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05/12/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006947325

France | France, Cour d'appel d'Orléans, Ct0068, 05 décembre 2005, JURITEXT000006947325


COUR D'APPEL D'ORLÉANS CHAMBRE CIVILE GROSSES + EXPÉDITIONS la SCP LAVAL - LUEGER Me Estelle GARNIER 05/12/2005 ARRÊT du : 5 DECEMBRE 2005 No : No RG : 05/00031 DÉCISION RECOURS SUR L'ARRET de la Cour d'Appel d'ORLEANS en date du 13 Avril 2004 PARTIES EN CAUSE DEMANDERESSE : Madame Christiane X... épouse Y... 316 Rue Rodolphe Richard 45160 OLIVET Représentée par la S.C.P. LAVAL-LUEGER avoués à la Cour Ayant pour avocat la S.C.P. A. PIOUX-V. PIOUX du barreau d'ORLEANS D'UNE PART DEFENDERESSE : S.C.I. MJL prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité au dit siège 439

Rue Marcel Belot 45160 OLIVET Représentée par Maître Estell...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS CHAMBRE CIVILE GROSSES + EXPÉDITIONS la SCP LAVAL - LUEGER Me Estelle GARNIER 05/12/2005 ARRÊT du : 5 DECEMBRE 2005 No : No RG : 05/00031 DÉCISION RECOURS SUR L'ARRET de la Cour d'Appel d'ORLEANS en date du 13 Avril 2004 PARTIES EN CAUSE DEMANDERESSE : Madame Christiane X... épouse Y... 316 Rue Rodolphe Richard 45160 OLIVET Représentée par la S.C.P. LAVAL-LUEGER avoués à la Cour Ayant pour avocat la S.C.P. A. PIOUX-V. PIOUX du barreau d'ORLEANS D'UNE PART DEFENDERESSE : S.C.I. MJL prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité au dit siège 439 Rue Marcel Belot 45160 OLIVET Représentée par Maître Estelle GARNIER avoué à la Cour Ayant pour avocat Maître François TARDIF du barreau d'ORLEANS D'AUTRE PART REQUETE EN DATE DU 4 Janvier 2005 COMPOSITION DE LA COUR Lors des débats, à l'audience publique du 18 OCTOBRE 2005, Monsieur Bernard BUREAU, Président, a entendu les avocats des parties, avec leur accord, par application de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile. Lors du délibéré : Monsieur Bernard BUREAU, Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité, Madame Marie-Brigitte NOLLET, Conseiller, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller. Greffier : Mademoiselle Nathalie Z... faisant fonction de greffier. ARRÊT : Prononcé publiquement le 5 DECEMBRE 2005 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile. Par arrêt définitif du 13 avril 2004, la Cour de ce siège a notamment confirmé le jugement du Tribunal de Grande Instance d'ORLÉANS du 18 février 2003 qui a ordonné à la S.C.I. M.J.L. d'effectuer des travaux d'aménagement partiel du local commercial situé au rez-de-chaussée de son immeuble afin d'assurer aux occupants des appartements des étages supérieurs un accès direct à la rue Marcel BELOT à OLIVET sous astreinte de 300 ç par jour de

