COUR D'APPEL D'ORLÉANS CHAMBRE CIVILE GROSSES + EXPÉDITIONS la SCP LAVAL - LUEGER Me Elisabeth BORDIER 07/03/2005 ARRÊT du : 07 MARS 2005 No : No RG : 04/00671 DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal d'Instance de TOURS en date du 12 Septembre 2003 PARTIES EN CAUSE APPELANTS Monsieur André X... 12 avenue de la gare 37380 MONNAIE Madame Lysiane Y... épouse X... 12 avenue de la gare 37380 MONNAIE représentés par la SCP LAVAL - LUEGER, avoués à la Cour ayant pour avocat la SCP BAYLAC - OTTAVY, du barreau de TOURS D'UNE PART INTIMÉS : Monsieur Patrick LE Z... 23 rue du Parc de Clagny 78000 VERSAILLES Aide juridictionnelle Partielle numéro 2004/002494 du 24/06/2004 Monsieur Patrick A... 2 la Joubardière 37210 VERNOU SUR BRENNE Madame Fabienne A... 2 la Joubardière 37210 VERNOU SUR BRENNE représentés par Me Elisabeth BORDIER, avoué à la Cour ayant pour avocat Me Meriem BABA-RONCIERE, du barreau de SAUMUR Monsieur Christophe LE Z... 13 boulevard Paul CEZANNE 78280 GUYANCOURT Mademoiselle Sophie LE B... 23 avenue du Parc de Clagny 78000 VERSAILLES ASSIGNES en INTERVENTION FORCÉE , NON REPRESENTES , D'AUTRE PART DÉCLARATION D'APPEL EN DATE DU 22 Janvier 2004 ORDONNANCE DE CLÈTURE DU 7 janvier 2005 COMPOSITION DE LA COUR Lors des débats, du délibéré : Monsieur François CRÉZÉ, Président de Chambre, Madame Marie-Brigitte NOLLET, Conseiller, Madame Anne C..., Conseiller. Greffier : Madame Anne Chantal D..., Greffier lors des débats et du prononcé de l'arrêt. DÉBATS : A l'audience publique du 10 JANVIER 2005, à laquelle ont été entendus les avocats des parties. ARRÊT :
Lecture de l'arrêt à l'audience publique du 07 MARS 2005 par Monsieur François CRÉZÉ, Président, lequel a signé la minute avec Madame Anne Chantal D..., Greffier. Vu l'appel interjeté par les époux X... à l'encontre d'un jugement rendu le12 septembre 2003 par le Tribunal d'Instance de TOURS, qui les a déboutés de leur
demande en nullité du bail consenti le 22 décembre 2000 par les époux LE Z... aux époux A..., a débouté chacune des parties de leurs demandes en dommages et intérêts et sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et les a condamnés aux dépens ; Vu les conclusions récapitulatives signifiées le 6 janvier 2005 par les époux X..., tendant à voir infirmer le jugement entrepris et, la Cour statuant à nouveau, à voir: - dire que le bail rural dont s'agit est nul et, en tous cas, qu'il leur est inopposable, - déclarer l'arrêt à intervenir opposable aux époux A..., - ordonner sa publication à la Conservation des Hypothèques, - condamner, in solidum, les époux LE Z... à leur payer la somme de 3.000 ç à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et celle de 2.000 ç, sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - condamner les époux LE Z..., sous la même solidarité aux dépens ; Vu les conclusions récapitulatives signifiées le 28 décembre 2004 par Patrick LE Z... et les époux A..., tendant à voir confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, à voir débouter les époux X... de leurs demandes, à les voir condamner à leur payer la somme de 1.500 ç, sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et à les voir condamner aux dépens ; Vu l'assignation en intervention forcée délivrée, suivant actes des 8 et 9 septembre 2004, puis par acte du 24 septembre 2004, à Christophe et Sophie LE Z..., es-qualités d'héritiers de leur mère, Marie-Claire FOURNIER épouse LE Z..., décédée le 3 octobre 2003 ; SUR CE, LA COUR : Attendu que Christophe et Sophie LE Z..., susnommés, n'ont pas été cités à personne, ni sur première, ni sur seconde assignation, et n'ont pas constitué avoué ; Que, cependant, dès lors que les autres intimés comparaissent, le présent arrêt sera réputé contradictoire à l'égard de tous, conformément aux dispositions de
