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26/04/2022 | FRANCE | N°19/02048

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre sociale, 26 avril 2022, 19/02048


C O U R D ' A P P E L D ' O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE - A -

Section 1

PRUD'HOMMES

Exp +GROSSES le 26 AVRIL 2022 à

la SELARL 2BMP

la SAS ENVERGURE AVOCATS





AD



ARRÊT du : 26 AVRIL 2022



MINUTE N° : - 22



N° RG 19/02048 - N° Portalis DBVN-V-B7D-F6UW



DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE TOURS en date du 15 Mai 2019 - Section : INDUSTRIE







APPELANTE :



Madame [Z] [G] épouse [O]<

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née le 19 Juin 1987 à ST GERMAIN EN LAYE (78100)

Le Janay

37340 CLERE LES PINS



représentée par Me Louis PALHETA de la SELARL 2BMP, avocat au barreau de TOURS



ET



INTIMÉE :



SAS JERO...

C O U R D ' A P P E L D ' O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE - A -

Section 1

PRUD'HOMMES

Exp +GROSSES le 26 AVRIL 2022 à

la SELARL 2BMP

la SAS ENVERGURE AVOCATS

AD

ARRÊT du : 26 AVRIL 2022

MINUTE N° : - 22

N° RG 19/02048 - N° Portalis DBVN-V-B7D-F6UW

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE TOURS en date du 15 Mai 2019 - Section : INDUSTRIE

APPELANTE :

Madame [Z] [G] épouse [O]

née le 19 Juin 1987 à ST GERMAIN EN LAYE (78100)

Le Janay

37340 CLERE LES PINS

représentée par Me Louis PALHETA de la SELARL 2BMP, avocat au barreau de TOURS

ET

INTIMÉE :

SAS JEROME, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social

3 Rue Yves Chauvin CS 10520

37510 BALLAN MIRE

représentée par Me Pierre GEORGET de la SAS ENVERGURE AVOCATS, avocat au barreau de TOURS

Ordonnance de clôture : 4 janvier 2022

Audience publique du 22 Février 2022 tenue par M. Alexandre DAVID, Président de chambre, et ce, en l'absence d'opposition des parties, assisté lors des débats de Mme Karine DUPONT, Greffier.

Après délibéré au cours duquel M. Alexandre DAVID, Président de chambre a rendu compte des débats à la Cour composée de :

Monsieur Alexandre DAVID, président de chambre, président de la collégialité,

Madame Laurence DUVALLET, présidente de chambre,

Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, conseiller

Puis le 26 Avril 2022, Monsieur Alexandre DAVID, président de Chambre, assisté de Mme Karine DUPONT, Greffier a rendu l'arrêt par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

La SAS JEROME BTP, inscrite au registre du commerce de Tours, est installée à Ballan-Miré, en Indre-et-Loire. Elle exerce son activité dans le domaine du bâtiment et des travaux publics.

Elle a engagé, dans un premier temps, Mme [Z] [G], dans le cadre d'un contrat de professionnalisation, pour occuper les fonctions d'animatrice qualité sécurité environnement.

Les parties ont conclu le 31 octobre 2008 un contrat à durée indéterminée à effet du lendemain, la salariée étant engagée en qualité d'animatrice qualité sécurité environnement, pour un salaire mensuel de 1600 € et 151 heures 67 par mois.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale des employés, techniciens et agents de maîtrise des travaux publics du 12 juillet 2006.

Détentrice d'un brevet de technicien supérieur, la salariée a suivi une formation d'animateur QSE, à l'issue de laquelle elle a reçu, le 16 décembre 2008, une certification professionnelle, ce dont l'employeur a été informé le 23 avril 2009.

Le salaire initialement convenu correspondait au minimum conventionnel pour les salariés de niveau C.

Le 27 février 2016, la salariée a écrit à l'employeur qu'elle satisfaisait aux quatre critères conventionnels lui permettant de bénéficier du niveau F et ce, dès son embauche.

Le 16 mars 2016, la société a réfuté sa thèse, tout en l'assurant que les augmentations de salaire prévues, à son bénéfice, en février, septembre 2016 et mai 2017 seraient mises en 'uvre, dès le 1er août 2016.

Mme [G] a sollicité le 17 juin 2017 une rupture conventionnelle de son contrat de travail.

Le 26 juin 2017, elle a démissionné.

