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28/01/2010 | FRANCE | N°09/02886

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre sociale, 28 janvier 2010, 09/02886


C O U R D ' A P P E L D ' O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE

PRUD'HOMMES

GROSSES le 28 JANVIER 2010 à

la SCP LAVISSE-BOUAMRIRENE

la SELARL 2 BMP BARON-BELLANGER-MARSAULT-PALHETA

COPIES le 28 JANVIER 2010 à

La SAS LIMPA NETTOYAGES

[O] [K]

POLE EMPLOI

ARRÊT du : 28 JANVIER 2010



N° : - N° RG : 09/02886



DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Conseil de Prud'hommes de TOURS en date du 02 Décembre 2008 - Section : COMMERCE



ENTRE



APPELANTE :



La SAS LIMPA NET

TOYAGES

[Adresse 11]

[Localité 10]



représentée par la SCP LAVISSE-BOUAMRIRENE, avocats au barreau d'ORLÉANS





ET



INTIMÉE :



Madame [O] [K]

née le [Date naissance ...

C O U R D ' A P P E L D ' O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE

PRUD'HOMMES

GROSSES le 28 JANVIER 2010 à

la SCP LAVISSE-BOUAMRIRENE

la SELARL 2 BMP BARON-BELLANGER-MARSAULT-PALHETA

COPIES le 28 JANVIER 2010 à

La SAS LIMPA NETTOYAGES

[O] [K]

POLE EMPLOI

ARRÊT du : 28 JANVIER 2010

N° : - N° RG : 09/02886

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Conseil de Prud'hommes de TOURS en date du 02 Décembre 2008 - Section : COMMERCE

ENTRE

APPELANTE :

La SAS LIMPA NETTOYAGES

[Adresse 11]

[Localité 10]

représentée par la SCP LAVISSE-BOUAMRIRENE, avocats au barreau d'ORLÉANS

ET

INTIMÉE :

Madame [O] [K]

née le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 7] (ALGÉRIE)

[Adresse 2]

[Localité 12]

comparante en personne, assistée de Maître MARSAULT de la SELARL 2 BMP BARON-BELLANGER-MARSAULT-PALHETA, avocat au barreau de TOURS

Après débats et audition des parties à l'audience publique du 10 Décembre 2009

LA COUR COMPOSÉE DE :

Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre,

Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller,

Madame Catherine PAFFENHOFF, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mademoiselle Valérie LATOUCHE, Greffier,

Puis ces mêmes magistrats ont délibéré dans la même formation et à l'audience publique du 28 Janvier 2010, Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre, assisté de Mademoiselle Valérie LATOUCHE, Greffier, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

RÉSUMÉ DE LA PROCÉDURE

Madame [O] [K] a saisi le conseil de prud'hommes de TOURS de diverses demandes à l'encontre de la SAS LIMPA NETTOYAGES, pour le détail desquelles il est renvoyé au jugement du 2 décembre 2008, la cour se référant aussi à cette décision pour l'exposé des demandes reconventionnelles.

Elle a obtenu :

- 22.600 euros de dommages et intérêts en application de l'article L 1226-15 du code du travail,

- 3.823,95 euros de solde d'indemnité de licenciement,

- 2.508,62 euros de préavis,

- 250,86 euros de congés payés afférents,

- un bulletin de paie, un certificat de travail et une attestation ASSEDIC sous astreinte de 15 euros par jour et par document faute d'exécution 15 jours après la notification,

- 850 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement a été notifié à la société le 9 janvier 2009.

Elle en a fait appel le 19 janvier 2009.

DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES

Elle demande :

- le débouté intégral,

- la restitution des sommes perçues en application de l'exécution provisoire,

- 1.500 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que Madame [K], agent de propreté, a été licenciée le 14 juin 2007 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Elle soutient que l'inaptitude est consécutive à une maladie de droit commun, et non à une rechute d'accident du travail, et qu'il est nécessaire qu'à la date du licenciement, l'employeur soit informé du caractère professionnel de l'accident.

