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16/07/2024 | FRANCE | N°23/03482

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-2, 16 juillet 2024, 23/03482


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 51H



Chambre civile 1-2



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 16 JUILLET 2024



N° RG 23/03482 -

N° Portalis DBV3-V-B7H-V4EC



AFFAIRE :



[T] [E] [W]



C/



S.A.S. GROUPE SOLLY AZAR









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Décembre 2022 par le Juge des contentieux de la protection de Colombes





N° RG : 1122000142
>

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 16/07/24

à :





Me Solange RIVERA





Me Sabrina DOURLEN



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LESEIZE JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 51H

Chambre civile 1-2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 16 JUILLET 2024

N° RG 23/03482 -

N° Portalis DBV3-V-B7H-V4EC

AFFAIRE :

[T] [E] [W]

C/

S.A.S. GROUPE SOLLY AZAR

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Décembre 2022 par le Juge des contentieux de la protection de Colombes

N° RG : 1122000142

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 16/07/24

à :

Me Solange RIVERA

Me Sabrina DOURLEN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LESEIZE JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [T] [E] [W]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Solange RIVERA, Plaidant et Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 194

APPELANT

****************

S.A.S. GROUPE SOLLY AZAR

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Sabrina DOURLEN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 453 et Me Frédéric GONDER de la SELARL GONDER, Plaidant, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 27 mai 2024, Madame Isabelle BROGLY, magistrate honoraire, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe JAVELAS, Président,

Madame Anne THIVELLIER, Conseillère,

Madame Isabelle BROGLY, Magistrate honoraire,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Céline KOC

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 19 avril 2017, la société civile immobilière [Localité 6] a consenti à

M. [T] [W] un bail d'habitation portant sur des locaux situés [Adresse 1] à [Localité 6], moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 550 euros, et d'une provision pour charges de 50 euros. Lors de son entrée dans les lieux, M. [W] a versé un dépôt de garantie d'un montant de 550 euros.

L'état des lieux de sortie a été établi contradictoirement le 30 juin 2021.

Faisant état d'incidents de paiement du loyer et des charges, la société civile immobilière [Localité 6] a sollicité auprès de la société Groupe Solly Azar la mise en 'uvre des garanties d'assurance qu'elle a souscrites concernant les loyers impayés.

Le 9 juillet 2021, la société civile immobilière [Localité 6] a délivré à la société Groupe Solly Azar quittance subrogative d'un montant de 9 650 euros correspondant à l'indemnisation des loyers et charges impayés arrêtés au 30 juin 2020, déduction faite du dépôt de garantie de 550 euros conservé par la bailleresse.

Par ordonnance rendue par ce tribunal le 25 octobre 2021, il a été enjoint à M. [W] de payer à la société Groupe Solly Azar la somme de 9 650 euros en principal, outre la somme de 51,07 euros au titre de la requête d'injonction de payer et 340,81 au titre des frais d'huissier (constat de reprise des lieux et commandement de payer).

M. [W] a formé opposition à cette ordonnance par déclaration au greffe en date du 31 mars 2021.

Par jugement contradictoire du 14 décembre 2022, le juge des contentieux et de la protection du tribunal de proximité de Colombes a :

- déclaré recevable l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 25 octobre 2021 par le tribunal de proximité de Colombes,

- dit que le présent jugement se substitue à cette ordonnance,

- condamné M. [W] à payer à la société Groupe Solly Azar la somme de 9 650 euros au titre du solde de l'arriéré de loyer arrêté au 30 juin 2021, dépôt de garantie déduit,

- débouté M. [W] de sa demande de délais de paiement,

- débouté la société Groupe Solly Azar de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [W] aux entiers dépens,

- dit n'y avoir lieu d'écarter l'exécution provisoire de droit de la présente décision.

Par déclaration déposée au greffe le 26 mai 2023, M. [W] a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 19 avril 2024, M. [W], appelant, demande à la cour :

- d'infirmer le jugement du 14 décembre 2022 rendu par le juge des contentieux et de la protection du tribunal de proximité de Colombes et statuant à nouveau,

à titre principal,

- juger que le logement qui lui a été remis en exécution du bail d'habitation du 19 avril 2017 est indécent, dès lors qu'il comporte des infractions aux articles 33, 35 et 40-1 du règlement sanitaire départemental des Hauts-de-Seine selon le rapport de visite du 6 août 2018 du service hygiène et santé environnementale de la mairie de [Localité 6] et son courrier du 26 novembre 2019,

