La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/04/2022 | FRANCE | N°19/03225

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre sociale, 26 avril 2022, 19/03225


C O U R D ' A P P E L D ' O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE - A -

Section 1

PRUD'HOMMES

Exp +GROSSES le 26 AVRIL 2022 à

Me Anne BONNEVILLE

la SCP LEMAIGNEN - WLODYKA - DE GAULLIER





FCG





ARRÊT du : 26 AVRIL 2022



MINUTE N° : - 22



N° RG 19/03225 - N° Portalis DBVN-V-B7D-GBBP



DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE TOURS en date du 10 Septembre 2019 - Section : COMMERCE







APPELANT :


<

br>Monsieur [E] [Y]

né le 13 Mai 1985 à CHAMBRAY LES TOURS (37170)

14 rue de la Gare

37510 SAINT GENOUPH



représenté par Me Anne BONNEVILLE, avocat au barreau de TOURS



ET



INTIMÉE :



SA M...

C O U R D ' A P P E L D ' O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE - A -

Section 1

PRUD'HOMMES

Exp +GROSSES le 26 AVRIL 2022 à

Me Anne BONNEVILLE

la SCP LEMAIGNEN - WLODYKA - DE GAULLIER

FCG

ARRÊT du : 26 AVRIL 2022

MINUTE N° : - 22

N° RG 19/03225 - N° Portalis DBVN-V-B7D-GBBP

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE TOURS en date du 10 Septembre 2019 - Section : COMMERCE

APPELANT :

Monsieur [E] [Y]

né le 13 Mai 1985 à CHAMBRAY LES TOURS (37170)

14 rue de la Gare

37510 SAINT GENOUPH

représenté par Me Anne BONNEVILLE, avocat au barreau de TOURS

ET

INTIMÉE :

SA MAAF ASSURANCES venant aux droits du GIE EUROVAD, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social

CHABAN

79180 CHAURAY

représentée par Me Benoit DE GAULLIER DES BORDES de la SCP LEMAIGNEN - WLODYKA - DE GAULLIER, avocat au barreau D'ORLEANS,

ayant pour avocat plaidant Me Frédéric DANNEKER, avocat au barreau de PARIS

Ordonnance de clôture : 18 janvier 2022

Audience publique du 01 Février 2022 tenue par Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, Conseiller, et ce, en l'absence d'opposition des parties, assistée lors des débats de Mme Karine DUPONT, Greffier.

Après délibéré au cours duquel Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, Conseiller a rendu compte des débats à la Cour composée de :

Monsieur Alexandre DAVID, président de chambre, président de la collégialité,

Madame Laurence DUVALLET, présidente de chambre,

Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, conseiller

Puis le 26 Avril 2022, Monsieur Alexandre DAVID, président de Chambre, assisté de Mme Karine DUPONT, Greffier a rendu l'arrêt par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 25 février 2013, le GIE Eurovad a embauché M. [E] [Y] en qualité de conseiller en clientèle junior, statut employé de la convention collective nationale des sociétés d'assurances.

Le GIE Eurovad a pour activité la gestion de la plate-forme d'assistance téléphonique de la MAAF.

Au dernier état de la relation contractuelle, M. [E] [Y] a occupé le poste de conseiller en clientèle, classe 4C.

Par courrier du 10 octobre 2017, le GIE Eurovad a convoqué M. [E] [Y] à un entretien préalable à une éventuelle sanction pouvant aller jusqu'au licenciement, lui notifiant une mise à pied conservatoire.

M. [E] [Y] a demandé la réunion d'une commission de conciliation, laquelle s'est réunie le 15 novembre 2017. L'avis des représentants de l'employeur étant que la procédure apparaissait pleinement justifiée au contraire de l'avis des représentants du salarié qui demandaient de laisser une seconde chance à M. [Y].

Par courrier du 24 novembre 2017, le GIE Eurovad a notifié à M. [E] [Y] son licenciement pour « faute simple ».

