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26/04/2022 | FRANCE | N°19/00623

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre sociale, 26 avril 2022, 19/00623


C O U R D ' A P P E L D ' O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE - A -

Section 1

PRUD'HOMMES

Exp +GROSSES le 26 AVRIL 2022 à

la SELARL AVOCAT LOIRE CONSEIL

Me Fabrice BELGHOUL







FCG



ARRÊT du : 26 AVRIL 2022



MINUTE N° : - 22



N° RG 19/00623 - N° Portalis DBVN-V-B7D-F323



DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ORLEANS en date du 10 Janvier 2019 - Section : ACTIVITÉS DIVERSES







APPELANT :



Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS) intervenant par l'UNEDIC - CGEA D'ILE DE FRANCE EST

164-174 rue Victor Hugo

92309 LEVALLOIS PERRET



représent...

C O U R D ' A P P E L D ' O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE - A -

Section 1

PRUD'HOMMES

Exp +GROSSES le 26 AVRIL 2022 à

la SELARL AVOCAT LOIRE CONSEIL

Me Fabrice BELGHOUL

FCG

ARRÊT du : 26 AVRIL 2022

MINUTE N° : - 22

N° RG 19/00623 - N° Portalis DBVN-V-B7D-F323

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ORLEANS en date du 10 Janvier 2019 - Section : ACTIVITÉS DIVERSES

APPELANT :

Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS) intervenant par l'UNEDIC - CGEA D'ILE DE FRANCE EST

164-174 rue Victor Hugo

92309 LEVALLOIS PERRET

représenté par Me Eric GRASSIN de la SELARL AVOCAT LOIRE CONSEIL, avocat au barreau d'ORLEANS

ET

INTIMÉS :

Madame [W] [H] épouse [U]

née le 22 Décembre 1992 à Orléans

88 allée du gamay

45560 SAINT DENIS EN VAL

représentée par Me Fabrice BELGHOUL, avocat au barreau d'ORLEANS

S.E.L.A.F.A. MJA, prise en la personne de Me [B] [M], ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL DIRECT'COM désigné par ordonnance du tribunal de commerce de Bobigny en date du 28 novembre 2017

puis de mandataire ad litem, désigné par ordonnance du tribunal de commerce de Bobigny en date du 29 juin 2018, domicilié en cette qualité

14/16 rue de Lorraine - 93000 BOBIGNY

non représentée, n'ayant pas constitué avocat

Ordonnance de clôture : 18 janvier 2022

Audience publique du 01 Février 2022 tenue par Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, Conseiller, et ce, en l'absence d'opposition des parties, assistée lors des débats de Mme Karine DUPONT, Greffier.

Après délibéré au cours duquel Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, Conseiller a rendu compte des débats à la Cour composée de :

Monsieur Alexandre DAVID, président de chambre, président de la collégialité,

Madame Laurence DUVALLET, présidente de chambre,

Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, conseiller

Puis le 26 Avril 2022, Monsieur Alexandre DAVID, président de Chambre, assisté de Mme Karine DUPONT, Greffier a rendu l'arrêt par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Un contrat intitulé « contrat de travail VDI » (vendeur à domicile indépendant) a été signé entre la SARL Direct'com et Mme [W] [U] le 7 juillet 2015. L'objet du contrat était la représentation et la vente au nom et pour le compte de la société ou pour les clients désignés par celle-ci de contrats d'abonnement des produits et services définis au contrat auprès d'une clientèle de particuliers à leur domicile, leur lieu de travail, ou tout autre lieu non habituellement destiné à la commercialisation de produits. Il était stipulé que le VDI serait rémunéré à la commission par contrats complets et payés par les opérateurs à la société.

