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12/01/2007 | FRANCE | N°05/322

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Chambres reunies, 12 janvier 2007, 05/322


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE SOLENNELLE

GROSSES + EXPÉDITIONS

SCP LAVAL LUEGER
SCP DESPLANQUES-DEVAUCHELLE
Me Elisabeth BORDIER
Me Jean-Michel DAUDÉ
Me Estelle GARNIER

12 / 01 / 2007
ARRÊT du : 12 JANVIER 2007

No :

No RG : 05 / 00322

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal de Commerce de PARIS en date du 05 Janvier 1994

PARTIES EN CAUSE

DEMANDERESSE devant la Cour de Renvoi :

La S.N.C LETIERCE ET FILS
agissant poursuites et diligences de ses Gérants domiciliés en cette qualité au

dit siège
5 rue Turgot
27150 ETREPAGNY

représentée par la SCP DESPLANQUES-DEVAUCHELLE, avoués à la Cour

ayant pour avocat Me Gér...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE SOLENNELLE

GROSSES + EXPÉDITIONS

SCP LAVAL LUEGER
SCP DESPLANQUES-DEVAUCHELLE
Me Elisabeth BORDIER
Me Jean-Michel DAUDÉ
Me Estelle GARNIER

12 / 01 / 2007
ARRÊT du : 12 JANVIER 2007

No :

No RG : 05 / 00322

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal de Commerce de PARIS en date du 05 Janvier 1994

PARTIES EN CAUSE

DEMANDERESSE devant la Cour de Renvoi :

La S.N.C LETIERCE ET FILS
agissant poursuites et diligences de ses Gérants domiciliés en cette qualité audit siège
5 rue Turgot
27150 ETREPAGNY

représentée par la SCP DESPLANQUES-DEVAUCHELLE, avoués à la Cour

ayant pour avocat Me Gérard FREZAL, du barreau de ROUEN

D'UNE PART

DÉFENDEURS devant la Cour de Renvoi :

La S-A STOLZ SEQUIPAG
agissant en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège
2 rue du Colonel Driant
75001 PARIS

La S.A. AXA FRANCE IARD
agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration, domicilié en cette qualité audit siège
26, Rue Drouot
75009 PARIS

représentées par Me Jean-Michel DAUDÉ, avoué à la Cour

ayant pour avocat la SCP NEVEU-SUDAKA ET ASSOCIES, du barreau de PARIS

La SOCIÉTÉ GÉNÉRALE
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
29 boulevard Haussmann
75009 PARIS

représentée par Me Elisabeth BORDIER, avoué à la Cour

ayant pour avocat Me Etienne RACHEZ, du barreau de PARIS

La S.A. ASSURANCES GÉNÉRALES DE FRANCE IART " AGF IART " telle que venant aux droits de PFA IARD agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration, domicilié en cette qualité audit siège
87, rue de Richelieu
75002 PARIS

représentée par la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour

ayant pour avocat Me Bruno LEPLUS, du barreau de PARIS

La SA SOCOTEC
agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration, domicilié en cette qualité audit siège
3 avenue du Centre * Les Quadrants
78280 GUYANCOURT

représentée par Me Elisabeth BORDIER, avoué à la Cour

ayant pour avocat la SCP GODART ET ASSOCIES, du barreau de PARIS

La S.A.S. QUALITEST INDUSTRIE
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Domaine de Courbeville Ouest
91400 ORSAY

représentée par Me Estelle GARNIER, avoué à la Cour

ayant pour avocat la SCP GIRAULT-CELERIER, du barreau d'ORLÉANS

La S-A ITA INGENIERIE
agissant en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège
Immeuble Sigma
Forum de la Rocade
35510 CESSON SEVIGNE

Maître François B...
pris en sa qualité de liquidateur de la liquidation judiciaire de la SA ITA INGENIERIE
...
35000 RENNES

La S.A. AXA GLOBAL RISKS
telle que venant aux droits de l'UAP agissant en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège
26 rue Drouot
75426 PARIS CEDEX 09

Maître Marie-Claire C...
pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SA ITA INGENIERIE, nommée en cette qualité par jugement du Tribunal de Commerce de RENNES du 12 janvier 2005.
...
35000 RENNES