- juger qu'en réparation du préjudice de jouissance, les loyers dus pour la période du 19 avril 2017 au 30 juin 2021 seront réduits à hauteur de 50%,

- juger qu'il est donc à jour des loyers pour la période du 19 avril 2017 au 30 juin 2021 d'un montant total de 13 860 euros dès lors qu'il a versé pour la période du 19 avril 2017 au 30 avril 2019 une somme de

13 970 euros (incluant le dépôt de garantie de 550 euros),

- condamner la société Groupe Solly Azar à lui restituer le trop-perçu de 110 euros,

- juger que son préjudice matériel est de 5 740,10 euros,

- condamner la société Groupe Solly Azar à lui payer la somme de 5 740,10 euros,

- condamner la société Groupe Solly Azar à lui payer une indemnité de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral,

à titre subsidiaire,

- juger que toute condamnation prononcée à son encontre sera réglée par celui-ci à raison d'une mensualité de 150 euros sur 23 mois et le solde à la 24ème mensualité,

en tout état de cause,

- ordonner, s'il y a lieu, la compensation entre les créances,

- condamner la société Groupe Solly Azar aux dépens de première instance et d'appel,

- condamner la société Groupe Solly Azar à lui payer une indemnité de procédure de 3 360 euros.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 13 mars 2024, la société Groupe Solly Azar, intimée, demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 14 décembre 2022 dont appel en toutes ses dispositions,

- rejeter l'ensemble des demandes de M. [W],

en tout état de cause,

- condamner M. [W] au paiement d'une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [W] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 25 avril 2024.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'appel de M. [W].

Au soutien de son appel, M. [W] reproche au premier juge de l'avoir condamné au paiement de la somme de 9 650 euros au titre de l'arriéré de loyers arrêté au 30 juin 2021, dépôt de garantie déduit, motif pris que cette somme n'était pas due au regard d'une part, des manquements de la bailleresse à son obligation de délivrer un logement décent, et d'autre part, de l'absence de régularisation annuelle des charges. Il fait valoir qu'il a subi durant son occupation des lieux, un refoulement répétitif des toilettes de l'appartement (eau saturée en excréments débordant des toilettes et se répandant sur le sol), et que ce n'est qu'après une année de refoulements successifs et réguliers des toilettes que la bailleresse a effectué les travaux nécessaires, à savoir le remplacement de la colonne d'évacuation des eaux usées, qu'ensuite, à la fin de l'année 2018, son appartement a été infesté de punaises de lit, qu'il a mandaté une entreprise pour les éradiquer, qu'il a jeté le canapé, son lit et repeint le logement, que le 5 avril 2019 il a écrit au gestionnaire du bien pour l'informer de ce que son logement étant de nouveau infesté, et que ce n'est que le 9 octobre 2019 que le logement a de nouveau été traité, cette fois, aux frais de la bailleresse, lui permettant de réintégrer son logement trois semaines plus tard, que cependant l'infestation de punaises n'a pas été définitivement éradiquée. M. [W] ajoute que l'appartement n'était pas suffisamment ventilé.

Le groupe Solly Azar poursuit la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, exposant qu'il est vain pour M. [W] de contester la créance au motif qu'il a lui-même subi un préjudice du fait de la bailleresse, dès lors qu'il ne démontre aucune faute qu'elle aurait éventuellement commise. Elle ajoute qu'en tout état de cause, la prétendue insalubrité alléguée par le locataire ne lui est pas opposable, en sa qualité d'assureur, subrogé dans les droits du bailleur. La société Solly Azar expose que le débiteur peut, pour refuser le paiement de la dette, opposer au subrogé les exceptions inhérentes à la dette, mais qu'il ne peut pas juridiquement solliciter d'une juridiction la condamnation du subrogé à lui payer des dommages-intérêts au titre d'un préjudice que lui aurait causé le subrogeant, que cette action est personnelle et ne peut être dirigée qu'à l'encontre de l'auteur du comportement fautif, que si le locataire ne peut poursuivre l'assureur en paiement de dommages-intérêts en raison des manquements du bailleur, il peut toutefois opposer à l'assureur la compensation entre la créance de loyers, objet de la quittance subrogative, et une créance qu'il détiendrait sur le bailleur, que toutefois, une telle exception que l'on peut qualifier de personnelle, n'est opposable au subrogé que si elle est née avant que la subrogation lui soit devenue opposable, qu'en l'espèce, la prétendue créance de M. [W] est à ce jour encore incertaine puisqu'elle n'a pas été consacrée par une décision judiciaire, qu'il s'ensuit qu'à la date de la subrogation, M. [W] ne disposait d'aucune créance certaine, liquide et exigible à l'encontre de son bailleur au titre d'un prétendu trouble de jouissance, qu'il en résulte que l'assureur ne peut être condamné à payer la moindre somme au locataire au titre d'un préjudice trouvant son origine dans les manquements éventuels du bailleur, que le locataire ne peut donc en l'espèce, opposer à l'assureur une quelconque compensation de sa dette avec une prétendue créances détenue à l'encontre de son ancien bailleur.