Le 22 juin 2018, Mme [Z] [G] a saisi le conseil de prud'hommes de Tours aux fins de se voir reconnaître la classification dont elle estime relever et d'obtenir diverses sommes en conséquence.

Elle a ainsi sollicité la condamnation de l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

-7254,75 € de dommages-intérêts au titre de l'impact sur sa retraite et de son évolution de carrière,

-659,52 € d'indemnité de fractionnement pour six jours,

-15'677,50 € de rappel de salaires du 1er octobre 2014 au 26 août 2017 avec requalification de son coefficient en F ETAM,

-1567,80 € de congés payés afférents,

-2000 € de prime d'intéressement et de participation,

-1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'employeur a conclu au rejet des prétentions adverses et à la condamnation de Mme [G] à lui payer la somme 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 15 mai 2019, le conseil de prud'hommes de Tours, statuant en sa formation de départage, a :

Condamné la SAS Jérôme BTP à payer à Mme [Z] [G] épouse [O] la somme de 609,22 euros brut à titre d'indemnité de congés payés de fractionnement ;

Débouté Mme [G] de l'ensemble de ses autres demandes ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que chaque partie conserva la charge des dépens qu'elle aura engagés, à l'exception des éventuels frais d'exécution du jugement, qui seront à la charge de la SAS Jérôme BTP.

Mme [Z] [G] a interjeté appel de cette décision le 14 juin 2019.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions remises au greffe par voie électronique le 12 novembre 2021 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles Mme [Z] [G] épouse [O] demande à la cour de :

Dire et juger Mme [Z] [G] épouse [O] recevable et bien fondée en son appel.

En conséquence,

Réformer le jugement entreprise, et condamner pour les motif sus évoqués, la société Jérôme BTP à devoir lui régler :

Rappel de salaire sur repositionnement : 10 739, 23 euros ;

Congés payés afférents ; 1073, 92 euros ;

Par impossible ordonner la remise du certificat de congés payés afférent sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

Congés payés de fractionnement (6 jours) : confirmer le jugement de première instance et en conséquence condamner la SAS Jérôme BTP sauf à porter la somme due à 659,52 euros bruts à ce titre ;

Dommages-intérêts en raison de l'impact sur la carrière de la salariée :

5 000,00 euros ;

Prime d'intéressement et participation : 2 000,00 euros ;

Ordonner par ailleurs à la SAS Jérôme BTP d'avoir à remettre à Mme [Z] [G] :

Un bulletin de salaire ;

Une attestation Pôle emploi tout conforme à l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document ;

Condamner enfin la société Jérôme BTP à devoir lui régler la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

La condamner également à tous les dépens.

S'agissant du repositionnement conventionnel, la salariée soutient que le niveau F dépend de quatre critères :

- le contenu de l'activité et la responsabilité dans le travail,

- l'autonomie, l'initiative, l'adaptation et la capacité à recevoir délégation,

- la technicité et l'expertise,

- les compétences acquises par expérience ou formation.

Sur le premier des critères, elle fait valoir qu'elle exerçait une autorité légitime sur un ensemble de salariés affectés à un projet et qu'elle réalisait des contrôles, et à cet effet, elle prend dans ses conclusions divers exemples qui illustrent son propos.

Elle souligne que la société reconnaît dans ses écritures qu'un salarié, titulaire d'un brevet de technicien supérieur, doit être intégré au niveau E au terme de 18 mois maximum, soit dès avril 2009, alors qu'elle a attendu cette intégration jusqu'en août 2016.

Il en résulte qu'après huit ans de présence d'expérience, elle avait acquis une légitimité à la position F.

Sur le deuxième critère, elle souligne qu'elle cherchait au quotidien à résoudre les problèmes qui lui étaient soumis et pour lesquels les méthodes n'étaient pas pré- établies.

Sur le troisième critère, la transmission des connaissances, elle note qu'elle assurait des formations internes pour transmettre aux salariés les connaissances minimales, ayant même eu à encadrer un stagiaire de l'IUT de Niort, pendant une dizaine de semaines, au terme desquelles il a obtenu son diplôme.

Elle a dispensé également des formations en habilitation électrique pour intervenir sur des postes à haute tension.

Sur le critère de l'autonomie, l'initiative, l'adaptation et la capacité à recevoir délégation, elle se réfère à sa fiche de fonctions, qui lui permet d'affirmer qu'elle répond à l'ensemble de ces critères.