Maître Yves D...
pris en sa qualité d'administrateur judiciaire et encore de commissaire à l'exécution du plan de la société SAUER ENGINEERING POLYINDUS
Mandataire liquidateur-...
...
77007 MELUN CEDEX

Maître Jean-Paul E...
pris en sa qualité d'administrateur judiciaire et encore de commissaire à l'exécution du plan de la société SAUER ENGINEERING POLYINDUS
Mandataire liquidateur
...
77130 MONTEREAU

Maître F...
pris en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société LARIVE. La Société LARIVE est en LJ clôturé pour insuffisance d'actif (TC Toulouse)
Mandataire liquidateur
...
31000 TOULOUSE

DÉFAILLANTS faute de constitution d'avoué-

D'AUTRE PART

DÉCLARATION de SAISINE devant la COUR DE RENVOI EN DATE DU 06 Janvier 2005

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 31 octobre 2006

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats

Monsieur Alain RAFFEJEAUD, Président de Chambre,

Madame Marie-Brigitte NOLLET, Conseiller,

Monsieur Yves FOULQUIER, Conseiller,

Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller,

Madame Elisabeth HOURS, Conseiller,.

Greffier :

Madame Anne-Chantal PELLÉ, Greffier, lors des débats et du prononcé de l'arrêt.

DÉBATS :

A l'audience publique du 10 Novembre 2006, ont été entendus :
Monsieur Alain RAFFEJEAUD, Président de Chambre, en son rapport,
les avocats des parties en leurs observations,

ARRÊT :

Prononcé publiquement le 12 JANVIER 2007 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

La société LETIERCE a fait édifier courant 1986 à BASSENS (Gironde) un complexe industriel céréalier, comportant notamment un portique de chargement des navires, relié à un silo de stockage par tapis roulant.

Sont notamment intervenus dans la réalisation de ce complexe, la société ITA SEMADA, devenu ITA INGENIERIE en qualité de maître d'oeuvre, la société STOLZ SEQUIPAG pour le lot " ouvrage et manutention ", ses sous-traitants, les sociétés LARIVE et SAUER, et enfin le bureau SOCOTEC et la société SGS QUALITEST pour le contrôle technique.

L'ensemble des ouvrages ont été livrés fin octobre 1986, mais, le 25 mars 1987, pendant le chargement d'un navire, l'engin de chargement s'est effondré sur celui-ci et sur le quai, entraînant la mort du grutier et la destruction totale de l'engin ;

Sa reconstruction a été confiée à la société STOLZ, mais il a de nouveau été détruit le 22 juillet 1989, cette fois par un incendie.

L'engin a été reconstruit, mais la société LETIERCE s'est plainte de dysfonctionnements.

Entre-temps, elle avait obtenu, par ordonnance de référé en date du 2 avril 1987, la désignation d'un expert en la personne de M. G..., lequel a déposé plusieurs rapports, mais n'a pu accomplir la totalité de sa mission en raison de difficultés de financement des opérations d'expertise par la société LETIERCE.

Dans le même temps, celle-ci et la société STOLZ qui s'opposaient sur le règlement des situations et l'existence des malfaçons, ont signé le 25 mars 1988 un protocole d'accord censé régler le sort des divers litiges qui les opposaient.

C'est dans ces circonstances que la société STOLZ qui n'était pas payée de ses travaux, a saisi le 6 août 1991 le tribunal de commerce de PARIS, que reconventionnellement, la société LETIERCE a réclamé l'indemnisation de son préjudice et la désignation d'un expert, et que le tribunal, par jugement en date du 5 janvier 1994 :
-condamné la société LETIERCE à payer à la société STOLZ la somme de 475. 380,98 francs TTC avec intérêts légaux depuis le 11 octobre 1986,
-débouté la société STOLZ de sa demande en paiement d'une somme de 1. 188. 408,10 francs TTC,
-ordonné une expertise et commis M. H...et M. G..., à l'effet de donner leur avis sur les préjudices allégués par la société LETIERCE pouvant être exclusivement imputés à l'accident du 25 mars 1987.

Pour faire droit partiellement aux prétentions de la société STOLZ, le tribunal a considéré que les réserves ayant été levées, la retenue de garantie de 475. 380,98 francs n'avait plus lieu d'être maintenue, mais qu'en revanche, la réfaction de 1. 188. 408,10 francs n'avait pas été indûment opérée par la société LETIERCE, dès lors que le protocole du 25 mars 1988 avait fixé à cette somme son préjudice.