Sur ce,

* sur l'exception d'inexécution invoquée par M. [W].

Le moyen développé par M. [W] en vertu duquel il n'est redevable d'aucune somme au titre des loyers impayés à l'égard du bailleur à raison des manquements de ce dernier, consiste implicitement mais nécessairement à invoquer l'exception d'inexécution.

Si l'article 6 c) de la loi du 6 juillet 1989 dispose que le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation et s'il résulte également de cet article que le propriétaire a l'obligation d'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués, le preneur ne peut suspendre de sa propre initiative, sans y avoir été préalablement autorisé en justice, le paiement de son loyer sous prétexte que le bailleur ne remplit pas son obligation d'exécuter les travaux, car il n'y a aucune compensation entre une créance éventuelle et en tout cas incertaine de travaux et une dette certaine de loyers. En outre, l'exception d'inexécution ne peut être utilement invoquée que lorsque le preneur, du fait des manquements du bailleur à son obligation d'entretien, se trouve dans l'impossibilité d'utiliser les lieux loués.

En l'espèce, M. [W] qui est entré dans les lieux le 19 janvier 2017 et qui s'y est maintenu jusqu'à son départ, le 30 juin 2021, n'est pas fondé à invoquer l'exception d'inexécution pour se voir dispenser du paiement de ses loyers : en effet, non seulement, il n'établit pas avoir été dans l'impossibilité absolue d'habiter l'appartement, quand bien même les conditions d'habitabilité ont été assurément difficiles, mais encore faire droit à sa demande reviendrait à l'indemniser deux fois du préjudice qu'il allègue, dès lors qu'il sollicite cumulativement une réduction du montant de l'ensemble des loyers appelés durant la même période.

Aux termes de l'article 1346-4 du code civil, la subrogation transmet à son bénéficiaire, dans la limite de ce qu'il a payé, la créance et ses accessoires, à l'exception des droits exclusivement attachés à la personne du créancier.

En l'espèce, il n'est pas contesté que la société Groupe Solly Azar a versé à la bailleresse la somme de

9 650 euros correspondant aux loyers et charges impayés de M. [W] en application de la clause 'indemnisation loyers impayés', insérée dans le contrat signé.

Or, le paiement avec subrogation, s'il a pour effet d'éteindre la créance supposée à l'égard du créancier, la laisse subsister au profit du subrogé, qui dispose de toutes les actions qui appartenaient au créancier et qui se rattachaient à cette créance immédiatement avant le paiement. Il dispose à ce titre de la qualité pour agir en recouvrement des loyers à hauteur de la créance subrogée ainsi qu'un intérêt personnel à en poursuivre le paiement.

Le jugement ne peut donc qu'être confirmé en ce qu'il a condamné M. [W] à verser à la société groupe Solly Azar la somme de 9 680 euros au titre du solde de loyers, selon décompte arrêté au 30 juin 2021, correspondant au montant de la quittance subrogative délivrée le 9 juillet 2021 par la bailleresse au titre de l'indemnisation des loyers et charges impayés arrêtés au 30 juin 2021, déduction faite du dépôt de garantie de 550 euros conservé par la bailleresse.

* sur l'exception invoquée par M. [W].

En vertu de l'article 1346-5 du code civil, le débiteur peut opposer au créancier subrogé les exceptions inhérentes à la dette, telles que la nullité, l'exception d'inexécution, la résolution ou la compensation de dettes connexes. Il peut également lui opposer les exceptions nées de ses rapports avec le subrogeant avant que la subrogation lui soit devenue opposable, telles que l'octroi d'un terme, la remise de dette ou la compensation de dettes non connexes.

