM ;
En conséquence :
- Dire et juger que la responsabilité de la société AEO en lien avec l'accident, est résiduelle, et fixer sa part dans le partage des responsabilités à une proportion ne pouvant excéder 5% ;
- Dire et juger irrecevables les demandes en paiement formées à l'encontre des sociétés AEO et Groupama PVL et notamment la demande de remboursement formée par la CPAM du Loiret, au titre des sommes versées à la victime ;
- Débouter en conséquence l'ensemble des parties, de toute demande en paiement qui serait formée à l'encontre de la société AEO comme de son assureur, Groupama PVL;
A titre reconventionnel :
- Donner acte à la société Groupama PVL de la subrogation dans les droits de son assuré, la société AEO, du fait du remboursement à la Caisse primaire d'assurance maladie du Centre de la somme de 67.929, 18 euros correspondant au capital représentatif de la rente majorée consécutif à la reconnaissance de la faute inexcusable de la société AEO ;
- Donner acte du désistement par la société AEO et Groupama PVL de l'ensemble de leurs demandes formées à l'encontre de Monsieur [Z] [X], du fait du décès de ce dernier ;
- Dire et juger recevable et bien fondée la demande reconventionnelle de la société AEO et de Groupama PVL, tendant à faire supporter le coût du capital représentatif de la rente majorée consécutif à la reconnaissance de la faute inexcusable, aux sociétés HLC, SABAM, à Monsieur [D], ainsi qu'à la SMABTP, et ce à concurrence de leur part de responsabilité ;
- Fixer le montant de la créance de la société AEO et de Groupama PVL au passif des sociétés HLC et SABAM à proportion de leur part de responsabilité à répartir sur la somme de 67.929,18 euros ;
- Condamner solidairement ou in solidum ou les unes à défaut des autres, Monsieur [W] [D] ainsi que la SMABTP, cette dernière au titre de l'action directe en sa qualité d'assureur des sociétés SABAM et HLC, à rembourser à la société Groupama PVL, elle-même subrogée dans les droits de son assuré AEO, le montant du capital représentatif de la rente majorée consécutif à la faute inexcusable, soit la somme de 67.929, 18 euros, à concurrence des parts de responsabilité qui leur sera imputable ;
- Assortir ces condamnations des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir;
En tout état de cause :
- Condamner les sociétés SABAM, HLC, SMABTP et Monsieur [W] [D] à verser aux sociétés AEO et Groupama une somme de 15.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de l'instance.
Par conclusions en date du 26 décembre 2019, la CPAM du Loiret a formé un appel incident portant sur la limitation par le premier juge, de son recours contre les sociétés SABAM et HLC, leurs liquidateurs et leur assureur commun, à la seule part de responsabilité excédant celle mise à la charge de la société AEO.
Par conclusions notifiées le 4 avril 2022, la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret demande à la cour d'appel de :
- Statuer ce que de droit quant au mérite de l'appel régularisé par la société AEO et son assureur la CRAMA PARIS VAL DE LOIRE à l'encontre du Jugement n° 11/00642 du Tribunal de Grande Instance d'Orléans du 22/05/2019,
- Déclarer mal fondés la SMABTP, en sa qualité d'assureur des sociétés SABAM et HLC, toutes deux en liquidation judiciaire et de Maître [L] liquidateur judiciaire de la SABAM, ainsi que Me [L] en cette qualité, en leur appel incident dudit Jugement.
- Recevoir la CPAM du LOIRET en son appel incident du Jugement du 22/05/2019 en ce que ce Jugement a limité le recours de cet organisme à l'encontre des sociétés SABAM et HLC en liquidation judiciaire, de Messieurs [X] et [D] et de la SMABTP, assureur des sociétés SABAM et HLC et de Me [L] es qualité de liquidateur judiciaire desdites sociétés, à la proportion des responsabilités qu'il retenait à la charge de chacun des intervenants (employeur et tiers).
Statuant à nouveau de ce chef :
- Donner acte à la CPAM du Loiret de ce qu'elle se désiste de ses demandes en ce qu'elles étaient dirigées à l'encontre de Monsieur [Z] [X], aujourd'hui décédé.
- Constater que par son Jugement définitif du 22/11/2007, rendu au contradictoire des intéressés, ainsi que de Monsieur [U] et de la CPAM du Loiret, le Tribunal Correctionnel d'Orléans, a déclaré « (') Messieurs [X] et [D] ainsi que les sociétés SABAM et HLC solidairement et entièrement responsables du préjudice subi par la victime (')
- Vu le caractère subrogatoire du recours de la CPAM du Loiret dans les droits et actions de la victime, Monsieur [F] [U], fixer la créance de la CPAM du Loiret à la liquidation judiciaire des sociétés SABAM, d'une part et HLC d'autre part:
- à la somme de 292.592,92 €, s'agissant des débours en espèces et nature exposés par la CPAM du fait de l'accident du 08/03/2000, ladite somme augmentée des intérêts au taux légal à compter du 23/05/2018, date de notification par RPVA des conclusions de la CPAM du Loiret devant le Tribunal de Grande Instance d'Orléans, valant mise en demeure.
- à la somme de 1.098 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion par application de l'article L 454-1 alinéa 8 du code de la sécurité sociale,
- à la somme de 3.000,00 € au visa de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
- Condamner Monsieur [D], in solidum avec la SMABTP, assureur des sociétés SABAM et HLC et de Me [L] es qualité de liquidateur judiciaire desdites sociétés, à régler à la CPAM du Loiret :
- la somme de 292.592,92 €, au titre de sa créance augmentée des intérêts au taux légal à compter du 23/05/2018,
- la somme de 1.098 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion par application de l'article L 454-1 alinéa 8 du code de la sécurité sociale,
- la somme de 3.000,00 € au visa de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
- Condamner Monsieur [D] in solidum avec la SMABTP, assureur des sociétés SABAM et HLC et de Me [L] es qualité de liquidateur judiciaire desdites sociétés aux dépens de première instance et d'appel,
- Faire application quant à ces derniers des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SARL ARCOLE société d'avocats au Barreau de Tours.
Par conclusions notifiées le 19 décembre 2019, la société SMABTP et la société Villa, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Sabam, ont formé forment appel incident sur le pourcentage de responsabilité de 33 % dans la survenance de l'accident de Monsieur [U] imputé à la Société AEO, avec toutes conséquences en découlant.
Par conclusions récapitulatives n°3 notifiées le 22 mars 2022, la société SMABTP et la société Villa, en qualité de liquidateur judiciaire de la société SABAM, demandent à la cour de :
- déclarer la société AEO, la société Groupama PVL et la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret mal fondées en leur appel principal ou incident d'un jugement prononcé le 22 mai 2019 par le Tribunal de Grande Instance d'Orléans (RG 11/00642).
- déclarer la SMABTP, es-qualité d'assureur des Sociétés SABAM et HLC, et de Maître [L], es-qualité de liquidateur judiciaire de la Société SABAM, recevables et bien fondés en leur appel incident et limité dudit jugement portant sur le pourcentage de responsabilité imputée à la Société la Société AEO, et toutes conséquences en découlant.
STATUANT A NOUVEAU :
- voir fixer à 90 % au moins la part de responsabilité de la Société AEO, sauf pour cette dernière à être garantie par son assurance, la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES PARIS VAL DE LOIRE ' GROUPAMA PVL, avec toutes conséquences en découlant.
- voir fixer les limites du recours de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret à la part excédant le taux de responsabilité mis à la charge de la Société AEO.
EN TOUT ETAT DE CAUSE :
- débouter la Société AEO , la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES PARIS VAL DE LOIRE ' GROUPAMA PVL, et la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU LOIRET de toutes demandes, fins et prétentions, tant principales que reconventionnelles, formées à l'encontre de la SMABTP, es-qualité d'assureur des Sociétés SABAM et HLC, et de Maître [L], es-qualité de liquidateur judiciaire de la Société SABAM.
- Vu le jugement prononcé le 22 mai 2019 octroyant déjà à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU LOIRET ce titre une indemnité forfaitaire de 1 066 €, débouter la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU LOIRET de sa demande tendant à s'entendre condamner Monsieur [W] [D] et feu [Z] [X] (bien qu'il soit décédé), pris in solidum entre eux et avec la SMABTP, assureur des Sociétés SABAM et HLC et de Maître [L] es-qualité de liquidateur judiciaire desdites sociétés, à lui régler une nouvelle somme de 1 080.00 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion par application de l'article L 454-1 alinéa 8 du Code de la sécurité sociale.
- condamner solidairement, et à défaut in solidum, la Société AEO et la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES PARIS VAL DE LOIRE ' GROUPAMA PVL, à verser à la SMABTP, es-qualité d'assureur des Sociétés SABAM et HLC, et de Maître [L], es-qualité de liquidateur judiciaire de la Société SABAM, la somme de 7 000.00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, et aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Alexis DEVAUCHELLE, par application de l'article 699 du même Code.
Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions récapitulatives.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 5 avril 2022.
A l'audience du 9 mai 2022, l'affaire a été mise en délibéré au 5 juillet 2022.
MOTIFS
Sur le désistement des demandes formées à l'encontre de M. [X]
Il convient de donner acte à la société AEO, à la société Groupama PVL et à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret de ce qu'elles ne forment plus, dans le dernier état de la procédure, de demandes à l'encontre de [Z] [X].
Sur le partage de responsabilité
La société AEO conteste le partage de responsabilité prononcé par le tribunal qui a considéré que la société AEO était responsable à hauteur de 33% de la survenance de l'accident, les autres sociétés et personnes visées se partageant les 67% restant.
Elle souligne en effet que le fait d'avoir 'laissé son apprenti travailler dans un lieu non sécurisé', est, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, insuffisant pour justifier le partage de responsabilité prononcé, alors que la société AEO ne pouvait avoir conscience de la situation de danger ponctuel soudainement créée par les deux autres prestataires, et que M. [U] bénéficiait d'un encadrement adapté, étant en binôme avec un salarié expérimenté et effectuant des travaux qui ne présentaient aucun risque propre ni aucune technicité particulière. Elle précise que l'absence de garde-corps, inhabituelle, soudaine et imprévisible, n'était pas visible des salariés de la société AEO puisqu'une cloison empêchait la visibilité direct vers la baie. Elle ajoute enfin que la société AEO justifie avoir mis en place un 'plan particulier de sécurité et de protection de la santé' sur le chantier, qui identifiait notamment les risques de chute de hauteur, qu'elle avait réalisé avec la SOCOTEC l'inspection commune préalable, et qu'elle a donc bien pris les mesures de nature à préserver ses salariés des dangers prévisibles. Elle estime que les fautes commises par les sociétés HLC et Sabam constituent la cause première, essentielle et directe de l'accident, la société HLC ayant omis de réinstaller les protections après la livraisons des menuiseries extérieures, et la société Sabam ayant, en qualité d'entreprise générale, omis de vérifier la remise en place de ces protections alors qu'elle n'ignorait pas leur retrait. Elle en déduit que leurs fautes ayant eu un rôle déterminant dans la survenance du dommage, il n'y a pas lieu à partage de responsabilité. Subsidiairement, elle estime que sa part de responsabilité ne saurait excéder 5%.
La société Villa-Florek, en sa qualité de liquidateur de la société Sabam, et la société SMABTP, estiment que c'est au contraire la société AEO qui doit être déclarée responsable à hauteur de 90% de l'accident, dans la mesure où c'est elle qui a fait travailler son apprenti dans la seule pièce du seul appartement de l'étage dont le balcon était provisoirement dépourvu de protections collectives, et que [F] [U] n'était pas encadré comme son statut d'apprenti l'exigeait.