Pour ensuite ordonner une expertise, les premiers juges ont estimé que celle-ci, précédemment ordonnée, mais qui n'avait pas été mise en oeuvre, était particulièrement nécessaire dans une affaire aussi complexe.

Sur appels des sociétés STOLZ et LETIERCE, la cour d'appel de PARIS, par arrêt en date du 14 novembre 2000, a notamment déclaré la société LETIERCE irrecevable pour défaut de qualité et d'intérêt à agir, m ais également irrecevable l'intervention volontaire de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, laquelle arguait d'une cession de créance par la société LETIERCE en vertu de la loi dite DAILLY (aujourd'hui codifiée aux articles L 313-23 et suivants du Code monétaire et financier).

Pour statuer ainsi, la cour d'appel a considéré que la société LETIERCE n'avait jamais été propriétaire des installations puisque celles-ci faisaient l'objet d'un crédit-bail, ni n'en avait été l'exploitant puisque c'étaient ses filiales, LMI-SPBL et CERECOLE, qui les exploitaient.

S'agissant de l'intervention de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, elle a estimé qu'elle se heurtait, en outre, aux dispositions de l'article 564 du nouveau Code de procédure civile.

Sur pourvoi de la société LETIERCE et pourvoi incident de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, la Cour de cassation, par arrêt en date du 15 décembre 2004, a cassé et annulé cette décision, aux motifs d'une part, qu'ayant relevé que la société LETIERCE avait fait édifier le complexe industriel, la cour d'appel n'avait pas recherché, comme il lui était demandé, si la société LETIERCE n'était pas recevable à agir contre les constructeurs responsables en qualité de maître de l'ouvrage d'origine, qualité qui lui était reconnue dans les contrats conclus en son nom propre avec les sociétés ITA SEMADA, SOCOTEC et STOLZ, et d'autre part, qu'ayant relevé que l'indemnisation du préjudice né des pertes d'exploitation avait été réclamée en première instance par la société LETIERCE, et que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE tirait son droit éventuel de la subrogation dans les droits de la société LETIERCE par suite de la cession de créance, l'intervention de cette banque ne créait dès lors aucun litige nouveau, procédant directement de la demande originaire, et tendant aux mêmes fins.

La cour de ce siège, désignée comme cour de renvoi, a été régulièrement saisie par déclaration au greffe en date du 6 janvier 2005.

La société LETIERCE a justifié sa qualité et son intérêt à agir par le fait qu'elle était demeurée propriétaire des installations jusqu'au 1er octobre 1987, puis était intervenue en qualité de maître d'ouvrage délégué à compter de cette date.

Elle a justifié le maintien de la retenue de garantie par le fait qu'elle n'avait pas levé les réserves concernant les travaux de parachèvement du portique et " hors portique 1986 ".

Elle s'est également opposée au paiement de la somme de 1. 188. 408,10 francs correspondant à son préjudice tel que définitivement fixé au protocole du 25 mars 1988, de même qu'à celui de la somme de 1. 220. 533,39 francs correspondant à un portique non réceptionné pour un tonnage de 1. 250 tonnes-heure.

Elle a conclu à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il avait ordonné une expertise.

Elle a sollicité, en tout état de cause une somme de 30. 000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, intervenante volontaire, s'est prévalue des termes de l'arrêt de cassation pour conclure à la recevabilité de son intervention.

Elle a demandé paiement à la société STOLZ, en sa qualité de cessionnaire de la créance de la société LETIERCE, d'un montant minimum de 1. 372. 041 euros au titre des pertes d'exploitation subies par la cédante, outre intérêts au taux légal et 3. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société STOLZ et son assureur, la compagnie AXA FRANCE IARD, se sont prévalus de ce que la société LETIERCE avait, dans un premier temps, saisi la cour d'appel de PARIS d'un appel-nullité, pour prétendre que la dévolution s'était opérée pour le tout et s'opposer à tout renvoi de l'affaire devant les premiers juges.

Ils ont ensuite invoqué une transaction entre la société STOLZ d'une part, la société LETIERCE et ses filiales d'autre part, intervenue le 19 février 2003, pour soutenir que cette dernière, outre le fait qu'elle n'était ni propriétaire, ni exploitante de l'installation, était irrecevable en ses demandes.

