COUR D'APPEL D'ORLÉANS CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS SCP LAVAL-LUEGER SCP-DESPLANQUES-DEVAUCHELLE Me BORDIER ARRÊT du : 10 FÉVRIER 2005 No : No RG : 04/ 00718 DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 23 Octobre 2003
PARTIES EN CAUSE APPELANTE : L'OPAC DE TOURS agissant en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège, 1, rue Maurice Bedel-37000 TOURS représentée par la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour ayant pour avocat la SCP CRUANES-DUNEIGRE-THIRY, du barreau de TOURS D'UNE PART
INTIMÉES : Madame Nadia Y... épouse Z..., demeurant ...-37230 FONDETTES représentée par Me Elisabeth BORDIER, avoué à la Cour ayant pour avocat Me Catherine LESIMPLE-COUTELIER, du barreau de TOURS ASSEDIC DE LA REGION CENTRE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, 13 rue Valentin Hay-Bp 7127-37071 TOURS CEDEX 02 représentée par la SCP DUTHOIT-DESPLANQUES-DEVAUCHELLE, avoués à la Cour ayant pour avocat la SCP LALOUM-ARNOULT, du barreau de TOURS D'AUTRE PART DÉCLARATION D'APPEL EN DATE DU 20 Février 2004
COMPOSITION DE LA COUR Lors des débats et du délibéré : Monsieur Jean-Pierre REMERY, Président de Chambre, Madame Odile MAGDELEINE, Conseiller, Monsieur Alain GARNIER, Conseiller. Greffier : Madame Nadia FERNANDEZ, lors des débats et du prononcé de l'arrêt.
DÉBATS : A l'audience publique du 27 Janvier 2005. ARRÊT : Lecture de l'arrêt à l'audience publique du 10 Février 2005 par Monsieur le Président REMERY, en application des dispositions de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile. Madame Z... a été employée par l'Office Public d'Aménagement et de Construction (OPAC) de TOURS du 1er février 1992 au 2 mai 2001, date a laquelle elle a volontairement démissionné de son emploi, ainsi qu'il ressort d'un procès verbal de conciliation devant les Conseillers rapporteurs du Conseil des Prud'hommes de TOURS en date du 10 octobre 2001. Elle a occupé ultérieurement différents emplois intérimaires ou à durée déterminée et s'est inscrite à l'issue de ces missions, en qualité de demandeur d'emploi, auprès de l'ASSEDIC de la Région Centre. Cet organisme ayant refusé de l'indemniser au motif que cette charge incombait à l'OPAC, ce que contestait ce dernier, Madame Z... a assigné celui-ci ainsi que l'ASSEDIC aux fins de les voir condamner, l'OPAC à titre principal et l'ASSEDIC à titre subsidiaire, à lui verser les indemnités de chômage, outre des dommages et intérêts, qu'elle estimait lui être dus.
Par jugement du 23 octobre 2003, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de Grande Instance de TOURS a dit que la charge de l'indemnisation chômage incombait à l'OPAC de TOURS et a condamné celui-ci à payer à Madame Z... la somme de 4. 724, 64 Euros correspondant aux périodes de non-emploi ainsi que celles de 1. 500 Euros à titre de dommages et intérêts et de 1. 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. L'OPAC de TOURS a relevé appel et demande à la Cour, au vu d'un arrêt de la Cour de Cassation du 11 mars 2003 (Cass. Soc., Bull. Civ. V no 90) de dire que Madame Z..., par sa démission confirmée par la transaction du 10 octobre 2001, a renoncé à être indemnisée par l'OPAC de ses pertes d'emploi postérieures dans le secteur privé, de sorte que l'ASSEDIC de la Région Centre doit lui rembourser les sommes versées à Madame Z... soit 7. 177, 22 Euros avec intérêts à compter des paiements, outre 3. 000 Euros pour résistance abusive. De son côté, Madame Z... sollicite la confirmation du jugement, sauf à porter à 39, 70 Euros au lieu de 23, 16 Euros la base de l'indemnisation journalière et à lui allouer une somme supplémentaire de 10. 000 Euros à titre de dommages et intérêts. L'ASSEDIC de la Région Centre conclut également à la confirmation du jugement, sur la base d'un arrêt du Conseil d'Etat du 30 décembre 2002 (requête no 224. 462). Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé à la décision entreprise et aux dernières conclusions signifiées les :
- 7 Août 2004 (ASSEDIC),
- 15 décembre 2004 (Madame Z...),
- 16 décembre 2004 (OPAC de TOURS),
Les demandes et moyens des parties seront analysés en même temps que leur discussion dans les motifs qui suivent. SUR QUOI Sur la transaction du 10 octobre 2001
Attendu qu'aux termes de l'accord conclu entre l'OPAC de Tours et Madame Z... devant le Conseil des Prud'hommes de TOURS, Mme Z... reconnaît que la rupture intervenue de son propre fait est bien une démission. Les parties décident de mettre un terme au litige qui les oppose par une conciliation totale portant sur la somme de 70. 000 F à titre d'indemnité nette, forfaitaire et transactionnelle de renonciation à procédure que l'OPAC s'engage à payer à Mme Z... Nadia au 15 décembre 2001. Mme Z... est informée que le présent accord transactionnel sera déclaré comme tel auprès des services de l'ASSEDIC et déclare qu'elle en assume toutes les conséquences, notamment en matière d'impossibilité de prétendre à une indemnisation de l'OPAC, la rupture en date du 2 mai 2001 ne pouvant être assimilée à une démission légitime au regard des règles régissant l'assurance chômage ;
