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13/10/2008 | FRANCE | N°07/01974

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambre civile 1, 13 octobre 2008, 07/01974


CHAMBRE CIVILE
GROSSES + EXPÉDITIONS
la SCP LAVAL-LUEGER Me Jean-Michel DAUDÉ

13 / 10 / 2008
ARRÊT du : 13 OCTOBRE 2008
N° RG : 07 / 01974
DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BLOIS en date du 05 Juillet 2007

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :
Monsieur Bernard X... ...41700 CHEVERNY

La S. A. MONCEAU GENERALE ASSURANCES agissant en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège 1 Avenue des Cités Unies d'Europe B. P. 10217 41103 VENDOME CEDEX

représentée p

ar la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour
ayant pour avocat Me Jacques SIEKLUCKI, du barreau de BLOIS
D'UNE ...

CHAMBRE CIVILE
GROSSES + EXPÉDITIONS
la SCP LAVAL-LUEGER Me Jean-Michel DAUDÉ

13 / 10 / 2008
ARRÊT du : 13 OCTOBRE 2008
N° RG : 07 / 01974
DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BLOIS en date du 05 Juillet 2007

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :
Monsieur Bernard X... ...41700 CHEVERNY

La S. A. MONCEAU GENERALE ASSURANCES agissant en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège 1 Avenue des Cités Unies d'Europe B. P. 10217 41103 VENDOME CEDEX

représentée par la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour
ayant pour avocat Me Jacques SIEKLUCKI, du barreau de BLOIS
D'UNE PART
INTIMÉES :
La Société MACIF prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège Chaban de Chauray 79037 NIORT CEDEX 9

Madame Marie-Line Z... épouse A... ... 41700 COUR CHEVERNY

représentées par Me Jean-Michel DAUDÉ, avoué à la Cour
ayant pour avocat Me Audrey HAMELIN, du barreau de BLOIS
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL EN DATE DU 24 Juillet 2007
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 3 septembre 2008

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, à l'audience publique du 09 SEPTEMBRE 2008, Madame Marie-Brigitte NOLLET, Conseiller, a entendu les avocats des parties, avec leur accord, par application des articles 786 et 910 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
Lors du délibéré :
Monsieur Bernard BUREAU, Président de Chambre,
Madame Marie-Brigitte NOLLET, Conseiller, Rapporteur, qui en a rendu compte à la collégialité,

Madame Elisabeth HOURS, Conseiller.
Greffier :
Madame Anne-Chantal PELLÉ, Greffier lors des débats.
ARRÊT :
Prononcé publiquement le 13 OCTOBRE 2008 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Le 5 avril 2003, à 5 heures du matin, un incendie s'est déclaré dans un immeuble, sis ...à COUR CHEVERNY (41), appartenant à Bernard X... et loué pour partie à Marie-Line Z... épouse A..., laquelle y exploite une activité commerciale de couturière-retoucheuse sous l'enseigne " VOS RÊVES SUR MESURE ".
Suivant ordonnance du 20 mai 2003, le juge des référés a ordonné une expertise confiée à monsieur Daniel D..., ultérieurement remplacé par monsieur Daniel E... .
Aux termes de son rapport, déposé le 16 octobre 2003, ce dernier a conclu à un incendie d'origine accidentelle, ayant pris naissance dans la partie d'immeuble dont Bernard X... s'était réservé l'usage exclusif.
Par acte du 18 mars 2005, Marie-Line Z... épouse A... et son assureur, la MACIF, ont fait assigner Bernard X... et la MUTUELLE GÉNÉRALE D'ASSURANCE, aux fins de voir déclarer le premier responsable du sinistre et de le voir condamner, solidairement avec son assureur, à les indemniser de leurs préjudices.
Par jugement du 5 juillet 2007, le tribunal a :- déclaré la MACIF, subrogée dans les droits et actions de son assurée, et Marie-Line Z... épouse A... recevables et bien fondées en leurs demandes,- déclaré Bernard X..., solidairement tenu avec son assureur, la MUTUELLE GÉNÉRALE D'ASSURANCE, cette dernière dans les limites de sa garantie, de les indemniser de leur entier préjudice et condamné les intéressés à payer : # à la compagnie la MACIF la somme de 36. 842 €, à titre principal, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, outre celle de 1. 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, # à Marie-Line Z... épouse A... la somme de 3. 000 €, au titre de son préjudice personnel, outre 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- ordonné l'exécution provisoire du jugement,- condamné Bernard X..., in solidum avec la MUTUELLE GÉNÉRALE D'ASSURANCE aux dépens, en ce compris les frais de référé et d'expertise.

Bernard X... et la MUTUELLE GÉNÉRALE D'ASSURANCE ont relevé appel de cette décision.
Ils en sollicitent l'infirmation et, aux termes de leurs écritures signifiées le 10 juin 2008, demandent à la cour de :- dire que, seules, les dispositions des articles 1719 et suivants du code civil ont vocation à s'appliquer en l'espèce,- dire que Marie-Line Z... épouse A... ne rapporte pas la preuve d'un vice de construction ou d'un défaut d'entretien imputable au bailleur, qui soit en relation avec le sinistre, et de les débouter de leurs demandes,

reconventionnellement,- constater que l'expert judiciaire n'a pu déterminer avec certitude l'origine du sinistre et dire qu'en application des dispositions de l'article 1733 du code civil, Marie-Line Z... épouse A... est présumée responsable de l'incendie,- condamner cette dernière, solidairement avec son assureur, la MACIF, à payer avec intérêts au taux légal : # à la M. G. A, subrogée dans les droits de Bernard X..., la somme de 185. 542 €, # à Bernard X... la somme de 4. 356 €,- condamner Marie-Line Z... épouse A... et la MACIF, in solidum, à payer à la M. G. A la somme de 3. 000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- les condamner, sous la même solidarité aux dépens.

Bernard X... et la MUTUELLE GÉNÉRALE D'ASSURANCE soutiennent que les dispositions des articles 1733 et 1734 du code civil n'édictent aucune présomption de responsabilité au profit du preneur contre le bailleur, que c'est donc à tort que le premier juge a accueilli l'action des intimées sur le fondement de l'article 1734 du code civil et que seuls les articles 1719 et 1721 du même code sont susceptibles de s'appliquer.

Ils allèguent qu'il incombe à Marie-Line Z... épouse A... d'apporter la preuve d'une faute, vice de construction ou défaut d'entretien, susceptible d'engager la responsabilité du bailleur, que la détermination du point de départ de l'incendie ne peut se confondre avec la cause de ce dernier, que, l'origine du sinistre n'ayant pu, en l'espèce, être déterminée avec certitude par l'expert, la responsabilité du bailleur ne peut être retenue sur le fondement de l'article 1721 du code civil et que, ni les dispositions de l'article 1719-3°, ni celles de l'article 1382 du code civil, ne sont applicables en la matière. Les appelants font valoir que Bernard X... n'a fait qu'entreposer des archives dans le grenier, où, selon l'expert, l'incendie aurait pris naissance, que cette occupation ne saurait s'assimiler à une jouissance effective des lieux comparable à celle d'un locataire, que Marie-Line Z... épouse A... ne peut donc s'exonérer de la présomption de responsabilité qui pèse sur elle en vertu de l'article 1733 du code civil, qu'elle doit, par application de ce texte, être déclarée responsable du sinistre et condamnée à les indemniser de leur entier préjudice.

Suivant conclusions récapitulatives signifiées le 24 juin 2008, Marie-Line Z... épouse A... et la MACIF sollicitent la confirmation du jugement entrepris, sauf, subsidiairement, à en substituer le fondement, le rejet de la demande reconventionnelle des appelants, la condamnation solidaire de ces derniers à leur payer la somme de 2. 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et leur condamnation solidaire aux dépens.

Elles soutiennent que la présomption de responsabilité pesant sur le locataire se trouve écartée, dès lors que le bailleur a conservé la jouissance exclusive d'une partie des locaux et qu'il les occupe au même titre qu'un autre locataire, ce qui est le cas en l'espèce puisque Bernard X... occupait privativement une partie de l'immeuble loué, en l'occurrence le grenier, dans lequel il stockait des archives et du matériel, que l'expert a constaté que l'incendie avait pris naissance dans ce grenier et que la cause pouvait provenir, soit d'une défaillance d'un circuit électrique, soit de produits stockés dans les lieux, que Bernard X..., qui a d'ailleurs commis des négligences en entreposant dans le grenier des produits inflammables, est seul tenu de supporter les conséquences du sinistre. Subsidiairement, les intimées invoquent les dispositions de l'article 1719-3° du code civil et le manquement commis en l'occurrence par le bailleur à son obligation d'assurer la jouissance paisible des lieux, et, plus subsidiairement encore, les dispositions de l'article 1382 du code civil, faisant valoir que l'incendie s'était déclaré en raison des négligences commises par le bailleur, du fait d'une installation électrique non conforme et du stockage de matériels dans les lieux. Elles font enfin valoir qu'il est certain que l'incendie n'a pas pris naissance dans les locaux occupés par Marie-Line Z... épouse A... et qu'aucune faute n'est établie à l'encontre de cette dernière.

SUR CE, LA COUR :

Attendu qu'il résulte du rappel des faits, tel qu'il est énoncé par l'expert et non contesté par les parties, que l'incendie s'est déclaré vers 5 heures du matin, qu'il a été découvert par un voisin, sous la forme d'une épaisse fumée qui s'échappait du toit au-dessus du magasin exploité par Marie-Line Z... épouse A..., et que les ardoises ont ensuite éclaté, les flammes devenant alors visibles ; Qu'il ressort des constatations matérielles de l'expert que le feu, qui globalement s'est contenu au niveau des combles, a détruit entièrement l'étage de l'immeuble au-dessus du magasin et que ce dernier n'a été endommagé que par les fumées de l'incendie et les eaux déversées par les pompiers pour éteindre le sinistre ; Que l'expert indique que l'analyse des restes calcinés de la charpente démontre que la propagation du feu s'est effectuée, au-dessus de la dalle en béton, depuis le mur séparatif en parpaings côté Est vers le centre du bâtiment ; Que l'examen minutieux du tableau électrique situé au rez-de-chaussée de l'immeuble a établi avec certitude que cette installation n'avait pas participé à l'incendie, l'expert ayant notamment constaté que les disjoncteurs de sécurité des différents réseaux avaient juste fondu en surface, mais qu'ils étaient intacts à l'intérieur, que la carbonisation des gainages isolants situés au-dessus du tableau provenait de la chaleur émanant de l'incendie à l'étage, laquelle s'était diffusée par un orifice ouvert dans la dalle en béton pour permettre le passage des câbles électriques alimentant le rez-de-chaussée, et que les câbles de sortie, au-dessous du tableau, étaient beaucoup moins détériorés, car plus éloignés de la source de chaleur ;

Attendu que l'expert a pu, à bon droit, compte-tenu de ces constatations, conclure que le sinistre avait pris naissance au premier étage, dans les combles, près du mur en parpaings ci-dessus visé ; Qu'il en résulte avec certitude que l'incendie n'a pas pris naissance dans la partie de l'immeuble louée à Marie-Line Z... épouse A... ;

Attendu que l'expert a, en outre, déduit de ses constatations que le sinistre était d'origine accidentelle, ce qui n'est pas contesté ; Que, sans pouvoir déterminer avec certitude la cause exacte de l'incendie, il a néanmoins relevé que celui-ci pouvait provenir, soit d'une défaillance du circuit électrique, Bernard X... lui ayant certes affirmé qu'il n'existait pas d'installation de cette nature à l'étage, mais des morceaux de câbles électriques en partie calcinés ayant été retrouvés dans les décombres, soit des produits stockés par le propriétaire dans les lieux, certains provenant de son ancienne activité de quincaillier étant susceptibles de s'être dégradés dans le temps en entraînant une inflammation spontanée (insecticides, engrais azotés) ;

Attendu que la détermination des responsabilités en cas d'incendie dans un immeuble loué est régie par les dispositions spécifiques des articles 1733 et 1734 du code civil ;
Attendu que la présomption de responsabilité pesant en la matière sur le locataire, telle qu'elle résulte de l'article 1733 du code civil, est écartée, lorsque le bailleur s'est réservé la jouissance exclusive d'une partie de l'immeuble loué et qu'il l'occupe dans les mêmes conditions qu'un locataire, sauf à lui à établir que le feu a pris naissance dans la partie occupée par le preneur ou, à tout le moins, que l'incendie n'a pas commencé dans la partie qu'il s'est réservée ;
Attendu, en l'occurrence, qu'il est constant que Bernard X... s'est réservé la jouissance exclusive du grenier, desservi par une cage d'escalier indépendante, cette partie de l'immeuble n'étant pas comprise dans le bail consenti à Marie-Line Z... épouse A... ; Que, s'agissant d'un local non habitable, l'usage qu'en faisait le bailleur, qui y entreposait des archives et du matériel provenant de son ancien commerce de quincaillerie, était conforme à la destination des lieux et correspondait à l'utilisation qu'en aurait faite un locataire, c'est à dire le rangement et la conservation de biens divers ; Que, par ailleurs, les constatations et conclusions du rapport d'expertise judiciaire ci-avant analysées, et non utilement contestées, excluent, de manière certaine, que le sinistre ait pris naissance dans la partie de l'immeuble louée à Marie-Line Z... épouse A... et établissent au contraire qu'il a débuté dans le local dont Bernard X... s'était réservé la jouissance exclusive ; Que, dès lors, en vertu des dispositions de l'article 1734 du code civil, dont les conditions d'application au bailleur se trouvent réunies, seul, Bernard X... doit être déclaré responsable des conséquences du sinistre, étant observé qu'aucune faute en relation avec l'incendie n'est établie, ni même alléguée, à l'encontre de Marie-Line Z... épouse A... ;

Attendu, en conséquence, que c'est à bon droit que le premier juge a condamné Bernard X..., in solidum avec son assureur, à indemniser Marie-Line Z... épouse A... et la MACIF et qu'il a débouté les appelants de leur demande reconventionnelle ; Que le jugement sera confirmé ;

Attendu que Bernard X... et la MUTUELLE GÉNÉRALE D'ASSURANCE qui succombent supporteront les dépens et seront condamnés au paiement d'une indemnité de procédure de 1. 500 € ;

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Y AJOUTANT,
CONDAMNE in solidum, Bernard X... et la MUTUELLE GÉNÉRALE D'ASSURANCE à payer à Marie-Line Z... épouse A... et à la MACIF, ensemble, la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1. 500 €), sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
REJETTE le surplus des demandes,
CONDAMNE les appelants, in solidum, aux dépens et accorde à maître DAUDE, avoué, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Arrêt signé par Monsieur Bernard BUREAU, président et Madame Anne-Chantal PELLÉ, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 07/01974
Date de la décision : 13/10/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Blois, 05 juillet 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2008-10-13;07.01974 ?
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