La survenance du dommage, à savoir la chute de M. [U] du balcon du troisième étage dénué de protection, est la conséquence de la conjonction de trois facteurs qui ont concourru à la survenance du dommage :
- d'une part, le fait que la société HLC, en charge du lot menuiserie, a, pour les besoins d'une livraison d'huisseries, décidé de retirer les protections de ce balcon, situé au troisième étage du bâtiment, sans les réinstaller une fois la livraison effectuée, alors même que le chantier était en cours et que des ouvriers étaient amenés à travailler dans l'appartement en cause ;
- d'autre part, le fait que la société Sabam, qui était contractuellement chargée de la mise en place de l'entretien et de la maintenance des protections collectives à l'intérieur des bâtiments et à leurs abords pendant toutes la durée du chantier, a omis de s'assurer du rétablissement de ces protections alors même qu'elle n'ignorait pas que les gardes-corps avaient été déposés ;
- enfin, le fait que la société AEO, sous la responsabilité de laquelle travaillait M. [U], a omis de s'assurer que les lieux sur lesquels elle faisait intervenir un apprenti mineur et inexpérimenté, fût-ce sous l'encadrement d'un salarié expérimenté, étaient suffisamment sécurisés pour éviter qu'il ne soit exposé à un risque d'accident corporel, et en particulier, s'agissant d'un appartement situé au troisième étage, à un risque de chute en hauteur, alors même que le travail demandé à M. [U] impliquait qu'il recule en arrière en direction du balcon et que, le chantier étant en cours et plusieurs entreprises y intervenant, le risque que les garde-corps ne soient pas présents ne pouvait être exclu, quand bien même cette absence eût résulté d'une erreur humaine ou du défaut de diligences d'autres intervenants sur le chantier, hypothèses qui doivent être prises en considération au titre des risques potentiels auxquels peuvent être exposés un apprenti.
C'est donc vainement que la société AEO soutient n'avoir pas commis de faute à l'origine du dommage.
Si les fautes des sociétés HLC et Sabam, qui sont responsables de la dépose des garde-corps et de leur absence au moment de l'accident, ont concourru à la survenance du dommage dans une proportion qui ne saurait être réduite à 10 % comme elles le sollicitent, dès lors que la dépose et l'absence de rétablissement des gardes-corps a eu un rôle causal non négligeable dans la survenance de l'accident, la faute de la société AEO, qui était responsable d'un apprenti mineur et était tenue, à ce titre, de s'assurer qu'il travaillait dans des conditions de sécurité ne l'exposant pas à un risque de blessures ou de mort et aurait donc dû vérifier, avant de le faire travailler dans l'appartement en cause, que celui-ci ne présentait pas de danger pour lui, et en particulier, s'agissant d'un appartement situé au 3ème étage, que les ouvertures étaient pourvues de dispositifs de protection, loin d'avoir joué un rôle résiduel comme elle le soutient, a au contraire contribué dans une proportion tout aussi importante à la survenance du dommage qui aurait été évité si ces mesures de sécurité avaient été prises.
Il convient en conséquence de fixer à 50% la part de responsabilité de la société AEO dans la survenance de l'accident, les autres sociétés et personnes visées se partageant les 50% restant.
Sur la demande relative à la somme de 67 929,18 euros correspondant au capital représentatif de la rente majorée
Les sociétés AEO et GROUPAMA PVL demandent que le coût du capital représentatif de la rente majorée consécutif à la reconnaissance de la faute inexcusable soit supporté par les sociétés HLC et SABAM, par M. [D] et par la SMABTP, à concurrence de leur part de responsabilité. Elles demandent :
- que soit fixé le montant de la créance de la société AEO et de Groupama PVL au passif des sociétés HLC et SABAM à proportion de leur part de responsabilité à répartir sur la somme de 67 929,18 euros ;
- la condamnation solidaire ou in solidum, des uns à défaut des autres, M. [D] ainsi que la SMABTP, cette dernière au titre de l'action directe en qualité d'assureur des sociétés SABAM et HLC, à rembourser à la société GROUPAMA PVL, elle-même subrogée dans les droits de son assuré AEO, le montant du capital représentatif de la rente majorée consécutif à la faute inexcusable, soit la somme de 67 929,18 euros, à concurrence des parts de responsabiltié qui leur sera imputable, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir.
La SMABTP et la société Villa Florek en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Sabam soutiennent que le tribunal a à bon droit déclaré cette demande irrecevable faute pour les sociétés HLC, Sabam, leurs dirigeants respectifs et la société SMABTP d'avoir été mis en cause devant le tribunal des affaires de sécurité sociale afin que le jugement leur soit déclaré commun et opposable.
Il est constant qu'en cas de partage de responsabilité d'un accident du travail avec un tiers, l'employeur, auteur d'une faute inexcusable, ou son assureur, est en droit d'obtenir le remboursement par ce tiers de la fraction, correspondant à sa part de responsabilité, de la cotisation complémentaire d'accident du travail visée à l'article L. 452-2, alinéa 6, du code de la sécurité sociale (1re Civ., 11 janvier 2000, pourvoi n° 97-16.605, Bull. 2000, I, n° 7 ;Soc., 18 janvier 1996, pourvoi n° 93-15.675, Bulletin 1996 V N° 18).
La recevabilité de cette demande n'est pas subordonnée à la mise en cause, devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, des tiers coresponsables du dommage.
La demande de la société AEO et de GROUPAMA PVL est dès lors recevable.
La société Groupama PVL justifie, par la production d'un chèque d'un montant de 67 929,18 euros à l'ordre de la CARPA, avoir versé cette somme le 13 mai 2013 à la CPAM. Il n'est pas contesté que ce paiement a eu lieu en exécution du contrat d'assurance la liant avec la société AEO. Elle se trouve dès lors subrogée dans ses droits.
Compte tenu du partage de responsabilité opéré entre les parties, il convient de condamner la SMABTP et M.[W] [D], in solidum, à verser à la société GROUPAMA PVL une somme de 50% X 67 929,18 = 33 964,59 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présence décision et de fixer à cette somme le montant de la créance de la société GROUPAMA PVL au passif de la liquidation judiciaire des sociétés HLC et SABAM.
Sur le recours de la caisse primaire d'assurance maladie
Le tribunal a condamné in solidum M. [D], M. [X], la société AEO, la société SMABTP et la société GROUPAMA PVL, à proportion de leur part de responsabilité, à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret la somme de 292 592,92 euros au titre des sommes versées par elle à M. [F] [U] et la somme de 1066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion. Il a fixé à ces sommes les créances de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret dans la liquidation judiciaire des sociétés SABAM et HLC.
La caisse primaire d'assurance maladie du Loiret sollicite l'infirmation de ces chefs de dispositifs et demande que sa créance soit fixée à la liquidation judiciaire des sociétés SABAM et HLC, aux sommes de :
- 292 592,92 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2018,
- 1098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion par application de l'article L454-1 alinéa 8 du code de la sécurité sociale,
- 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle demande la condamnation in solidum de M. [D] et de la SMABTP à lui régler les mêmes sommes.
Elle fait valoir que, à son égard, en considération des décisions intervenues :
- en application du jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du 7 février 2012, c'est la société AEO qui était tenue de lui rembourser la majoration de la rente;
- en application du jugement rendu par le tribunal correctionnel d'Orléans le 22 novembre 2007, confirmé en appel par un arrêt du 14 octobre 2008, ce sont M. [X] et [D] et les sociétés SABAM et HLC qui ont été déclarés entièrement responsables du préjudice subi par la victime, et ils sont donc tenus de régler l'intégralité de la créance de la caisse primaire d'assurance maladie née de cet accident, à charge le cas échéant pour eux de se retourner contre la société AEO pour voir statuer sur la répartition finale de la dette.
La société SMABTP et la société Villa en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société SABAM demandent que soient fixées les limites du recours de la caisse primaire d'assurance maladie à la somme excédant le taux de responsabilité mis à la charge de la société AEO.