l'article 474 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile ; Attendu qu'il résulte des énonciations du jugement entrepris, des écritures des parties et des pièces produites que, suivant acte reçu par Maître DELAGE, notaire à MONNAIE (37), le 9 septembre 1986, les époux X..., Yvette GOUGEON épouse E... et les époux LE Z... ont procédé à un échange multilatéral de parcelles, toutes sises sur la commune de VERNOU SUR BRENNE (37), échange au terme duquel les époux X... sont, notamment, devenus propriétaires indivis avec les époux LE Z... des parcelles cadastrées section A no 846, 852 et 854 ; Qu'il était expressément prévu, aux termes de cet acte, au paragraphe "Conventions particulières entre les parties", que les époux X... étaient autorisés à faire un étang, dont une partie s'étendrait sur les parcelles cadastrées section A 845, A 852 et A 854, qu'il s'agirait d'un étang d'agrément sans aucun caractère professionnel, qu'il serait seulement utilisé à usage personnel et familial par tous les riverains, que les propriétaires des parcelles cadastrées A 845, A 852 et A 854 (c'est à dire actuellement Mme E... et les époux LE Z...) et leurs enfants, ainsi que Mr Aimé E..., auraient un droit de chasse et de pêche à la ligne sur la partie de l'étang recouvrant leurs propriétés respectives ; Que l'acte prévoyait enfin un droit de préférence au profit des époux X..., en cas de vente des parcelles A 847, 853 et 855 ; Qu'il est constant que les époux X... ont aménagé un étang s'étendant notamment sur les parcelles A 852 et 854 ; Que, suivant acte notarié du 22 décembre 2000, les époux LE Z... ont vendu aux époux A... une maison d'habitation sise "la Joubardière", commune de VERNOU SUR BRENNE (37), ainsi que diverses parcelles de terres et bois situées alentour ; Que, par acte du même jour, les époux LE Z... ont consenti aux époux A... un bail rural à long terme, ayant commencé à courir le 1er décembre 2000 pour s'achever le 30
novembre 2018, sur la moitié indivise leur appartenant des parcelles A 846, 852 et 854, ainsi que sur les parcelles A 853 et 855, les bailleurs déclarant abandonner aux preneurs le droit de chasse et de pêche à la ligne, dont ils bénéficiaient avec leurs enfants, sur la partie d'étang recouvrant les parcelles A 846, 852 et 854 ; Que, par acte des 29 et 31 juillet 2002, les époux X... ont saisi le Tribunal d'Instance de TOURS, aux fins de voir constater la nullité de l'accord passé entre les époux LE Z... et les époux A... pour la jouissance de l'étang leur appartenant et obtenir l'indemnisation du préjudice qu'ils estiment subir ; Que c'est dans ces conditions qu'est intervenue la décision dont appel ; Attendu qu'au soutien de leur recours, les époux X... font valoir que les époux LE Z..., qui n'étaient propriétaires que de la moitié indivise des parcelles A 846, 852 et 854, n'avaient pas qualité pour consentir, seuls, un bail sur lesdites parcelles et céder un droit de pêche qui était l'accessoire de ladite propriété indivise, que la conclusion d'un tel bail requérait le consentement de tous les indivisaires, que, dès lors qu'il a été consenti par les époux LE Z..., seuls, ledit bail est nul, comme se heurtant aux dispositions de l'article 815-3 du code civil, qu'il en va de même de la constitution du droit de chasse et de pêche consenti sur les parcelles louées, celui-ci constituant le corollaire du bail frappé de nullité, que les époux LE Z..., qui avaient parfaite conscience de l'impossibilité de transmettre le droit de pêche dont ils bénéficiaient, ainsi qu'en témoigne leur lettre du 13 janvier 2002, ont agi de mauvaise foi et en fraude des droits de leurs co-indivisaires, ce qui justifie de plus fort l'annulation de l'acte litigieux, mais également l'octroi de dommages et intérêts pour résistance abusive ; Que les époux X... soutiennent que, en tout état de cause, la convention passée entre les époux LE Z... et les
époux A... leur est inopposable, aux motifs, d'une part, que, l'étang litigieux ayant le statut d'eau close, le droit de pêche appartient exclusivement aux propriétaires des parcelles sur lesquelles s'étend le plan d'eau et ne peut être exercé par les époux A..., simples locataires, en vertu d'un bail contesté, de la moitié indivise des parcelles constituant l'assiette de l'étang, et, d'autre part, que, pour pouvoir accéder aux parcelles louées, et donc à l'étang, les preneurs seraient tenus d'emprunter la parcelle 834, qui est leur propriété exclusive et sur laquelle ils n'ont consenti aucun droit de passage, de sorte que le bail rural et le droit de pêche consentis par les époux LE Z... se heurteraient à une impossibilité juridique ; Attendu que Patrick LE Z... et les époux A... allèguent en réplique que la validité du bail, en ce qu'il porte sur les parcelles A 853 et 855, appartenant en pleine propriété aux époux LE Z..., ne peut être contestée, ces derniers étant parfaitement libres d'en disposer à leur guise, que l'étang a été construit sur la rivière fédérale dite de "la Valinière à la Fontaine Bondrée", que les parcelles A 852 et 854 recouvertes par l'étang font partie de la copropriété instaurée entre les époux X... et les époux LE Z..., que les locataires bénéficient donc de fait d'un droit de pêche, qu'au surplus, l'étang est de type "à cheval" sur la rivière d'Etat, de sorte qu'il doit être fait application des dispositions de l'article L 435-1 du code de l'Environnement, aux termes desquelles le droit de pêche appartient à l'Etat et est exercé à son profit, que selon l'article L 435-4 du même code, dans les plans d'eau, autres que ceux prévus à l'article L 435-1 précité, le droit de pêche appartient au propriétaire du fonds, qu'étant propriétaires indivis avec les époux X... des parcelles formant l'assiette de l'étang, les époux LE Z... bénéficiaient d'office du droit de pêche dans cette partie de l'étang et pouvaient donc
régulièrement le céder, qu'il n'est, enfin, nullement établi que les époux A... seraient obligés d'emprunter un chemin appartenant en propre aux époux X... pour exercer leur droit de pêche, aucune servitude n'ayant été constituée sur ledit chemin, et les intéressés bénéficiant d'un accès direct à l'étang par les parcelles 853 et 855 dont ils sont également locataires ; Attendu qu'il résulte de l'acte d'échange du 9 septembre 1986 que les époux LE Z... n'ont cédé aux époux X... que la moitié indivise, en toute propriété, des parcelles cadastrées section A no 852 et 854, l'autre moitié desdites parcelles restant leur propriété ; Qu'ils avaient dès lors parfaitement qualité pour consentir un bail, fût-il de longue durée, sur la partie desdites parcelles dont ils sont restés propriétaires, les dispositions de l'article 815-3 du code civil n'ayant pas vocation à s'appliquer en l'espèce, dès lors qu'il n'est pas, par l'effet de ce bail, porté atteinte aux droits de propriété cédés aux époux X... ; Que la possibilité d'une cession de leurs droits de propriété, et donc a fortiori d'une simple mise en location, par les époux LE Z... était d'ailleurs expressément envisagée à l'acte, puisque au paragraphe intitulé "Conventions particulières entre les parties", il était mentionné "les propriétaires des parcelles cadastrées section A 845, A 852 et A 854 (c'est à dire actuellement Mme E... et M et Mme LE Z... ... )", ce qui impliquait la possibilité que la personne de ces propriétaires puisse venir à changer ; Attendu, par ailleurs, que, comme l'a relevé à bon droit le premier Juge, l'acte d'échange, qui reconnaissait un droit de chasse et de pêche aux propriétaires susvisés, sur la partie de l'étang recouvrant leurs propriétés respectives, n'a nullement lié ce droit à la personne des époux LE Z... et de Mme E..., la formule employée, telle que ci-dessus rappelée, impliquant au contraire la reconnaissance du transfert du droit de chasse et de pêche aux