Le 27 mars 2018, M. [E] [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Tours aux fins de contester son licenciement, le considérant comme abusif et afin de voir condamner le GIE Eurovad aux dépens et au paiement avec intérêts, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause, de dommages-intérêts pour défaut d'accompagnement outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le GIE Eurovad a demandé au conseil de prud'hommes de débouter M. [E] [Y] de ses demandes et de le condamner aux dépens et au paiement de la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 10 septembre 2019, auquel il est renvoyé pour un ample exposé du litige, le conseil de prud'hommes de Tours a :

- débouté M. [E] [Y] de ses demandes,

- débouté le GIE Eurovad de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [E] [Y] aux dépens.

Par déclaration adressée par voie électronique au greffe de la cour en date du 4 octobre 2019, M. [E] [Y] a relevé appel de cette décision.

A la suite de la dissolution du GIE Eurovad, la SA MAAF Assurances est venue aux droits du GIE Eurovad .

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions enregistrées au greffe le 9 décembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en application de l'article 455 du code de procédure civile, aux termes desquelles M. [E] [Y] si demande à la cour de :

Réformer le jugement dont appel :

Et statuant à nouveau :

Dire et juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

Condamner la société MAAF assurances venant aux droits du GIE EUROVAD à verser à M. [Y] les sommes suivantes :

Dommages-intérêts nets pour licenciement sans cause 15 000 €

Dommages-intérêts pour défaut d'accompagnement 5000 €

Intérêts de retard de droit

Fixer le salaire brut moyen mensuel de M. [Y] à 2548€ ;

Condamner la société MAAF ASSURANCES venant aux droits du GIE EUROVAD à verser à Pôle emploi les indemnités prévues par l'article 1235-4 du code du travail ;

Condamner 'la société EUROVAD venant aux droits du GIE EUROVAD' à verser à M. [Y] la somme de 4000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. »

Vu les dernières conclusions enregistrées au greffe le 10 septembre 2020, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en application de l'article 455 du code de procédure civile, aux termes desquelles la SA MAAF Assurances venant aux droits du GIE Eurovad demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et en conséquence de:

A titre principal :

Confirmer le jugement rendu entre les parties par le Conseil de prud'hommes de Tours

Dire et Juger le licenciement pour faute de Monsieur [E] [Y] fondé sur une cause réelle et sérieuse

Dire et Juger que les dispositions conventionnelles invoquées par Monsieur [Y] ont été respectées

Débouter M. [E] [Y] de l'ensemble de ses demandes et le condamner aux entiers dépens

A titre reconventionnel :

Condamner Monsieur [Y] à verser au GIE Eurovad, sur le fondement de l'article 700 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE, la somme de 2000 €. »

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 janvier 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement

Aux termes de l'article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

L'article L.1235-1 du code du travail dispose qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles; que si un doute subsiste, il profite au salarié.

Les motifs avancés doivent être précis et matériellement vérifiables, des motifs imprécis équivalent à une absence de motif.

La lettre de licenciement énonce, comme objet : « Notification de licenciement pour faute simple. ».

Elle fait suite à la convocation du 10 octobre 2017 à entretien préalable à un éventuel licenciement assorti d'une mise à pied à titre conservatoire ainsi motivée : « en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés ».

Par conséquent, conformément à ce qu'ont retenu les premiers juges, l'employeur s'est exclusivement placé sur le terrain disciplinaire. L'employeur n'a pas fondé la mesure de licenciement sur l'insuffisance professionnelle du salarié. Les moyens traitant de l'insuffisance professionnelle soumis à la cour par le salarié sont donc sans intérêt pour la solution du litige.

Dans la lettre de licenciement, qui fixe les termes du litige, il est fait grief à M. [E] [Y] :

1°) une insuffisance de moyens déployés pour atteindre le niveau de résultats attendus ;

2°) la persistance fautive du non-respect des règles internes d'entreprise.

Sur le premier grief

Concernant ce grief, la lettre de licenciement est ainsi rédigée : « Dans un premier temps, nous vous avons fait grief de votre refus d'exécuter l'objet même de votre contrat de travail. En effet, il ressort de vos résultats que vous ne remplissez pas l'obligation de proposer des devis à laquelle vous êtes tenu en tant que conseiller en clientèle. Nous pouvons illustrer ses propos par les résultats suivants :

' au mois d'août : vous avez reçu 86 appels de prospects et à l'issue de ces appels, vous n'avez proposé qu'un seul devis. Votre taux de proposition de « devis automobile » est à 1,16 % lorsque le centre est à 63,91 %.

' au mois de septembre : vous avez reçu 105 appels de prospects à l'issue desquelles vous avez réalisé huit devis. Votre taux de proposition de « devis automobile » est à 7,62 % alors que la moyenne du centre est à 49,71 %.

' Entre le 1er janvier et le 29 septembre 2017 : votre taux de proposition de « devis automobile » sur les appels reçus est de 10,24 % alors que la moyenne du centre est de 77,73 % et la moyenne nationale à 84,92 %.

En septembre 2017, vous avez répondu à 105 appels entrants prospects contre 56 en moyenne sur le groupe. Alors même que vous êtes entré en contact avec deux fois plus de prospects que le reste de vos collègues, votre taux de proposition de devis automobile et, au contraire, le plus bas du centre.

C'est d'autant plus regrettable qu'un rappel à l'ordre vous a été adressé en date du 3 juillet 2007. Nous attendions une réaction à un changement de votre part. Or, force est de constater que vous avez persisté dans cette attitude fautive consistant à vous exonérer de réaliser des propositions de devis au prospect, au mépris des directives et de vos objectifs commerciaux.»

Le rappel à l'ordre qui aurait été adressé le 3 juillet 2017 n'est pas versé aux débats. Il est produit un courriel du 30 juin 2017 adressé à M. [E] [Y] par sa responsable de groupe signalant une « déviance » de son activité puisqu'il passerait plus de temps que la moyenne des conseillers du centre en appels sortants et lui rappelant que la société ne faisait plus de transfert vers AIS pour la partie habitation.

La SA MAAF Assurances venant aux droits du GIE Eurovad procède par comparaison pour justifier du grief et elle produit ce qui serait le suivi des appels reçus par sept conseillers au mois d'août et septembre 2017, sans que ces chiffres puissent être comparés aux chiffres d'autres conseillers ainsi qu'à celui d'autres conseillers des autres groupes. L'employeur n'a pas entendu communiquer, comme cela lui avait été demandé, les feuilles de suivi mensuel des dix conseillers du groupe dont faisait partie M. [E] [Y].

En outre, il est reproché au salarié de ne pas proposer de devis. Le nombre d'appels ne peut en aucun cas justifier que le salarié n'ait pas proposé de devis. Il peut simplement être constaté que des devis n'ont pas été établis, ce qui peut trouver une explication dans le refus de la personne appelée de recevoir un devis.

En tout état de cause, il n'est pas justifié que le salarié n'établissait pas suffisament de devis faute de pouvoir faire une comparaison globale avec les autres salariés et pas seulement avec quelques uns d'entre eux.

Rien ne permet de conclure non plus que l'insuffisance de moyens déployés pour atteindre le niveau de résultats attendu, dont se prévaut l'employeur, présenterait un caractère fautif.

A cet égard, il ressort du procès-verbal de conciliation que les représentants de l'employeur considèrent : « j'ai la conviction que M. [Y] n'est pas, au plan professionnel, comme au plan comportemental, aux attendus de son poste et ce, malgré ses compétences ». Un représentant des salariés a indiqué : « on pousse à la production et on pousse à la quantité plutôt qu'à la qualité. C'est une victime de plus. » Un autre indiquait : « L'entreprise tend à la quantité plutôt qu'à la qualité. Nous mettons en avant l'inflexion du modèle. Aujourd'hui, JA est une victime collatérale. »

Ainsi les moyens déployés et le niveau de résultats obtenus qui apparaît à l'employeur insuffisant ne saurait être considéré comme procédant d'une volonté délibérée et ayant un caractère fautif.

Sur le second grief : persistance fautive du non-respect des règles internes d'entreprise

Ce grief se divise en trois reproches :

- non-respect des règles relatives à la souscription d'un contrat client,

- non-respect des règles relatives au remplissage d'écran de conclusions,

- non-respect du motif de contact prospect.