retard passé un délai de quatre mois à compter de la signification de l'arrêt et s'est réservée le pouvoir de liquider l'astreinte ; Par assignation du 21 décembre 2004, Christiane X... épouse Y..., propriétaire du fonds servant, a saisi la Cour d'appel dORLÉANS d'une demande de liquidation d'astreinte au motif que la S.C.I. M.J.L. n'a pas effectué les travaux prescrits au terme du délai qui lui avait été imparti ; Vu les conclusions récapitulatives de Christiane Y..., du 17 octobre 2005, auxquelles la Cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et demandes et dans lesquelles elle expose en substance que son intérêt à agir ne saurait être sérieusement contesté dans la mesure où elle bénéficie de l'astreinte et qu'elle doit donc pouvoir la faire liquider puisqu'il n'est pas contestable que le délai d'exécution est dépassé depuis le 28 août 2004 et que les travaux prescrits n'ont pas été réalisés ; que ces travaux constituent pour elle l'assurance que les occupants de l'immeuble de la S.C.I. n'utiliseront pas la servitude de passage, dont leur fonds bénéficie, au-delà de ce qui est prévu par les actes et son adversaire ne peut invoquer une exécution par équivalence qui ne présente aucunement une telle garantie puisque les mesures prises par la S.C.I. M.J.L. obligent les occupants de son immeuble à faire un détour ainsi qu'à accéder à leurs boîtes à lettres et à sortir leurs poubelles par le local commercial ce qui suppose, au moins, une tolérance du locataire de ce local dont il ne peut être assuré qu'elle sera toujours acquise dans l'avenir ; que le juge chargé de la liquidation de l'astreinte ne peut modifier les obligations du débiteur sans porter atteinte à l'autorité de chose jugée ; que la S.C.I. M.J.L. ne justifie d'aucune cause étrangère, ni d'aucune impossibilité technique, lui interdisant de réaliser les travaux prescrits qui n'ont été rendus nécessaires qu'en raison de la modification, par elle, de l'état antérieur des lieux quand elle a

construit le local commercial ; qu'elle sollicite donc la liquidation définitive de l'astreinte à la somme de 126.000 ç, le paiement par la S.C.I. M.J.L. de cette somme et l'autorisation pour elle de faire procéder aux travaux ainsi que l'autorisation de prendre toutes sûretés ou hypothèques pour assurer le recouvrement de sa créance ; Vu les conclusions récapitulatives de la S.C.I. M.J.L., du 14 octobre 2005, auxquelles la Cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et demandes et dans lesquelles elle expose en substance que l'injonction qui lui avait été faite de procéder à des travaux d'aménagement de son local commercial n'était qu'une modalité d'exécution de la décision au fond tendant à restaurer les conditions d'exercice antérieures de la servitude telles que définies par l'arrêt du 13 avril 2004 ; qu'elle a finalement trouvé une solution différente qui aboutit au même résultat puisqu'elle a vendu, pour un euro symbolique, le fond de sa parcelle à la Mairie d'OLIVET afin d'agrandir le parking municipal Pierre de RONSARD en contrepartie de quoi la Mairie l'a autorisée à démolir le mur de séparation qui existait avec le parking ; qu'ainsi ses locataires peuvent accéder à pied ou en voiture à la cour de l'immeuble en passant par le parking et la rue de la Source, adjacente à la rue Marcel BELOT ; qu'elle estime donc avoir satisfait, par équivalence, à son obligation et considère que Christiane Y... n'a pas d'intérêt à agir en liquidation de l'astreinte ; qu'elle ajoute que la nouvelle situation ainsi créée a nécessité de sa part un gros sacrifice car elle a abandonné 400 m de terrain constructible en plein centre-ville pour un prix dérisoire tandis que Christiane Y... a profité de cette situation pour créer un portail d'accès à sa propriété à partir de la nouvelle desserte de l'immeuble ; qu'à titre subsidiaire, elle demande à voir juger que la décision se heurtait à une impossibilité totale d'exécuter les travaux car ces derniers étaient prescrits sur

un local faisant l'objet d'un bail commercial et entraînaient une perte de surface locative pour laquelle elle est débitrice d'une garantie d'éviction envers son preneur ; que, par ailleurs, comme elle a consenti des droits de stationnement dans la cour de l'immeuble aux locataires des appartements, les travaux ne pourraient donner lieu qu'à la création d'un passage pour voiture dont la faisabilité n'est pas certaine dans cet immeuble ancien; que, dès lors, une mesure d'expertise technique s'imposerait sur ce point s'il n'était pas fait droit à sa demande principale tenant à voir la Cour constater l'exécution des travaux par équivalent ; SUR QUOI LA COUR :