Par exemple, lors du chantier du tramway à Tours, elle a été amenée à échanger avec des interlocuteurs extérieurs comme la médecine du travail, la CARSAT... De fait, elle a participé à la réalisation d'environ 120 chantiers par an.

Elle insiste sur la technicité de l'expertise ,au point qu'elle a eu à piloter des opérations de retrait d'amiante.

Quant aux compétences acquises par l'expérience sur la formation, elle rappelle l'existence de son brevet de technicien supérieur, complété par une année de spécialisation QSE, en sorte qu'elle aurait dû bénéficier du coefficient F après une période maximale de 18 mois.

Du 1er octobre 2014 au 28 août 2017, le manque-à-gagner s'élève pour elle à 10'739,23 € et 1073,92 € de congés payés afférents ou, à défaut de congés payés ,la remise d'un certificat de congés payés.

Elle évoque également le fractionnement de ses congés payés, ce qui doit générer des jours de congés payés supplémentaires, conformément aux dispositions de l'article L. 3143'23 du code du travail.

Les sommes liées à l'intéressement et à la participation qu'elle a perçues sur la base de son salaire étant inférieures à celles auxquelles elle pouvait prétendre, elle revendique, pour cette carence, une indemnisation spécifique de 2000 € de dommages-intérêts.

Cette demande doit être considérée comme recevable, en la forme, comme étant accessoire à la demande de paiement de l'intéressement ou de la participation, revendiquée devant le conseil de prud'hommes, sur le fondement des dispositions des articles 564 à 567 du code de procédure civile.

Enfin, elle invoque un préjudice sur l'impact de sa carrière et sur son salaire ultérieur, qui doit être compensé par une somme arbitrée à 5 000 €.

Vu les dernières conclusions remises au greffe par voie électronique le 16 novembre 2021 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la SAS Jérôme BTP demande à la cour de :

Confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déclarer la demande de dommages intérêts au titre de l'intéressement et de la participation irrecevable comme étant nouvelle en cause d'appel et subsidiairement mal fondée ;

Condamner Mme [Z] [O] à payer à la société JEROME BTP une indemnité de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner Mme [Z] [O] aux entiers dépens.

S'agissant de la demande de requalification, l'employeur soutient que la détention d'un diplôme ne peut, à lui seul, suffire à déterminer la qualification applicable au salarié.

Il dénie lui avoir promis une telle promotion, alors qu'elle ne remplissait pas l'intégralité des quatre critères exigés, cumulatifs.

Quant au premier, qui concerne la réalisation de travaux d'exécution de contrôle d'organisation d'études de gestion' la société soutient que Mme [G] n'a jamais exercé la moindre commandement sur qui que ce soit, ayant eu seulement autorité pour animer les actions QSE. En l'espèce, seul, le conducteur de travaux avait une autorité effective sur ses subordonnés.

La salariée était cantonnée au rôle d'appui et de soutien, sans pouvoir coercitif et sans travaux de gestion ou d'action commerciale.

La transmission des connaissances n'est exercée, en huit ans, que pendant quatre mois auprès d'un stagiaire, en sorte qu'elle est restée anecdotique.

Sur le deuxième critère, qui concernait l'autonomie, les quelques contacts ponctuels avec les interlocuteurs externes à l'entreprise ne peuvent suffire à justifier l'application du coefficient F, qui concerne la conduite avec les interlocuteurs extérieurs, et non plus l'échange avec eux.

Le troisième critère concerne la haute technicité dans sa spécialité, qui ne saurait être démontrée en l'espèce.

Le quatrième critère a trait aux compétences acquises par expérience ou formation : le niveau correspond au niveau d'accueil des salariés titulaires de diplômes brevet de technicien supérieur, diplôme universitaire de technologie ou diplôme DEUG. En réalité, c'est au bout de 18 mois que le salarié débutant doit intégrer le niveau, qui lui a été appliqué d'emblée.

Ces quatre critères s'avèrent cumulatifs et la salariée ne démontre pas pouvoir tous les remplir.

Subsidiairement, sur les congés payés afférents, dès lors que les services de congés est assuré par les caisses constituées à cet effet, et que la société démontre y être affiliée et à jour de ses cotisations, la salariée ne saurait être reçue en sa demande à cet égard et devra s'adresser à la caisse des congés payés.