Le 6 août 2015, Mme [W] [U] a adressé à sa supérieure hiérarchique un SMS ainsi rédigé : « Salut tu vas bien ' J'ai décidé d'arrêter. Ce métier n'est pas fait pour moi. Est-ce que [X] est joignable en ce moment ou bien il est en vacances ' »

Il lui a été répondu : « Bj, OK pas de soucis. Il faudrait que tu ramènes ta carte et la paperasse STP oui [X] est en vacs. »

Le 9 mars 2016, Mme [W] [U] a saisi le conseil de prud'hommes d'Orléans aux fins de voir juger qu'elle était liée à la SARL Direct'com par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 7 juillet 2015 et de condamner la SARL Direct'com à lui payer diverses sommes (rappel de salaire, congés payés afférents, commissions et frais de déplacement, frais irrépétibles, dépens). Elle a sollicité la requalification de sa démission en prise d'acte de la rupture, de dire celle-ci justifiée et en conséquence de condamner la SARL Direct'com à lui payer des dommages-intérêts pour licenciement abusif ainsi que des dommages-intérêts pour travail dissimulé.

La SARL Direct'com n'était ni comparante ni représentée.

Par jugement du 6 avril 2017, auquel il est renvoyé pour un ample exposé du litige, le conseil de prud'hommes d'Orléans, a :

- requalifié le contrat de travail de Mme [W] [U] en contrat de travail à durée indéterminé à temps complet ;

- fixé le salaire de Mme [W] [U] à la somme de 2 000 € mensuels brut ;

- condamné la SARL Direct'com à verser à Mme [W] [U] :

2 000 € à titre de rappel de salaire pour la période du 7 juillet 2015 au 16 août 2015

outre 200 € au titre des congés payés afférents ;

- 828 € au titre des commissions et déplacements ;

- requalifié la démission de Mme [W] [U] en prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur et à ce titre, condamné la SAS Le Tellier Emballages à payer à Mme [W] [U] les sommes de :

2 000 € de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

12'000 € au type des dommages-intérêts pour travail dissimulé ;

- ordonné à la SARL Direct'com de remettre à Mme [W] [U] les bulletins de salaire pour les mois de juillet et août 2015 ainsi que l'ensemble des documents liquidatifs sous astreinte de 50 € par jour pour l'ensemble des documents à compter du 30ème jour suivant la notification du jugement, l'astreinte étant limitée à 5000 €, le conseil s'en réservant la liquidation ;

- condamné la SARL Direct'com à verser à Mme [W] [U] la somme de 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté Mme [W] [U] du surplus de ses demandes ;

- condamné la SARL Direct'com aux dépens.

Par jugement du 28 novembre 2017, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert à l'égard de la SARL Direct'com une procédure de liquidation judiciaire immédiate sans maintien de l'activité. Cette décision a fixé provisoirement au 6 avril 2017 la date de cessation des paiements, en considération du jugement rendu par le conseil de prud'hommes du 6 avril 2017.

Par requête du 23 avril 2018, l'AGS intervenant par l'UNEDIC- C.G.E.A d'Île de France Est a formé tierce opposition au jugement du 6 avril 2017.

Par jugement du 10 janvier 2019, le conseil de prud'hommes d'Orléans a :

- déclaré recevable la tierce opposition ;

- requalifié la démission de Mme [W] [U] en prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur ;

- fixé la créance de Mme [W] [U] à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Direct'com aux sommes suivantes :

- 2 000 € à titre de rappel de salaire pour la période du 7 juillet 2015 au 16 août 2015, outre 200 € au titre des congés payés afférents ;

- 828 € au titre des commissions et déplacements ;

- 2 000 € de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

- 12'000 € au titre des dommages-intérêts pour travail dissimulé ;

- condamné Me [I] de la SELAFA MJA ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SARL Direct'com à payer à Mme [W] [U] la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- déclaré le jugement opposable à l'AGS intervenant par l'UNEDIC- C.G.E.A d'Île de France Est, dans les limites prévues aux articles L.3253-8 à L.3253-17, D. 3253-2 et D.3253-5 du code du travail ;

- Dit que les dépens seront inscrits à la liquidation judiciaire de la SARL Direct'com.