1o) SUR L'INTÉRÊT À AGIR : Attendu que Christiane Y..., bénéficiaire de la condamnation sous astreinte, a manifestement intérêt à agir en liquidation de cette astreinte dès l'instant où il n'est pas contesté que l'exécution des travaux par la S.C.I. M.J.L., fût-ce par équivalence, n'a pas été faite dans le délai imparti par la Cour ; qu'ensuite, la question de savoir si cette exécution par équivalence est admissible ou non et si le non respect du délai est imputable au débiteur de l'obligation relève du fond de l'affaire et ce n'est donc pas une question de recevabilité ; 2o) SUR LA RÉALISATION DES TRAVAUX PAR ÉQUIVALENCE : Attendu que le prononcé d'une astreinte n'est pas une fin en soi et n'a pour seul objet que de contraindre son débiteur à exécuter la décision de justice dans les termes ordonnés pour permettre à son bénéficiaire d'obtenir dans les meilleurs délais le plein exercice des droits qui lui ont été reconnus ; Attendu, en l'espèce, que Christiane Y..., propriétaire d'un fonds débiteur d'une servitude strictement limitée au passage des seuls véhicules utilitaires (livraison de bois, fuel, gaz, charbon, matériaux de construction et autres) desservant le seul fonds du no75 rue Marcel BELOT à OLIVET, à l'exception de tout autre, s'est plainte de ce que, à la suite de l'achat par la S.C.I. M.J.L.

des propriétés sises aux no 73 et 75 de la rue et des travaux de réunion des deux propriétés en une seule comportant au rez-de-chaussée la création d'un local commercial, les occupants des appartements situés à l'étage devaient utiliser l'assiette de cette servitude, tant avec leurs voitures particulières qu'à pied, pour accéder à leurs locaux ce qui aggravait sensiblement la servitude dont son fonds était débiteur ; que c'est dans ce cadre qu'elle a obtenu de la Cour la condamnation de la S.C.I. M.J.L. à effectuer sous astreinte les travaux litigieux ; Attendu qu'il résulte de ce qui précède que les travaux ordonnés avaient pour seul objet de permettre à la servitude conventionnelle dont le fonds Y... est débiteur de s'exercer dans des conditions comparables à celles antérieures ou, à tout le moins, pas plus contraignantes ; qu'il est certain qu'il n'a été proposé à l'époque aux juridictions saisies aucune solution alternative ; Attendu qu'aujourd'hui, la S.C.I. M.J.L. justifie avoir mis en oeuvre des travaux, certes différents, qui présentent l'avantage de permettre l'accès des occupants de son immeuble en voiture particulière ou à pied par un cheminement situé à l'opposé de la servitude litigieuse ; que cette solution présente, en fait, des avantages pour l'ensemble des parties ; que Christiane Y..., elle-même, y trouve son compte puisque, outre le fait qu'elle a pu bénéficier du nouveau passage pour y ouvrir un portail, la servitude dont son fonds est débiteur se trouve réduite à un droit de passage limité dans les termes de l'arrêt, ce qui motivait son action initiale ; qu'elle ne justifie pas de ce que, malgré le nouveau chemin d'accès imposé aux occupants de l'immeuble de la S.C.I. M.J.L., ces derniers aient continué à user de la servitude de passage dans des termes excédant les obligations de l'acte de 1838 ; Attendu, dans ces conditions, que si le nouveau chemin d'accès impose éventuellement des contraintes à ces occupants (allongement du

parcours, difficultés d'accès aux boîtes à lettres et pour la sortie des poubelles) il s'agit là de problèmes à régler entre la S.C.I. et ses locataires et qui ne concernent pas la demanderesse dès l'instant où les modalités d'exercice de la servitude sont rétablies dans les limites fixées par le titre et l'arrêt de la Cour ; que, dès lors, il doit être jugé que les travaux ordonnés par la Cour ne constituaient qu'un mode d'exécution de la décision de justice tendant à rétablir la servitude de passage dans ses limites antérieures et que la S.C.I. M.J.L. a satisfait à la décision du 13 avril 2004 en procurant aux occupants de son immeuble une desserte satisfaisante par un autre moyen que l'exécution des travaux ordonnés ; que, dès lors, l'exécution de ces travaux devient sans objet ; 3o) SUR LA LIQUIDATION DE L'ASTREINTE : Attendu que le délai imparti par la Cour d'appel dORLÉANS expirait le 24 août 2004 ; qu'il est constant qu'à cette date, le nouveau passage par la rue de la Source et le parking public n'était pas encore opérationnel ; qu'aux termes des dispositions de l'article 36 de la loi du 09 juillet 1991, le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter ; que l'astreinte est supprimée, en tout ou partie, s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère ; Attendu qu'il résulte des éléments versés aux débats que l'arrêt de la Cour a été signifié à la S.C.I. M.J.L. le 23 avril 2004 ; que, dès le mois de juin 2004 la S.C.I. a pris contact avec la Mairie pour lui proposer la vente du terrain formant le fond de sa parcelle ; qu'ayant obtenu un accord de principe, elle a dû faire intervenir un géomètre et établir un projet de division ainsi qu'un projet d'aménagement du parking remanié et a émis, le 11 août 2004, une pollicitation qui a été acceptée par une délibération du