La SA MAAF Assurances venant aux droits du GIE Eurovad reproche à M. [E] [Y] d'avoir procédé à des ventes forcées qui se traduiraient par un taux élevé d'annulation de contrat et de contourner les processus de gestion électronique des documents afin que les clients ne reçoivent pas leurs conditions particulières.

L'employeur peut faire état de faits déjà sanctionnés à l'appui d'une nouvelle sanction quand il y a réitération des mêmes faits fautifs.

Le 16 janvier 2017, le GIE Eurovad a notifié à M. [E] [Y] un avertissement lui reprochant : « un non-respect des règles de souscription des contrats d'assurance, des règles déontologiques et des process établis par l'entreprise ». Elle a cité deux cas de personnes dénonçant la souscription d'un contrat qui n'aurait pas été souhaité dont elles n'auraient connu l'existence qu'à la réception de la facture. Il était indiqué dans ce courrier : « Le fait de souscrire des contrats d'assurance non voulus et à l'insu des clients, d'imprimer les conditions particulières de ces contrats d'assurance localement afin que les clients ne les reçoivent pas, démontre votre volonté délibérée de ne pas appliquer les règles d'entreprise. Ce comportement impacte et nuit gravement à l'image de marque de l'entreprise et engendre des insatisfactions clients. Lors de notre entretien du 10 courant, vous avez pris conscience des impacts qui pouvaient être engendrés par cette situation et pris l'engagement de respecter à l'avenir les règles en la matière. C'est la raison pour laquelle, au regard des échanges que nous avons eus, nous limitons la sanction à un avertissement écrit avec inscription à votre dossier pendant un an à compter de la date de réception de ce courrier. »

Il n'est pas justifié que M. [E] [Y] ait agi de la sorte sur incitation de son employeur. Au contraire, il apparaît que ce dernier, pour éviter ce type de man'uvres impactant négativement l'image de l'entreprise, suivait le taux d'annulation sans prise d'effet des contrats proposés par ses conseillers.

À l'appui de son argumentation, la SA MAAF Assurances venant aux droits du GIE Eurovad produit neuf « contacts clientèle » de février à septembre 2017, notant les messages de personnes recevant l'appel de cotisations concernant un contrat démarché par M. [E] [Y] et indiquant ne pas vouloir du contrat. Seule l'une indique ne pas avoir donné son accord. Un de ces appels de rétractation a été fait non par le sociétaire mais par la mère du sociétaire et les sept autres n'indiquent pas pourquoi ils ne veulent pas du contrat souscrit et si celui-ci leur a été imposé sans qu'ils aient donné leur accord. Une personne ayant souscrit un contrat à la suite d'un démarchage téléphonique pouvant faire usage de son droit de rétractation, ces «contacts clientèles» ne permettent pas d'établir l'existence d'un comportement fautif du salarié.

Si M. [E] [Y] imprimait les conditions particulières des contrats sur le site localement, il n'est pas justifié que cela soit afin de contourner les règles alors qu'aucune instruction n'est produite interdisant au salarié de procéder de la sorte.

Malgré la sanction antérieure non contestée, les pièces produites ne suffisent pas à établir le comportement fautif de M. [E] [Y] qui aurait procédé à des ventes sans le consentement du client. L'absence d'accord n'est pas démontrée par l'employeur, le démarchage se faisant par téléphone sans que soit matérialisé un document permettant d'établir la réalité de l'accord du client.

La SA MAAF Assurances venant aux droits du GIE Eurovad reproche également à M. [E] [Y] de ne pas suffisamment «tracer» ses contacts en entrant le numéro de client et/ou le nom du prospect et l'objet de son appel. Cette nécessité aurait été rappelée à M. [E] [Y] le 18 mai 2017 et le 12 juin 2017. Les seules pièces qui pourraient correspondre à ces rappels qui ne figurent pas expressément au dossier sont, la synthèse réalisée au 12 mai 2017 figurant en pièce 17 qui présente les chiffres de productivités directes et indirectes ainsi que des notes manuscrites et celles-ci en ce qui concerne l'activité sont « DMC OK, BO OK, vigilance divers 15 min Appels + écrans = ' » et celle réalisée le 9 juin adressé le 3 juillet : « écrans conclus RA mai 85. » Aucune conclusion ne peut être tirée des pièces produites concernant le grief reproché. Aucune norme de traçabilité n'est donnée et justifiée.