Ils ont encore argué d'un jugement du tribunal de commerce de PARIS passé en force de chose jugée et opposable à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, en date du 7 octobre 2002, qui avait déclaré irrecevables les demandes de la société LETIERCE pour perte d'exploitation et prescrites celles de ses filiales.

Ils ont alors considéré que la demande de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE était de même irrecevable, outre le fait que celle-ci ne précisait pas le fondement de sa demande en fait et en droit, n'avait pas saisi la cour de renvoi, invoquait une cession de créance par une société qui n'était pas partie à l'instance et présentait une demande nouvelle devant la cour.

Au cas où il serait néanmoins fait droit à la demande de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, la société STOLZ a demandé la garantie des sociétés LETIERCE, SOCOTEC et SGS QUALITEST à raison des fautes à l'origine du sinistre qu'elles avaient commises.

La société STOLZ a enfin réclamé une somme de 30. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La SOCOTEC, après avoir rappelé le caractère limité de sa mission, a demandé sa mise hors de cause en se fondant sur une ordonnance de non-lieu du juge d'instruction du tribunal de grande instance de BORDEAUX du 29 mars 1998, sur le rapport d'expertise de M. G...et sur un jugement du tribunal de grande instance de BORDEAUX du 18 octobre 2000.

Elle a, en tant que de besoin, sollicité un sursis à statuer dans l'attente d'un jugement du tribunal de grande instance de BORDEAUX saisi d'une action à son encontre.

Elle a, en tout état de cause, demandé la garantie des sociétés LETIERCE, STOLZ et AXA, outre le paiement d'une somme de 8. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société SGS QUALITEST INDUSTRIE a fait valoir qu'elle avait été créée en 1998 et qu'elle n'avait aucun lien de droit avec la SGS QUALITEST intervenue sur le chantier.

A titre subsidiaire, elle a conclu à l'irrecevabilité de son appel en garantie en ce qu'il était nouveau en cause d'appel et se heurtait à l'autorité de la chose jugée attachée à un jugement du 18 octobre 2000.
Plus subsidiairement, elle a conclu à l'absence de responsabilité de la SGS QUALITEST.

Elle a sollicité une somme de 3. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La compagnie A.G.F., assureur de la société LARIVE, a conclu à l'irrecevabilité des demandes de la société LETIERCE venant aux droits de ses filiales et a sollicité, pour le surplus, le renvoi de l'affaire devant les premiers juges.

Elle a sollicité une somme de 3. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Maîtres D...et E..., ès qualités de commissaires à l'exécution du plan de la société SAUER ont été cités à leurs personnes, Maître C...ès qualités de liquidateur de la société ITA INGENIERIE l'a été à domicile et Maître F...ès qualités d'administrateur judiciaire de la société LARIVE a fait l'objet d'un procès-verbal de recherches infructueuses.

Aucun n'a comparu en appel, de sorte que le présent arrêt sera rendu par défaut.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 31 octobre 2006.

La société LETIERCE a sollicité le rejet des débats des dernières conclusions des sociétés STOLZ et AXA déposées le 27 octobre 2006.

SUR CE,

Sur la demande de rejet des débats :

Attendu que la société LETIERCE n'expose pas en quoi les dernières conclusions des sociétés STOLZ et AXA auraient mérité réponse de sa part ;

Qu'elles ne contiennent en tout cas aucune demande ou moyen nouveau ;

Que la société LETIERCE a elle-même conclu le 27 octobre 2006 ;

Qu'il n'existe dès lors aucun motif de rejet des débats des écritures adverses ;

Sur la qualité et l'intérêt à agir de la société LETIERCE :

Attendu qu'il n'est pas inutile de rappeler que la société STOLZ est la demanderesse d'origine et qu'il est pour le moins paradoxal de contester, après plusieurs années de procédure, la qualité pour agir d'une défenderesse que l'on a soi-même assigné, sans expliquer à quel titre on a pu la mettre en cause ;

Que quoi qu'il en soit, il est constant que la société LETIERCE a passé les marchés de travaux avec les entreprises et le maître d'oeuvre en son nom propre, en qualité de maître de l'ouvrage ;

Que s'il est exact que l'opération a été financée au moyen d'un crédit-bail, il ressort de ce contrat en date du 5 mai 1986, que le locataire LETIERCE s'engageait envers le bailleur à faire réaliser, sous sa responsabilité, l ‘ installation et à la lui remettre en toute propriété après son exécution ;