Que l'OPAC de TOURS déduit de cette transaction que Madame Z..., en contrepartie de l'indemnité versée, et en raison du fait qu'elle avait démissionné, avait renoncé pour l'avenir à faire de son ancien employeur l'assureur de son risque chômage ;
Qu'il résulte des articles L. 351-1 et L. 351-3 du Code du Travail, applicables, aux termes de l'article L. 351-12- 3o dudit Code, aux salariés relevant des établissements publics à caractère industriel et commercial des collectivités territoriales, tel que l'OPAC, et de l'article 4 du règlement annexé à la Convention d'assurance chômage du 1er janvier 2001, agréé par arrêté ministériel du 4 décembre 2000, applicable à l'espèce, que les allocations d'assurance chômage, qui sont à la charge de ces employeurs, ne sont attribuées qu'aux travailleurs involontairement privés d'emploi ;
Que le Tribunal a rappelé, à juste titre, qu'en vertu de l'article 2048 du Code Civil, les transactions se renferment dans leur objet et la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu, de sorte que les termes d'une transaction doivent être interprétés restrictivement ; que la transaction précitée se borne à rappeler à Madame Z... que la démission volontaire prive un salarié du droit de percevoir immédiatement les allocations de chômage, par application des articles du Code du Travail précités, mais ne saurait exclure le droit à l'assurance de la salariée lorsque les conditions d'indemnisation sont à nouveau réunies en raison d'une activité professionnelle ultérieure suffisante dans le secteur privé, dès lors qu'au jour de la transaction, le montant de ce droit n'était ni déterminé ni déterminable ;
Attendu, en outre, selon l'article 2045 du Code Civil, que pour transiger, il faut avoir la capacité de disposer des objets compris dans la transaction, et qu'en l'occurrence, la répartition des charges d'indemnisation du chômage entre l'ancien employeur public et l'ASSEDIC est déterminée par des dispositions réglementaires d'ordre public qui seront exposées ci-après, et auxquelles les parties ne peuvent déroger ; Sur la charge de l'indemnisation
Attendu que l'OPAC de TOURS prétend avoir versé par erreur à Madame Z... une somme de 1. 117, 71 Euros le 19 juin 2002, au titre de la période du 9 mars 2002 au 25 avril 2002 ; que, toutefois, l'Office n'a effectué ce règlement qu'après l'envoi de deux courriers à Madame Z... les 23 avril et 2 mai 2002 par lesquels il l'informait de son intention de prendre contact avec l'antenne ASSEDIC pour étudier ses droits, puis lui demandait d'adresser l'ensemble de ses bulletins de salaires depuis le 2 juin 2001 afin d'apprécier ses droits éventuels, de sorte que l'ancien employeur a versé en toute connaissance de cause la somme litigieuse, étant observé que l'OPAC a attendu d'être assigné par Madame Z... pour former sa demande en répétition ;
Attendu, par ailleurs, qu'en vertu de l'article L. 351-12 du Code du Travail, ont droit à l'allocation d'assurance chômage instituée par l'article L. 351-1 du même code, notamment, les agents relevant des établissements publics à caractère industriel et commercial des collectivités territoriales, involontairement privés d'emploi, aptes au travail et recherchant un emploi ; que le même article L. 351-12 prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat fixe les règles de coordination applicables pour l'indemnisation des travailleurs dont les activités antérieures prises en compte pour l'ouverture des droits ont été exercées auprès d'employeurs relevant, les uns de l'article L. 351-4 (secteur privé), les autres du présent article (secteur public) ; que ce décret, repris à l'article R. 351-20 du Code du Travail dispose que lorsque, au cours de la période retenue pour l'application du troisième alinéa de l'article L. 351-3 (conditions d'âge et d'activité professionnelle antérieure), la durée totale d'emploi accomplie pour le compte d'un ou plusieurs employeurs affiliés au régime d'assurance a été plus longue que l'ensemble des périodes d'emploi accomplies pour le compte d'un ou plusieurs employeurs relevant de l'article L. 351-12, la charge de l'indemnisation incombe aux institutions gestionnaires du régime d'assurance, et que, dans le cas contraire, cette charge incombe à l'employeur relevant de l'article L. 351-12 ou à celui des employeurs relevant de cet article qui a occupé l'intéressé durant la période la plus longue ; qu'aux termes de l'article 4 du règlement annexé à la Convention d'assurance chômage du 1er janvier 2001, les salariés privés d'emploi justifiant de l'une des périodes d'affiliation prévues à l'article 3 doivent n'avoir pas quitté volontairement leur dernière activité professionnelle salariée, ou une activité professionnelle salariée autre que la dernière, dès lors que, depuis le départ volontaire, il ne peut être justifié d'une période d'affiliation d'au moins 91 jours ou d'une période de travail d'au moins 455 heures ;
Qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions, d'une part, que, lorsqu'un salarié a, après avoir quitté volontairement un emploi, retrouvé un autre emploi dont il a été involontairement privé, il est attributaire de droits à indemnisation au titre de l'assurance chômage dès lors qu'il a travaillé au moins 91 jours ou 455 heures dans ce dernier emploi et, d'autre part, que, dans cette hypothèse, celui des anciens employeurs de l'intéressé qui supporte la charge de l'indemnisation est celui qui, dans la période de référence prise en compte pour l'ouverture des droits, l'a occupé pendant la période la plus longue, peu important la circonstance que le salarié eût quitté volontairement son précédent emploi ;
Qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que Madame Z... avait retravaillé 157 jours après sa démission, soit davantage que le minimum exigé, lors de sa demande d'inscription en qualité de demandeur d'emploi, tout en ayant perdu involontairement ces nouveaux emplois intérimaires ou à durée déterminée, et que celui de ses derniers employeurs qui, au cours des vingt quatre mois de référence précédant la fin du contrat de travail retenue pour l'ouverture des droits l'a employée pendant la plus longue période est l'OPAC de TOURS ; que le jugement mérite donc confirmation en ce qu'il a dit que la charge de l'indemnisation incombait à l'OPAC de TOURS et, eu égard au fait que cet organisme avait déjà indemnisé spontanément Madame Z... pour la période du 9 mars au 25 avril 2002, fait application de l'article R. 351-21 du Code du Travail selon lequel, dans le cas de réadmission intervenant alors que le travailleur privé d'emploi n'a pas épuisé les droits ouverts lors d'une précédente admission, l'allocation accordée correspond au montant global le plus élevé, après comparaison entre le montant global du reliquat des droits ouverts au titre de la précédente admission et le montant global des droits ouverts au titre de la nouvelle admission, et lorsque le montant le plus élevé est celui du reliquat des droits de la précédente admission, l'allocation est à la charge de l'employeur ou de l'institution d'assurance chômage qui a décidé la précédente admission ;
Attendu, sur le montant de l'indemnisation, que Madame Z... a obtenu satisfaction devant le Tribunal quant au montant des allocations de chômage réclamées et que sa demande de réévaluation de l'indemnité journalière est irrecevable devant la Cour, faute d'intérêt à agir, au sens de l'article 122 du Nouveau Code de Procédure Civile, ce d'autant plus qu'elle ne démontre pas que les montants litigieux auraient été erronés ; que, de même, l'intimée ne caractérise pas les nouveaux préjudices qui seraient de nature à permettre la condamnation de l'OPAC à lui verser une somme de 10. 000 Euros à titre de dommages et intérêts supplémentaires en cause d'appel ; qu'elle sera donc déboutée de ces demandes ; Sur les demandes accessoires
Attendu que le sens du présent arrêt commande de rejeter la demande en dommages et intérêts pour résistance abusive formée par l'OPAC de TOURS contre l'ASSEDIC de la Région Centre ;
Que l'OPAC de TOURS supportera les dépens d'appel et versera, à ce titre, la somme de 2. 000 Euros à chacun des deux intimés, par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort ;
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
Déboute Madame Z... de ses demandes de réévaluation des indemnités de chômage déjà versées et d'allocation de dommages et intérêts supplémentaires en cause d'appel ;
Rejette la demande formée par l'OPAC de TOURS contre l'ASSEDIC de la Région Centre tendant à l'allocation d'une somme pour résistance abusive ;
Condamne l'OPAC de TOURS aux dépens d'appel, et à payer à Madame Z... et à l'ASSEDIC de la Région Centre la somme de 2. 000 Euros chacun, au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Accorde aux Avoués de la cause le droit à recouvrement direct reconnu par l'article 699 du même code ;
Et le présent arrêt a été signé par Monsieur REMERY, Président, et Madame FERNANDEZ, Greffier présent lors du prononcé.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT