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16/03/2021 | FRANCE | N°19/009911

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 02, 16 mars 2021, 19/009911


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 16/03/2021
Me Marie-Stéphanie SIMON
la SCP SAINT-CRICQ et ASSOCIÉS

ARRÊT du : 16 MARS 2021

No : 49/21 - No RG : 19/00991 - No Portalis DBVN-V-B7D-F4SN

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 04 Décembre 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265 2333 7117 0236

Monsieur [P] [L]
né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1] (BELGIQUE)
[Adresse 1]
[Localité 2] (BELGIQUE)>
représenté par Me Marie-Stéphanie SIMON, avocat au barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

INTIMÉS :

- Timbre fiscal dématérialisé N...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 16/03/2021
Me Marie-Stéphanie SIMON
la SCP SAINT-CRICQ et ASSOCIÉS

ARRÊT du : 16 MARS 2021

No : 49/21 - No RG : 19/00991 - No Portalis DBVN-V-B7D-F4SN

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 04 Décembre 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265 2333 7117 0236

Monsieur [P] [L]
né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 1] (BELGIQUE)
[Adresse 1]
[Localité 2] (BELGIQUE)

représenté par Me Marie-Stéphanie SIMON, avocat au barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

INTIMÉS :

- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265 2442 2779 0864

Monsieur [S] [Y]
né le [Date naissance 2] 1945 à [Localité 3]
[Adresse 2]
[Localité 4]

et

Madame [N] [V] épouse [Y]
née le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 5]
[Adresse 2]
[Localité 4]
tous deux représentés par Me Stanislas DE LA RUFFIE de la SCP SAINT-CRICQ et ASSOCIÉS, avocat au barreau de TOURS

S.E.L.A.R.L. OFFICE NOTARIAL DE RICHELIEU
[Adresse 3]
[Localité 6]

défaillante

D'AUTRE PART

•DÉCLARATION D'APPEL en date du :23 Mars 2019
•ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 06 octobre 2020 .

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, du délibéré :

Madame Laurence FAIVRE, Président de chambre,
Monsieur Laurent SOUSA, conseiller,
Madame Laure-Aimée GRUA, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles en vertu de l'ordonnance No 92/2020

Greffier :

•Madame Marie-Lyne EL BOUDALI, greffier lors des débats et de Marie-Claude DONNAT, lors du prononcé.

DÉBATS :

A l'audience publique du 09 NOVEMBRE 2020, à laquelle ont été entendus Madame Laure-Aimée GRUA, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles en vertu de l'ordonnance No 92/2020, en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries.

ARRÊT :

Prononcé le 16 MARS 2021, délibéré initialement prévu le 09/03/2021 et prorogé au 16/03/2021 à la demande de la présidente, par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Aux termes d'un acte reçu le 1er février 2006 par Maître [T] [U], notaire, M. [R] [B], Mme [G] [B], M. [T] [B], Mme [C] [B] et son époux [X] [Z] ont cédé à M. [P] [L] et Mme [L] [R] une maison d'habitation avec jardin et garage cadastrée AC [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4] sise [Adresse 4].

Aux termes d'un acte reçu le 17 septembre 2007 par ce notaire, Mme [G] [B], M. [T] [B], Mme [C] [B] épouse [Z] ont cédé à M. [S] [Y] et Mme [V] [N] [V] épouse [Y], l'immeuble contigu situé [Adresse 5], comprenant, notamment une parcelle [Cadastre 5] composée d'une dépendance à usage de remise.

Une difficulté est apparue lorsque M. [L] et Mme [R] ont voulu faire apport de leur immeuble à une SCI dont la parcelle [Cadastre 5], dont ils avaient l'usage et dans laquelle se situait leur compteur électrique et qu'ils ont constaté que celle-ci n'était pas incluse dans la vente.

Le notaire les ayant contactés afin d'établir un acte rectificatif, M. et Mme [Y] ont fait ouvrir une porte dans leur mur pour avoir accès à cette remise, condamné à l'aide de parpaings l'ouverture donnant sur la propriété voisine, vidé la remise de son contenu et demandé, par courrier du 15 mars 2014, à leurs voisins de déplacer leur compteur électrique.

M. [L] et Mme [R] ont saisi le 4 juillet 2014 le juge des référés, d'une demande de remise en état des lieux qui, par ordonnance du 25 novembre 2014, les en a débouté, leur ordonnant de faire déposer, sous astreinte, leur compteur électrique dans le délai de deux mois. Cette décision a été confirmée par l'arrêt rendu par notre cour le 13 juillet 2015.

Par actes d'huissier de justice délivrés les 27 janvier 2016 et 9 février 2016, M. [L] a assigné ses voisins pour se voir reconnaître propriétaire de la parcelle AC [Cadastre 5], obtenir le paiement de dommages-intérêts et d'une indemnité de procédure. Il a assigné le notaire en opposabilité de la décision.

Par jugement rendu le 4 décembre 2018, le tribunal de grande instance de Tours a :
- déclaré recevable l'action en revendication du droit de propriété,
- débouté M. [L] de ses demandes à ce titre,
- déclaré irrecevable l'action en indemnisation fondée sur le trouble à la possession,
- débouté M. [L] de ses autres demandes d'indemnisation, le condamnant à payer à M. et Mme [Y] une indemnité de procédure de 3 000 euros et le condamnant aux dépens.

Selon déclaration reçue au greffe de la cour le 23 mars 2019, M. [L] a relevé appel de cette décision, en tous chefs de son dispositif.
Les parties ont conclu. L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 octobre 2020.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Les dernières conclusions, remises les 23 août 2019 par l'appelant, 22 novembre 2019 par les intimés, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions, peuvent se résumer ainsi qu'il suit.

M. [L] demande d'infirmer le jugement en ce qu'il le déboute de l'ensemble de ses demandes, statuant à nouveau, à titre principal, le dire propriétaire de la parcelle cadastrée section AC [Cadastre 5], [Adresse 5], ordonner la publication de la décision, condamner les intimés à remettre en état la remise dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision et sous astreinte de 150 euros par jour, passé ce délai, les condamner au paiement de dommages-intérêts de 12 600 euros, dire l'arrêt opposable à Maître [U], à titre subsidiaire, condamner in solidum les intimés au paiement de dommages-intérêts de 6 000 euros, débouter les intimés de l'ensemble de leurs demandes et les condamner au paiement d'une indemnité de procédure de 5 000 euros et des dépens de première instance et d'appel.

M. et Mme [Y] demandent de confirmer le jugement, débouter l'appelant de l'ensemble de ses demandes, le condamner au paiement d'une indemnité de procédure de 5 000 euros et des dépens, distraits au profit de leur avocat.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le premier juge a retenu, pour écarter l'existence d'une erreur matérielle, que le rattachement de la parcelle au [Adresse 4] antérieurement à 1955 et la survenance d'une erreur matérielle à cette date ne sont pas établis, les allégations de M. [T] [B] et Mme [G] [B], selon lesquels la remise a toujours fait partie du [Adresse 4], ne suffisaient pas à contredire les actes notariés puisqu'ils étaient enfants lors de la vente de 1955 et sont contredites par M. et Mme [Y] qui établissent l'existence d'une ancienne ouverture entre les fonds et, pour écarter la prescription acquisitive, que la parcelle litigieuse étant restée en dehors de la vente du [Adresse 4], ses acquéreurs ne pouvaient joindre leur possession à celle de leurs vendeurs.

L'appelant fait plaider, d'abord, l'erreur matérielle affectant son titre de propriété et la commune intention des parties, ses vendeurs, qui sont également vendeurs de la propriété contiguë ayant attesté que la remise composant la parcelle litigieuse a toujours fait partie de l'immeuble qui lui a été vendu, ces vendeurs attestant qu'il était dans leur intention de lui vendre la parcelle ; subsidiairement, la prescription acquisitive, sa possession paisible résultant de la configuration des lieux, les propriétés étant séparées par un mur de pierre que M. et Mme [Y] ont percé pour accéder à la remise puisqu'ils n'en avaient pas accès et ensuite que de leur acquisition jusqu'au mois de janvier 2014, date à laquelle le notaire s'est rapproché d'eux, les intimés n'ont jamais eu conscience qu'ils pouvaient être propriétaires de la parcelle, alors que lui-même l'occupait à titre de propriétaire, en y stockant divers biens mobiliers et en y installant son compteur électrique.

Les intimés soutiennent que si une personne peut, à l'énoncé de l'article 2265 du code civil, compléter sa prescription en joignant sa possession à celle de son vendeur, encore faut-il que le bien ait été compris dans la vente.

A l'énoncé de l'article 1157 ancien du code civil, dans sa version antérieure à l'Ordonnance no2016-131 du 10 février 2016, applicable au litige, on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes.

Il faut constater que l'acte notarié du 1er février 2006 contenant vente par les consorts [B] à M. [L] ne mentionne pas la dépendance à usage de remise dans la consistance des biens vendus. L'erreur manifeste dans la désignation des parcelles vendues ne ressort pas des mentions de l'acte de vente, la désignation cadastrale étant en accord avec la consistance indiquée.

Par contre, il n'est pas contesté que depuis son acquisition, c'est M. [L] qui avait l'usage de la remise, son compteur EDF y étant installé, le juge des référés, par ordonnance du 25 novembre 2014, lui en ayant ordonné le dépôt, et que des travaux, consistant en l'ouverture d'une porte sur la remise, ont été réalisés par M. et Mme [Y] en février 2014, le constat d'huissier du 12 juin 2014 et les photographies versées au débat prouvant qu'à cette occasion les portes et fenêtres de la remise donnant sur le fonds de M. [L] ont été murées. Il en ressort que jusqu'en février 2014, l'appentis s'ouvrait uniquement sur le fonds de celui-ci.

Les propriétés des parties étant séparées par un mur de pierres, percé par M. et Mme [Y] en février 2014 pour avoir accès à la remise, il est certain que jusqu'à cette date, M. [L] a été en possession de cette remise de façon continue, paisible, publique et qu'il en a eu la jouissance exclusive à titre de propriétaire.

Les auteurs de celui-ci, à savoir, [R] [B], vendeur, devenu propriétaire par donation du 18 juin 1954, qui habitait la propriété, Mme [G] [B], M. [T] [B], Mme [C] [B] et son époux [X] [Z], vendeurs, auxquels [R] [B] a vendu sa propriété par acte du 30 octobre 1993 en s'en réservant l'usage et l'habitation, en ont eu la possession à titre continu, paisible, public et à titre de propriétaire.

Mme [G] [B], M. [T] [B], Mme [C] [B] et son époux [X] [Z], vendeurs tant de M. [L] que de M. et Mme [Y], attestant, pièces appelants no13 à 16, que la remise faisait partie de la vente de la propriété à M. [L], l'intention des parties était d'inclure la parcelle supportant la remise dans la vente de la propriété à ce dernier.
M. [L] pouvant joindre à sa possession celle de ses auteurs, il convient, infirmant la décision, de le déclarer propriétaire par prescription trentenaire de la parcelle [Cadastre 5].

M. et Mme [Y] ne sauraient se prévaloir utilement de l'interruption de la possession des appelants à compter de février 2014, soit pendant plus d'une année, faisant obstacle, en application de l'article 2271 du code civil, à l'acquisition de la prescription. En effet, dès le 4 juillet 2014, M. [L] a engagé contre eux un référé possessoire pour se voir restituer la remise, cette procédure s'étant terminée par l'arrêt rendu par notre cour le 13 juillet 2015 confirmant l'ordonnance du 25 novembre 2014 le déboutant de sa demande et lui enjoignant de faire déposer son compteur électrique. Ensuite, dans le délai de moins d'un an, il a assigné M. et Mme [Y] pour se voir reconnaître la propriété de la parcelle par actes d'huissier de justice délivrés les 27 janvier et 9 février 2016.

M. [L] qui a engagé rapidement une procédure pour faire faire reconnaître ses droits, sa possession est présumée avoir été ininterrompue.

M. et Mme [Y] seront solidairement condamnés à remettre la remise dans son état antérieur, notamment en rétablissant les murs et les ouvertures, dans le mois de la signification de la présente décision, ensuite sous astreinte dont les modalités sont fixées dans le dispositif.

M. [L] étant privé depuis février 2014 de la jouissance de la remise, il convient de condamner solidairement M. et Mme [Y] à lui verser des dommages-intérêts de 5 000 euros.

Par ailleurs, il est certain qu'il a subi un préjudice moral et un préjudice matériel de se voir priver, après plusieurs années d'occupation de cette remise dans laquelle se situait son compteur électrique, dont le déplacement a généré des frais. M. et Mme [Y] seront condamnés à lui payer des dommages-intérêts d'un montant total de 5 000 euros.

La présente décision vaudra titre de propriété après publication au service de la propriété foncière et sera notifiée à Maître [T] [U], notaire ;

Il y a lieu de condamner M. et Mme [Y] qui succombent, au paiement des dépens de première instance et d'appel et d'une indemnité de procédure de 5 000 euros à M. [L] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement ;

INFIRME le jugement ;

Statuant à nouveau ;
DÉCLARE M. [P] [S] [Z] [B] [D] [L] propriétaire, par prescription, de la parcelle cadastrée AC [Cadastre 5] pour 0a 18 centiares, [Adresse 4] ;

CONDAMNE solidairement M. [S] [Y] et Mme [V] [N] [V] épouse [Y] à remettre cette parcelle dans son état antérieur, notamment en rétablissant les murs et les ouvertures, dans le mois de la signification de la présente décision, ensuite sous astreinte provisoire de 150 euros par jour pendant trois mois ;

Les condamne solidairement à payer à M. [P] [S] [Z] [B] [D] [L] des dommages-intérêts de :
- 5 000 euros au titre de son préjudice de jouissance,
- 5 000 euros au titre de ses préjudices moral et matériel ;

DIT que la décision vaudra titre de propriété après publication au service de la propriété foncière ;

DIT que la décision sera notifiée à Maître [T] [U], notaire à [Localité 7] (Indre et Loire) ;

CONDAMNE solidairement M. [S] [Y] et Mme [V] [N] [V] épouse [Y] au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel et d'une indemnité de procédure de 5 000 euros à M. [P] [S] [Z] [B] [D] [L].

Arrêt signé par Madame Laurence FAIVRE, Président de Chambre et Madame Marie-Claude DONNAT greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : 02
Numéro d'arrêt : 19/009911
Date de la décision : 16/03/2021
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2021-03-16;19.009911 ?
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