Le grief n'est pas retenu.

Il est enfin reproché à M. [E] [Y] de remplir pour 80 % des appels entrants le motif : « renseignement horaire agence ». M. [E] [Y] explique que c'est en raison de la conception du logiciel qui ne permet pas de se connecter immédiatement sur le dossier client sans être obligé de donner le motif de l'appel. Pour autant, il appartenait à M. [E] [Y] et d'engager sa conversation avec le client par une demande de motif de l'appel et ainsi de renseigner le logiciel immédiatement. Le grief est donc justifié.

Compte tenu de l'ancienneté du salarié, de ce qu'il est reconnu comme un bon commercial, de ce que le 30 mai 2017 sa responsable lui indiquait suite au retour de la double écoute du 26 mai 2017, qu'il convenait de retenir :« - points positifs : le ton utilisé se veut rassurant et tu traites la demande de ton client de A à Z. Tu rassures tu reformules avec tes clients, qui valorise les clients et leurs contrats. - Axes de travail : tu n'abordes pas le sujet du digital sur tous les appels qui pourraient le justifier. Et tu ne vas pas chercher à mesurer à chaud la satisfaction de tes clients, ni le niveau de clarté des informations délivrées. À toi de prendre les réflexes STP. », de ce qu'aucune remarque n'avait été faite au salarié concernant l'importance de bien renseigner le motif de l'appel, cette seule faute ne saurait fonder la mesure de licenciement.

Par voie d'infirmation du jugement, il y a lieu de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande de dommages-intérêts pour défaut d'accompagnement

M. [E] [Y] reproche à son employeur de ne pas avoir mis en 'uvre un plan d'accompagnement prévu « pour un collaborateur qui n'est pas aux attendus ». Il n'est pas justifié que M. [E] [Y] n'accomplissait pas la prestation de travail attendue de lui et aucune insuffisance professionnelle ne lui a été reprochée.

M. [E] [Y] a reçu de multiples formations, un suivi par sa hiérarchie et une double écoute de ses entretiens téléphoniques dont l'un est cité ci-dessus à son profit.

Il n'entrait pas dans le personnel nécessitant un accompagnement.

Le salarié ne justifie pas du préjudice qu'il invoque.

Il est débouté de sa demande à ce titre par voie de confirmation de jugement.

Sur les conséquences pécuniaires de la rupture

Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par cet article.

M. [E] [Y] a acquis une ancienneté de quatre années complètes au moment de son licenciement dans la société employant habituellement au moins onze salariés. Le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est comprise entre trois et cinq mois de salaire.

Compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [E] [Y], de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à retrouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'elles résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer la somme de 12 000 euros brut à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les intérêts de retard

La créance de nature indemnitaire portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Sur l'article L. 1235-4 du code du travail

En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, dans sa version applicable à l'espèce, il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à M. [E] [Y] du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Les dépens de première instance et d'appel sont à la charge de l'employeur, partie succombante.

Il paraît inéquitable de laisser à la charge du salarié l'intégralité des sommes avancées par lui et non comprises dans les dépens. Il lui sera alloué la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles. L'employeur est débouté de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a débouté M. [E] [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour absence d'accompagnement ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

Dit que le licenciement de M. [E] [Y] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la SA MAAF Assurances venant aux droits du GIE Eurovad à payer à M. [E] [Y] la somme de 12 000 € brut à titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt ;

Ordonne le remboursement par la SA MAAF Assurances venant aux droits du GIE Eurovad à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à M. [E] [Y] du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;

Condamne la SA MAAF Assurances venant aux droits du GIE Eurovad à payer à M. [E] [Y] la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande à ce titre ;

Condamne la SA MAAF Assurances venant aux droits du GIE Eurovad aux dépens de première instance et d'appel.

Et le présent arrêt a été signé par le président de chambre et par le greffier

Karine DUPONT Alexandre DAVID


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/03225
Date de la décision : 26/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-26;19.03225 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award