S'agissant de la demande de dommages-intérêts complémentaires de 5000 €, l'employeur la considère comme infondée, dès lors qu'elle tend à contourner la prescription qui s'applique en matière de salaires. En outre, la salariée ne démontre par aucune pièce le préjudice qu'elle aurait subi à cet égard.

Enfin, la demande de 2000 € au titre de l'intéressement et de la participation n'a pas été formée en première instance et s'avère irrecevable en cause d'appel sur le fondement de l'article 566 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 4 janvier 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La notification du jugement est intervenue le 17 mai 2019, en sorte que l'appel principal de Mme [G], régularisé au greffe de cette cour le 14 juin 2019, dans le délai légal d'un mois, s'avère recevable en la forme.

Sur la demande de reclassification au coefficient F

La classification des emplois relevant de la convention collective nationale des employés, techniciens et agents de maîtrise des travaux publics du 12 juillet 2006 est effectuée selon quatre critères classants.

Ces critères classants, d'égale importance entre eux, sont :

-le contenu de l'activité, la responsabilité dans l'organisation du travail,

-l'autonomie, l'initiative, l'adaptation, la capacité à recevoir délégation,

-la technicité, l'expertise,

-les compétences acquises par expérience ou formation.

L'article 1 de l'annexe V de la convention collective relative à la classification des emplois prévoit : « la grille de classification des emplois des ETAM des travaux publics comprend huit niveaux de classement. Ces niveaux sont définis par quatre critères d'égale importance qui s'ajoutent les uns aux autres ».

Ainsi, contrairement ce que soutient Mme [G], il convient de prendre en compte les quatre critères, de manière cumulative, pour déterminer si elle peut prétendre à être positionnée au niveau F.

L'article 4 souligne qu'il convient de porter une attention particulière à l'expérience, qui prime sur les diplômes initiaux mis en 'uvre dans l'emploi.

En l'espèce, Mme [G], née en 1987, a obtenu le brevet de technicien supérieur agricole, d'un niveau de deux années après le baccalauréat, en gestion et protection de la nature, spécialité animation nature, à Montpellier le 21 novembre 2007, et le 16 décembre 2008, la certification professionnelle animateur qualité sécurité environnement, par un jury national, alors qu'elle était déjà engagée dans la société depuis un mois et demi.

A) Sur le contenu de l'activité et la responsabilité dans l'organisation du travail

A1. Sur le contenu de l'activité

La différence entre les niveaux E et F de la classification porte sur la technicité des projets confiés au salarié.

En l'espèce, le 10 mai 2016, le nouveau président de la société a adressé à tous les salariés un « engagement de la direction en matière de politique qualité et environnement », énonçant « qu'il s'agissait de donner du sens, de l'intelligence à notre travail et à notre fonction. [C] [L] et [Z] [G] ont autorité pour animer notre gestion qualité et environnement » (pièce n° 57 du dossier de la salariée).

Le 16 mars 2016, le directeur général a répondu à Mme [Z] [G] : « votre fonction transversale vous amène à prodiguer des conseils, des recommandations relatives à la qualité, la sécurité l'environnement' » (pièce n° 7 du dossier de la salariée).

La fiche de fonction de l'animateur QSE, mise à jour par la société le 17 août 2009 (pièce n° 17 du dossier de la salariée), décrit les actions à mettre en 'uvre par l'animateur au titre :

- de l'autorité et de la responsabilité :

. Il assure que le système de management est défini, mis en 'uvre et entretenu conformément aux référentiels ISO 9001 et 14'001,

. Il initie, conçoit, améliore et vérifie l'efficacité du système de management de la qualité et de l'environnement et rend compte à la direction,

. Il veille à l'intégration maximale des démarches QSE pour faciliter l'adhésion de tous,

. Il met en place des indicateurs et exploite les résultats,

. Il participe à la gestion des anomalies et réclamations des clients et à la mesure de la satisfaction des clients,

. Il met en place et gère le système documentaire,

. Il participe à la gestion des actions de progrès,

. Il anime les groupes de travail et définit les objectifs,

. Il mobilise, sensibilise l'ensemble du personnel aux démarches de progrès,

. Il organise, programme et conduit les audits internes et en analyse les résultats,

. Il a en charge la veille réglementaire en QSE,

. Il prépare les revues de direction : établit l'ordre du jour, mobilise les processus pour cette occasion, pilote le déroulement de la réunion, établit le comptes-rendus qu'il soumet au président,

. Est l'invité permanent du CHSCT.