Elle précise que Madame [K] a été victime d'une rechute d'accident du travail en 2004, que la CPAM a considéré que ses lésions à ce titre étaient consolidées au 10 février 2007, que Madame [K] a contesté, et qu'une expertise médicale a fixé cette date au 20 février 2007, ajoutant que depuis elle était en arrêt de maladie jusqu'à l'expertise, le 30 mars 2007.

Elle remarque qu'ensuite la salariée a toujours été en arrêt maladie et qu'ainsi elle relève de la procédure d'inaptitude de droit commun, peu important que le contrat soit resté suspendu jusqu'à la visite de reprise.

Elle estime que le certificat du médecin du travail qui relie l'inaptitude à l'accident ne peut être pris en compte puisqu'il faut se placer à la date du licenciement pour apprécier sa connaissance de la situation.

Elle en conclut qu'elle n'avait pas à consulter les délégués du personnel et que de toutes façons il n'en existait pas, comme elle en justifie par un procès-verbal de carence.

Elle précise qu'elle emploie surtout des agents de propreté, Madame [K] ne pouvant plus l'être, et très peu de personnel administratif, et qu'elle a interrogé divers responsables d'agence, qui lui ont répondu qu'ils n'avaient pas de poste disponible, ce dont il résulte qu'il lui était impossible de la reclasser et ce qui entraîne le rejet du préavis que la salariée ne pouvait effectuer (les congés payés n'étant de toutes façons pas dûs car l'indemnité n'a pas la nature d'un préavis), du rappel d'indemnité de licenciement, puisqu'elle lui a payé l'indemnité conventionnelle, et des dommages et intérêts.

Elle soutient enfin qu'il s'agit d'une procédure abusive.

Madame [K] fait appel incident pour obtenir :

- 25.000 euros de dommages et intérêts,

- une astreinte de 50 euros,

- 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient qu'elle relevait bien de la procédure d'inaptitude à la suite d'un accident du travail, puisque seule la visite de reprise met fin à la suspension du contrat.

Elle ajoute que le médecin du travail a fait un lien entre l'accident du travail et l'inaptitude en 2008.

Concernant le reclassement, elle soutient que la société ne justifie pas de ses recherches à ce titre, faute de produire l'organigramme du groupe s'il existe, et les registres du personnel des sociétés du groupe, cette situation lui donnant droit aux sommes réclamées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Eu égard aux dates ci-dessus, les appels, principal et incident, sont recevables.

La société est une entreprise de nettoyage.

Madame [K] est engagée comme agent de service par la société ABILIS le 9 août 1978.

En application de l'annexe 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté, elle passe au service de la société LIMPA NETTOYAGES le 1er avril 2000, avec reprise de son ancienneté au 9 août 1978. Elle travaille à l'agence de [Localité 12].

Elle est victime d'un accident du travail le 2 février 2001. Il affecte son genou gauche, et entraîne un arrêt jusqu'au 13 avril 2001.

Le 24 mai 2004, elle est victime d'une rechute qui entraîne un nouvel arrêt.

La CPAM l'informe qu'elle considère cette rechute comme consolidée le 10 février 2007, mais qu'elle peut contester et demander une expertise, ce qu'elle fait.

Madame [K] transmet :

- un arrêt de travail initial du 17 au 27 février 2007,

- une prolongation du 27 février au 28 mars 2007.

Il s'agit d'arrêts de droit commun.

Le 30 mars 2007, le docteur [T], chirurgien expert, conclut que :

- l'accident de travail du 2 février 2001 est consolidé le 20 février 2007,

- l'état clinique de la patiente justifie un arrêt de travail au titre de la maladie jusqu'au jour de l'expertise, soit le 30 mars 2007.

Madame [K] ne conteste pas ces conclusions.

Elle passe une visite de reprise le 23 avril 2007.

Elle est déclarée « inapte à tous les postes de l'entreprise ».

Le 2ème examen du 11 mai 2007 est ainsi libellé :

« Inapte au poste d'agent d'entretien étude de poste effectuée le 10 mai 2007 (pas de poste actuellement disponible); serait apte à un poste sans station debout ni marche prolongées, sans montée et descente des escaliers, sans port de charge ni effort physique important ».

Elle est licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 14 juin 2007.

Après avoir rappelé les termes des 2 examens, la lettre se poursuit ainsi :

« Nous avons effectué des recherches de reclassement au sein de l'entreprise afin de trouver un poste correspondant aux restrictions médicales énumérées. Les impératifs de notre activité et de nos clients ont rendu cette recherche infructueuse, aucun poste compatible avec votre état de santé n'existant dans notre entreprise dont le seul secteur d'activité est le nettoyage de locaux et qui n'emploie principalement que des agents de service dont les tâches sont justement celles proscrites par le service médical du travail vous concernant.

Votre inaptitude totale et définitive à votre poste de travail et le fait que tout reclassement dans l'entreprise soit impossible nous ont conduits à devoir envisager votre licenciement. C'est pourquoi, en date du 30 mai 2007, nous vous convoquions à un entretien préalable à un éventuel licenciement prévu pour se tenir le 7 juin 2007, en vue de vérifier nos possibilités de procéder à votre reclassement interne; voire à procéder à votre licenciement.

Lors de notre entretien, vous avez reconnu que les particularités de notre métier et les restrictions médicales vous concernant étaient incompatibles puisque vous continuez de souffrir de vos maux également dans votre vie quotidienne personnelle.

Compte tenu de ce qui précède, nous vous notifions par la présente votre licenciement tenant à votre inaptitude médicale à tenir votre poste de travail, à l'impossibilité de l'aménager selon les prescriptions du médecin du travail et à l'impossibilité de pourvoir à votre reclassement au sein de notre entreprise.

Considérant que vous n'êtes pas apte à travailler pendant la durée du délai-congé que notre convention collective vous reconnaissait, la rupture de votre contrat de travail interviendra à la date de 1ère présentation de cette lettre recommandée avec avis de réception ».

Il faut commencer par déterminer quelle procédure s'appliquait : celle de l'article L 122-24-4 ou celle de l'article L 122-32-2 du code du travail.

Celle prévue par le 2ème texte doit être retenue dès lors que l'inaptitude a pour origine l'accident du travail, au moins partiellement, ou qu'elle est susceptible d'avoir cette origine, ce qu'il revient au juge d'apprécier au vu des éléments dont l'employeur avait connaissance dans la période précédent immédiatement le licenciement.

Selon l'expertise, la rechute est consolidée au 20 février 2007, et les arrêts postérieurs sont sans rapport avec elle.

L'expert n'a fait mention d'aucune séquelle au 20 février 2007, et Madame [K] n'indique pas qu'elle a bénéficié d'une rente accident du travail.

Elle a admis ces conclusions en n'exerçant pas de recours, et les avis d'inaptitude n'indiquent pas que celle-ci est la conséquence de la rechute.

En se situant juste avant le licenciement, ce sont donc les arrêts de maladie qui sont la cause exclusive de l'inaptitude, le fait que ce soit la visite de reprise qui ait mis fin à la période de suspension étant sans incidence à cet égard.

Il ne peut être tenu compte du certificat délivré par le médecin du travail le 23 septembre 2008, affirmant le contraire, car il est postérieur au licenciement, et fait état d'un élément qui ne figure pas sur les avis d'inaptitude, qui sont les seuls permettant à l'employeur de se déterminer sur la procédure applicable.

En conclusion, c'est celle prévue par l'article l 122-24-4 du code du travail qui a été à bon droit retenue.

La société devait donc rechercher sur reclassement, au vu des conclusions du médecin, au besoin par mutation, transformation de poste ou aménagement du temps de travail.

Les restrictions étaient incompatibles avec un poste d'agent de propreté, même aménagé ou à temps partiel.

Seul un poste administratif aurait pu convenir.