Elle fait valoir que c'est dans un véritable souci d'équité tiré de l'examen des faits, que les premiers juges, après avoir réparti entre la société AEO et les tiers la responsabilité finale de l'accident survenu, ont limité le recours de la caisse primaire d'assurance maladie à l'encontre des tiers à la seule part excédant celle mise à la charge de la société AEO.
Force est de constater que la juridiction pénale a déclaré les sociétés Sabam et HLC et leurs dirigeants respectifs entièrement responsables du préjudice subi par M. [U], de sorte qu'ils sont tenus d'indemniser son entier préjudice.
Il en résulte qu'il n'y a pas lieu de limiter le recours de la caisse primaire d'assurance maladie à l'égard des sociétés SABAM et HLC, de M. [D] et de la SMABTP à la somme excédant le taux de responsabilité mis à leur charge.
La caisse primaire d'assurance maladie sollicite une indemnité forfaitaire de 1098 euros en application de l'article L 454-1 al.8 du code de la sécurité sociale.
La société SMABTP et la société Villa en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société SABAM s'opposent à cette demande dont ils considèrent qu'elle fait doublon avec celle présentée en première instance, qui a donné lieu à l'allocation d'une somme de 1066 euros, qui a déjà été versée.
Toutefois, le jugement étant infirmé du chef des condamnations prononcées au profit de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret, il convient d'accueillir sa demande à hauteur d'appel.
Elle sollicite à ce titre une somme de 1098 euros et fonde sa demande sur les dispositons de l'article 1 de l'arrêté ministériel du 9 décembre 2020.
L'article 1 de l'arrêté du 4 décembre 2020 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale pour l'année 2021 fixe en effet à la some de 1098 euros le montant maxiam de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par les articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale.
Il convient donc de fixer à la somme de 292 592,92 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mai 2018, ainsi qu'à la somme de 1098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L454-1 al.8 du code de la sécurité sociale, la créance de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret au passif de la liquidation judiciaire des sociétés SABAM et HLC, et de condamner in solidum la société SMABTP et M. [D] au paiement de ces sommes.
Sur l'opposabilité de l'expertise médicale
La société AEO soutient que c'est à tort que l'expertise médicale du Docteur [O], ordonnée par la juridiction pénale à l'occasion d'un contentieux qui lui était étranger, et donc réalisée sans sa présence, lui a été déclarée opposable par le jugement de première instance.
A hauteur d'appel, aucune des parties ne sollicite, dans le dispositif de ses conclusions, que l'expertise en cause soit déclarée opposable à la société AEO et à GROUPAMA PVL.
Il convient dès lors d'infirmer le jugement de ce chef.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Chaque partie supportera la charge des dépens qu'elle a exposés en première instance et en appel, à l'exception de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret dont les dépens de première instance et d'appel seront supportés in solidum par les sociétés AEO et Groupama PVL, et par la société SMABTP et M. [D].
Les circonstances de la cause justifient de condamner in solidum la société SMABTP et M. [D] au paiement d'une somme de 3000 euros à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de fixer à cette somme la créance de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret dans la liquidation judiciaires des sociétés Sabam et HLC.