- Comportements professionnels : il doit appliquer six comportements professionnels attendus dans l'entreprise :

. Le sens clients : informations et conseils auprès des clients internes, sait promouvoir les actions d'amélioration continue et les bénéfices qui en découlent,

. Les objectifs généraux : remplit sa mission dans un souci d'efficacité de productivité. Volonté de tenir les plannings,

. Respect des règles : du règlement intérieur et des consignes liées à la protection de l'environnement,

. Management : implique ses collaborateurs dans des actions de progrès,

. Autonomie et initiative : développe son autonomie et sa polyvalence, cherche à connaître et à maîtriser les domaines et les limites des outils qu'il utilise habituellement,

. Souplesse et polyvalence : s'adapte aux imprévus et changements de situation. Anticipe et assimile les évolutions de son métier et de l'entreprise.

-Il est à la fois acteur et porteur de la politique qualité à l'entreprise, attentif aux dysfonctionnements internes et externes et propose des axes d'amélioration, tout en assurant la confidentialité des documents qualité.

-Liaisons fonctionnelles : est en relation avec l'ensemble du personnel, en interne et en externe, avec les consultants et les auditeurs qualité.

-Suppléance : du directeur administratif et financier.

Niveau initial requis : bac plus 2, connaissances de l' entreprise quant aux hommes, aux moyens, à la structure et à l'organisation, et connaissance des normes ISO 9001 et ISO 14001.

Mme [G] dispose, comme l'expose cette fiche de fonction, de l'autorité nécessaire pour animer la branche QSE de l'entreprise. Elle est ainsi investie d'un pouvoir de commandement sur un ensemble de salariés aux fins de réalisation de ce projet.

A titre d'exemples, la salariée démontre :

-en pièce 65, sur le chantier de la préfecture, qu'elle a enjoint aux conducteurs des travaux de ne pas continuer à utiliser un échafaudage qui ne présentait pas tous les éléments de sécurité,

-et en pièce 66 , qu'elle a fait immobiliser un chariot élévateur utilisé par un magasinier, en raison de sa dangerosité.

Aussi un conducteur des travaux, M. [I] atteste-t-il : « elle avait autant de pouvoir et d'autorité qu'un conducteur de travaux ou un chargé d'affaires au sein de l'entreprise. Elle pouvait stopper un chantier en cas de manquement à toute règle de sécurité ou consigne de l'entreprise ».

Les contrôles de chantier constituaient la base de la tâche de la salariée avec la responsabilité qui en découlait. Comme elle était la seule avec son supérieur hiérarchique, M. [L] à exercer cette fonction, sa compétence se déployait donc sur les projets les plus techniques.

A2. Sur la résolution des problèmes avec le choix de la solution la plus adaptée

Les salariés relevant de la classification E doivent être en mesure de résoudre des problèmes à partir de méthodes et techniques préétablies, tandis que les salariés du niveau F doivent être en mesure de résoudre les problèmes en choisissant « la solution la plus adaptée par référence à des méthodes, procédés ou moyens habituellement mis en 'uvre dans l'entreprise ».

La fiche de fonction précise que l'animateur QSE « s'adapte aux imprévus et changements de situation ».

L'ampleur des responsabilités effectivement exercées par Mme [G] impliquait la résolution de problèmes par le choix de la solution la plus adaptée.

A3. Sur la transmission des connaissances

Le niveau E implique que le salarié « peut transmettre ses connaissances », alors que le niveau F suppose que le salarié « transmet ses connaissances ».

La fiche de fonction prévoit que l'animateur QSE a pour missions « l'intégration maximale des démarches QSE pour faciliter l'adhésion de tous », l'animation des groupes de travail ainsi que la mobilisation et la sensibilisation de l'ensemble du personnel aux démarches de progrès.

Mme [G] transmettait donc ses connaissances en la matière à l'ensemble du personnel.

En outre, par sa pièce 67, elle démontre avoir parrainé un stagiaire en diplôme universitaire de technologie HSE pendant quatre mois, qui a réussi son diplôme.

B) Sur le critère d'autonomie, initiative, adaptation et capacité à recevoir délégation

Le salarié positionné au niveau F agit dans le cadre d'instructions permanentes et/ou de délégations.