Par déclaration adressée par voie électronique au greffe de la cour en date du 12 février 2019, l'AGS intervenant par l'UNEDIC- C.G.E.A d'Île de France Est a relevé appel de cette décision.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions enregistrées au greffe le 10 mai 2019, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en application de l'article 455 du code de procédure civile, aux termes desquelles l'AGS intervenant par l'UNEDIC- C.G.E.A d'Île de France Est demande à la cour de :

S'entendre dire et juger recevable et bien-fondée en son appel.

Y faisant droit,

Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Débouter Madame [W] [U] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

En tout état de cause :

Dire et juger que le C.G.E.A. ne garantit pas le paiement :

des sommes réclamées à titre d'astreinte assortissant la délivrance de documents salariaux,

des dommages et intérêts pour préjudice moral et/ou financier,

des sommes réclamées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Dire et juger que les intérêts ont nécessairement été interrompus au jour d'ouverture de la procédure collective par application de l'article L. 621-48 du Code de Commerce,

Dire et juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles D. 3253-1 et suivants du Code du Travail,

Dire et juger que l'obligation du C.G.E.A de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

Déclarer la décision à intervenir opposable au C.G.E.A. en sa qualité de gestionnaire de l'AGS dans les limites prévues aux articles L 3253 et suivants du Code du Travail et les plafonds prévus aux articles D 3253-1 et suivants du Code du Travail,

Donner acte que l'AGS se réserve le droit d'engager toute action en répétition de l'indu,

Statuer ce que de droit quant aux dépens sans qu'ils puissent être mis a la charge du C.G.E.A.

Vu les dernières conclusions enregistrées au greffe le 22 mai 2019, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en application de l'article 455 du code de procédure civile, aux termes desquelles Mme [W] [H] épouse [U] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement du 10 janvier 2019 qui a dit la tierce opposition recevable mais mal fondée et dit qu'il n'y avait pas lieu à modification du jugement rendu le 6 avril 2017,

Y ajoutant,

Condamner l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'Ile-de-France Est à verser à Madame [W] [H] épouse [U] la somme de 2 400 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles d'appel,

Condamner l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'Ile-de-France Est à verser à Mme [W] [H] épouse [U] la somme de 3 000 € pour appel abusif,

Condamner l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'Ile-de-France Est aux entiers dépens

La SELAFA MJA ès qualités, à laquelle la déclaration d'appel et les conclusions de l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'Ile-de-France Est ont été signifiées par acte d'huissier de justice du 13 mai 2019, remis à personne en application de l'article 654 du code de procédure civile, n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 janvier 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le bien-fondé de la tierce opposition

Mme [W] [H] épouse [U] soutient qu'elle avait la qualité de salariée de la SARL Direct'com.

L'AGS intervenant par l'UNEDIC- C.G.E.A d'Île de France Est conteste cette qualité et demande l'infirmation de la décision en ce qu'elle a requalifié la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet ainsi que le montant du salaire retenu.

L'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs. Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné (en ce sens, Soc., 4 mars 2020, pourvoi n° 19-13.316, P + B + R + I).

L'article L. 135-1 du code de commerce dispose que le vendeur à domicile indépendant est celui qui effectue la vente de produits ou de services dans les conditions prévues par la section III du chapitre 1er du titre II du livre 1er du code de la consommation, à l'exclusion du démarchage par téléphone ou par tout moyen technique assimilable, dans le cadre d'une convention écrite de mandataire, de commissionnaire, de revendeur ou de courtier, le liant à l'entreprise qui lui confie la vente de ses produits ou services.

Le statut de vendeur à domicile indépendant institué par la loi du 27 janvier 1993 est exclusif de tout lien de subordination juridique caractéristique du contrat de travail dans la mesure où le vendeur à domicile indépendant gère librement l'organisation de son travail et détermine seul son niveau d'activité et ses objectifs financiers sans que l'entreprise puisse lui donner des directives.

Pour que le contrat d'un vendeur à domicile indépendant, conclu avec une société, s'analyse en un contrat de travail, il y a lieu de rechercher si dans l'accomplissement de ses activités de vente à domicile, la société fixait unilatéralement ses conditions de travail, donnait des directives et en contrôlait l'exécution.