Le locataire, condamné à indemniser le créancier subrogé au titre des loyers impayés, peut opposer à ce dernier, sur le fondement de cet article, la compensation de dettes connexes et non connexes, étant observé que la notion de connexité a été étendue et que les obligations réciproques issues d'un même contrat sont unies par un lien de connexité, qu'en l'espèce il y a bien connexité entre une dette de loyers - obligation du locataire de payer son loyer - et une dette résultant d'un préjudice de jouissance ' obligation du bailleur de faire jouir paisiblement son locataire des lieux donnés à bail.

Il s'ensuit que M. [W] est recevable à opposer à la société Groupe Solly Azar, créancier subrogé, les mêmes exceptions et moyens de défense dont il disposait contre son créancier initial, soit la compensation de dettes connexes, (dette locative et l'éventuelle créance qu'il détient sur le bailleur à raison des manquements avérés de ce dernier au titre de l'indemnisation du trouble de jouissance qu'il allègue).

Dès lors, il appartient à la cour, d'apprécier la réalité du préjudice de jouissance allégué par M. [W] durant sa période d'occupation des lieux et dans l'affirmative, d'en déterminer l'importance.

* sur le préjudice de jouissance allégué par M. [W].

L'article 1719 du Code civil dispose: ' le bailleur est obligé par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d'habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l'expulsion de l'occupant'.

L'article 6 de la loi d'ordre public du 6 juillet 1989 dispose notamment que ' le bailleur est obligé :

a) de délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les éléments mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement, toutefois, les parties peuvent convenir par une clause expresse des travaux que le locataire exécutera ou fera exécuter et des modalités de leur imputation sur le loyer (.....).

b) d'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du Code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle, hormis ceux qui consignés dans l'état des lieux, qui auraient fait l'objet de la clause expresse mentionnée ci-dessus.

c) d'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués.

Il incombe, par ailleurs, au bailleur de délivrer au locataire un logement en bon état d'usage, de réparation et qui réponde aux normes de décence prescrites par les articles 1 et 2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatifs aux caractéristiques du logement décent étant rappelé que cette obligation a un caractère d'ordre public.

Il s'ensuit que le bailleur a l'obligation de maintenir le logement dans cet état décent et non dangereux pour le locataire, dès lors qu'il a été informé de sa dégradation à la suite d'événements non imputables au locataire.

En l'espèce, M. [W] justifie le préjudice de jouissance dont il entend se prévaloir par les nombreuses pièces qu'il verse aux débats, à savoir :

- les factures de TBS Bâtiment émises les 10 juin 2017, 18 août 2017 et 20 décembre 2017 pour des montants respectifs TTC de 1 045 euros, 1815 euros et 1 045 euros relatives à des travaux de dégorgement de canalisations WC, nettoyage et application de peinture, réalisés dans l'appartement,

- la copie des sms échangés entre le 3 août 2018 et le 17 octobre 2018 avec le gestionnaire du bien qui admet les problèmes de refoulement dans les WC de l'appartement et qui confirme au locataire la nécessité de remplacer la colonne, ainsi que les photographies qui y sont annexées,

- le rapport de visite dressé le 10 août 2018 par le service d'hygiène et de santé environnementale de la commune de [Localité 6] qui informe le locataire qu'une mise en demeure a été adressée au gestionnaire afin qu'il réhabilite le logement dans un délai de 30 jours, après avoir constaté, sur place le 8 août, d'une manière générale que la température de l'air est de 28°, le taux d'humidité dans l'air est de 46,8%; que :

* dans la cuisine, l'aération en partie basse de la fenêtre en PVC est à l'intérieur du

garde-manger muni d'une porte,

*dans la salle de bains, présence d'excréments sur la cuvette des toilettes et sur le sol, le locataire ayant indiqué qu'un refoulement des eaux usées a eu lieu le 3 août et que ce problème revient de manière récurrente; taux d'humidité de 100% dans le mur mitoyen avec la cuisine.

Aux termes de son rapport, le service d'hygiène conclut que des travaux doivent être réalisés pour remédier aux infractions aux articles 33, 35 et 40-1 du règlement sanitaire départemental des Hauts-de- Seine, à savoir :

* rechercher les causes des reflux des eaux usées dans les sanitaires et y remédier nécessairement,

* création d'une aération en partie basse donnant vers l'extérieur dans la cuisine,

* création d'une aération en partie basse donnant vers l'extérieur dans la salle de bains,

* rechercher les cause de l'humidité dans la salle de bains et y remédier.