Que le contrat mettait également à sa charge " la réparation pécuniaire intégrale de tous les dommages qui pourraient survenir pour quelque cause que ce soit, et même par cas fortuit, force majeure ou fait de tiers, tant à l'installation que du fait de cette dernière et / ou de l'opération de réalisation " ;

Que le locataire se voyait encontre confier l'exercice des actions en responsabilité et autres recours relatifs à l'exécution des commandes et marchés ;

Que d'une manière générale, le locataire assumait " tous les risques attachés à l'ensemble des opérations ", tandis que " le rôle du bailleur dans la réalisation de l'installation é (tait) purement financier " ;

Attendu que la date d'achèvement de l'installation, à laquelle était censée débuter le crédit-bail et donc le transfert des risques du locataire au bailleur, fixée initialement au 1er septembre 1986, a été reportée aux termes de divers avenants et, en dernier lieu, au 1er avril 1988, selon avenant en date du 18 juillet 1988 ;

Qu'il s'ensuit que jusqu'à la date du 1er avril 1988, la société LETIERCE avait qualité pour poursuivre la réparation des dommages subis par l'installation, et plus particulièrement des dommages résultant du sinistre du 25 mars 1987 ;

Que par ailleurs, la société LETIERCE est susceptible, mais sur un autre fondement juridique, de réclamer réparation aux responsables du dommage qu'elle a pu subir en sa qualité de locataire ;

Qu'au demeurant, la société STOLZ ne lui avait pas contesté dans le protocole d'accord du 25 mars 1988 un préjudice évalué provisoirement à environ un million de francs ;

Qu'en conséquence, elle a qualité et intérêt à agir ;

Sur la portée de la transaction en date du 19 février 2003 :

Attendu qu'aux termes de cette transaction intervenue entre la société STOLZ et son assureur d'une part, la société LETIERCE et ses filiales d'autre part, ces dernières ont reconnu que la société STOLZ restait créancière d'une somme d'un million de francs au titre du litige présentement soumis à la cour et la société STOLZ a renoncé à sa créance, en échange de quoi la société LETIERCE a renoncé à tout recours contre la société STOLZ, se réservant toutefois de mettre en oeuvre l'action directe contre son assureur ;

Qu'il s'ensuit que le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il avait débouté la société STOLZ de sa demande en paiement d'une somme de 1. 188. 408,10 francs, et qu'il convient de donner acte aux parties de la transaction intervenue ;

Sur la portée du jugement en date du 7 octobre 2002 :

Attendu qu'aux termes de ce jugement, le tribunal de commerce de PARIS a dit la société LETIERCE irrecevable à agir en indemnisation de ses pertes d'exploitation, au seul motif que la cour d'appel de PARIS, dans son arrêt du 14 novembre 2000 qui n'était pas encore cassé, en avait jugé ainsi ;

Mais attendu que selon l'article 625 aliéna 2 du nouveau Code de procédure civile, la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ;

Qu'il s'ensuit que le jugement du 7 octobre 2002 qui s'est borné à reprendre la motivation de l'arrêt cassé, est nul de plein droit en vertu du texte précité ;

Qu'en conséquence, la société LETIERCE reste recevable à poursuivre l'indemnisation de son préjudice à l'encontre de la compagnie AXA ;

Sur les responsabilités et les préjudices :

Attendu que les premiers juges n'ont pas statué sur les responsabilités du sinistre et les préjudices qui en ont résulté ;

Que la cour n'ayant à statuer que sur les dernières écritures des parties, n'est pas saisie d'un appel-nullité de la part de la société LETIERCE, mais d'un appel-réformation, de sorte qu'elle a le choix entre renvoyer l'affaire devant les premiers juges ou bien évoquer, étant précisé que l'affaire n'est pas en état, la société LETIERCE n'ayant conclu ni sur les responsabilités, ni sur son préjudice ;

Attendu que le principe du double degré de juridiction est un droit pour les parties, auquel il ne convient de déroger qu'en cas d'accord entre elles ou de motif impérieux ;

Qu'en l'espèce, la société LETIERCE qui a le plus intérêt à une solution rapide du litige, ne souhaite pas que la cour évoque et les parties ne sont au demeurant pas en état ;

Qu'il convient donc de renvoyer l'affaire devant les premiers juges ;