En l'espèce, Mme [W] [H] épouse [U] produit un contrat portant l'intitulé 'contrat de travail VDI' daté du 7 juillet 2015, signé avec la SARL Direct'com pour son engagement de vendeur à domicile indépendant.

Mme [W] [H] épouse [U] produit également :

- une « promesse d'embauche en CDI » signée avec la SARL Direct'com le 7 juillet 2015, à la condition que 'le commercial effectue impérativement un résultat mensuel minimum de 90 ventes validées, en maison ou en immeuble et payées par l'opérateur sur une période définie avec le gérant de la société'. Cette promesse prévoyait qu'une fois en CDI, le salaire serait de 2 000 € brut par mois, outre des commissions, des primes, des titres restaurants ou frais de repas ;

- une carte d'accréditation ;

- les contrats à faire signer aux clients ;

- des échanges de SMS avec son chef d'équipe.

Mme [W] [H] épouse [U] n'a pas perçu de rémunération de la part de la SARL Direct'com. Cette circonstance n'est pas de nature à écarter l'existence d'un contrat de travail.

Il ressort des SMS produits par Mme [W] [H] épouse [U] que la SARL Direct'com fixait ses horaires ainsi que son lieu de prospection et ce la veille de ses activités de prospection. L'intéressée ne disposait dès lors d'aucune autonomie dans l'organisation de son travail. La SARL Direct'com contrôlait également l'exécution du travail en demandant un compte rendu du nombre de contrats signés chaque soir.

Au vu de ces éléments, Mme [W] [H] épouse [U] rapporte la preuve que dans l'accomplissement de ses activités de vente à domicile, la SARL Direct'com fixait unilatéralement ses conditions de travail, lui donnait des directives et en contrôlait l'exécution.

L'existence d'un lien de subordination, et partant d'un contrat de travail, est démontrée.

Mme [W] [H] épouse [U] a exercé son activité de vente dans un lien de subordination caractérisant un contrat de travail, entre le 7 juillet et le 6 août 2015. Elle a accompli 136 heures 30 de travail. C'est donc à juste titre que le conseil de prud'hommes a reconnu la qualité de salarié à temps complet à Mme [W] [H] épouse [U].

Sur le rappel de salaire

En sa qualité de salarié, Mme [W] [H] épouse [U] peut prétendre à un rappel de salaire pendant la période travaillée soit du 7 juillet 2015 au 6 août 2015.

La SARL Direct'com a établi une promesse d'embauche de contrat de travail fixant la rémunération de Mme [W] [H] épouse [U] à la somme mensuelle de 2 000 €. Il y a lieu de fixer le rappel de salaire dû à Mme [W] [H] épouse [U] en considération de ce montant.

Le jugement du conseil de prud'hommes est confirmé en ce qu'il a fixé le montant du rappel de salaire à 2 000 €, outre 200 € au titre des congés payés afférents.

Sur la demande en paiement de commissions et frais de déplacement

Par les SMS produits aux débats, Mme [W] [H] épouse [U] démontre avoir fait signer 16 contrats d'abonnement et soutient avoir dû se déplacer d'Orléans en région parisienne, frais que son employeur doit prendre en charge.

L'AGS intervenant par l'UNEDIC- C.G.E.A d'Île de France Est s'y oppose.

Le contrat de travail VDI prévoyait une rémunération à la commission. Il a été requalifié en contrat de travail avec un salaire mensuel de 2 000 €.

La promesse d'embauche en contrat de travail à durée indéterminée prévoyait une rémunération fixe outre des commissions différentes selon la nature des contrats et à la condition qu'ils aient été validés et payés à l'opérateur. Elle ne contenait aucune disposition relative aux modalités de remboursement des frais professionnels, étant rappelé que ces frais doivent être supportés par l'employeur.

Mme [W] [H] épouse [U] ne démontre pas que des commissions lui seraient dues. En effet, il n'est justifié ni de la nature des contrats signés, ni qu'ils aient été validés et honorés.

La salariée ne justifie pas des frais de déplacement qu'elle invoque.