En raison de ses activités transversales, comme noté dans la fiche de poste, Mme [G] n'évoluait pas dans un domaine strictement défini, contrairement à un salarié positionné au niveau E, puisqu'elle pouvait même suppléer le directeur administratif et financier. Elle devait prendre des initiatives et savoir faire passer l'information.

La salariée avait un rôle d'animation en matière de QSE et conduisait des relations ponctuelles avec les consultants et les auditeurs qualité. Elle était en capacité de représenter l'entreprise dans le cadre de ses missions QSE.

Ainsi, par sa pièce 68, Mme [G] démontre avoir participé à un contrôle externe « sondages géotechniques» le 6 février 2012 sur divers tronçons concernant des chantiers des massifs de la LAC.

Elle prenait part aux réunions de chantier de Cofiroute, péage de Monnaie' de la ligne TGV Tours- Bordeaux, en sorte qu'elle se trouvait en contact avec des organismes comme la CARSAT, la DIRECCTE, la CCI, l'AFNOR, en particulier, pour le renouvellement des certifications de l'entreprise. Elle a participé à l'adaptation des règles de sécurité.

C) Sur la technicité et l'expertise

Le niveau F requiert du salarié :

-des connaissances structurées des diverses techniques et savoir-faire de sa spécialité professionnelle et de leurs applications,

-une haute technicité dans sa spécialité et

-qu'il se tienne à jour dans sa spécialité.

Aux termes de huit ans d'expérience dans la société, Mme [G] s'est nécessairement tenue à jour en raison des évolutions réglementaires de sa matière et a souvent été sollicitée par les chefs de chantier pour ses expertises techniques comme en atteste M. [H] [E], ancien salarié, dans la pièce 60. Elle démontre ainsi avoir des connaissances structurées et faire preuve de la haute technicité nécessitée par ses fonctions d'animateur QSE.

La salariée démontre son expertise par son action sur la carrière de Saint-Laurent exploitée par la société Sables de Saint-Laurent (pièce 69). Elle a dû concevoir les documents pour cette carrière, effectuer les contrôles exigés pour une installation classée pour l'environnement et assister aux réunions sécurité organisées par l'Unicem, fédération interprofessionnelle rassemblant les producteurs de matériaux minéraux.

Les réglementations applicables sur une carrière s'avèrent différentes de celles utilisées sur un chantier, et requièrent une haute technicité.

Lors d'un contrôle de la direction régionale de l'environnement, elle était présente pour le contrôle de cette carrière et elle assurait, seule, la visite de contrôle de la Prévencem, organisme de contrôle pour les carrières.

D) Sur les compétence acquise par expérience ou formation

Un salarié de niveau F doit posséder l'expérience acquise en niveau E ou une formation générale technique ou professionnelle.

Il est opportun de rappeler la certification professionnelle d'animateur qualité sécurité environnement obtenue le 16 décembre 2008 par la salariée, parallèlement à son emploi et l'expérience acquise au cours de ces huit ans.

En outre, l'annexe classification de la convention collective, en son article 2 relatif à la prise en compte des diplômes, précise que le niveau de classement E correspond à un diplôme BTS-DUT et qu'au terme d'une période d'accueil et d'intégration de 18 mois maximum la situation du salarié devra être examinée.

La salariée est entrée dans la société avec son brevet de technicien supérieur et au niveau de classement E comme l'affirme lui-même l'employeur. Au terme de huit années demi de service, ses multiples demandes visant à convaincre la société de la classer au niveau F n'ont pas abouti.

Il s'ensuit que Mme [G] démontre qu'elle remplissait les conditions requises pour être classée au niveau F de la classification conventionnelle. Il y a lieu d'infirmer le jugement sur ce point.

Sur les demandes pécuniaires

A) Sur la demande de rappel de salaire

Tenant compte des règles relatives à la prescription des demandes de rappel de salaire, Mme [G] sollicite un rappel de salaire sur la base des minima conventionnels applicables aux salariés classés au niveau F pour la période du 1er octobre 2014 au 28 août 2017.

Cette demande est fondée en son principe. Il y a lieu de condamner la SAS JEROME BTP au paiement de la somme de 10'739,23 € à ce titre.