nouveaux propriétaires en cas de cession des droits de propriété ; Attendu ainsi que, non seulement, les époux LE Z... étaient fondés à consentir, seuls, un bail, sur la partie des parcelles dont ils étaient restés propriétaires, mais encore, s'agissant précisément de la partie recouverte par l'étang des époux X..., à se substituer leurs locataires, pour l'exercice des droits de chasse et de pêche, dont ils bénéficiaient en leur qualité de propriétaires ; Attendu que les époux X... peuvent d'autant moins se plaindre d'avoir été lésés par la convention intervenue entre les époux LE Z... et les époux A..., ni alléguer une quelconque fraude à leurs droits, que, contrairement à ce qu'ils soutenaient en première instance, ils ne bénéficiaient, aux termes de l'acte du 9 septembre 1986, d'aucun droit de préférence, en cas de cession des parcelles comprises dans l'échange, le seul droit qui leur ait été reconnu portant sur les parcelles cadastrées section A no 847, 853 et 855, étrangères au présent litige ; Que le jugement entrepris sera confirmé, en ce qu'il a débouté les époux X... de leur demande en nullité du bail litigieux, en ce compris les droits de chasse et de pêche ; Attendu que les appelants ne sont pas davantage fondés à invoquer l'inopposabilité du bail, au motif que le droit de pêche consenti aux époux A... se heurterait au statut du droit de la pêche, tel qu'il résulte des articles L 435-1 et suivants du code de l'Environnement, dès lors que, comme il a été indiqué ci-dessus, en l'espèce, le sort du droit de pêche a été réglé par la convention des parties, les époux X... ayant eux-mêmes, lors de l'échange de septembre 1986, reconnu ce droit aux propriétaires des parcelles échangées, ainsi que, par voie de conséquence, à toute personne (acquéreur ou locataire) que ces derniers entendraient se substituer ; Attendu, enfin, que les époux X... ne peuvent pas plus prétendre que le bail consenti serait insusceptible d'exécution, au
motif que, pour en jouir, les époux A... seraient obligés d'emprunter un chemin (parcelle 834), dont eux-mêmes seraient personnellement et seuls propriétaires ; Qu'en effet, les époux LE Z... n'ont fait que donner à bail aux époux A... des parcelles de terre, dont ils sont propriétaires et dont l'accès ne leur a, quant à eux, jamais été contesté antérieurement, en l'occurrence les parcelles litigieuses A 852 et 854, mais également les parcelles A 853 et 855, ces dernières offrant d'ailleurs aux locataires un accès direct à l'étang dont s'agit, étant souligné que le bail contesté n'a nullement constitué une servitude de passage sur la parcelle A 834 appartenant aux époux X... ; Attendu qu'il convient, en conséquence, de débouter ces derniers de leur appel et de confirmer le jugement entrepris ;Attendu qu'il convient, en conséquence, de débouter ces derniers de leur appel et de confirmer le jugement entrepris ; Attendu que les époux X..., qui succombent, seront condamnés aux dépens, ainsi qu'au paiement aux intimés d'une indemnité de 1.500 ç, sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS : Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris, Y AJOUTANT, CONDAMNE les époux X... à payer à Patrick LE Z... et aux époux A..., ensemble, la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 ç), sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, REJETTE le surplus des demandes,
CONDAMNE les époux X... aux dépens et accorde à Maître BORDIER, avoué, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Et le présent arrêt a été signé par Monsieur François CRÉZÉ, Président et par Madame Anne-Chantal D..., Greffier. LE GREFFIER,
LE PRÉSIDENT.