Les désordres ainsi décrits, caractérisent les manquements du bailleur à son obligation de résultat d'assurer à son locataire une jouissance paisible des lieux donnés à bail, étant observé à cet égard qu'il n'appartient pas au locataire de caractériser une faute imputable au bailleur.

Le préjudice de jouissance incontestablement subi par M. [W] du fait du refoulement des eaux usées saturées d'excréments, de l'absence de ventilation de l'appartement, de l'humidité ambiante, sera justement indemnisé par un abattement de 50% sur le montant du loyer hors charges, soit sur la somme de 550 euros et ce, à compter du 1er mai 2017, date à laquelle les désordres sont apparus dans leur ampleur, jusqu'au mois de septembre 2018 inclus, date à laquelle il y a été remédié. Il convient donc d'allouer à M. [W] la somme de 4 675 euros au titre de ces divers désordres.

Le préjudice de jouissance résultant de l'infestation des punaises de lit pour la période comprise entre le 1er janvier 2019 et le 9 octobre 2019 sera indemnisé à hauteur de la somme mensuelle de 165 euros correspondant à un abattement de 30% sur le montant du loyer, de sorte que M. [W] est bien fondé à obtenir la somme de 1 700 euros au titre de ce préjudice, étant souligné que le locataire ne justifie pas de la présence persistante des punaises de lit au-delà du 9 octobre 2019, date à laquelle un traitement a été réalisé aux frais de la bailleresse.

Le montant total de l'indemnisation du préjudice de jouissance subi M. [W] s'élève donc à la somme totale de 6 375 euros.

* sur la réparation du préjudice matériel.

M. [W] produit les différentes factures attestant des dépenses qu'il a dû personnellement engager pour remédier aux désordres, face à l'inertie du gestionnaire du bien, ainsi que celles attestant des frais d'hébergement provisoires rendus nécessaires par l'état des lieux.

Il y a lieu de lui allouer la somme de 5 740,10 euros à ce titre.

* sur l'indemnisation du préjudice moral.

Le préjudice moral incontestablement subi par M. [W], en raison de la nécessité de vivre dans un logement affecté par des refoulements d'eaux usées saturées d'excréments, des odeurs nauséabondes en résultant, et d'y héberger durant cette période, un jeune enfant âgé de 20 mois dans le cadre de son droit de visite et d'hébergement sera justement indemnisé par l'allocation de la somme de 2 000 euros.

* sur la compensation judiciaire.

Il y a lieu de prononcer la compensation judiciaire entre les créances réciproques des parties et de constater qu'après compensation, M. [W] n'est plus redevable d'aucune somme.

Sur les mesures accessoires.

La société Groupe Solly Azar doit être condamnée aux dépens de la procédure d'appel, les dispositions du jugement contesté relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance étant, par ailleurs, infirmées.

Il y a lieu de faire droit à la demande de M. [W] au titre des frais de procédure par lui exposés en cause d'appel en condamnant la société Groupe Solly Azar à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement rendu le 14 décembre 2022 par le juge des contentieux et de la protection du tribunal de proximité de Colombes en ce qu'il a condamné M. [W] à payer à la société Groupe Solly Azar la somme de 9 650 euros au titre du solde de l'arriéré de loyer arrêté au 30 juin 2021,

dépôt de garantie déduit,

L'infirme sur le surplus,

Déclare M. [W] recevable à opposer à la société Groupe Solly Azar, créancier subrogé, les mêmes exceptions et moyens de défense dont il disposait contre son créancier initial, soit la compensation de dettes connexes, (dette locative et l'éventuelle créance qu'il détient sur le bailleur à raison des manquements avérés de ce dernier au titre de l'indemnisation du trouble de jouissance qu'il allègue),

Condamne la société Groupe Solly Azar à verser à M. [W] la somme de la somme de 6 375 euros au titre de l'indemnisation de son trouble de jouissance, celle de 5 740,10 euros à titre de réparation de son préjudice matériel, celle de 2 000 euros à titre d'indemnisation de son préjudice moral,

Prononce la compensation entre les créances réciproques des parties,

Constate qu'après compensation, M. [W] n'est plus redevable d'aucune somme,

Déclare en conséquence sans objet sa demande de délais de paiement,

Condamne la société Groupe Solly Azar à verser à M. [W] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Groupe Solly Azar aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-2
Numéro d'arrêt : 23/03482
Date de la décision : 16/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-16;23.03482 ?
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