Cependant, la demande concernant les congés payés afférents au rappel de salaire sera rejetée. En effet, l'employeur, assuré, par la caisse des congés payés CNETP (pièce 16) auprès de laquelle il était affilié et à jour de ses cotisations ne peut être tenu au paiement d'une indemnité de congés payés dont est redevable la caisse.

Il y a lieu d'ordonner à la SAS JEROME BTP de remettre à Mme [G] un ou plusieurs bulletins de paie, un certificat de congés payés et une attestation Pôle emploi conformes à la présente décision dans un délai d'un mois à compter de sa signification. Il n'y a pas lieu d'assortir cette mesure d'une astreinte.

B) Sur la demande au titre du fractionnement des congés

L'article L. 3141-23 du code du travail dispose que deux jours ouvrables de congés complémentaires sont attribués, lorsque le nombre de jours de congés, pris en dehors de la période régulière, est, au moins, égal à six.

Pour les raisons précédemment exposées, l'employeur n'est pas redevable des indemnités de congés payés dont la charge incombe à la caisse de congés payés.

Cependant, la société ne conteste pas le principe de la somme accordée, à ce titre, en première instance, puisqu'elle conclut « à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions ».

L'appel ne pouvant aboutir à aggraver la situation de l'appelant, il y a lieu de confirmer le jugement de ce chef.

C) Sur la demande de dommages-intérêts en raison de l'impact sur la carrière

Mme [G] sollicite la réparation du préjudice subi du fait de l'absence d'évolution dans l'entreprise. Elle invoque un impact sur son salaire et sur sa carrière.

L'existence du préjudice qu'elle invoque n'est pas établie. Il y a lieu, par voie de confirmation du jugement de la débouter de ce chef de demande.

D) Sur la demande au titre de l'intéressement et la participation

L'article 566 du code de procédure civile dispose que les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, sauf à ce qu'elles soient l'accessoire, la conséquence ou le complément de celles soumises aux premiers juges.

En première instance, Mme [G] a sollicité 2000 € au titre de la prime d'intéressement et de participation. Devant la cour d'appel, elle ne reprend pas cette prétention mais forme une demande de 2000 € à titre de dommages-intérêts, en relevant que, pour les années 2014 à 2018, elle perçu un montant cumulé de 1675,59 € au titre de l'intéressement et de la participation.

Cette demande nouvelle est l'accessoire de la demande de rappel de prime formée devant le conseil de prud'hommes. Elles est donc recevable.

Il y a lieu d'évaluer à 150 € le préjudice subi de ce chef et de condamner l'employeur au paiement de cette somme.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

Il y a lieu de condamner la SAS JEROME BTP aux dépens de première instance et d'appel.

Il y a lieu de condamner la SAS JEROME BTP à payer à Mme [G] la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de la débouter de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement rendu entre les parties par le conseil de prud'hommes de Tours du 15 mai 2019, sauf en ce qu'il a condamné la SAS JEROME BTP à payer à Mme [Z] [G] épouse [O] la somme de 609,22 € brut au titre des congés payés de fractionnement et en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande au titre des congés payés afférents au rappel de salaire et de sa demande de dommages-intérêts au titre de l'impact sur la retraite et l'évolution de carrière ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Condamne la SAS JEROME BTP à payer à Mme [Z] [G] épouse [O] la somme de 10'739,23 € à titre de rappel de salaire ;

Déclare recevable la demande de dommages intérêts au titre de l'intéressement et de la participation formée par Mme [Z] [G] épouse [O] ;

Condamne la SAS JEROME BTP à payer à Mme [Z] [G] épouse [O] la somme de 150 € à titre de dommages-intérêts réparant le préjudice subi sur l'intéressement et la participation ;

Ordonne à la SAS JEROME BTP de remettre à Mme [Z] [G] épouse [O] un ou plusieurs bulletins de paie, un certificat de congés payés et une attestation Pôle emploi conformes à la présente décision dans un délai d'un mois à compter de sa signification, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette mesure d'une astreinte ;

Déboute Mme [Z] [G] épouse [O] du surplus de ses prétentions ;

Condamne la SAS JEROME BTP à payer à Mme [Z] [G] épouse [O] la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande à ce titre ;

Condamne la SAS JEROME BTP aux dépens de première instance et d'appel.

Et le présent arrêt a été signé par le président de chambre et par le greffier

Karine DUPONT Alexandre DAVID


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/02048
Date de la décision : 26/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-26;19.02048 ?
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