Conseil Municipal du 22 octobre 2004 ; que, dès cette époque, la S.C.I. M.J.L. a obtenu l'autorisation du conseil municipal d'abattre le mur qui séparait le parking public et le fond de sa parcelle ce qui mettait, dès ce moment, la cour de son immeuble en communication avec la rue de la Source ; qu'ensuite, la vente a été régularisée devant notaire le 12 janvier 2005 et un permis de démolir était accordé le 14 janvier 2005 ; qu'enfin, le 31 janvier 2005, la S.C.I. M.J.L. avisait officiellement ses locataires que, désormais, l'accès à leur logement se ferait exclusivement par la rue de la Source et "que le portail vert actuel (ndr : celui qui débouche sur le passage par le fonds Y...) sera fermé et condamné et ne pourra être utilisé que pour les livraisons de bois, charbon, fuel et matériaux (jugement de la Cour d'appel)" ; Attendu qu'il résulte de ces éléments que si la S.C.I. M.J.L. n'a pas respecté le délai imparti par la Cour pour mettre en oeuvre la nouvelle desserte de son fonds, elle a, néanmoins, remarquablement fait diligence et a dû subir les contraintes incompressibles et incontournables engendrées par la négociation à mener avec une collectivité locale (instruction du dossier, réunion du conseil municipal) et composer avec l'intervention de tiers (géomètre, notaire) dont elle ne maîtrisait pas l'emploi du temps et la disponibilité ce qui constitue une cause étrangère au sens de l'article 36 in fine de la loi du 09 juillet 1991 laquelle n'a pas à remplir les conditions de la force majeure dès l'instant où il est démontré que le débiteur de l'obligation a mis en oeuvre en temps utile les moyens nécessaires à l'exécution de la décision de justice et que le retard apporté à cette exécution provient, exclusivement, de circonstances qui ne sont pas de son fait et sur lesquelles il n'a aucune maîtrise ; que, dans ces conditions, l'astreinte sera supprimée et Christiane Y... déboutée de ses demandes ; Attendu qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser

supporter à l'intimée la charge des frais irrépétibles qu'elle a dû engager ; qu'elle sera donc déboutée de sa demande de ce chef ; PAR CES MOTIFS : Statuant en audience publique, par arrêt contradictoire et en dernier ressort : VU les articles 35 et 36 de la loi du 09 juillet 1991 ; DÉCLARE RECEVABLE l'action de Christiane Y... ; CONSTATE que la S.C.I. M.J.L. a exécuté par équivalence l'arrêt de cette Cour du 13 avril 2004 ; CONSTATE que le retard apporté à l'exécution de cette décision provient exclusivement d'une cause étrangère à la S.C.I. M.J.L. ; SUPPRIME l'astreinte prononcée par l'arrêt du 13 avril 2004 ; DÉBOUTE Christiane Y... de toutes ses demandes ; DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; CONDAMNE Christiane Y... aux dépens ; ACCORDE à Maître GARNIER, avoué, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile ; Arrêt signé par Monsieur Bernard BUREAU, président et Mademoiselle Nathalie Z... faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : Ct0068
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006947325
Date de la décision : 05/12/2005

Analyses

SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE

Il n'y a pas lieu de liquider l'astreinte lorsque la partie condamnée, bien qu'elle n'exécute pas la décision dans ses termes exacts, réalise des travaux qui, tout en étant de nature différente, assurent parfaitement la défense des intérêts de son adversaire tels qu'ils ont été protégés par la décision.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2005-12-05;juritext000006947325 ?
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