Sur la recevabilité de l'intervention de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE :

Attendu que par la déclaration au greffe de la société LETIERCE, la cour de renvoi s'est trouvée saisie de l'entier litige, dans l'état dans lequel il se trouvait avant l'ordonnance de clôture rendue par le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de PARIS ;

Qu'il s'ensuit qu'il importe peu que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE n'ait pas effectué de déclaration de saisine ;

Attendu que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE est intervenue devant la cour d'appel de PARIS sur appel provoqué, bien que n'ayant pas été partie en première instance ;

Que si son appel provoqué est ainsi irrecevable, son intervention volontaire peut toutefois être recevable si elle y a intérêt et si son intervention a un lien suffisant avec la prétention originaire ;

Attendu que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE se prévaut d'une cession " loi DAILLY " que lui aurait consentie la société LETIERCE d'une créance que cette dernière aurait fait valoir en première instance ;

Mais attendu que s'il est exact que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE est bien cessionnaire d'une créance professionnelle sur la société STOLZ, ainsi que cela résulte du bordereau en date du 8 août 1988, il en ressort également que le créancier cédant est la société S.P.B.L., et non pas la société LETIERCE ;

Qu'en conséquence, la prétention de la société LETIERCE ne se rattache pas par un lien suffisant à la demande originaire, alors que la société S.P.B.L. n'a jamais été dans la cause ;

Attendu qu'au surplus, par un jugement passé en force de chose jugée en date du 7 octobre 2002, le tribunal de commerce de PARIS a jugé que l'action de la société S.P.B.L. engagée le 25 juin 1998 était prescrite ;

Que de même, il apparaît que la demande de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE formulée par conclusions du 26 novembre 1999, soit plus de dix ans après la notification le 16 août 1988 de la cession de créance au débiteur cédé, est prescrite par application de l'article L. 110-4 du Code de commerce ;

Qu'ainsi, l'intervention de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE est-elle doublement irrecevable ;

Sur la mise en cause des autres parties :

Attendu qu'aucune demande n'est formulée en l'état à leur encontre, hormis une demande de garantie de la société STOLZ désormais sans objet ;

Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et les dépens :

Attendu que l'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que compte tenu de la transaction intervenue, les sociétés LETIERCE, STOLZ et AXA conserveront à leur charge leurs dépens ;

Attendu que la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE qui succombe en son intervention, fera de même ;

Attendu que les dépens exposés par les autres parties seront enfin à la charge de la société LETIERCE qui les a intimées ;

PAR CES MOTIFS,
***************

DIT n'y avoir lieu à rejet des débats des dernières conclusions de la société STOLZ SEQUIPAG,

CONFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté la société STOLZ de sa demande en paiement d'une somme de 1. 188. 408,10 francs,

STATUANT à NOUVEAU de ce chef, et Y AJOUTANT,

Vu la transaction en date du 19 février 2003,

DONNE ACTE à la société STOLZ SEQUIPAG de sa renonciation à sa créance et à la société LETIERCE de sa renonciation à son action à l'encontre de la société STOLZ SEQUIPAG,

DÉCLARE la société LETIERCE recevable en son action directe contre la société AXA FRANCE IARD,

DIT n'y avoir lieu à évocation,

RENVOIE l'affaire devant les premiers juges pour qu'il soit statué sur les responsabilités dans le sinistre du 25 mars 1987 et l'indemnisation des préjudices qui en ont découlé, éventuellement subis par la société LETIERCE,

DÉCLARE irrecevable l'intervention de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE,

DIT que les sociétés LETIERCE, STOLZ SEQUIPAG, AXA FRANCE et la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE conserveront à leur charge les dépens qu'elles ont exposés,

CONDAMNE la société LETIERCE aux autres dépens d'appel, et ACCORDE à Maître BORDIER, Maître GARNIER, et à la SCP LAVAL LUEGER, avoués, le bénéfice de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile,

REJETTE toutes autres demandes comme étant sans objet ou non fondées.

Arrêt signé par Monsieur Alain RAFFEJEAUD, président et Madame Anne-Chantal PELLÉ, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Chambres reunies
Numéro d'arrêt : 05/322
Date de la décision : 12/01/2007
Type d'affaire : Chambre mixte

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Paris, 05 janvier 1994


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2007-01-12;05.322 ?
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