Si les 2.500 salariés de la société sont essentiellement des postes d'agent de propreté ou d'agents de maîtrise qui vont sur le terrain, elle ne conteste pas qu'elle a aussi des postes administratifs.

Selon ses papiers à en tête de l'époque, la société comporte 8 agences :

- [Localité 10], qui est aussi le siège social,

- [Localité 9],

- [Localité 4],

- [Localité 12],

- [Localité 6],

- [Localité 3],

- [Localité 5],

- [Localité 8].

Madame [D], la directrice des ressources humaines, a interrogé certaines de ces agences, puisque la société produit les réponses négatives de celles de :

- [Localité 9],

- [Localité 4],

- [Localité 3].

Toutefois il n'existe aucune justification de ce que celles de [Localité 12], [Localité 6], [Localité 5] et [Localité 8] aient aussi été interrogées.

Concernant l'agence principale d'ORLÉANS, s'il est logique que Madame [D] ne s'interroge pas elle-même, la société aurait dû produire le registre du personnel, ce qu'elle ne fait pas.

L'obligation de reclassement n'a été que partiellement remplie, ce qui rend le licenciement infondé.

Puisque l'obligation de reclassement a été méconnue, le préavis est dû, de même que les congés payés afférents.

Le rappel d'indemnité de licenciement sera rejeté, l'article L 122-32-6 du code du travail étant inapplicable.

Madame [K] devra restituer la somme perçue à ce titre en application de l'exécution provisoire.

Madame [K] ayant plus de 2 ans d'ancienneté dans une société d'au moins 11 salariés, les dommages et intérêts ne peuvent être inférieurs au salaire des 6 derniers mois.

Madame [K] ne produisant aucune pièce permettant de connaître sa situation professionnelle ultérieure, son préjudice matériel et moral n'a pas excédé le minimum, soit 7.525,86 euros.

Il convient d'ordonner le remboursement des indemnités de chômage, dans la limite de 3 mois.

La société devra remettre les documents induits sous astreinte, comme indiqué au dispositif.

La procédure n'est nullement abusive.

Ses demandes étant pour l'essentiel fondées en leur principe, il est inéquitable qu'elle supporte ses frais irrépétibles.

Il convient de confirmer les 850 euros et d'y ajouter 650 euros.

Enfin la société supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

DÉCLARE recevables les appels, principal et incident,

CONFIRME le jugement, sauf sur les points ci-après,

L'INFIRMANT de ce chef, et statuant à nouveau,

CONDAMNE la SAS LIMPA NETTOYAGES à payer à Madame [O] [K] 7.525,86 euros de dommages et intérêts pour licenciement infondé (au lieu de 22.600 euros de dommages et intérêts en application de l'article L 1226-15 du code du travail),

REJETTE le solde d'indemnité de licenciement, et condamne Madame [O] [K] à rembourser à la SAS LIMPA NETTOYAGES les 3.823,95 euros perçus à ce titre,

CONDAMNE la SAS LIMPA NETTOYAGES à remettre à Madame [O] [K] un bulletin de paie pour le préavis et les congés payés afférents, un certificat de travail, une attestation ASSEDIC en tenant compte, sous une astreinte provisoire de 10 euros par jour et par document faute d'exécution 15 jours après la notification de l'arrêt, et à lui payer 650 euros supplémentaires en application de l'article 700 du code de procédure civile,

ORDONNE le remboursement par la SAS LIMPA NETTOYAGES aux organismes concernés des indemnités de chômage perçues par Madame [O] [K] du jour de la rupture, dans la limite de 3 mois d'indemnités,

REJETTE les dommages et intérêts pour procédure abusive et CONDAMNE la SAS LIMPA NETTOYAGES aux dépens d'appel.

Et le présent arrêt a été signé par le Président de Chambre et par le Greffier

Valérie LATOUCHE Daniel VELLY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/02886
Date de la décision : 28/01/2010

Références :

Cour d'appel d'Orléans, arrêt n°09/02886


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-01-28;09.02886 ?
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