Eu égard à ces éléments, il y a lieu de débouter Mme [W] [H] épouse [U] de sa demande.

Sur la demande d'indemnisation du chef de travail dissimulé

L'article L. 8221-5 du code du travail dispose qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paye, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif de l'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre 1.

L'article L. 8223-1 du code du travail dispose en outre qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaires.

Mme [W] [H] épouse [U] sollicite une indemnité en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait du travail dissimulé.

La SARL Direct'com a soumis la salariée à un «contrat de travail VDI» qui n'était autre qu'une période d'essai d'un futur contrat à durée indéterminée promis au vendeur en cas de réalisation d'un nombre important de ventes.

La société a donné des directives à Mme [W] [H] épouse [U] et l'a placée sous un lien de subordination. Elle s'est sciemment abstenue de verser une rémunération, d'établir un bulletin de paie et de régler les cotisations sociales correspondantes.

Les éléments matériel et intentionnel du travail dissimulé sont donc caractérisés.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a reconnu l'existence d'un travail dissimulé et a alloué à la salariée une somme de 12'000 € correspondant à six mois de salaires.

Sur la rupture du contrat de travail

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail. Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause sa démission en raison de faits ou manquements imputables à l'employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les manquements reprochés à l'employeur sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, ou dans le cas contraire, d'une démission.

Mme [W] [H] épouse [U] a écrit à son chef d'équipe le 6 août 2015 un SMS ainsi rédigé : « j'ai décidé d'arrêter. Ce métier n'est pas fait pour moi. »

Dans ses conclusions, elle expose qu'elle devait effectuer 250 km par jour pour aller travailler et qu'elle n'a été ni rémunérée ni dédommagée pour ses frais de déplacement.

Son contrat prévoyait une rémunération à la commission une fois les contrats payés par l'opérateur, la prise en charge des frais de déplacement domicile/travail n'était quant à elle pas prévue.

Il existait un litige contemporain à la rupture, la société ne versant aucun salaire à Mme [W] [H] épouse [U] et s'étant soustraite à ses obligations déclaratives en la faisant travailler sans régulariser de contrat de travail.

Il y a donc lieu de requalifier la démission en prise d'acte de la rupture du contrat de travail.

Les manquements de l'employeur étaient de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail. Il y a donc lieu de dire que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le conseil de prud'hommes a fait une juste appréciation du préjudice subi par la salariée du fait de la perte injustifiée de son emploi en lui allouant la somme de 2000 euros à ce titre. Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages-intérêts pour appel abusif

Il n'est aucunement établi que l'AGS intervenant par l'UNEDIC- C.G.E.A d'Île de France Est aurait fait un usage abusif de son droit d'agir en justice. Mme [W] [H] épouse [U] est déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Il y a lieu de confirmer le jugement du 10 janvier 2019 en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

Les dépens de la procédure d'appel sont à la charge de l'AGS intervenant par l'UNEDIC- C.G.E.A d'Île de France Est, partie succombante pour l'essentiel.

Il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme [W] [H] épouse [U] l'intégralité des sommes avancées par elle et non comprises dans les dépens. Il lui sera alloué la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de la présente procédure d'appel. L'AGS intervenant par l'UNEDIC- C.G.E.A d'Île de France Est est condamnée à lui payer cette somme.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement du 10 janvier 2019 sauf en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Direct'com une créance de 828 € au titre des commissions et déplacements pour les contrats conclus pendant la période de travail ;

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant :

Déboute Mme [W] [H] épouse [U] de ses demandes au titre des commissions et déplacements ainsi que de sa demande de dommages-intérêts pour appel abusif ;

Condamne l'AGS intervenant par l'UNEDIC-C.G.E.A d'Île de France Est à payer à Mme [W] [H] épouse [U] la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne l'AGS intervenant par l'UNEDIC-C.G.E.A d'Île de France Est aux dépens de l'instance d'appel.

Et le présent arrêt a été signé par le président de chambre et par le greffier

Karine DUPONT Alexandre DAVID


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/00623
Date de la décision : 26/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-26;19.00623 ?
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