Les circonstances de la cause justifient de rejeter les autres demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par décision réputée contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :
- déclaré irrecevable et pour partie prescrite l'action de la société AEO et de son assureur Groupama PVL à l'encontre de la SMABTP, la société Villa en la personne de Maître [L] ès qualités de liquidateur de la société SABAM, de M.[Z] [X], de la société HLC et de M. [W] [D],
- dit que la part de responsabilité de la société AEO est fixée à 33%, tandis que la société SABAM, resprésentée par la société Villa en la personne de Maître [L], M. [Z] [X], la société HLC et M. [D] sont tenus responsables ensemble à 67% ;
- dit qu'en conséquence, le recours de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret est limité, concernant la société Villa en qualité de liqudiateur de la société SABAM, M. [Z] [X] et M.[W] [D] à la part excédant le taux de responsabilité mis à la charge de la société AEO,
- Déclaré le rapport d'expertise du Dr [O] opposable à la société AEO et à la société Groupama PVL ;
- Condamné in solidum, Messieurs [Z] [X], [W] [D], la société AEO, avec la garantie des assureurs SMABTP et Groupama PVL, à verser à la CPAM du Loiret la somme de 292.592, 92 euros, dans la limite pour chacun des proportions précitées ;
- fixé la créance de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret dans la liquidation judiciare des sociétés SABAM et HLC à la somme correspondant au prorata de leur part de responsabilité, et débouté la caisse primaire d'assurance maladie de ses demandes de condamnations à l'égard de ces sociétés en liquidation judiciiare,
- débouté la société AEO et la société Groupama PVL de l'ensemble de leurs demandes y compris celles à l'égard de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret,
- Condamné in solidum Messieurs [Z] [X] et [W] [D] et les sociétés AEO, SMABTP et Groupama PVL à régler à la CPAM, dans les proportions de responsabilité précitées, une somme de 1.066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion de l'article L376-1 du code de la sécurité sociale;
- fixé la créance de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret dans la liquidation judiciaire des sociétés SABAM et HLC à la somme correspondant au prorata de leur part de responsabilité pour cette indemnité forfaitaire de gestion, et déboute la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret de ses demandes de codnamantions à l'égard de ces sociétés en liquidation judiciaire,
- Condamné in solidum les sociétés AEO et Groupama PVL à payer les sommes de 6.000 euros à la société Villa es qualité de liquidateur de la société SABAM, de Monsieur [Z] [X] et de la SMABTP, 2.500 euros à Monsieur [W] [D] et 1.000 euros à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret,
- condamné in solidum la société AEO et la société Groupama PVL aux dépens.
CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
DONNE ACTE à la société AEO, à la société GROUPAMA PVL et à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret de ce qu'elles ne forment plus de demandes à l'encontre de [Z] [X] ;
FIXE à 50% la part de responsabilité de la société AEO dans l'accident dont M. [F] [U] a été victime le 8 mars 2000, la société SABAM, représentée par son liqquidateur judiciaire Maître [L], la société HLC, représentée par son liqquidateur judiciaire la société Saulnier [V] et associés et M. [W] [D] étant pour leur part coresponsables de l'accident à hauteur de 50% ;
DECLARE RECEVABLE la demande de la société AEO et de la société GROUPAMA PVL tendant à ce que le coût du capital représentatif de la rente majorée consécutif à la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur soit supporté par les sociétés HLC, SABAM, M. [D] et la SMABTP, à concurrence de leur part de responsabilité;
CONDAMNE en conséquence in solidum la SMABTP, en sa qualité d'assureur des sociétés SABAM et HLC, et M. [W] [D] à rembourser à la société GROUPAMA PVL, subrogée dans les droits de son assurée la société AEO, une somme de 33 964,59 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
FIXE la créance de la société GROUPAMA PVL, subrogée dans les droits de son assurée la société AEO, au passif de la liquidatation judiciaire des sociétés Sabam et HLC à la somme de 33 964,59 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
CONDAMNE in solidum la SMABTP et M. [W] [D] à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret une somme de 292 592,92 euros au titre des sommes versées par elle à M. [F] [U] ;
FIXE la créance de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret dans la liquidation judiciaire des sociétés SABAM et HLC à la somme de 292 592,92 euros ;
CONDAMNE in solidum la SMABTP et M. [W] [D] à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret une somme de 1098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de l'article L454-1 du code de la sécurité sociale ;
FIXE la créance de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret dans la liquidation judiciaire des sociétés SABAM et HLC à la somme de 1098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de l'article L454-1 du code de la sécurité sociale ;
CONDAMNE in solidum les sociétés AEO et Groupama PVL, la SMABTP et M. [W] [D] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
REJETTE les autres demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
DIT que chaque partie conservera la charge des dépens qu'elle a exposés en première instance et en appel. à l'exception de la caisse primaire d'assurance maladie du Loiret dont les dépens seront supportés in solidum par in solidum par les sociétés AEO et Groupama PVL, par la société SMABTP et par M. [D].
Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de Chambre et Madame Fatima HAJBI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT